Chapitre 1 : Private equity : une classe d`actifs alternatifs

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Chapitre 1 : Private equity : une classe d`actifs alternatifs
Dr Mondher Cherif
Economiste, Universitaire HDR, France, Associate Risk Manager (The Institute USA)
Private Equity professional (PEIG USA), certified Islamic Banker (Bahrein)
Email : [email protected]
Introduction au Private equity : Une classe d’actifs alternatifs
L’objectif de article est de présenter les principales caractéristiques du private equity, qui fait désormais partie
intégrante des actifs dits alternatifs, très demandés par les investisseurs du fait des performances intéressantes
et des avantages fiscaux qu’il leur offre, en même temps que la possibilité d’une meilleure diversification de
leurs placements. Le capital investissement joue un rôle essentiel pour renforcer les fonds propores des start
um hihg tech (via le capital-risque), de financer la croissance des entreprises, de faciliter leur reprise /
transmission (LBO) ou encore de les restrcuturer (distress capital). C’est un instrument de finanement en
fonds propres (equity) qui complète l’offre financière apportée par les banques (dette moyen et long termes).
Pourquoi le private equity ?
Le capital-investissement (private equity) est devenu une composante significative des portefeuilles des
investisseurs institutionnels avec une allocation représentant 5 à 10 % du total des actifs. Les investisseurs
avertis réalisent que le private equity offre beaucoup de bénéfices dont :
• une faible corrélation avec les investissements traditionnels (actions, obligations, etc.) :
• des rendements historiques élevés ;
• des avantages fiscaux (pour les family offices et les autres investisseurs fortement imposables) ;
• une protection contre les fluctuations dans les valorisations à court terme associées aux actifs cotés ;
• la participation à un marché très dynamique et à fort potentiel de croissance.
Les investissements dans les fonds de private equity appartiennent aux placements alternatifs les plus connus
et les plus répandus avec les hedge funds, les fonds de Real Estate et autres fonds spécialisés dans les matières
premières et ressources naturelles.
Corrélation private equity/actifs cotés
D’après une étude réalisée par Cambridge Associates, le private equity apparaît faiblement corrélé avec les
actifs cotés. Ainsi, par exemple, le capital-risque (venture capital) affichait une corrélation de moins 17 % par
rapport aux obligations américaines et seulement une corrélation de 38 % avec l’indice S & P 500. Du fait de
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cette faible corrélation, investir dans le private equity peut être un moyen efficace pour améliorer les
rendements d’un portefeuille et/ou de réduire sa volatilité globale. Par ailleurs, il existe également une
corrélation entre les différents segments du private equity eux-mêmes (venture capital, capitaldéveloppement, LBO, Mezzanine capital et distress capital), ce qui est intéressant, car la diversification permet
dans ce cas de réduire les risques à l’intérieur d’un portefeuille de private equity.
Qu’est-ce qu’un fonds de private equity ?
Les fonds de private equity sont un « mix » entre du capital disponible pour être investi, et des professionnels
qui investissent dans des entreprises non cotées à fort potentiel pour générer de la valeur. Les investissements
peuvent être réalisés sous la forme d’actions, d’obligations, d’obligations convertibles, d’avances en comptes
courants, etc. Les fonds sont généralement des véhicules d’investissement avec un sponsor, des investisseurs :
des institutionnels et des family offices (Limited Partners ou LP) et une société de gestion (General Partner ou
GP).
Un fonds de private equity connaît plusieurs étapes tout au long de son cycle de vie : La levée des fonds
(Fundraising), la période d’investissement, la période de suivi des investissements avec une recherche de
création de valeur (monitoring) et la cession des lignes de participation (Exit strategy)
Les véhicules d’investissement du private equity et la 20-80 Rule
En France comme en Tunisie le véhicule d’investissement le plus couramment proposé aux investisseurs
institutionnels est le Fonds commun de placement à risque (FCPR). Au plan international, les opérations de
private equity sont effectuées au travers de véhicules d’investissement du type « Limited Partnership » dont les
mécanismes s’apparentent à ceux des FCPR et qui représentent la structure standard. Lors de la souscription,
chaque souscripteur (investisseur ou gestionnaire) reçoit des parts de FCPR de catégories différentes conférant
des droits hiérarchisés. En termes de remboursement, les « investisseurs souscripteurs » sont prioritaires par
rapport aux « gestionnaires souscripteurs ». En plus du montant nominal souscrit, ils peuvent toucher un
rendement prioritaire ou « hurdle rate » à un taux déterminé (en général entre 6 % à 8 % par an, uniquement
pour les parts A et B). Le solde est ensuite distribué, après remboursement du nominal des parts souscrites par
les gestionnaires souscripteurs, en général selon la règle 80/20, soit 80 % aux investisseurs et 20 % aux
gestionnaires. Notons que, préalablement au partage des plus-values, les gestionnaires peuvent rattraper le
montant versé aux investisseurs au titre de rendement prioritaire, grâce à un versement compensatoire ou
« catch up ». Par ailleurs, une clause de « claw back » peut être prévue par le règlement. Cette clause organise
le blocage de tout, ou d’une partie des plus-values distribuées aux gestionnaires souscripteurs, jusqu’à ce que
les investisseurs souscripteurs aient reçu le remboursement de leur investissement nominal et leur rendement
prioritaire.
