La pratique de l`entretien d`explicitation (EdE)

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La pratique de l`entretien d`explicitation (EdE)
La pratique de l’entretien
d’explicitation (EdE)
Georges ARMENOULT
26/08/02
327, rue du Moulin de Sémalen - 34000 Montpellier - Téléphone 04 67 15 76 6 0 - Télécopie 04 67 15 76 61
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I/
INTRODUCTION
Face aux nombreux départs d’experts et de spécialistes conduisant à une prévisible massification
des recrutements ces prochaines années dans notre ministère, la capitalisation des connaissances
et leur transfert sont devenus une problématique forte pour certaines activités à enjeu. A cet effet,
des études et des projets ont été engagés par le Réseau Scientifique et Technique (RST) et par la
Direction des Affaires Financières et de l’Administration Générale ( DAFAG).
Par ailleurs, la fiche technique n°10, produite par le CEDIP en juin 1999 « Capitaliser une
expérience, quelle méthode ? », aborde déjà cette problématique et pose la question de comment
privilégier l’émergence des savoir-faire individuels implicites.
Il a paru intéressant d’enrichir cette réflexion en la mettant en perspective avec les travaux sur
l’entretien d’explicitation, du Groupe de Recherche sur l’Explicitation ( GREX) dirigés par Pierre
V ERMERSCH et de Nadine FAINGOLD et Catherine LE HIR, ses collaboratrices.
Bien qu’il existe différentes techniques d’entretien, la spécificité de l’entretien d’explicitation est de
viser la verbalisation de l’action.
Il en est donné la définition suivante « l'entretien d'explicitation constitue un ensemble de techniques
qui ont pour but de favoriser, d'aider, de solliciter la mise en mots descriptive de la manière dont une
tâche a été réalisée. L'entretien d'explicitation vise donc en priorité la verbalisation de l'action, telle
qu'elle est effectivement mise en oeuvre dans l'exécution d'une tâche précise. Bien entendu le terme
d'action ne recouvre pas seulement des actions matérielles, mais comprend aussi les actions
mentales » .
Mais comment faire pour questionner l’implicite afin de recueillir des données réfléchies ?
Sans remplacer une indispensable formation à la pratique de l’entretien d’explication, ce document
se propose de présenter cet outil qui ne constitue, selon Pierre V ERMERSCH « qu’un escabeau pour
atteindre les confitures sur l’armoire ».
II/ APPROCHE DE L’ENTRETIEN D’EXPLICITATION
Des études sont menées sur l’entretien d’explicitation depuis bientôt un demi-siècle. Mais ces
techniques en sont encore au stade expérimental. Elles sont utilisées en formation dans les
situations scolaires de pédagogie interrogative. Des réflexions dans le champ professionnel ne sont
conduites que de manière récente.
Trois buts sont donnés à l’entretien d’explicitation :
 Aider le guidant (1) à s’informer (analyse d’erreurs, expertise, recherche,…).
 Aider l’acteur (1) à s’auto informer (retour réflexif sur la démarche suivie pour une tâche ce
qui lui per met de construire son expérience).
 Lui apprendre à s’auto informer ( moyen d’apprendre à apprendre dans la mesure où
l’acteur apprend à décrire sa manière de faire et apprend ainsi à en prendre conscience).
(1) Tout au long de cette présentation le terme acteur désignera l’interv iewé (celui qui a réalisé l’action) et le terme de
guidant l’intervieweur (celui qui aide à la mise en mot des actions réalisées)
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Dans cette pratique d’explicitation, on passe de l’interrogation « pourquoi » (attente d’une réponse
pour valider la compréhension d’une problématique) au questionnement a posteriori « comment »
(comprendre le fonctionnement intellectuel en situation). Cette démarche se heurte toutefois à
plusieurs difficultés :
 L’action est très souvent une connaissance autonome incorporée et contient une part
sensible de savoir-faire non conscient.
 L’entretien d’explicitation n’est pas un acte habituel et peu d’acteurs ont été formés à sa
pratique. Elle requiert en conséquence une aide, une médiation voire une guidance et
l’apprentissage des techniques correspondantes.
 Elle suppose, dans cet acte pratiqué a posteriori, une qualité de mémoire et de rappel des
faits de l’acteur questionné.
Il existe une certaine dichotomie entre réussir une activité et la comprendre. Souvent la réalisation
d’une action précède les concepts per mettant de la justifier. Un individu ne sait pas toujours ce qu’il
sait déjà en acte. Comprendre comment il s’y prend pour exécuter une action (quelles sont les
routines utilisées, par exemple), per met d’inférer sur les connaissances fonctionnelles et les buts
réellement poursuivis.
L’action, par son statut cognitif, constitue une connaissance autonome ( Jean PIAGET).
Pour transférer certaines de ses connaissances, l’acteur doit pouvoir prendre le temps d’un retour
réflexif sur ses propres activités.
Cependant, il ne sait pas toujours décrire explicitement les capacités qu’il a mobilisées dans l’action
et il est, dès lors, indispensable qu’une aide lui soit apportée pour passer de l’acte à sa
verbalisation.
Un travail d’assistance et de guidance doit accompagner peu à peu l’acteur vers un accès à la
formulation et à la verbalisation du vécu dans l’action. Cela lui per met d’évoquer et de décrire les
différentes opérations qui ont conduit à sa mise en œuvre.
Réaliser ce guidage, c’est compenser, par une médiation, le fait que la mise en mots spontanée
n’est que rarement descriptive, qu’elle se rapporte plus souvent à des généralités et qu’elle ne vise
quasiment jamais une tâche spécifiée.
Il a également été noté que cet entretien devait être réalisé par un membre externe à une relation
hiérarchique, pour ne pas placer l’acteur en position de jugement par les questions et introduire
alors un enjeu. En effet, la soumission à une autorité d’évaluation peut occasionner des déviances
du sujet alors plus enclin à représenter la conformité à une nor me que d’aborder ses pratiques
réelles.
L’entretien d’explicitation comporte trois spécificités essentielles



