Colique néphrétique. Conduite à tenir

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Colique néphrétique. Conduite à tenir
COLIQUE NEPHRETIQUE
CONDUITE A TENIR
K. ZAHIRI, M.G. BENGHANEM, K. HACHIM, E. FATIHI, B. RAMDANI, D. ZAID
RESUME
La colique néphrétique est la conséquence d’une
obstruction des voies excrétrices urinaires qui peut se
compliquer d’infection ou de tro u bles métab o l i q u e s
secondaires à une anurie. Pour cela, elle représente une
u rgence médicale ou médico-ch i ru rgi c a l e. Il fa u t
d’abord calmer la douleur par des antispasmodiques et
des anti-inflammatoires, puis entamer une démarche
diagnostique étiologique comportant un interrogatoire
minutieux et un examen clinique complet. Le bilan morphologique comportera un ASP, une UIV et une échographie rénale. Les étiologies sont dominées par la
pathologie lithiasique.
L’essentiel
Motif de consultation part i c u l i Ë rement fréquent, la
colique néphrétique constitue une urgence médicale
et/ou chirurgicale. Les explorations morphologiques du
rein et des voies urinaires sont d’un grand secours pour
trouver la cause.
INTRODUCTION
La colique néphrétique est une douleur aiguë violente et
paroxystique traduisant une mise en tension brutale de la
voie excrétrice supérieure en amont d’un obstacle quelle
qu’en soit l’étiologie. C’est une urgence thérapeutique
m é d i c a l e, parfois ch i ru rgicale lorsque surviennent des
complications infectieuses ou métaboliques.
(voyage, effort), une période de chaleur ou une baisse des
apports liquidiens. L’agitation du patient est caractéristique
à la recherche, mais en vain, d’une position antalgique.
D’autres signes peuvent accompagner cette douleur, tantôt
u ri n a i re renforçant le diagnostic telles une pollakiurie,
brûlures mictionnelles voire hémat u ri e, tantôt digestifs
pouvant gêner le diagnostic tels des nausées, vomissements
ou syndrome sub-occlusif.
L’évolution est souvent brève ; la colique néphrétique cède
en quelques minutes ou quelques heures. Parfois, elle peut
persister créant un véritable état de mal néphrétique.
2 - La douleur de la colique néphrétique sera parfois
moins typique
Elle peut être limitée à une simple lombalgie ou à ses seules irradiations. Ailleurs, elle peut prendre des masques
trompeurs imposant pour d’autres pathologies notamment
des urgences ch i ru rgicales constituant des diag n o s t i c s
différentiels.
La présence de signes occlusifs peut faire évoquer une
occlusion du grêle.
Une douleur de la fosse iliaque ou du flanc droit simule
une appendicite, une cholécystite aiguë ou un ulcère gastrique ou duodénal en poussée.
La diffusion de la douleur peut faire penser à une pancréatite aiguë, un infarctus du myocarde ou un infarctus du
mésentère.
Une douleur scrotale chez un homme exige d’éliminer une
torsion de testicule ou une orchi-épididymite aiguë.
C’est pourquoi, il faudra rechercher et attacher une grande
valeur à l’existence de signes urinaires ou d’une douleur
provoquée de la fosse lombaire.
DIAGNOSTIC
CONDUITE A TENIR
1- La colique néphrétique est souvent typique
Il s’agit d’une douleur violente, brutale et unilatérale de la
fosse lombaire, irradiant vers le bas en direction de la fosse
iliaque et de la racine de la cuisse. Cette douleur est
spontanée ou vo l o n t i e rs provoquée par des secousses
Service de Néphrologie - Hémodialyse - CHU Ibn Rochd - Casablanca Maroc.
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1- Anamnèse
Elle recherche des antécédents de crises identiques, des
antécédents de lithiase ou chirurgicaux. Elle recherche un
facteur déclenchant (voyage, sports), des signes urinaires
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telle une hématurie, une fièvre et/ou frissons. Enfin, elle
recherche des antécédents familiaux.
2 - Examen physique
Il apprécie l’état général sans oublier les constantes vitales
et la prise de la température. La palpation recherche une
douleur provoquée de la fosse lombaire avec gros rein. Les
touchers pelviens systématiques re ch e rchent une masse
pelvienne.
3 - Examens biologiques
En urgence, le dosage de l’urée sanguine et de la créatininémie doit se faire surtout avant une urographie intraveineuse (UIV). L’examen cy t o b a c t é ri o l ogique des urines
permet de rechercher une infection. La numération globulaire sanguine peut révéler, dans un contexte fébrile, une
hyper leucocytose à poly nu cl é a i res témoignant d’une
infection.
