Lire un extrait - Editions Persée

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Lire un extrait - Editions Persée
À LA RENCONTRE D’ANNA
Keutgen Valérie
À la rencontre d’Anna
Roman
Éditions Persée
Ce livre est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages et les événements sont le
fruit de l’imagination de l’auteur et toute ressemblance avec des personnes vivantes
ou ayant existé serait pure coïncidence.
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© Éditions Persée, 2016
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AVANT-PROPOS
Il est très difficile de donner naissance à une fiction. Vous vous imaginez l’histoire dans votre esprit, voyez nettement les personnages que
vous voulez créer, leur donnez vie et voulez les contrôler, les guider,
leur donner un sens. Vous commencez l’ébauche dans votre tête, savez
comment poursuivre et finir l’histoire. Une idée bien précise de ce qu’il
doit leur arriver. Pendant des jours, des semaines, voire des mois, cette
histoire se construit dans votre tête, vous subjugue, vous fait rêver,
vous emporte. Vous n’avez alors qu’une idée en tête, celle de la coucher sur un support, que d’autres personnes que vous, les connaissent,
les aiment comme vous les aimez.
Vous êtes alors devant votre page blanche et n’avez aucun doute sur
la naissance de votre nouvelle. Vous commencez par créer le premier
personnage, lui donnez vie, un physique, un caractère, un passé et des
envies. Vous la contrôlez, la guidez et vous êtes heureux, car elle est là
devant vous cette personne que vous aviez dans votre esprit, enfin libérée de sa cage. Vous continuez et l’histoire délivre d’autres personnes
qui reçoivent leurs propres caractéristiques, leurs propres envies, leurs
peurs.
Et là, vous commencez la véritable trame, celle que vous vous étiez
imaginée dans votre petit esprit étriqué durant tout ce temps, et vous
êtes heureux, la voyez prendre enfin vie sous vos yeux. Cependant, les
jours passent, les semaines et les écrits continuent, alors vos personnages prennent petit à petit le contrôle et vous ne l’aviez pas prévu.
Ils s’échappent et l’histoire prend une proportion que vous n’aviez pas
imaginée.
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Leurs décisions ne sont plus les vôtres, leurs désirs prennent d’autres
directions, vous les suivez, curieux de savoir vous-même ce qu’il se
passera. L’auteur devient alors le lecteur. Ils vous fascinent et parfois
vous effrayent. Leur évolution ne dépend plus de vous, mais de leurs
choix, leurs peurs, leurs envies.
Je ne me prétends pas auteur ou écrivaine, non, loin de moi cette
idée. Je ne suis qu’une personne qui a énormément d’imagination et
qui aime créer des histoires, parfois rocambolesques, oui, je l’avoue.
Cette nouvelle était importante pour moi, car Anna et Émeline sont un
peu mes amies imaginaires.
J’avais au départ pensé l’écrire en deux livres, l’un du point de vue
d’Anna et l’autre d’Émeline. Une fin totalement différente avait initialement été prévue et, qui je l’avoue, me plaisait bien plus.
Mais comme, je viens de vous l’expliquer, quelques lignes plus haut,
Anna et Émeline m’ont prise au piège et m’ont imposé leurs choix qui
au cours de l’histoire sont devenus plus qu’évidents. Me guidant au fur
et à mesure, chacune, une main posée sur mon épaule de part et d’autre,
me racontant l’une et l’autre leurs pensées du moment, me reprenant
quand j’empruntais la mauvaise route.
Je vous propose donc de venir lire mon histoire qui, au fil des pages,
est devenue la leur.
Valérie Keutgen
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ÉMELINE
Émeline ne sut pourquoi, mais pressentait au plus profond d’ellemême que sa vie allait changer ce jour-là. En sortant de la voiture,
elle avait décidé d’aller se promener sur la digue, au lieu de suivre
sagement son compagnon à la recherche d’un endroit où dormir. Elle
inspira profondément l’air frais tout en fermant les yeux, essayant par
la même occasion de se vider la tête de toutes pensées devenues un peu
trop envahissantes.