Il vise à installer l’acteur dans une position de parole particulière où il sera plus tourné vers
son « univers intérieur » que sur son environnement de travail. Cette position d’évocation,
appelée aussi « position de parole incarnée », est désignée ainsi parce qu’il est fait appel à
la mémoire concrète (GUSDORF 1950) en créant les conditions d’une ré-émergence des
éléments sensoriels (images, sons, ressentis corporels) de la situation passée.
C’est une technique de questionnement à visée de recherche mais également une aide à la
prise de conscience. Elle s’oppose à l’explication en supprimant la question du pourquoi
pour aller vers le comment du vécu de l’action. Elle per met ainsi à l’individu de s’exprimer
en étant en contact avec lui-même. C’est une condition sine qua non qui nécessite une
formation pratique pour le guidant.
Les aspects procéduraux de l’action présupposent que soient identifiées et écartées les
verbalisations relevant des informations satellites (contexte, intentionnel, émotionnel et
jugements).
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III/
LA VERBALISATION DE L’ACTIVITE
En situation professionnelle, il convient de repérer en premier lieu, à partir des éléments à
transférer, ceux qui présentent de véritables enjeux de capitalisation, et qui par ailleurs nécessitent
une assistance spécif ique.
(Cette réflexion de capitalisation peut se réaliser à partir des travaux publiés par Charles BORDERES
et Guy PA NISSE dans la fiche technique numéro 10 de juin 1999 « Capitaliser une expérience, quelle
méthode ? » et par ceux de Gilles AYMAR parus dans la fiche technique numéro 21 de janvier 2002
« Conserver au sein d’un service les connaissances d’un partant » ).
III/1 – Comprendre les conditions de verbalisation
Dans toutes situations de dialogue, il faut établir la communication, c’est-à-dire se mettre en rapport
avec l’autre et se synchroniser. Les techniques et les conditions de communication ont été
richement développées par de très nombreux auteurs. L’entretien d’explicitation s’en inspire
fortement, en mettant en évidence la maîtrise de trois indicateurs :
 L’attention au rythme et au ton de la voix (observer le rythme de parole, s’y ajuster, repérer
les silences qui doivent être respectés,…)
 L’accord postural et l’attention à la gestualité (synchronisation posturale, reprise
gestuelle,…)
 L’écoute de la langue sensorielle utilisée (gestes oculaires, vocabulaire sensoriel, gestualité
d’accompagnement,…).
Dans le questionnement d’explicitation l’acteur doit être dans une position de parole afin d’accèder
aux informations relatives au vécu de l’action. Cette position doit être systématiquement recherchée
et identifiée. Le guidant a pour tâche prioritaire, chaque fois que c’est nécessaire, de ramener
l’acteur vers cette position de parole.
Néanmoins, elle constitue un construit privé qui n’est observable que par le sujet lui- même. Il est
donc nécessaire, pour le guidant, de définir des indicateurs identifiables de la mise en œuvre de
cette position au niveau non verbal et verbal.

