Coinfection VIH-VHC : recherche posters désespérément

Coinfection VIH-VHC : recherche posters désespérément
Revue critique
de l'actualité scientifique internationale
sur le VIH
et les virus des hépatites
n°88 - décembre 2000
HEPATOLOGIE
Coinfection VIH-VHC : recherche posters
désespérément
Gilles Pialoux
Hôpital Rothschild (Paris)
La problématique de la coinfection VIH-VHC a mis du temps à s'imposer
dans le cadre des congrès de l'AASLD. Elle est en passe d'y trouver sa
place, au moins au niveau des sessions de posters.
Si l'on en croit la stricte lecture du programme de ce 51e congrès de l'AASLD,
la coinfection VIH-VHC intéresse au moins autant les hépatologues que les
spécialistes du sida, qu'ils soient réunis à Durban ou à Chicago : une session
spécifique lors du " postgraduate course " qui introduisait le congrès, un
rendez-vous " meet-the-professor luncheon ", un " early morning workshop "
et 17 communications orales ou posters ont été consacrés, à Dallas, au thème
de la coinfection VIH/VHC.
C'est déjà beaucoup pour une thématique inexistante à l'AASLD il y a
quelques années. Un retard d'intérêt qui s'est encore fait cruellement sentir
lors des pures sessions de formation médicale continue. A l'instar de David L.
Thomas, qui tenta essentiellement, lors du " postgraduate course ", d'imposer
la loi des grands nombres : " Aux Etats-Unis, 300 000 patients coinfectés
VIH-VHC sont à la charge du système de soins et le fait d'être infecté par le
VIH multiplie par 94,4 fois le risque de décès lié à une maladie hépatique due
au VIH contre 16,7 fois pour une personne VIH négative. "
,Il fallut en fait attendre l'après-midi du troisième jour du congrès pour que les
débats débutent réellement. Vincent Di Martino, de l'Hôpital Pitié-Salpétrière,
a présenté les résultats d'une étude rétrospective portant sur 295 patients
VHC+, cirrhotiques, suivis en moyenne 37 mois, dont 35 étaient coinfectés
par le VIH1. Le but de cette étude était de dégager les facteurs de risque de
cirrhose et d'évaluer l'impact de l'infection VIH sur ceux-ci (analyse
multivariée selon le modèle de Cox). Comparativement à la population
séronégative pour le VIH, les patients coinfectés présentaient :
- une proportion plus importante d'hommes (85 % vs 65 % ; p < 0,01) ;
- une proportion plus forte d'usagers de drogues (83 % vs 17 % ; p < 0,0001) ;
- une consommation plus conséquente d'alcool, ce qui contraste avec les
résultats d'autres études (84 +/- 89 gr/jour vs 34 +/- 60 gr/jour ; p < 0,0001) ;
- une activité histologique plus marquée selon le score Métavir (2,0 +/- 0,7 vs
1,6 +/- 0,7 ; p = 0,003) ;
- un âge plus bas au moment de la contamination par le VHC (24,8 ans vs 35
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+/- 15 ans ; p < 0,0001).
Par contre, l'étude de Di Martino et coll. semble démontrer que les patients
coinfectés ne sont ni plus ni moins traités (61 % vs 53 %, non significatif) et
ni mieux ni moins bien suivis (30 +/- 43 mois vs 38 +/- 31 mois) que les
mono-infectés VHC… Une conclusion qui mérite largement confirmation sur
d'autres populations ou dans d'autres centres.
En analyse multivariée, cette intéressante étude française permet néanmoins
d'identifier 3 facteurs de risque de complications des cirrhoses : l'infection
VIH (Risque Relatif (RR) = 5), l'âge au moment du diagnostic de cirrhose et
la consommation d'alcool. De même, la coinfection VIH apparaît comme un
facteur de décès indépendant chez les patients VHC+ (RR = 5,7).
Plus décevante apparaît l'étude de Mark S. Sulkowski2 qui concerne pourtant
un nombre important de malades VIH+ (1 742), dont 45,1 % sont coinfectés
(n=326) par le VHC. Le principal intérêt de cette étude se résume dans la
haute prévalence de coinfectés dans une clinique urbaine de Baltimore
spécialisée dans le prise en charge du VIH. Une forte prévalence en rapport
direct avec le pourcentage de patients coinfectés par ailleurs usagers de
drogues : 84,1 % !
A l'évidence, ce fut lors des copieuses sessions de posters que l'on put traquer
l'information attractive :
Poster 341 : "Expérience de la transplantation hépatique chez les receveurs
VIH+"3. Beaucoup de monde devant le poster mais seulement 2 patients
dessus !
Tous deux avait été sélectionnés quant à leur infection VIH (plus de 500
CD4/mm3 et charge virale indétectable). La durée de suivi après greffe était
de 13 mois pour l'un, de 3 mois pour l'autre. Conclusion : " La greffe de foie
peut être proposée chez les patients coinfectés dûment sélectionnés quant aux
critères VIH ". A méditer, donc…
Poster 434 : "Immunité cellulaire chez les patients coinfectés VIH/VHC"4.
C'est Bruce _D. Walker qui s'y colle. Comme pour le VIH, les techniques sont
à l'identique (proliférations et Elispot). C'est intéressant par la connaissance
des 2 infections : en CTL, 22/22 des patients étudiés ont une réponse contre le
VIH et 3/22, une réponse contre le VHC. Sous traitement antirétroviral
(HAART), 5/8 ont une réponse proliférative vis-à-vis du VIH mais seulement
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1/8 vis-à-vis du VHC (épitopes C100). A suivre donc.