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de la voie excrétrice en amont de l’obstacle qui est plus ou
moins importante ou inexistante et précisera le siège et la
nature de l’obstacle.
c - Echographie
Elle peut montrer une dilat ation des voies ex c r é t ri c e s .
Celle-ci peut être absente surtout dans les premiers temps
d’une colique néphrétique. Ainsi, une échographie normale
n’élimine pas le diagnostic. Elle peut parfois préciser la
nature de l’obstacle.
6 - Traitement
Dès sa confi rm ation, la colique néphrétique ex i ge un
traitement antalgique.
4 - Au terme de cette première étape
* La crise est typique, l’urgence est de calmer la douleur
puis à froid, entamer un bilan étiologique qui dictera la
thérapeutique adaptée.
* Le diagnostic est incertain, la symptomatologie étant
moins typique sans signes urinaires ou avec des signes
digestifs au premier plan. L’UIV en urgence, après vérification de la fonction rénale et en l’absence d’allergie
aux produits iodés, affirme ou exclut la colique néphrétique.
* Une fois le diagnostic posé, il faut rechercher l’existence de complication infectieuse sous la forme de fièvre
avec frissons ou mécanique sous la forme d’anurie.
A - Colique néphrétique non compliquée
Le repos au lit est conseillé.
La restriction hydrique en période douloureuse est préconisée pour éviter la surtension des voies excrétrices.
Les antispasmodiques peuvent être administrés par voie
intramusculaire ou intraveineuse.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens peuvent être administrés par voie intramusculaire ou intraveineuse. Ils agissent en diminuant l’œdème urétéral et la synthèse de prostaglandines E2 déclenchée par l’augmentation de la pression intra-pyélique.
Si la douleur n’est toujours pas contrôlée, l’usage des
même produits, en perfusion, peut amener la sédation de la
crise.
Il est rare qu’une crise, mÍme intense, ne cède pas aux
doses importantes d’analgésiques antispasmodiques. Dans
ces cas, l’on pourra avoir recours aux opiacés.
5 - Examens radiologiques
En cas d’échec, il ne reste plus qu’à drainer les urines.
a - Cliché de l’abdomen sans préparation
A lui seul, il est insuffisant. Il recherche un calcul se projetant en regard des voies excrétrices, mais les calculs ne
sont pas tous radio-opaques et les coliques néphrétiques ne
sont pas toutes lithiasiques.
B - Colique néphrétique compliquée
En cas de complications septiques, il faut dériver les urines
en urgence par voie endoscopique (montée de sonde urétérale) ou par ponction percutanée (néphrostomie). Avant ces
gestes, des prélèvements bactériologiques urinaires et sanguins doivent être faits et une antibiothérapie doit être
démarrée. Le traitement étiologique de l’obstacle surviendra ultérieurement.
En cas de coliques néphrétiques anuriques sur rein unique
fonctionnel ou anatomique, le recours à l’épuration extrarénale est exceptionnel. Il faut en tout cas drainer d’urgence les urines par montée de sonde ou par néphrostomie.
b - UIV
Elle est réalisée en dehors des contre-indications. Elle
montrera le signe pathognomonique de la colique néphrétique que représente le retard de sécrétion et d’élimination
unilatérale voire une mutité rénale. D’où l’utilité des clichés retards ou tardifs. L’UIV montrera aussi une dilatation
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La douleur calmée, le traitement ultérieur se doit être
étiologique.
7 - Les principales causes des coliques néphrétiques
a - Intramurales
Elles intéressent la lumière des voies urinaires :
- Lithiase peut être inaugurée par des coliques néphrétiques dans 80 % des cas.
- Migration de caillots, de séquestres papillaires après
nécrose papillaire.
- Tumeur bourgeonnante de la voie excrétrice est responsable d’une colique néphrétique dans 18 % des cas.
b - Murales
Elles correspondent à l’atteinte de la paroi urétérale :
- Tumeur sténosante de l’uretère,
- Sténose urétérale intrinsèque tuberculeuse ou bilharzienne,
- Sténose congénitale.
c - Extra-murales
Il s’agit de compressions intrinsèques :
- Adénopathies lombaires,
- Fibrose rétro- péritonéale,
- Tumeur pelvienne,
- Ligature accidentelle de l’uretère.
CONCLUSION
Toute colique néphrétique, quelle que soit son intensité,
nécessite :
* un traitement symptomatique immédiat,
* un bilan étiologique, orientant ultérieurement le traitement curatif.
La démarche à suivre peut être différente selon qu’il s’agit
de colique néphrétique non compliquée qui constitue une
urgence essentiellement médicale ou de colique néphrétique compliquée d’infection ou d’anu rie qui peut être
«chirurgicale».
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