Les indicateurs non verbaux
o Le décrochage du regard (c’est l’indicateur privilégié du fait que le sujet tourne
l’attention vers son expérience interne).
o Le ralentissement du rythme de parole (ce qui est nommé est découvert au fur et à
mesure).
o La concordance du verbal et du non verbal (accord et compatibilité entre plusieurs
indicateurs).
Par ailleurs, il est souvent donné pr iorité à l’information non verbale dans la mesure où elle
est une communication en grande partie non consciente d’elle- même. Elle constitue donc
une communication non intentionnelle qui a moins de chance d’être travestie que le
contenu verbal.

Les marqueurs linguistiques
o La position formelle s’accompagne de généralisation (j’ai l’habitude de, je le fais
toujours, quelquefois, …), de règles d’action, du temps présent, d’expressions
renvoyant à un sens général (intérêt, méthodologie,…).
o La position de parole incarnée se manifeste sous la forme d’un vocabulaire
spécifique, descriptif, concret et relié à des connotations sensorielles (rythme de
parole ; moment daté : hier, il y a huit jours,…) ; centration sur les moments précis ;
description des perceptions et des états émotionnels ; situation dans le temps et dans
l’espace,…). L’acteur décrit son vécu en diminuant les commentaires.
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Tout entretien s’inscrit dans des cadres contractuels implicites et explicites qu’il est important de
connaître. La dissymétrie des rôles fait que le guidant peut être à l’origine de contraintes voire de
sollicitations. De plus, parce qu’il per met de pénétrer dans sa pensée privée (intimité psychique), un
contrat de communication explicite doit être recherché, tout au long de l’entretien, pour recueillir
l’accord de l’acteur sur les limites de son engagement dans l’échange.
Cette technique de questionnement suppose le respect d’un certain nombre de conditions pour viser
l’information pertinente par la position de parole (êtes-vous d’accord pour qu’on aille plus loin ou
seriez-vous d’accord pour préciser davantage ou plus en détail ce dernier point,…?).
III/2 – Définir et identifier la parole de l’acteur
La prise d’informations doit se mettre en place en recherchant des formulations directes et positives
(si vous en êtes d’accord, je voudrais que vous me décriviez comment vous avez traité ce dossier
ou comment avez-vous opéré pour résoudre ce problème,….).
Il convient alors de rechercher le moment remarquable ou important de l’acte pour aider l’acteur à
identifier le champ spécifique (la première ou la dernière fois que vous avez fait cela ; par exemple ;
une anecdote vécue par vous qui me permettrait de mieux comprendre,…). Il doit se référer à la
chose vécue par lui et, même si cette information est présente, elle n’est pas forcément disponible
en conscience.
Une des fonctions du guidant est alors d’identifier si l’acteur fait bien référence à la situation,
sachant que l’entrée par les actes ne doit pas écarter les autres entrées possibles.
La mise en mots va focaliser et découper le vécu dans différents domaines de verbalisation (cf.
document ci-dessous, qui constitue pour le guidant un pilote lui permettant de se repérer dans son
propre espace d’écoute), organisés en quatre groupes :