Poster 469 : "La coinfection dans la ville de New York : une étude
randomisée chez les vétérans"5. La question épidémiologique est inverse :
sur une population importante de personnes vivant avec le VHC (N = 138),
combien sont infectées aussi par le VIH ? Réponse : 21,3 %. Et alors ?
L'énumération des risques supposés de contamination par le VHC vaut par
contre le détour : usage de drogue par voie intraveineuse (54,3 %),
consommation de cocaïne par voie nasale (52,2 %), un nombre de partenaires
sexuels supérieur à 20 au cours de la vie (48,1 %). Notons d'ailleurs que la
transmission sexuelle du VHC est une mode nord-américaine très prisée à
cette 51e AASLD puisqu'en séance plénière, la représentante du CDC tablait
sur 20 % de transmission sexuelle du VHC et quasiment aucun cas de…
transmission nosocomiale.
Poster 478 : "Outbreak of blood-borne viral infections in children
attending a single hospital"6. Vous avez dit nosocomial ? Une équipe suisse
a présenté en détail l'épidémie d'infections virales nosocomiales de l'hôpital
Al Fatch à Benghazi (Libye) : 393 enfants infectés par le VIH (le premier cas
remontant à mai 1998), dont 49 % d'enfants coinfectés VIH-VHC et 22 %
tri-infectés VIH-VHC-VHB. Le procès serait en cours…
Poster 486 : "Impact de l'infection VIH sur la qualité de vie des personnes
atteintes de l'hépatite C"7. Résultats assez surprenants : les patients atteints
d'hépatite chronique C ont une qualité de vie moindre que ceux contaminés
par le VIH, et la qualité de vie des personnes coinfectées n'est pas pire que
celle de ceux uniquement atteints par l'hépatite C…
Poster 498 : "L'infection VIH précoce ne modifie pas le taux de sous-types
VHC"8. L'infection VIH n'a pas d'impact sur l'apparition de quasi espèces du
VHC chez les patients coinfectés.
Communication 611 : "Un profil anatomopathologique particulier pour le
foie chez les patients VIH+ sous HAART"9. Une nouvelle entité
anatomopathologique qui associe balonisation des hépatocytes + activation
des cellules de Kupfer + fibrose péricellulaire (BKPK) serait la marque de
l'hépatotoxicité des inhibiteurs de protéase du VIH. A confirmer.
Communication 751 : "Efficacité de l'association interféron-ribavirine et
impact sur l'infection VIH chez des hémophiles VHC+ sous HAART"10. On
nous le dit même en Espagne : l'association interféron-ribavirine est efficace
et bien tolérée chez les patients coinfectés sous HAART. En l'occurrence,
l'étude espagnole a été menée chez 19 patients coinfectés, hémophiles, sous
HAART et naïfs de toute thérapeutique anti-VHC. Le taux de réponse
thérapeutique soutenue est de 32 %, comparable à ceux obtenus dans une
population non coinfectée.
Poster 760 : "Traitement par interféron à dose quotidienne chez les
patients VIH-VHC : résultats préliminaires"11. Tentative plutôt réussie de
traitement par l'interféron en injection quotidienne chez le patient coinfecté.
Obsolète depuis l'émergence de l'interféron pégylé ?
Poster 999 : "Développement d'une maladie alcoolique chez la souris
transgénique HIV1-vpu"12. C'est chez la souris, on ne vous en parlera pas…
Globalement, la coinfection VIH intéresse moins les hépatologues que la
coinfection VHC ne mobilise les infectiologues. Reste que les problématiques
inhérentes au dépistage, à la prise en charge globale, aux aspects
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immunologiques et à la recherche d'un candidat vaccin devraient rapprocher,
s'il en faut, les deux spécialités…
1 - Di Martino V_et al. " Impact of HIV coinfection on the long-term follow-up of
HCV-related cirrhosis " 203
2 - Sulkowski MS_et al. " HCV and HIV coinfection : prevalence, genotype distribution
and severity of liver disease by in an urban HIV clinic " 204
3 - O'Brien CB et al. " Experience with liver transplantation in HIV positive recipients "
341
4 - Nguyen TN et al. " Cellular immune response in HIV/HCV co-infection " 434
5 - Brau N et al. " Hepatitis C and coinfection with _HIV-1 in the New York city
metropolitan area : a random survey among US veterans " 469
6 - Quadri R et al. " Outbreak of blood-borne viral infections in children attending a single
hospital " 478
7 - Bini EJ et al. " Impact of HIV infection on health-related quality of life in patients with
chronic hepatitis C : an unexpected finding " 486
8 - Mao Q et al. " Early HIV infection does not affect the rate of HCV genetic substitution
" 498
9 - Kemmer MN et al. " A distinctive histologic pattern of liver injury in HIV-positive
patients on HAART : a possible hepatotoxic effect of protease inhibitors " 611
10 - Sauleda S et al. " Efficacy of interferon plus ribavirin combination treatment and
impact on HIV infection in haaemophiliacs with chronic hepatitis C and under HAART "
751
11 - Bruno R et al. " Daily interferon therapy in HIV-HCV coinfected patients :
preliminary report " 760
12 - Bautista AP " Development of alcoholic liver disease in HIV-1 vpu transgenic mice "
999
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