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SOLUTIONS
AUTOMATISMES
QUAND LES ROULEMENTS
SONT VICTIMES
DES VARIATEURS…
Depuis quelques années, on observe une augmentation de la dégradation des roulements des
moteurs présents sur les systèmes d’entraînement. Dans certains cas, ce sont les variateurs de vitesse
électronique qui en sont responsables : leur fréquence de commutation élevée est en effet à l’origine
de courants de palier haute fréquence qui peuvent être amenés à traverser les roulements, provoquant
des phénomènes de piquage.
Pour prévenir ce phénomène, il faut “soigner” la mise à la terre de l’équipement et permettre aux courants de circulation de reboucler vers le châssis du variateur sans passer par les roulements. L’amplitude
de ces courants peut également être réduite en utilisant des câbles moteurs symétriques ou en filtrant
la sortie du variateur. En isolant les roulements du moteur, on interrompt le parcours emprunté par les
courants de palier.
■
l arrive que quelques mois seulement
après la mise en route d’un entraînement de puissance à vitesse variable,
les roulements du moteur doivent
être remplacés. La dégradation prématurée
de ces roulements peut être le fait des courants de palier, courants parasites induits
dans l’arbre moteur et qui circulent dans
les roulements. Ces courants de palier présentent plusieurs formes. Les plus connus
sont les courants de palier basse fréquence (BF) induits par l’asymétrie des
moteurs. Les nouvelles règles pratiques de
conception et de fabrication des moteurs
permettent quasiment de s’affranchir de
ces courants. Et puis il y a les courants de
palier haute fréquence (HF), apparus il y
a quelques années avec l’arrivée des nouvelles générations de variateurs de vitesse. Les variateurs électroniques de vitesse
actuellement disponibles sur le marché
I
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doc. ABB
Les variateurs de vitesse
génèrent des impulsions de
courant à haute fréquence
qui s’écoulent à travers les
impédances de fuite du système d’entraînement. Si on
ne prend pas de précautions
suffisantes, ces courants de
fuite peuvent passer à travers les roulements, provoquant une usure prématurée de ceux-ci.
MESURES 717 - SEPTEMBRE 1999
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DÉSÉQUILIBRE INSTANTANÉ DES TENSIONS APPLIQUÉES AU MOTEUR
1
0,5
0
-0,5
-1
BOUCLE DE MODE COMMUN D’UN ENTRAINEMENT MOTEUR + VARIATEUR
Phase A
Variateur
CMC
1
0,5
0
-0,5
-1
Phase B
1
0,5
0
-0,5
-1
Phase C
Câbles
Lc
Enroulement moteur
Lm
Cm
Vcm
CMC
Cc
Cin
Lg
Tension de mode commun VCM=Vphase–masse
1
0,5
0
-0,5
-1
Les variateurs électroniques de vitesse appliquent des trains d’impulsions
à chacune des phases du moteur. Comme le montre le schéma du bas, la somme
instantanée des trois phases n’est pas nulle. La tension résultante est appelée
“tension de mode commun” et sa fréquence est égale à la fréquence
de commutation du variateur. Cette tension est à l’origine de courants de fuite
à travers les impédances de fuite du moteur.
intègrent en effet des transistors de puissance IGBT qui présentent des commutations 20 fois plus rapides qu’il y a une
décennie. Avec leurs impulsions de tension très rapides et leurs fréquences de
commutation élevées, ces variateurs de
vitesse peuvent provoquer la circulation
d’impulsions de courant haute fréquence
(HF) dans les roulements. Si l’énergie de
ces impulsions est suffisamment élevée, il
y a transfert de métal entre les billes et les
pistes de roulement. Ce phénomène,
appelé “piquage”, se manifeste dans un
délai assez court après la mise en route des
systèmes d’entraînement (un à six mois)
et il impose le remplacement prématuré
du roulement.