Descriptif des aspects du vécu (activité de réfléxivité sur la réalité).
o Emotionnel (centré sur la personne).
o Sensoriel (sensations vécues du corps).
o De la pensée (aperception, conscience du fonctionnement mental).
o De l’action (succession d’actions élémentaires que le sujet a mis en œuvre pour
atteindre le but).
Conceptuel (réflexion et prise de distance par rapport au concret).
Symbolique (signes figuratifs)
Imaginaire (point de départ vers un monde des symboles, de l’imagination,… ).
APERCEPT IF
EMO TIO N
SYMBO LIQ UE
ACTION
VECU
CRITERES
VALEURS
CROYANCES
EXPERI ENCE
SAVOI R
I MAGIN AIRE
CONNAISSANCES
CO NCEPTS
T HEORIES
PASSE
FUT UR
Gr ex - C ath erin e L e H ir - Explic itatio n
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Une fois la verbalisation canalisée sur la description d’un vécu de l’action, il est nécessaire
d’effectuer de nouvelles différenciations. Toute action se situe dans un ordre chronologique, dans un
contexte donné et comporte des jugements, des opinions et des commentaires.

Au centre du schéma se situe l’action vécue (pour questionner le procédural : comment
avez vous fait, qu’est ce que vous avez fait,…).

L’axe vertical repère le rapport du sujet à son vécu et rassemble toutes les informations
concernant :
o En haut, les variables de la situation -les contextes, les circonstances,
l’environnement- (pour questionner le contexte : où, quand, avec qui, avec quoi, dans
quelles circonstances, dans quel état d’esprit,…).
o En bas, les évaluations subjectives de la réalisation de l’action (pour questionner les
jugements : qu’en pensez-vous, qu’en pensiez-vous, quelle impression cela vous a
fait, qu’en gardez vous, que croyez vous, qu’est-ce que cela vous a fait,…). Bien
qu’elles s’inscrivent bien dans la tâche spécifiée, elles ne donnent aucune information
sur le faire ou sur le procédural.

L’axe horizontal quant à lui repère le lien entre la réalisation pratique de l’action et ce qui
peut lui être relié :
o A droite, la dimension intentionnelle (pour questionner l’intentionnel : dans quel but,
pour quel motif, dans quelle intention, que visiez vous, …).
o A gauche, la dimension des savoirs théoriques (pour questionner le déclaratif : sur
quoi vous basiez vous, quelle règle avez vous respectée, utilisée, appliquée, mise en
œuvre, que disait la consigne, la règle,…).
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III/3 – Accompagner l’acteur dans son évocation
Hor mis la capacité à identifier et repérer les manières dont s’exprime l’acteur, le guidant doit
conduire et accompagner l’acteur durant l’entretien :
 En ralentissant le rythme de la parole pour permettre à l’acteur d’accéder plus facilement à
son expérience interne (attendez…je vous propose de prendre le temps de retrouver plus
complètement cette situation, prenez le temps…d’y être,…). Pour recueillir la description du
vécu, le guidant doit placer l’acteur au plus près de ce moment . Pour favoriser le souvenir,
il est nécessaire que l’acteur se remette mentalement dans le contexte à la fois émotionnel
et environnemental présent au moment de l’événement
 En faisant spécifier le contexte de la situation (bien que mineures par rapport à ce qui a été
fait, ces informations sont sensoriellement fondées)
 En faisant spécifier les sensations ressenties (éléments contrastés, questions alternatives,
associées ou dissociées, détaillées ou globales…)
o Visuelles
o Auditives
o Kinesthésiques
Le schéma ci-dessous propose une classification fonctionnelle des décisions de relance. Autrement
dit, à partir des informations données par l’acteur, le guidant doit prendre une décision selon quatre
axes possibles :
Encourager la verbalisation en cours
Dans cette situation, le guidant laisse l’acteur s’exprimer. Il facilite la verbalisation en adoptant
une synchronisation gestuelle et posturale, en gérant les silences et en produisant des
relances minimalistes (reformulations en écho par exemple).
Il doit vérifier qu’il s’agit toujours d’une action singulière, réelle et spécifiée. Dans le cas où
l’information paraîtrait insuffisante ou qu’elle pourrait être élargie, il convient de relancer.

