1 Discours prononcé par Philippe COUILLET, Président de l
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1 Discours prononcé par Philippe COUILLET, Président de l
Discours prononcé par Philippe COUILLET, Président de l’association Les Oublié(e)s» de la Mémoire Madame la Ministre, Monsieur le conseiller Mémoire auprès du Secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens Combattants, Monsieur le Maire, représentant le Maire de Paris, Mesdames, Messieurs les parlementaires, Mesdames, Messieurs les élu-e-s, Mesdames, Messieurs les Présidents d’associations, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, Et puis permettez-moi de vous appelez tout simplement, mes chèr-e-s Ami-e-s, Au nom de notre association, Les «Oublié(e)s» de la Mémoire, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier de votre présence si nombreuse ce matin. Je tiens à vous remercier, Madame la Ministre, d’avoir bien voulu parrainer et honorer de votre présence cette cérémonie. Je tiens à remercier Monsieur Bertrand Delanoé, maire de Paris, son cabinet et ses services techniques, ainsi que Monsieur le Directeur Interrégional des Anciens Combattants d’Ile-de-France, ici présent que je salue, qui nous reçoivent, et qui nous permettent de nous rassembler ce matin devant ce haut lieu de mémoire. Je remercie les présidents d’associations mémorielles et leurs représentants, marquant leur solidarité de cette mémoire partagée. Je remercie également les portes-drapeaux, les toujours fidèles symboles de nos manifestations républicaines. Cette cérémonie prend cette année un éclat particulier grâce à l’illustration vocale du Chœur Melomen, dirigé par John Dawkins. Soyez assurer de notre gratitude. Je remercie les associations lesbiennes, gay, bi et trans qui ont accepté de participer à cet hommage, autant par leur présence, que par ce dépôt de gerbe inter-associatif, symbole d’une unité dans ce combat que nous menons tous au quotidien. Cet après-midi, notre association, organise à Toulouse, un hommage similaire à ce matin, en présence d’élus et d’associations LGBT, devant la statut de Jean Jaurès, derrière le Capitole. Ce lieu et cette statue ont été choisis pour manifester notre indignation contre une campagne européenne haineuse d’extrême droite détournant l'image et les paroles de Jaurès. A nous, citoyens républicains, de reprendre ses paroles d’humaniste et d’en faire notre leitmotiv : « Rechercher la vérité, la comprendre, la dire, afin de ne pas subir la loi du mensonge qui passe. » Notre rassemblement d'aujourd'hui ne s'inscrit pas dans un acte de passéisme acharné. 1 Comme l’a écrit Marie-José Chombart de Lauwe, présidente de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation : « Le devoir de mémoire n’a de sens que rapporté aussi aux luttes de ceux qui ont refusé la fatalité du crime, de la haine, du racisme et de l’exclusion, et voulu une société respectueuse des principes de la déclaration universelle des Droits de l’Homme. » Nous manquons vraiment aujourd'hui d'un lieu mémoriel national consacré aux victimes de l'homophobie, comme nous en trouvons dans beaucoup de grandes villes européennes. Nous espérons qu’un tel lieu verra enfin le jour dans la Capitale. Ce lieu ne serait pas uniquement le symbole du passé et de la Déportation pour motif d’homosexualité. Il rendrait aussi l'hommage dû aux victimes d'aujourd'hui, en France et dans le Monde. Nous observons malheureusement encore dans notre pays plusieurs actes de grande violence homophobe, qui bafouent les principes mêmes de notre société, en portant atteinte à la liberté et au respect de la personne humaine. Se souvenir pour refuser l’oubli, c’est travailler pour éviter que l’Histoire et ses horreurs ne se reproduisent. C’est l’occasion de rappeler quelques pages historiques de l’homosexualité en France, qu’elles soient négatives ou bien allant dans le sens du progrès : En janvier 1750, les gagne-deniers et cordonnier Jean Diot et Bruno Lenoir, pris de boisson, sont surpris par le guet, rue Montorgueil à Paris, en train de commettre ce qui aurait dû être considéré comme un banal outrage à la pudeur, comme il s'en produisait régulièrement passible d'une mercuriale ou jugement. Ils sont cependant condamnés à la peine maximum, sentence confirmée par le Parlement, et brûlés en place de Grève, le 6 juillet 1750. J’ouvre une parenthèse : Ironie de l’Histoire, sur cette même place, actuelle Place de l’Hôtel de Ville, se déroule en ce moment une importante campagne de collecte de sang ; collecte dont nous sommes exclus et que nous sommes condamnés à être des citoyens de seconde zone. Ce refus est un acte de discrimination d’Etat. Nous ne pouvons plus l’accepter. Je ferme cette parenthèse et poursuis cette évocation historique. La Révolution Française abandonnera la répression pénale de l'homosexualité. Le Code Napoléon inscrira la majorité sexuelle comme source de discrimination : elle est fixée à 15 ans pour les hétérosexuels et à 18 pour les homosexuels. Et la notion d'"atteinte publique à la pudeur" présente dans le code sera souvent utilisée pour réprimer l'homosexualité. Le 6 août 1942, Pétain signe un texte de loi "dite Darlan" portant la majorité sexuelle pour les actes hétérosexuels à 15 ans et à 21 ans pour les actes homosexuels, réprimant insidieusement l'homosexualité. Dans les faits, Vichy, par des discours d'une violence extrême contribuera à l'accroissement de l'homophobie qui se traduira par une violence exercée par toute la société au quotidien sur les homosexuels. 