ulaire - E

Transcription

ulaire - E
L
e dilemme de la prévention primaire.
Les résultats de HOPE-3, présentés lors du congrès de l’ACC, sont l’occasion de réfléchir à toutes
les questions soulevées par le concept de prévention primaire. HOPE-3 est une étude ambitieuse,
menée de façon indépendante par Salim Yusuf avec la volonté de s’assurer que les conclusions
de l’étude s’appliquent dans différents contextes ethniques, économiques et sociologiques.
Elle a évalué sur une période de plus de 5 ans deux traitements de prévention (une statine, la
rosuvastatine à la dose intermédiaire de 10 mg et un double traitement antihypertenseur par
une association de candésartan et hydrochlorothiazide), chez des personnes d’au moins 55 ans
pour les hommes et 60 ans pour les femmes, ayant un risque cardiovasculaire relativement peu
important. De fait, les taux d’événements dans le groupe placebo de l’étude est faible, environ
1 % par an (0,8 % chez les femmes, 1,1 % chez les hommes), ce qui correspond quasiment au
risque d’une population générale ayant le même profil d’âge et de sexe, en France. Les résultats
sont négatifs pour ce qui est du traitement antihypertenseur, dont l’effet n’est bénéfique que
chez les personnes ayant au départ une pression artérielle modérément élevée (> 143 mm Hg
de pression systolique). Ils sont, en revanche, très favorables pour la statine, avec une réduction
de 24 % du premier critère principal, touchant ses trois composantes : décès cardiovasculaire
(-11 %), infarctus du myocarde (-35 %) et AVC (- 30 %) ; la mortalité globale est diminuée de 7
% (diminution non significative sur le plan statistique). En outre, les hospitalisations pour motif
cardiovasculaire sont réduites de 30 %, sans qu’il y ait aucune augmentation des hospitalisations
pour raison non cardiovasculaire. La tolérance du traitement par statine est bonne ; à 5 ans, 75 %
des sujets sont toujours sous statine (à titre de comparaison, 73 % des sujets du groupe placebo
reçoivent toujours le placebo de l’étude) ; 1,3 % des participants du groupe rosuvastatine et
0,6 % de ceux sous placebo ont eu une interruption temporaire de traitement pour symptômes
musculaires (différence statistiquement significative). Il n’y a pas plus de cas d’apparition de
diabète dans le groupe rosuvastatine, mais plus de sujets ont été opérés de la cataracte. La
tolérance doit toutefois être interprétée en sachant que 13 % des sujets ayant participé à la phase
d’un mois de run-in sous traitement actif n’ont finalement pas participé à l’étude, un quart
d’entre eux en raison d’effets secondaires du traitement.
Que faire de ces résultats en pratique ? Le concept-même de prévention pose question : il s’agit,
par définition, de s’adresser à des personnes bien portantes, sans doléance particulière, en leur
proposant de mettre en œuvre des mesures destinées à éviter qu’elles développent au fil du
temps telle ou telle maladie. Les mesures proposées peuvent être de l’ordre de l’hygiène de vie
(bien manger, si tant est qu’on sache réellement ce que cela veut dire, faire de l’exercice physique,
ne pas fumer …) ou comporter la prise de médicaments ; elles peuvent, ou non, nécessiter la réalisation d’examens qui vont du simple examen physique pratiqué par un docteur, à des examens
diagnostiques d’imagerie, parfois même invasifs. On comprend donc tout de suite les enjeux de
la prévention primaire : il faut être certain de proposer à ces personnes qui se sentent bien des
mesures efficaces sur l’objectif fixé (par exemple la réduction des événements cardiovasculaires),
qui n’entraînent pas par elles-mêmes de risques dans d’autres domaines (à quoi servirait de
diminuer le risque d’infarctus, s’il s’agissait d’augmenter celui de cancer ?) et qui seront donc susceptibles d’augmenter l’espérance de vie. Mais le cahier des charges ne s’arrête pas là : la baisse
du risque ciblé, s’accompagnant de l’augmentation de l’espérance de vie, doit se faire sans altérer la qualité de vie. En effet, à quoi bon gagner quelques mois ou même années d’espérance de
vie, s’il faut pour cela vivre dans l’inconfort ou à l’opposé de son inclinaison personnelle ?
On comprend donc l’importance du choix personnel dans toute décision de prévention primaire, particulièrement s’il s’agit d’utiliser des médicaments. Plus encore que le coût des traitements (qu’on peut imaginer s’équilibrer avec les économies réalisées en termes d’hospitalisations
évitées), c’est bien la décision de chacun de savoir comment il/elle souhaite vivre qui doit primer.
Nicolas Danchin
Rédacteur en chef
Yusuf S. et al. NEJM 2016; DOI: 10.1056/NEJMoa1600176 - Lonn E. et al. NEJM 2016; DOI: 10.1056/NEJMoa1600175
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AVRIL 2016
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