Focaliser
Cette étape vise à délimiter et à préciser un point sur lequel il faut revenir ou s’attarder car il
est porteur de sens et de pertinence (Je vous propose de me parler de ce moment qui a été
intéressant pour vous). La pratique a démontré que cette manière de procéder, qui paraît peu
précise, produit des résultats remarquablement pertinents pour l’acteur.

Elucider
C’est le but même de la technique de l’entretien d’explicitation. Deux actions doivent être
réalisées de manière concomitante :
o Obtenir une description complète de la succession des actions élémentaires
réalisées ;
o Rendre intelligible la production d’une action particulière pour per mettre la mise
en évidence de ce qui en fait l’efficience.
Il convient d'inciter la description d’une observation faite par l’acteur, que cette observation soit
basée sur de la perception, c’est-à-dire qu’elle renvoie aux organes de sens (vision, audition,
odorat, goût, sensations propres à l’acteur), ou sur l’aperception, c’est-à-dire sur l’expérience
de sa propre pensée (je me disais, j’évoquais une image visuelle, auditive, …). Le recours à
des questions dites ouvertes (quoi, quand, où, comment,…) va privilégier la description.
L’analyse des gestes mimes (qui renvoie à des mouvements du corps) et des gestes relatifs
aux activités mentales ( métaphoriques) donne également des informations sur la structure
sensorielle de la représentation.
Il faut se rappeler que le questionnement d’explicitation porte sur les actions de l’acteur telles
qu’elles lui sont accessibles dans son expérience, mais pas sur les processus cognitifs qui
organisent ces actions. Dans la formulation des relances, le recours à la question « pourquoi »
est donc totalement à proscrire.

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Réguler
La structure du discours est généralement très révélatrice. Une expression limpide, fluide et
rapide est le signe qu’une action a déjà été réfléchie, et l’acteur parle alors de ce qu’il sait de la
manière de faire (description de la tâche à réaliser) et moins de sa manière réelle de faire
(description des stratégies adoptées). La régulation permet de continuer à tenter d’atteindre
l’explicitation. Cette fonction, mobilisable à tout moment contrairement aux modalités de
relances (focaliser et élucider) décrites ci-dessus, a pour finalité de rattraper les écarts
constatés.

EVOCATIONS DE
L’ACTEUR
(shéma de Pierre VERMERSCH)
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Le questionnement s’arrête lorsque le guidant a obtenu les informations qu’il recherchait ou lorsque
la verbalisation témoigne d’une pr ise de conscience de l’acteur sur les capacités qu’il a mobilisées
dans l’action.
Enfin, la verbalisation, qui constitue
avantageusement être complétée par :
IV/
une
source d’informations
très
importante,
peut

Des observations sur les comportements (ce que fait ou ne fait pas l’acteur en situation).
Une des caractéristiques de l’observation est qu’il faut être physiquement présent ou
disposer de moyens d’enregistrement des séquences. Ce dernier point occasionne un
investissement important pour l’exploitation des données, mais présente aussi l’avantage,
par des visionnages successif s, d’observer des aspects qui n’étaient pas prévus au départ.
C’est cependant une pratique plus adaptée à un travail de recherche fondamentale qu’à la
capitalisation de situations de travail.