C’est seulement récemment qu’on a commencé à comprendre ces problèmes. Chacun des éléments constitutifs de l’entraînement (moteur, réducteur et variateur
de vitesse) est un produit fiable de haute
technicité, avec un MTBF élevé (MTBF :
Moyenne des Temps de Bon Fonctionnement). Mais lorsqu’ils sont associés, il
s’avère indispensable de respecter certaines
règles d’installation.
MESURES 717 - SEPTEMBRE 1999
Boucle de mode commun simplifiée d’un variateur MLI (modulation à largeur
d’impulsions) et d’un moteur asynchrone. Le variateur joue le rôle de source
de tension de mode commun (Vcm). Le courant de mode commun s’écoule par
les inductances de mode commun du câble et du moteur (Lc Lm) et
les capacités de fuite entre les enroulements moteur et la carcasse moteur
(qui donnent ensemble Cm). De la carcasse moteur, il passe dans le circuit
de terre usine (d’inductance Lg). Lg reçoit également un courant de mode
commun de la capacité de fuite du câble Cc. Le châssis du variateur est
raccordé au réseau de terre usine et couple les courants de terre du courant
de mode commun via les capacités de fuite entre le variateur et la carcasse,
refermées (Cin) sur la source de tension de mode commun.
Les courants de palier
ont plusieurs causes
La tension de palier haute fréquence (HF)
peut être générée de plusieurs manières
différentes. Les principaux facteurs
d’influence sont la taille du moteur et son
mode de mise à la terre.
Asymétrie du flux dans les gros moteurs.
Dans les gros moteurs, il y a une distribution asymétrique du flux. Comme les
impulsions de tension envoyées par le
variateur contiennent des fréquences élevées, les inductances de fuite des enroulements moteur favorisent le cheminement et l’écoulement des courants à la
terre. Si la tension ainsi induite entre les
bouts d’arbre est suffisamment élevée
pour vaincre l’impédance du film d’huile dans les roulements, des courants de
palier HF se mettent à circuler.
Lorsque le courant de fuite retourne au
variateur via le circuit de mise à la terre,
il cherche à emprunter l’itinéraire de
plus faible impédance. Si l’arbre moteur
est mis à la terre via la machine entraînée, une partie du courant de fuite peut
circuler par les roulements, l’arbre et la
machine entraînée, pour revenir jusqu’au variateur. Ce type de courant de
palier est appelé “courant à la terre de
l’arbre”.
Dans les petits moteurs, les courants de
palier HF peuvent être dus à la présence
de capacités de fuite internes du moteur.
Ce phénomène survient si l’arbre du
moteur n’est pas mis à la terre via la
machine entraînée.
Déséquilibre instantané de l’alimentation du moteur. Les courants de palier
sont liés à l’existence d’un circuit de mode
commun dans le système d’entraînement.
En fonctionnement normal, un réseau
d’alimentation type délivre une tension
sinusoïdale équilibrée et symétrique, c’està-dire que la somme vectorielle des trois
phases est toujours égale à zéro. Il est donc
normal que le neutre soit à un potentiel
de 0 V. Toutefois, cela n’est pas le cas avec
un variateur triphasé MLI (Modulation de
Largeur d’Impulsions) qui génère des
impulsions de largeurs différentes, de sorte qu’il est impossible d’arriver à chaque
instant à un équilibre parfait entre les
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phases (ce qui n’empêche pas que les tensions peuvent être équilibrées au niveau
de leur amplitude maximale). La tension
résultante est appelée “tension de mode
commun”, à laquelle le moteur est sensible. Les courants dus à la présence de
cette tension s’écoulent à travers les impédances de fuite présentes entre tout dispositif raccordé aux phases du variateur
(câbles moteur et enroulements moteur,
par exemple) et la terre.
Fronts de tension. Les impulsions de tension rapides produites par les variateurs
modernes contiennent des fréquences élevées (plusieurs kHz, voire plusieurs MHz).
