Nouvelles grandes ma.. - Fédération Française de la Couture du

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Nouvelles grandes ma.. - Fédération Française de la Couture du
 14 e RENCONTRES
INTERNATIONALES
DU TEXTILE ET DE LA MODE
DE NOUVELLES GRANDES MARQUES :
C’EST POSSIBLE
Samedi 26 avril 2014 / 10h30
Isabelle Ginestet-Naudin, Directrice des fonds sectoriels, Bpifrance.
Didier Grumbach, Président, Fédération française de la couture, du prêt-à-porter des couturiers et des créateurs de
mode
Didier Grumbach
Bonjour et merci à tous d’être venus si tôt.
De nouvelles grandes marques ? Est-ce possible ? C’est la question à laquelle nous allons essayer de répondre. Pour
cela, je vais vous faire un court historique et vous expliquer pourquoi la Bpi - anciennement la Caisse des Dépôts s'intéresse à la mode et pourquoi nous avons demandé à Isabelle Ginestet-Naudin, ici présente, de venir vous en
parler.
Je voudrais rappeler les moyens de financement qui ont fait vivre nos marques ces cent dernières années.
Les maisons de couture constituaient une industrie de main-d’œuvre considérable et compétitive. Les grands
capitaux étaient nécessaires à ces maisons qui employaient jusque dans les années 1950 des centaines d’ouvrières. Ce
qui intéressait notre Chambre Syndicale était de savoir à quel salaire mensuel avaient droit les ouvrières qui étaient la
force de travail de nos industries. La « confection », comme on disait alors, était artisanale et faisait travailler des
ouvrières à domicile ; elle n'existait pas encore sous la forme du prêt-à-porter que vous connaissez aujourd’hui.
Aussi bien Madame Vionnet, qui avait Monsieur Bader comme commanditaire, que Monsieur Dior dont la marque
était la propriété du groupe Boussac, ou qu’Yves Saint Laurent financé par Charles Of The Ritz – actionnaire
majoritaire de la marque jusqu’en 1973 -, pendant de longues années les maisons de couture ont eu besoin de
financiers. Elles ne pouvaient plus se développer sans eux.
Cela a progressivement changé à partir de 1948 quand Christian Dior lui-même a inventé le contrat de licence. Il
s'agissait alors de donner la marque en concession. Dans un monde protectionniste, ce système s’est avéré efficace.
Vous pouviez avoir des chemises Dior à Londres qui n'étaient pas les mêmes qu’à Paris puisqu’elles étaient concédées
à deux licenciés différents. Les couturiers se sont enrichis sur ce système pendant près de cinquante ans. Nous
sommes maintenant dans la mondialisation et à nouveau, c’est « un seul produit pour le monde ». Il ne peut plus y
avoir 300 contrats de licence sur le modèle que Pierre Cardin utilise toujours.
Le prêt-à-porter est devenu une industrie high-tech qui a besoin de financiers. C’est là qu’Isabelle Ginestet-Naudin
intervient à point nommé. Il s'agit bien de financer des sociétés dont les créateurs doivent être majoritaires lors de
leur phase de croissance lorsqu’ils écrivent un récit singulier.
Il faut absolument, et vous verrez qu'il n'y a pas d'exception, que les créateurs soient les maîtres chez eux pendant
cette phase. Le tour de table doit évoluer au fur et à mesure de la vie de la société. Si certains d'entre eux et qui sont
dans la salle réussissent, ils finiront chez LVMH ; ce n’est pas un désastre.
Je cède la parole à Isabelle qui va vous donner son point de vue sur la question. Je vous remercie.
Isabelle Ginestet-Naudin
Merci, cher Didier. Si je suis là, c’est quand même grâce à Didier Grumbach puisque c'est lui qui a pris l'initiative en
1999 de lancer Mode et Finance, fonds d'investissement précurseur, le seul en France dédié exclusivement à la mode,
pour faire émerger de nouvelles marques.