L’analyse des traces. Constituées par des informations formalisées plus ou moins
permanentes produites par l’activité, on les trouve par exemple dans les dossiers de projets
(actions, tâches décrites sur différents axes de travail). Mais il s’agit d’informations partielles
de l’activité qui nécessitent une interprétation quelquefois délicate, car la valeur d’une
information dépend aussi de l’interprétation qu’on lui donne.
CONCLUSION
Ce document tente d’apporter une information sur l’entretien d’explicitation, technique particulière
destinée à faciliter la description d’une action vécue par un acteur et plus particulièrement sur son
déroulement. Composé d’un ensemble d’outils complémentaires et de cadres théoriques, cette
méthode requiert un accompagnement. L’aide d’un guidant doit per mettre, par des reformulations et
des relances simples, un enchaînement des prises d’informations et l’élucidation complète de la
description de l’action.
Une formation expérientielle est nécessaire pour approcher cette technique d’aide à la verbalisation
d’une action. Ce savoir-faire demande beaucoup de pratique pour être maîtrisé. Cela exclue donc la
possibilité de le réserver à une population d’utilisateurs ne maîtrisant pas les techniques de base de
questionnement d’un entretien, se situant en position hiérarchique et qui ne serait pas impliquée
dans un important projet de capitalisation des connaissances.
Au delà de ce projet, ces techniques se mettent en œuvre et se développent dans d’autres
environnements professionnels (bilan de compétences, remédiation professionnelles, coaching,…)
et trouvent également des ouvertures dans l’aide aux personnes dans la prise de conscience de
leurs ressources personnelles.
Cette prise de conscience accompagnée, à partir du vécu de l’acteur, semble plus concrète que des
interprétations apportées par des tests. De nature inductive, ces derniers conduisent à la formulation
de pronostics, alors que la centration sur le vécu professionnel de l’acteur en situation per met un
véritable retour sur l’expérience (André CHAUVET).
Dans le cadre des mesures gouvernementales sur la validation des acquis de l’expérience par les
établissements d’enseignement supérieur (cf. article 4 du décret n°2000-590 du 24 avril 2002), pour
la délivrance d’une certification professionnelle (cf. décret n° 2002-615 du 26 avril 2002) et des
chantiers en cours conduits par le Ministère dans ce domaine, l’entretien d’explicitation constitue
une piste intéressante pour la formation de spécialistes.
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V/
FORMATION « TECHNIQUES D'AIDE A L'EXPLICITATION »
A partir des lectures des différents ouvrages et des travaux publiés, notre première hypothèse de
travail, avec Guy PANISSE, était de découvrir comment un supérieur hiérarchique pouvait repérer
les savoir-faire expérientiel de ses collaborateurs.
Une séance professionnelle organisée, le 30 novembre 2001, présentait deux études de cas
réalisées par des collègues volontaires du CEDIP ( Martine GANTER COUDERC et Valérie DEBAT
sur le thème « présentation de la mission de consultant à un nouvel arrivant » et Charles
BORDERES et Jean- Pierre ROGISSA RD sur le thème « élaboration du budget global de
fonctionnement »). Ce travail a per mis de démontrer que le passage de la théorie à la pratique dans
cette relation était très complexe.
Alors même que des grilles de recueil et d’analyse d’activité servaient de supports aux acteurs, il
persistait une très grande interrogation sur la qualité et la valeur des données exprimées. Elles
apparaissaient être plus l’indication de représentations que l’évocation précise des actions réalisées.
Elles avaient été produites mais l’acteur ne savait pas décrire comment il les avait réalisées. En
quoi, le questionnement n’avait-il pas permis un véritable retour réflexif ? Qu’est-ce qui avait
empêché la mise en mot de l’action vécue ? Identifier des comportements peut-il aider à décrire des
