Les actes préparatoires à la vente

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Les actes préparatoires à la vente
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Avant-contrats
Les actes préparatoires à la vente
La vente d’un immeuble est une opération complexe qui fait intervenir de nombreuses personnes et requiert
de multiples éléments avant de pouvoir être finalisée. C’est la raison pour laquelle elle se déroule en général
en deux temps. Les parties établissent d’abord un acte préparatoire puis réitèrent la vente par la signature
d’un acte chez le notaire. Cet acte préparatoire est fondamental parce qu’il cristallise les droits et obligations
de chacune des parties et conditionne la bonne signature de l’acte notarié.
Deux actes principaux :
la promesse unilatérale
de vente et la promesse
synallagmatique
Dans la pratique, l’avant-contrat prend
le plus souvent la forme d’une promesse
unilatérale de vente ou d’une promesse
synallagmatique de vente (également
appelée promesse bilatérale de vente1
ou « compromis de vente » dans le langage courant).
■ La promesse unilatérale de vente se
définit comme un contrat par lequel le
promettant s’engage à vendre un bien,
pendant un certain temps, au bénéfi-
1 C’est-à-dire
qui engage les
deux parties
contractantes..
ciaire qui a le droit de l’acquérir dans ce
même laps de temps.
■ Le compromis de vente est un
contrat par lequel les parties s’engagent
l’une à vendre, l’autre à acheter, un bien
moyennant un prix déterminé.
D’autres formes d’avant-contrats peuvent se présenter :
- la promesse unilatérale d’achat dans
laquelle l’engagement émane non du
vendeur, comme c’est le cas dans la promesse unilatérale de vente, mais de l’acquéreur. En pratique, elle est fort rare ;
- le pacte de préférence : il s’agit d’un contrat
par lequel le propriétaire s’engage à vendre
à une autre personne, par préférence, pour
le cas où il se déciderait à vendre. Il ne comporte donc pas d’engagement ferme du
promettant mais confère seulement une
priorité à son bénéficiaire ;
- le contrat préliminaire ou contrat de réservation est utilisé en matière de vente
d’immeuble à construire. Le promoteur
réserve un lot au candidat acquéreur
qui, en contrepartie de cette réservation, effectue un dépôt de garantie sur
un compte spécial.
Ces autres formes d’avant-contrats se
rencontrent toutefois dans des hypothèses très particulières.
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Le Propriétaire immobilier - Mars 2011 - 21
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Le compromis,
quelle que soit
sa forme, n’a pas
à être enregistré.
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que, un état de l’installation intérieure
d’électricité et, depuis cette année, le
document de contrôle de l’installation
d’assainissement non collectif.
Pour plus de précisions sur ces différents
diagnostics : voir le tableau récapitulatif publié dans notre numéro 437 - janvier 2011 – p. 6 et 7.
Précautions d’usage
et mentions obligatoires
La forme de ces deux conventions est
libre. En général, elles sont rédigées soit
par l’agent immobilier chargé de la négociation, soit par notaire.
Attention cependant, la promesse unilatérale aux termes de laquelle le promettant s’engage à vendre pendant un
délai excédant dix-huit mois doit être
reçue par notaire.
La promesse unilatérale de vente doit
être obligatoirement enregistrée dans
les dix jours de son acceptation par le
bénéficiaire, à la recette des impôts du
domicile de l’une des parties, et ce, à
peine de nullité. L’enregistrement n’est
pas requis si l’acte est conclu par acte
notarié.
Le compromis, quelle que soit sa forme,
n’a pas à être enregistré.
Dans tous les cas, il est impératif que le
promettant soit effectivement proprié-
22 - Le Propriétaire immobilier - Mars 2011
taire. En cas d’indivision ou d’usufruit, il
convient donc de s’entourer de précautions.
Dans la mesure où ces conventions ont
pour objet la vente d’un immeuble, elles
doivent comporter des mentions obligatoires, principalement imposées en
vue de protéger l’acquéreur.