Un vent frais balaya ses cheveux, rabattant ses longues mèches
noires au travers de son visage. « J’aurais dû penser à les attacher »,
se dit-elle, essayant de les regrouper sous son écharpe. Elle resserra
les pans de sa veste et offrit un peu son visage à la pâle chaleur du
soleil matinal. Les cris d’un enfant la sortirent de ses pensées, jouant
avec les vagues et sautant dans l’eau, il n’avait apparemment aucune
envie d’écouter ses parents qui lui couraient après tout en essayant de
le rattraper. L’horizon accapara de nouveau son attention et essaya vainement de distinguer les côtes anglaises. Elle mit sa main en visière et
plissa les yeux, mais une légère brume l’en empêchait.
— Vous pourrez l’apercevoir en fin de matinée, le brouillard se sera
dissipé d’ici là.
Elle se retourna, légèrement surprise. Une femme s’était approchée
sans qu’elle ne la remarque. Elle était seule et son regard portait encore
plus loin que le sien. Émeline avait reconnu l’accent du Massachusetts
et décida d’engager la conversation.
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— Massachusetts ? demanda Émeline un peu curieuse.
— Oui, Boston et vous ?
— Française, mais j’ai principalement vécu en Angleterre.
— Anna Thompson, enchantée.
— Émeline Demoine, de même.
Elle ne comprit pas pourquoi sa voix la captivait, elle y détecta un
léger sentiment d’amertume. Une tonalité un peu rauque et grave, mais
assez féminine pour ne pas la confondre avec celle d’un homme, un
timbre qu’Émeline affectionnait particulièrement.
— Vous êtes venue ici en vacances ? insista Émeline.
— Non, j’avais simplement besoin de revoir cet endroit. Et vous ?
— Je suis ici pour le tournage d’un film, enfin… à Paris. Nous passons deux jours à Wimereux avant de nous y rendre. Mon compagnon
voulait voir cet endroit, un de ses amis lui en avait fait l’éloge.
— Actrice, murmura Anna en la dévisageant.
Anna avança sa main et repoussa quelques mèches de cheveux
lui barrant le visage, elle frôla sa joue et Émeline frissonna sous le
contact de ses doigts. Anna fronça légèrement les sourcils et esquissa
un sourire.
— Vous avez des yeux magnifiques, lui dit-elle d’une voix douce.
Le geste d’Anna sembla suspendu dans l’air, enroulant une mèche
noire entre ses doigts. Émeline ne la quitta pas des yeux, fascinée par
sa prestance. Ce simple geste l’intimida et sentit le trouble s’emparer
d’elle. Elle ne fit rien pour s’y soustraire, se lovant dans cette nouvelle
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sensation. Le regard d’Anna se détourna pour se perdre à nouveau dans
le vide.
— Merci, murmura Émeline encore sous l’émotion.
Sa réponse fut à peine audible et ne fut pas certaine qu’elle l’ait
entendue, tant le vent soufflait. Elle reporta son attention sur la plage.
— Cet enfant aura raison de ses parents avant la fin de la promenade, lâcha-t-elle alors pour détourner la conversation, mais aussi pour
la retenir un peu auprès d’elle.
— C’est certain, répondit Anna en détournant les yeux de l’horizon.
M’est avis qu’ils devront lui prendre une bonne douche en rentrant,
dit-elle sur un air de défi.
Elles virent le petit garçon courir tout en voulant éviter une vague
un peu plus forte que les autres, se prendre les pieds dans ceux de son
père, les faisant choir tous les deux dans l’eau, elles rirent de bon cœur.
— Ah ! Vous avez gagné, mais ils seront deux sous la douche, répondit Émeline heureuse de la voir rire. Rappelez-moi de ne plus parier
contre vous !
— Est-ce une invitation ?