procédures et ne faut-il pas aller également à la recherche des processus ?
Pour le moindre, les choses n’étaient vraiment pas clarifiées au sortir de ce groupe miroir.
J’ai participé à une formation organisée en deux modules par le GREX, du 3 au 6 décembre 2001,
et du 22 au 24 janvier 2002, Le groupe de participants était composé de psychologues, de
consultants en formation, d’orthophonistes, d’ergonomes et de chercheurs du CNRS. L’objectif
pédagogique de cette formation était d'acquérir les techniques d'aide à l'explicitation pour :
o Faire décrire le déroulement d'une action vécue dans sa dimension procédurale.
o Favoriser et/ou provoquer la prise de conscience.
o M'informer de ce qu'une personne a fait.
o Aider quelqu'un à s'informer de ce qu'il a fait.
Le programme s’est déroulé en grande partie autour de pratiques et de mise en situation. Ont été
abordés les thèmes suivants :
 Mettre en place les conditions de l'explicitation
o Faire spécifier une tâche ou une situation
o Poser un contrat de communication
o S'accorder posturalement et verbalement
o Se référer à l'action dans sa dimension procédurale
 Développer des compétences d'observation de la position de parole incarnée
o Repérer les signes non verbaux
o Distinguer les différents types d'expressions verbales
 Faire décrire l'action
o Connaître et utiliser la structure de l'action
o Faire mettre en mots la gestualité
o For muler des questions centrées sur l'action
o Contourner les dénégations
L’intervenante, Catherine Le HIR, est enseignante certifiée en PNL, psychothérapeute et formatrice
certifiée aux techniques d’aide à l’explicitation.
Une nouvelle séance de professionnalisation a été organisée le vendredi 28 juin 2002 pour
présenter et valider cette étude.
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VI/
BIBLIOGRAPHIE
 Ebauche de référentiel de l’entretien d’explicitation
Armelle BALAS
Revue EXPLICITER n°27
décembre 1998
 La prise de conscience de sa manière d’apprendre
Armelle CHANEL BALAS
Thèse de doctorat Université Grenoble II juin 1998
 Apprendre par l’expérience n° 100/101
Education Per manente
décembre 1989
 Faisons un rêve et que cela devienne réalité
Catherine LE HIR
Revue EXPLICITER n° 34
mars 2000
 L’entretien d’explicitation en formation initiale et en formation continue
Pierre V ERMERSCH Collection Pédagogies
septembre 1994
 Les pratiques de l’entretien d’explicitation
Pierre V ERMERSCH et Maryse MAUREL
octobre 1997
Collection pédagogies
 Détacher l’explicitation de la technique d’entretien ?
Pierre V ERMERSCH Revue EXPLICITER n°25
mai 1998
 L’entretien d’explicitation
Pierre V ERMERSCH ESF
avril 2000
nouvelle édition
VII/ GLOSSAIRE
Pierre V ERMERSCH a élaboré un glossaire en août 1999 dont il présente de la manière suivante :
« Le vocabulaire utilisé par l’explicitation s’origine dans plusieurs champs théoriques : un des plus
apparent est celui de la théor ie de la pr ise de conscience de Piaget dont je ne finis pas de découvrir
la richesse et la fécondité. De manière probablement plus masquée, la psychologie du travail a
apporté les concepts permettant l’analyse de la tâche ou la description séquentielle du déroulement
de l’action. De nombreuses pratiques thérapeutiques ont suggéré leur part de vocabulaire. Il en va
de même des approches de la communication, et tout particulièrement la P N L et l'hypnose
ericksonnienne. La couche la plus récente est liée à ma rencontre avec la philosophie
phénoménologique principalement, husserlienne.
Ce glossaire est destiné à ceux qui souhaitent approfondir les concepts liés à l’explicitation et qui
cherchent une définition sans vouloir reprendre tout le livre paru en 1994, dans lequel la plupart sont
déjà présentés de façon plus intégrée au texte. Les renvois à l'intérieur du glossaire sont signalés
par un astérisque * ».
(glossaire format pdf)
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