❙ Ainsi, que l’on soit dans le cas d’une
promesse unilatérale de vente ou d’un
compromis de vente, le vendeur doit
produire un dossier de diagnostic technique.
Celui-ci comprend un constat de risque
d’exposition au plomb, un état mentionnant la présence ou l’absence de
matériaux ou produits contenant de
l’amiante, un état relatif à la présence
de termites, un état de l’installation
intérieure de gaz naturel, un état des
risques naturels et technologiques, un
diagnostic de performance énergéti-
❙❙Ces
conventions sont
généralement
rédigées
par l’agent
immobilier
chargé de la
négociation
ou par le
notaire.
❙ L’acte portant sur un terrain à bâtir
destiné à un usage d’habitation ou usage mixte d’habitation et professionnel
doit mentionner si le descriptif provient
ou non d’un bornage.
Des mentions spécifiques sont également prévues dans le cadre d’un lotissement.
De même, l’acte portant sur un lot de
copropriété doit comporter la superficie
de la partie privative de ce lot (obligation
prévue par la loi dite loi Carrez). À défaut,
l’acquéreur peut invoquer la nullité de
l’acte et si la surface vendue est inférieure
de plus d’un vingtième à celle indiquée
dans l’acte, l’acquéreur peut engager une
action en diminution du prix.
❙ Indépendamment des caractéristiques
de l’immeuble, le législateur a prévu la
protection de l’acquéreur en cas de recours à un emprunt en vue du paiement
du prix de cession.
L’acte, y compris la promesse unilatérale
de vente acceptée, est alors conclu sous
la condition suspensive d’obtention du
prêt par l’acquéreur.
Par mesure de précaution, et pour éviter
que l’acquéreur ne prenne prétexte de
cette clause pour se dédire, le vendeur
doit faire figurer dans l’acte les caractéristiques du prêt (taux, durée…) ainsi
que le nombre d’établissements financiers que l’acquéreur devra contacter.
Si l’acquéreur justifie que le prêt sollicité
par ses soins selon les caractéristiques
❙ L’acte peut être assorti d’autres conditions suspensives, telles par exemple,
l’obtention d’un permis de construire.
❙ Enfin, l’acquéreur non professionnel
d’un immeuble à usage d’habitation
dispose d’une faculté de rétractation
dans un délai de sept jours à compter
de la notification de l’acte signé, notification qui lui est faite généralement par
lettre recommandée avec accusé de réception. Pendant ce délai de sept jours,
aucun versement d’argent ne peut être
exigé de l’acheteur. S’il se rétracte, la
promesse est anéantie.
Divergences sur la portée
de l’engagement
Si la promesse unilatérale de vente et
le compromis de vente présentent des
points communs notamment quant au
contenu, ils divergent en revanche sur
leur régime juridique et les obligations
qu’ils créent pour chacune des parties.
■ Dans le cas d’une promesse unilatérale, le bénéficiaire accepte la
promesse en tant que promesse et ne
prend aucun engagement d’achat. Il
pourra acquérir le bien ultérieurement
en « levant l’option ». Ainsi, le bénéficiaire dispose d’un certain temps pour
étudier l’intérêt de l’opération, réunir
les fonds nécessaires, obtenir les autorisations, par exemple, un permis de
construire.
Il est cependant impératif que le bénéficiaire accepte la promesse2. Il suffit
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prévues lui a été refusé, il n’est pas tenu
d’acheter.
Si le prêt est accordé, il peut lever l’option dans le cadre d’une promesse unilatérale de vente et est tenu d’acquérir
dans le cadre d’un compromis de vente.
2 La promesse
unilatérale
de vente
est d’abord
acceptée par
le bénéficiaire
(sinon, elle
demeure une
offre), puis levée si le bénéficiaire entend
acheter.
pour cela d’une simple mention dans
l’acte. Tant qu’il ne l’accepte pas, elle
demeure une simple offre qui peut être
retirée à tout moment sans que le bénéficiaire ne puisse rien exiger.