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J’ai repris la gestion de ce fonds d'investissement en 2010, il n’y a donc pas très longtemps. Je partage tout à fait ce
que disait Didier sur l'importance de pouvoir être chez-soi au départ d'une marque. C’est ce que nous tentons de
faire avec Mode et Finance : accompagner les jeunes créateurs dans ces premières phases de développement pour
qu'ils puissent écrire leur histoire. Chaque cas est tout à fait singulier, chaque créateur a sa propre histoire. Durant
les quatre ans de gestion de Mode et Finance nous avons pu constater qu'il n'y avait pas qu’un seul modèle
économique, mais plusieurs, avec des contraintes très fortes communes à tous les créateurs.
Ce sont notamment les besoins en fonds de roulement qui sont considérables. Les cycles sont très longs, et se
juxtaposent, ce qui est très particulier à cette industrie. Les financiers sont là pour les accompagner dans cette phase
où les banques ne sont pas toujours présentes à la hauteur souhaitée pour assurer le financement de leurs besoins en
fonds de roulement.
Nous sommes dans une histoire singulière avec chaque fois des besoins d’investissements forts. Mode et Finance,
jusqu'à cette année, c’est 12 M et une capacité d'investissement de 500 K à 1 M par marque. C'est beaucoup et à
la fois très peu. Il est absolument important, nous en parlions déjà l'an dernier, de pouvoir accompagner la marque
émergente vers une certaine étape où le marché pourra prendre le relais.
On peut se réjouir aujourd'hui, avec la création de Bpifrance, du lancement d’un Mode et Finance II qui vise une
taille cible beaucoup plus importante que le premier puisqu’on souhaite aller jusqu’à 30 à 40 M pour ce fonds
d'investissement. Cela va nous permettre d'accompagner les marques de notre portefeuille plus loin que ce que nous
pouvions faire avec Mode et Finance I.
Nous avons l'ambition, avec ce fonds, de réunir à nos côtés les grands industriels de la mode. Il est important que
convergent toutes les énergies vers l’émergence de ces marques créatives qui font la réputation de la France. C'est
donc pour Bpifrance un enjeu absolument national. Nous allons entamer une levée de fonds auprès de ces
investisseurs potentiels, avisés, qui voudront bien nous accompagner dans cette future expérience et nous aider ainsi
à transformer ce bel essai fait avec Mode et Finance I. Je rappelle que nous détenons en portefeuille des marques à
fort potentiel. Nous nous réservons d'ailleurs une enveloppe pour refinancer les marques qui ont rejoint notre
portefeuille récemment, je pense notamment à la talentueuse créatrice franco-chinoise Yiqing Yin ou à d'autres
créateurs comme AMI-Alexandre Mattiussi ou Each x Other, pour ne citer qu'eux.
Nous allons poursuivre cet engagement auprès des créateurs français avec ce fonds Mode et Finance II que nous
souhaitons porter à un niveau nous permettant d'accompagner la marque vers une maîtrise de sa distribution, vers
un point d'équilibre et une taille critique qui permettront ensuite à LVMH ou Kering de prendre le relais.
Didier Grumbach
Merci beaucoup, Isabelle. C'est une bonne introduction à la table ronde suivante qui est modérée par Pascal
Morand,
Je veux parler de la Chine et de Monsieur Du Yuzhou qui est en face de moi. D’une façon très générale, dans les
années 50, toutes nos marques étaient axées sur l'Amérique du Nord ; dans les années 80, toutes les nouvelles
marques étaient tournées vers le Japon et n’ont réussi que grâce à cette croissance japonaise ; aujourd'hui avec la
Chine nous cherchons, aussi bien Monsieur Du Yuzhou et ses partenaires que nous, à trouver des moyens de
collaboration.
Monsieur Du, qui a été décoré Officier dans l'Ordre des Arts et Lettres par notre dernier Ministre de la Culture,
s’intéresse particulièrement aux domaines créatifs. Anne-Valérie Hash ici présente pourrait en témoigner car il est
allé lui rendre visite avec ses collaborateurs pour savoir comment et si une marque créative pouvait déboucher sur
une activité industrielle conséquente.