Émeline souleva un sourcil devant sa question, sentant son cœur
battre plus vite. Elle sursauta lorsqu’elle sentit un bras lui enserrer la
taille et l’attirer brutalement en arrière. Elle regarda son compagnon et
sourit à demi, ce qui n’échappa aucunement à l’Américaine. Il n’eut
aucun regard pour la femme et fit comme si elle n’existait pas, écrasant
la bouche d’Émeline d’un pseudo-baiser qui montrait aux alentours
qu’elle lui appartenait.
— Tu m’as fait peur !
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— J’ai trouvé un hôtel parfait en front de mer, nous pourrons
prendre la chambre à partir de quatorze heures. Allons-nous promener
en attendant.
Il referma la main sur sa nuque et l’emmena sans un mot de plus.
Émeline fit un petit signe d’au revoir envers Anna qui lui répondit en
souriant. Émeline le suivit un peu à contrecœur.
— Tu aurais pu lui dire bonjour, dit-elle en se dégageant.
— Pardon ?
Devant le ton de sa voix, elle répéta ses mots d’une voix un peu
moins assurée et il éclata de rire.
— Je n’ai d’yeux que pour toi, ma chérie, je ne l’ai pas vue,
pardonne-moi.
Elle n’insista pas, la journée venait à peine de commencer et ne
voulait pas la gâcher en le contrariant. Il s’arrêta devant un menu pour
prévoir leur prochain dîner et Émeline en profita pour jeter un œil derrière elle. Elle ne comprenait pas pourquoi ses pensées s’étaient tout à
coup concentrées sur cette femme, elle ne s’imaginait pas éprouver une
quelconque attirance pour elle. Mais le simple fait de repenser à son
regard posé sur elle, lorsqu’elle avait écarté ses cheveux, la fit frissonner. « C’est vrai qu’elle était belle avec ses yeux gris. » songea-t-elle.
Elle secoua la tête. « Calme-toi ! Mais qu’est-ce qui te prend d’avoir
de telles pensées ! » Malgré tout, elle se surprit à sourire à cette simple
idée. Gardant sur sa joue le souvenir de la chaleur de ses doigts, elle y
posa les siens comme pour les toucher.
— Nous mangerons ici à midi, le menu m’a l’air correct et les prix
aussi. Bien, allons voir ce que nous réserve cette charmante petite ville.
Émeline n’eut pas d’autre choix que de le suivre, même si elle se
sentait un peu fatiguée par le voyage. Ils flânèrent de vitrine en vitrine,
visitant chaque galerie de peinture qu’il pouvait trouver. Il réussit à
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dénicher un musée sur le débarquement de 1944 et en profita pour
entrer le visiter. L’heure du dîner approcha et elle sentit son estomac se
contracter, elle sut qu’il était temps d’aller au restaurant.
— Anthony, j’aimerais aller manger, s’il te plaît.
— D’accord, ma belle.
Il se pencha doucement pour l’embrasser et effleurer ses lèvres,
elle se blottit contre lui. Elle se sentait bien dans ses bras, recherchant
un peu de chaleur supplémentaire en glissant les mains sous sa veste.
Plus grand qu’elle, les yeux bleus délavés, cheveux blonds légèrement
ébouriffés, le visage large et une barbe naissante, il possédait la carrure type de l’américain du sud des États-Unis. Elle était tombée sous
son charme lors d’une soirée de charité et ils ne s’étaient plus quittés
depuis. Elle était alors âgée de vingt et un ans, l’âge d’or, lui répétait
souvent son père.
La sensation de bien-être fut de courte durée, car il la prit par la
main et l’entraîna vers la digue. Ce n’était pas un romantique dans
l’âme, mais un homme du Texas élevé par une famille dont le père était
un patriarche incontesté. Il avait donc toujours tendance à prendre les
décisions sans demander l’avis des autres. Elle se sentait malgré cela
en confiance avec lui, comme si rien ne pouvait l’atteindre, même si
parfois, c’était usant de le laisser faire à tout bout de champ.
— Dans quel hôtel allons-nous dormir ? demanda-t-elle curieuse.
— Le Majestic, il se trouve sur la digue. Nous sommes passés
devant, tout à l’heure.