2 Les recherches menées dans diverses sources archivistiques, par la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, ont permis d’identifier avec certitude 63 Français arrêtés pour motif d’homosexualité, durant la Seconde Guerre Mondiale. Au moins 11 d'entre eux trouveront la mort en déportation, dont 9 dans un camp de concentration ou un commando extérieur. Parmi ces français, il est à noter que 6 furent arrêtés en zone occupée (dont 3 à Paris). En février 1945, la continuation de l'ordre "moral" ambiant a permis à la loi de 1942 de faire partie des textes maintenus par le Gouvernement de la Libération. Sous De Gaulle, en 1960, l'amendement du député, Paul Mirguet, classe l'homosexualité comme "fléau social" et donne au gouvernement le droit de légiférer par décret pour la combattre. La France en 1968, adopte la classification de l'Organisation Mondiale de la Santé, classant l'homosexualité dans les maladies mentales. En avril 1981, à un mois de l'élection présidentielle, une manifestation, à Paris, de plus de 10000 personnes, annonce les futures marches ou Gay Pride. Mai 1981, l'élection à la présidence de la République de François Mitterrand conduit donc la nouvelle majorité à adopter successivement deux projets de loi, présentés par Robert Badinter, ministre de la justice, tendant à rendre effectifs les engagements pris. La loi, portant amnistie, concerne à la fois les outrages publics à la pudeur, aggravés pour homosexualité, et les actes contre nature avec un mineur de dix-huit ans. Robert Badinter, souligne alors, qu’« Il n'est que temps de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels, comme à tous ses autres citoyens dans tant d'autres domaines. La discrimination, la flétrissure qu'implique à leur égard l'existence d'une infraction particulière d'homosexualité les atteint - nous atteint tous - à travers une loi qui exprime l'idéologie, la pesanteur d'une époque odieuse de notre histoire. » En juin 1981, Gaston Defferre, ministre de l'Intérieur, supprime le groupe de contrôle des homosexuels à la préfecture de police et les fichiers qui auraient pu les concerner. Le ministère de la Santé, lui, n'accepte plus de prendre en compte l'homosexualité dans la liste des maladies mentales de l'OMS. Il faudra attendre le 17 mai 1993 pour que l'homosexualité soit définitivement rayée par l'OMS de la liste des maladies mentales. Le Pacte Civil de Solidarité dit PaCS est adopté par le Parlement en novembre 1999. Il ouvre la voie à la reconnaissance par l'Etat, pour la première fois, entre autres, aux couples homosexuels. En avril 2001, pour la première fois, l'État par la voie du Premier Ministre, Lionel Jospin, a évoqué la déportation pour homosexualité, lors d'une cérémonie publique. 3 Lors du 60ème anniversaire de la Libération des Camps, Jacques CHIRAC, président de la République a reconnu dans son discours à la Nation, la déportation d'homosexuels français dans les camps nazis. A ce sujet, je voudrais, au nom des « Oublié(e)s » de la Mémoire, en profiter pour remercier, le Conseil de Paris, qui a répondu à notre vœu – présenté par le groupe des élus communistes -, par un vote à l’UNANIMITE, le 12 mai dernier, d’une résolution intégrant la mémoire de la déportation pour motif d’homosexualité, lors des cérémonies de la Journée du Souvenir (fin avril), dans toutes les mairies d’arrondissement de Paris… Le 17 mai 2005, Louis-Georges Tin lance la première journée internationale contre l'homophobie pour le 15éme anniversaire du retrait par l’OMS de l’homosexualité de la liste des maladies mentales. Je pourrais bien sûr poursuivre au-delà de cette date symbolique. Il est ici important de rappeler l’émergence de tous nos mouvements associatifs, existant depuis 1971, qui poursuivent depuis, leurs actions et leurs engagements. L’actualité les obligent, encore, et toujours à rester vigilant et à poursuivre leurs aides aux victimes. Des anonymes, bénévoles, volontaires, militantes et militants associatifs LGBT se battent au quotidien dans le monde. Rendons leur ici notre hommage et notre gratitude. J'ai une pensée toute spéciale pour nos camarades, Christine Le Doaré (présidente du Centre LGBT de Paris) et Pierre Serne (représentant de l’ILGA Europe), qui sont actuellement à RIGA pour soutenir la Marche Balte. Cette dernière serait compromise et pourrait présager des violences homophobes, déjà vécues en Pologne et en Russie, dans de précédentes manifestations. J’en appelle à vous, Madame la Ministre, afin que vous poursuiviez vos démarches diplomatiques dans vos voyages et dans vos actions quotidiennes, pour que cette lutte contre la lesbophobie, l’homophobie et la transphobie devienne universelle, et ce dans le respect de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, chère à nos Témoins de l’Histoire, qui se sont battus pour nos Libertés. Comme le dirait Lafayette : "Nous ne demandons pas à être tolérés mais seulement la Liberté" Nous voulons être libres, respecter, et que nous puissions aimer comme on l’entend. C'est cela la Liberté, l'un des piliers de notre République. Je terminerai par les mots de Paul Eluard : Et par le pouvoir d’un mot, je recommence ma vie Je suis né pour te connaître, pour te nommer LIBERTE. ________________ 4