La structure duale
L’idée principale de la structure duale est de dissocier la Société de gestion (SG) du véhicule d’investissement.
Les membres de la société de gestion sont des professionnels qui gèrent grâce à un mandat de management
délivré par le fonds d’investissement, les participations de ce dernier. La structure duale permet à la société de
gestion de durer au-delà de la vie du fonds, qui est par construction limitée dans le temps (une dizaine
d’années) et de prévenir les risques. En effet, la structure duale :
• protège les actionnaires contre la mauvaise exécution du mandat de gestion ;
• protège les actionnaires contre les conflits d’intérêts potentiels et sépare les pouvoirs (les managers de la SG
dépendent uniquement du conseil d’administration de la SG composé généralement des promoteurs du fonds
et des managers) ;
• identifie clairement les compétences et les responsabilités (les investisseurs institutionnels transfèrent la
responsabilité de la gestion des participations à une SG indépendante). Les responsabilités sont partagées
autour des organes de décision (conseil d’administration du fonds et de la SG, comité d’investissement) ;
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• fidélise les membres de la société de gestion dont elle assure également la continuité.
La sélection de la société de gestion et relations LP/GP
Comme indiqué plus haut, les caractéristiques du private equity imposent de se doter d’un partenaire
disposant d’une expertise avérée dans la sélection des fonds, qui a démontré sa capacité à accéder à des fonds
de tout premier ordre, qui peut constituer un portefeuille diversifié avec des stratégies d’investissement et des
objectifs de rendement les plus divers, et qui dispose d’un historique de performances adéquat. La sélection
scrupuleuse et prudente de la société de gestion revêt une importance cruciale. Un aspect primordial est donc
l’évaluation critique d’un partenaire du fonds et son historique de performance par la direction. L’expérience
avérée et la continuité au niveau de la composition de l’équipe de direction sont particulièrement importantes.
L’autre aspect essentiel est la concordance entre les stratégies de placement d’un partenaire et les objectifs du
fonds lui-même.
Les coûts de gestion
On constate une certaine tendance à l’uniformisation des modes de rémunération des équipes de gestion. La
rémunération est généralement composée :
• d’une commission annuelle (frais de gestion) variant de 2,5 % à 3 %. Elle est basée sur le montant des
souscriptions durant la phase de l’investissement ;
• d’un intéressement ou carried interest qui représente généralement 20 % du montant total des plus-values,
nettes des moins-values réalisées par le fonds. Cet intéressement est fonction des performances effectuées et
n’est versé à la société de gestion qu’après que les investisseurs aient été remboursés de l’intégralité de leurs
apports et souvent qu’ils aient reçu des distributions leur assurant un rendement prioritaire (hurdle rate) qui
peut varier de 6 à 8 %. Afin de bénéficier de ce « carried interest », les gestionnaires du fonds doivent souscrire
à des parts spécifiques qui concrétisent leur prise de risque financière et leur implication personnelle dans la
vie du fonds. Généralement, seuls les « key men » (managers clés) en bénéficient afin de les fidéliser
(convergence des intérêts LP/GP). En plus de la commission versée à la société de gestion, le FCPR prend à sa
charge les honoraires du commissaire aux comptes et la commission du dépositaire, les frais de transactions
liés aux participations, les frais réels de constitution du FCPR avec une limite maximale préfixée (entre 0,5 % et
1 % en moyenne de l’engagement global).
Les sorties des investisseurs : IPO ou la sortie en bourse
Les conditions de sortie des capital-risqueurs font partie intégrante de l’opération et sont donc arrêtées dés la
mise en place de celle-ci. Il s’agit là d’une des caractéristiques principales de ce type d’opération, qui explique
notamment, de par la complexité de l’exercice, le soin que l’on consacre au montage juridique de l’ensemble. Il
est d’usage que les conditions de sortie soient organisées par le pacte d’actionnaires (Shareholders Agreement)
. Le terme de la « sortie » recouvre toutes les possibilités qui permettront aux investisseurs de céder leur
participation : introduction en Bourse, cession de l’entreprise à un industriel ou à de nouveaux investisseurs en
capital-investissement (sortie stratégique). La sortie idéale est l’IPO : Initial Public Offering qui s’accompagne
d’une très bonne valorisation de la cible en portefeuille ce qui permet aux investisseurs de réaliser un TRI ou un
Multiple d’investissement élevés. Le Nasdaq Américain est la référence en tant que marché financier dédiés
aux entreprises high tech à fort potentiel de croissance. Les expériences Britannique avec l’AIM (Alternative
Investment Market) et française avec le marché Alternext sont un bon exemple à suivre pour la Tunisie qui a
crée son marché alternatif dédié aux PME et qui gagnerait beaucoup à être plus dynamique et plus reconnu par
nos PME tunisiennes et nos start up innovantes à la recherche de fonds propres pour diversifier leur sources
de financement et financer leur croissance et leurs dépenses de R&D.
Les prochains articles aborderont les questions importantes du phénomène de la courbe en « J », de la mesure
des performances des fonds, de l’ingénierie financière derrière les opérations de LBO ou encore la notion du
coût du capital pour les entreprises cotées et non cotées.
Cet article est paru dans Entreprises Magasine. Pour allez plus loin : le capital-risque, seconde édition, Banque
Edition, 2008.
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