Les variateurs électroniques de vitesse
n’échappent pas à la règle et ils comportent
donc
un
convertisseur
alternatif/continu incorporant, comme
aujourd’hui tous les convertisseurs, une
électronique de découpage haute fréquence. Les courants haute fréquence créés
à l’intérieur de ce convertisseur s’écoulent
par les capacités de fuite formées naturellement entre les conducteurs (véhiculant
ces courants) et la masse du système
d’entraînement.
Dès lors que deux éléments conducteurs
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En s’écoulant à travers les roulements, les courants de palier
provoquent le
piquage des pistes
de roulement.
sont séparés
par un isolant, il y a un effet capacitif. Autant dire
que les capacités de fuite sont présentes
partout. Par exemple, une spire d’enroulement moteur isolée de la carcasse par un
vernis et un isolant d’encoche a une capacité par rapport à la carcasse du moteur.
Des capacités de fuite se forment ainsi
naturellement entre les conducteurs et la
terre d’un système d’entraînement.
On sait que l’impédance d’une capacité
est inversement proportionnelle à la capacité et à la fréquence. Les capacités à l’inté-
rieur du moteur sont très faibles. Aux
basses fréquences (BF), elles présentent
une forte impédance, ce qui bloque les
courants de circulation BF. Il en va autrement pour les hautes fréquences, auxquelles travaillent les variateurs. En effet,
aux très hautes fréquences, même les
faibles capacités constituent un chemin de
faible impédance pour la circulation des
courants. Ces courants font partie du courant de mode commun total et empruntent un parcours appelé “boucle de mode
commun”.
Plusieurs de ces boucles se forment dans
tout système d’entraînement. Leur
nombre dépend de la configuration du
système et des règles d’installation mises
en œuvre. Elles partent toutes de la source de tension de mode commun, à savoir
le variateur lui-même, où les fronts de tension de l’onduleur se traduisent, aux fréquences élevées, par des impulsions de
courant de forte intensité.
Le courant de mode commun ne cherche
pas naturellement le réseau de terre sous
la surface du bâtiment ou tout transformateur de puissance et sa terre associée.
Il s’écoulera cependant par ceux-ci ou par
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CONFIGURATIONS DE CÂBLES “MOTEURS” SYMÉTRIQUES
blindage
Conducteur PE
Conducteur PE et blindage
Pour limiter les courants de palier, il est recommandé d’utiliser uniquement des câbles moteur symétriques. Le
conducteur de terre (terre de protection, PE) du câble moteur doit être disposé de manière symétrique pour éviter
les courants de palier à la fréquence fondamentale. Cette symétrie est obtenue avec un conducteur PE enveloppant tous les conducteurs de phase ou avec un câble constitué de trois conducteurs de phase et trois conducteurs
de terre parfaitement symétriques.
le parcours de plus faible inductance (couplages capacitifs parasites) jusqu’au bus
CC, via le châssis du variateur.
L’impédance de palier varie
au cas par cas
La circulation de courants dans les roulements peut varier rapidement, car elle
dépend de l’état physique du roulement
à un moment donné. Par exemple, une
capacité de fuite dans le roulement n’est
entretenue que tant que les billes des roulements sont recouvertes d’huile ou de
graisse et ne sont pas conductrices. Cette
capacité, où siège la tension d’arbre induite, peut être court-circuitée si la tension
de palier franchit le seuil de claquage ou
si une bille perce le film d’huile et entre en
contact avec les deux pistes de roulement.
A très petite vitesse, les roulements présentent un contact métallique car les billes
ne sont pas sur un film d’huile.
En général, l’impédance de palier dicte le
niveau de tension où le roulement commence à être conducteur. Cette impédance est une fonction non linéaire de la charge, de la température et de la vitesse de
rotation du roulement, et du lubrifiant
utilisé. Elle varie au cas par cas.