Evidemment, nous n’avons pas trouvé la solution ; la Chine, au contraire du Japon, est un empire industriel
considérable. Christine Zhao, ici présente, a servi entre nous de relais pendant des années. Aujourd'hui, on doit
fabriquer en France les collections de création qui s’exportent, mais à terme, on ne peut pas fabriquer qu’en France
et la Chine est un partenaire majeur.
De ce fait, nous allons organiser dans le cadre du cinquantenaire des relations franco-chinoises un forum à Paris en
novembre prochain qui rassemblera Monsieur Chen Dapeng et Monsieur Dominique Jacomet.
Isabelle Ginestet-Naudin
Puisqu'on parle de Dominique Jacomet, je tiens à rebondir sur l’IFM.
Je l’ai rappelé, il n’existe pas un business model mais plusieurs, chaque marque étant singulière. Certaines vont
s'appuyer sur des contrats de style, d'autres sur le développement de joint-ventures sur de nouveaux territoires, etc.
De la même manière, nous sommes persuadés que le modèle financier n’est pas unique. Nous sommes un
investisseur avisé capable de financer seul, mais en tant qu’investisseur en fonds propres minoritaire, nous
recherchons des modèles économiques reposant sur un couple créateur/gestionnaire. C’est absolument
indispensable.
Au-delà même de ce binôme qui va travailler au succès de la marque, nous allons mettre en place pour Mode et
Finance II un programme d’accompagnement pour celles qui rejoindront notre portefeuille. Nous avons notamment
une convention de partenariat en cours avec l’IFM. Nous avons déjà commencé un excellent travail avec Patricia
Romatet. Il nous semble absolument indispensable d'avoir, aux côtés de l’investisseur que je représente aujourd'hui,
des expertises et des systèmes d'accompagnement au tout début du développement de la marque pour véritablement
donner à chaque créateur les plus grandes chances de réussir. C'est crucial…
Didier Grumbach
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Mode et Finance doit associer des gens mais aussi des compétences. Mode et Finance ne doit pas investir dans des
entreprises dont le directeur général n’est pas pertinent. La mode est l’industrie la plus complexe. Il y a peu de
réussites car les duos sont difficiles à constituer et les échecs proviennent souvent d’un manque de direction
bicéphale.
Je voudrais dire qu’il est beaucoup plus facile de recruter un créateur de mode qu'un manager qui saura se prêter au
jeu de la création et gérer l'entreprise dans la durée.
Ceci dit, l’aspect conseil existe au niveau de la Fédération française de la Couture et doit également exister au sein de
l’IFM qui a été constitué pour cela.
Isabelle Ginestet-Naudin
L'accompagnement est effectivement indispensable pour Mode et Finance, seul fonds de capital-risque qui intervient
à un stade de développement très précoce dans la vie de l'entreprise et qui doit donc être en mesure de la guider dans
son développement. En avançant, on essaie de mettre autour de Mode et Finance et de son portefeuille toutes les
bonnes énergies pour le faire grandir correctement.
Il ne faut pas oublier que Mode et Finance est issu d’une volonté. L'année dernière, la Bpi a été créée. Nicolas
Dufourcq, son Directeur Général, arrivait. On ne connaissait pas ses ambitions pour notre industrie. On peut se
réjouir aujourd’hui de la réaffirmation de l’enjeu d’un fonds d'investissement comme Mode et Finance pour notre
pays. Nous allons nous employer à le gérer le mieux possible et nous espérons avoir des industriels autour de nous,
parce que je pense qu’en effet, on doit faire converger les expertises et expériences pour faire émerger ces marques et
continuer à être une référence.
Je ne voulais pas non plus que l'on oublie que Bpifrance est la Banque Publique d'Investissement. Ce nouveau volet
d'accompagnement a été l’objet d’une autre nouveauté à côté de celle de la création du fonds d’investissement
successeur : l’engagement de Bpifrance de prévoir un budget spécifique pour un accompagnement extra-financier
qui est à mon avis absolument indispensable.
Didier Grumbach
S'il n'y a pas de question, Pascal Morand va prendre la suite.
Isabelle Ginestet-Naudin
Merci à tous pour votre attention. Merci, Didier.
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