La promesse unilatérale de vente est
donc faite au profit de l’acquéreur exclusivement qui est libre d’acheter en levant
l’option, ou non. Le vendeur, lui, est ▸▸▸
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lié irrévocablement. La convention ne
deviendra vente que si l’acquéreur, qui a
accepté préalablement la promesse, lève
l’option dans le délai qui lui est imparti.
Cette levée d’option n’obéit à aucune
condition de forme particulière ; en pratique, elle intervient par lettre recommandée ou acte d’huissier selon les stipulations de la promesse ou, le plus souvent,
par la signature de l’acte authentique.
■ Le compromis de vente, pour sa
part, constitue une convention qui engage définitivement les deux parties.
Le compromis est une vente dans le prolongement de l’article 1589 du Code civil
selon lequel la promesse de vente vaut
vente lorsqu’il y a accord sur la chose et
sur le prix. Il n’exige l’accomplissement
d’aucune formalité supplémentaire (sauf,
évidemment, signature de l’acte notarié).
Ainsi qu’en matière
de sanctions
Les sanctions de la violation de la promesse par le vendeur varient selon que
l’on est en présence d’une promesse
unilatérale de vente ou d’un compromis
de vente. Il arrive parfois que le vendeur
trouve un acheteur à un meilleur prix et
lui vende son immeuble au mépris de la
promesse qu’il a signée.
■ S’il s’agit d’une promesse unilatérale, et à condition bien sûr qu’elle soit
acceptée (cf. supra), le bénéficiaire de
la promesse ne peut solliciter que des
dommages et intérêts ; il ne peut pour-
24 - Le Propriétaire immobilier - Mars 2011
❙❙Dans le
cas d’un
compromis,
l’acheteur
évincé peut
demander
en justice
l’exécution
forcée de la
vente.
Le compromis de vente engage
définitivement les deux parties.
suivre la nullité de la vente. En revanche, si la promesse n’a pas été acceptée,
le bénéficiaire acquéreur potentiel n’a
aucun droit.
■ Dans le cadre d’un compromis,
l’acheteur évincé peut demander en
justice l’exécution forcée de la vente. Il
deviendra donc propriétaire du bien.
Parallèlement, le vendeur peut forcer le
cocontractant à acheter.
■ Cependant, ces principes doivent être nuancés à la lumière des
clauses financières que les praticiens insèrent dans les conventions.
En contrepartie de l’immobilisation du
bien, il est conseillé de prévoir que le
bénéficiaire d’une promesse unilatérale
verse une indemnité d’immobilisation
au vendeur, en général de 5 à 10 % du
prix de vente. Une indemnité d’un montant de 5 % est même imposée par la
loi dans le cas d’une promesse dont la
durée d’option est supérieure à 18 mois.
Cette indemnité ne doit être versée
qu’une fois le délai de rétractation de
sept jours écoulé.
Si l’acquéreur achète en levant l’option
dans le délai imparti, l’indemnité s’impute sur le prix de vente. En revanche,
s’il refuse de lever l’option ou le fait en
dehors du délai, la promesse est caduque et l’indemnité reste acquise au
vendeur. Dans ce cas, on le voit, le bénéficiaire n’est pas totalement libre d’acquérir puisque, s’il ne lève pas l’option, il
perd l’indemnité qu’il a réglée.
Enfin, l’indemnité est restituée à l’acheteur si les conditions suspensives ne
sont pas réalisées, par exemple, s’il n’a
pu obtenir de prêt.
Parallèlement, pour pallier la fermeté
de l’engagement résultant du compromis, les parties peuvent insérer une
clause de dédit aux termes de laquelle
si une des parties refuse de réaliser
définitivement la vente (le vendeur refuse de vendre ou l’acheteur d’acheter),
l’autre ne pourra l’y contraindre mais
pourra seulement réclamer le versement du dédit, perdant ainsi la faculté
de demander l’exécution forcée.
Diane Dupeyron,
avocat au barreau de Toulouse
En conclusion
Il convient en pratique d’être très vigilant sur le texte de l’avantcontrat, et d’en demander un projet avant signature, car toutes les
conditions de la vente future doivent impérativement être réglées
dans l’avant-contrat.

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