Prévenir les avaries liées
aux courants de palier HF
Les courants de palier HF peuvent être
maîtrisés en veillant à la qualité du câblage et de la mise à la terre, en rompant
les boucles de courants de palier et en
amortissant le courant de mode commun HF. Selon le type de courants de
palier HF, on privilégiera telle ou telle
solution.
La règle de base pour prévenir tous les
types de courant HF est une bonne mise à
la terre. Les méthodes standard de mise à
la terre des équipements visent essentiellement à réaliser une liaison d’impédance
suffisamment faible pour protéger le maté-
Mesurer les courants de palier HF
■ Si vous suspectez la présence de courants
de palier HF, des mesures peuvent être faites
sur site pour contrôler l’existence de boucles
de courant. Cette opération peut cependant
s’avérer difficile car le courant de mode commun peut circuler dans des organes inhabituels, tels que les arbres en rotation. Il s’agit
de détecter les impulsions de courte durée et
rapides dans un environnement bruyant (tant
au niveau électrique que mécanique), opération qui exige un matériel spécial et un personnel expérimenté. Pour ce faire, ABB utilise
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un capteur de courant de type Rogowsky,
flexible, sans fer, de conception spéciale pour
la mesure des courants de palier HF. Le groupe a acquis une certaine expérience dans ce
domaine puisqu’à ce jour, il a contrôlé plus de
900 entraînements à vitesse variable dans le
monde entier et dans des applications très
différentes. Bien entendu, il s’agissait d’installations à problème, les utilisateurs ou les installateurs n’ayant pas respecté les règles de
l’art...
riel et les personnes des défauts du réseau.
Un entraînement à vitesse variable peut
être efficacement mis à la terre et protégé
des hautes fréquences du courant de mode
commun si certaines règles élémentaires
d’installation sont respectées :
- Utiliser uniquement des câbles moteur
symétriques. Le conducteur de terre (terre de protection, PE) du câble moteur doit
être disposé de manière symétrique pour
éviter les courants de palier à la fréquence fondamentale. Cette symétrie est obtenue avec un conducteur PE enveloppant
tous les conducteurs de phase ou avec un
câble constitué de trois conducteurs de
phase et trois conducteurs de terre parfaitement symétriques.
- Définir un itinéraire court et de faible
impédance pour le retour du courant de
mode commun vers le variateur. Pour ce
faire, la méthode la plus efficace et la plus
aisée consiste à utiliser des câbles moteur
blindés. Le blindage doit être continu et
en matériau bon conducteur HF (cuivre
ou aluminium). Les raccordements aux
deux extrémités devant être faits avec une
reprise de masse sur 360°.
- Ajouter des liaisons d’équipotentialité
entre les différents équipements et les
points connus de référence à la terre, en
utilisant des fils de cuivre tressés de 50 à
100mm de large car les conducteurs de
section plate constituent un parcours de
plus faible inductance que les conducteurs
de section ronde. Ces liaisons d’équipotentialité doivent être réalisées là où une
discontinuité est suspectée entre le niveau
de terre du variateur et celui du moteur.
Par ailleurs, il peut être nécessaire de réaliser l’équipotentialité entre les carcasses
du moteur et de la machine entraînée
pour court-circuiter la circulation de courants dans les roulements du moteur et de
la machine entraînée.
L’interruption des boucles de courants de
palier se fait dans le moteur en isolant le
ou les roulements. L’amortissement du
courant de mode commun HF côté variateur peut être réalisé avec des filtres spéciaux. Constructeur de variateurs et de
moteurs, ABB peut proposer la solution la
mieux adaptée à chaque cas et fournir des
instructions détaillées pour la mise à la
terre et le câblage.
Philippe Brem
Responsable produits vitesse variable
ABB Industrie
ABB Industrie Drives
15, rue Sully
69150 Décines
Tél. : 0472054037 - Fax : 0472054030
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