Absence d`infection VIH après transfusion de sang contaminé et

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Absence d`infection VIH après transfusion de sang contaminé et
Absence d'infection VIH après transfusion de sang contaminé et prophylaxie post-exposition
Revue critique
de l'actualité scientifique internationale
sur le VIH
et les virus des hépatites
n°86 - septembre 2000
VIH - CAS
Absence d'infection VIH après transfusion
de sang contaminé et prophylaxie
post-exposition
Sophie Chamaret
Unité d'oncologie virale Institut Pasteur (Paris)
Failure to develop
HIV infection
after receipt of
HIV-contaminated
blood and
postexposure
prophylaxis
Katzeinstein T.L.,
Dickmeiss E.,
Aladdin H., Hede
A., Nielsen C.,
Nielsen H.,
Jorgensen L.B.,
Gerstoft J.
Annals of Internal
Medicine, 2000,
133, 31-34
Transfusée avec du sang contaminé par le VIH, une jeune
danoise est restée séronégative après 9 mois de prophylaxie
post-exposition. Le donneur de sang se serait lui-même
contaminé 2 semaines avant le don de sang lors d'une bagarre
dans un bar gay.
L'obligation de pratiquer une sérologie VIH pour chaque don de
sang en transfusion sanguine (obligatoire en France depuis août
1985) a permis de limiter au maximum le risque de
contamination des receveurs. Mais la période nécessaire au
développement des anticorps anti-VIH après une infection étant
de l'ordre de 3 semaines, il existe donc une " fenêtre " pendant
laquelle le donneur de sang peut être infecté mais encore
séronégatif.
Les auteurs rapportent ici le cas d'un homme ayant présenté de la
http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/86_1217.htm (1 sur 3) [11/04/2003 15:05:52]
Absence d'infection VIH après transfusion de sang contaminé et prophylaxie post-exposition
fièvre et développé un rash cutané. Le mode d'exposition au VIH
n'a pu être déterminé, le patient n'a pas (ou n'a pas reconnu ?) de
contacts extra-maritaux et n'était pas usager de drogue par voie
IV. Cependant, il avait été impliqué dans une bagarre avec
effusion de sang dans un bar gay 25 jours plus tôt.
Lors de son admission à l'hôpital, cet homme présentait une
charge virale élevée (2x106 copies/ml) et il a averti qu'il avait
donné son sang une semaine plus tôt. Comme d'habitude, ce
sang avait été divisé en globules rouges, en " buffy coat " et en
plasma frais congelé. Les cellules rouges avaient été utilisées
pour une transfusion, et le " buffy coat " écarté. Le plasma
congelé a été immédiatement testé pour l'antigène p24, avec un
résultat négatif: en revanche, le dosage d'ARN VIH montrait 11
000 copies/ml.
La receveuse, une jeune fille de 13 ans, a reçu les globules
rouges 2 jours avant que le donneur ait été testé ARN positif.
Elle a également reçu une unité de plaquettes, 3 unités de plasma
frais congelé et 5 unités de globules rouges pendant une
opération orthopédique. La prophylaxie post-exposition a
commencé à J+2 avec de la zidovudine (AZT), de la lamivudine
(3TC) et du nelfinavir à des doses pour enfant et a duré 9 mois.
Ce traitement était prévu pour un an, mais a été arrêté à 9 mois à
cause d'effets secondaires importants et persistants.
Que ce soit avant la mise en place du traitement, pendant les 9
mois de ce traitement puis 6 mois après l'arrêt, tous les tests de
détection de l'ARN, de l'ADN, de l'antigène et des anticorps
anti-VIH ont été négatifs, alors que la limite de détection de
l'ARN était de 3 copies/ml. Cette jeune fille présentait un
génotype CCR5/CCR5, et n'était donc pas résistante à l'infection
par le VIH.
Les différents marqueurs d'infection pour le VIH étant négatifs
avant la mise en place du traitement, il est donc impossible de
savoir si l'absence d'infection est due à l'éradication du VIH par
les antirétroviraux ou si le don de globules rouges était non
infectieux.
Ce cas particulier appelle plusieurs observations. Tout d'abord,
le donneur ne reconnaît aucun facteur de risque, mais il était
cependant dans un bar gay; on peut donc se poser des questions
quant au mode de contamination, lié d'après lui à une bagarre
sanglante.
Ensuite, les auteurs rappellent que des études précédentes
montrent que les receveurs de sang infecté étaient contaminés
dans presque 100% des cas, mais il est important de remarquer
que les articles cités en référence datent de 1989 pour deux
d'entre eux et de 1990 pour l'autre.
Or, en France, une enquête descendante a été réalisée en mars
1999 sur les dons découverts séropositifs (de 1990 à 1998
inclus). Au total, sur 135 dons concernés, 37 receveurs (27%)
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ont été testés et 1 a été retrouvé séropositif (sources Institut
français de veille sanitaire pour le groupe rétrovirus). Nous
sommes donc loin des 90% rapportés dans les publications
référencées dans cet article.
Par ailleurs, les estimations régulières du risque résiduel pour le
VIH en transfusion dû à une fenêtre sérologique de 22 jours
(6-38) étaient en 1992-1994 de 1/588 000 dons, en 1994-1996 de
1/1 000 000 de dons et en 1997-1999 de 1/1 400 000 dons. Cette
amélioration du risque est liée sans doute à un questionnaire plus
sélectif, mais certainement aussi à des tests ELISA de plus en
plus sensibles tout en restant très spécifiques.
Pour conclure, rien ne permet d'affirmer que le donneur a été
contaminé par le VIH lors de sa bagarre, ni que la receveuse a
été protégée de l'infection par un traitement HAART.
Cependant, on ne peut nier un risque de transmission du VIH
lors de bagarres sanglantes, et Brambilla et coll. (1) ont
démontré une telle contamination par une analyse moléculaire
utilisant des PCR réalisées à partir des cellules mononucléées du
sang périphérique de chacun des protagonistes. Le virus de
l'hépatite B avait d'ailleurs été également transmis.
Au demeurant, il reste indéniable qu'il est plus facile de
démontrer une contamination qu'un absence de transmission du
VIH.
1 - Brambilla A, Salvatori F, Pristera R, Alfano M, Vincenzi E
" Molecular analysis of HIV-1 relatedness in case of viral transmission
during a bloody fight between two adults "
AIDS, 1998, 12, 4
http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/86_1217.htm (3 sur 3) [11/04/2003 15:05:52]