Pendant qu’ils s’installaient à table, Anthony lui parla de son travail, mais son regard était attiré par l’horizon derrière lui. Imbu de luimême, il ne remarquerait de toute manière pas que son attention n’était
pas rivée sur lui. Elle pouvait enfin distinguer les falaises anglaises,
elle sourit, se souvenant de la remarque d’Anna. Anthony le prit pour
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un encouragement et continua de raconter sa petite anecdote professionnelle qu’il fut seul à trouver amusante.
Émeline avait la particularité de pouvoir s’isoler dans ses pensées,
même si elle était entourée de bruit, et cela, sans que personne ne s’en
aperçoive. Quand elle voulait la paix, elle s’y réfugiait avec délice. Et
ces derniers temps, cela devenait de plus en plus fréquent, car Anthony
devenait trop envahissant, ne lui laissant plus d’intimité sauf lors de ses
déplacements. Il avait beaucoup changé depuis la mort de son père, cinq
mois auparavant. Au début, la différence était minime, mais ensuite, il
avait voulu tout connaître de son emploi du temps et ne la laissait plus
respirer, l’étouffant par sa présence et ses remarques parfois blessantes.
Un bruit de verre que l’on renverse sur une table la tira de sa rêverie. Elle vit alors une jeune serveuse agenouillée, essayant tant bien
que mal d’éponger le pantalon de sa cliente. Elle reconnut Anna avec
qui elle avait discuté le matin même. Elle remarqua son regard amusé
devant la serveuse qui tentait vainement de s’excuser tout en frottant
ses jambes à l’aide d’un essuie de cuisine. Anna se leva et entra dans le
restaurant. Émeline la suivit des yeux remarquant que le comportement
de la serveuse avec Anna était pour le moins étrange.
Elle entendit vaguement Anthony passer la commande pour elle et
reprit ses esprits.
— Non, j’aimerais beaucoup goûter à votre pavé de saumon, s’il
vous plaît.
— Mais, enfin ma chérie, tu ne vas pas prendre ça, s’exclama-t-il
inquiet. Le saumon n’est peut-être pas frais, on ne sait jamais. Non, elle
prendra le steak du chef.
— Notre saumon est frais, monsieur, je vous l’assure ! répondit la
serveuse offensée.
— Anthony, je sais ce que je veux manger et ce sera du poisson,
dit-elle agacée.
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La serveuse prit note et débarrassa la table avant de leur apporter
les boissons.
— Pourquoi prends-tu plaisir à me contredire devant cette fille ?
— Quoi ?
Elle le regarda surprise par sa réaction. Il affichait une expression de
colère mal dissimulée qui l’a mis mal à l’aise. Elle se leva en prétextant
une envie de se rafraîchir le visage, mais il saisit son poignet et le serra
cruellement. Émeline grimaça sous la douleur.
— Tu me fais mal !
Elle soutint son regard et il finit par la lâcher. Elle frotta sa peau
endolorie et continua son chemin vers les toilettes du restaurant. Elle
poussa doucement la porte et entra sans faire attention, ne pensant
qu’au changement de comportement d’Anthony avec elle. Lorsqu’elle
releva les yeux, elle vit la jeune serveuse appuyée sur le meuble du
lavabo et contre elle l’Américaine, la main sous son jeans lui caressant
l’entrejambe en un lent mouvement de va-et-vient, et de l’autre refermant les doigts sur le bas de son visage, le tournant sur le côté.
Elle ne put bouger sur le moment et regardait le couple qu’elles formaient. Anna effleurait la peau de cette fille avec douceur. Et la manière
dont ses lèvres glissaient à la naissance de sa gorge pour remonter à sa
bouche fit naître au creux de ses reins une chaleur depuis longtemps
oubliée. Elle se mordit la lèvre inférieure et se mit à envier cette jeune
rousse à la peau blanche tachetée.
N’ayant pas fait de bruit en entrant, elle ressortit doucement et resta
un moment appuyée contre la porte, fermant les yeux et essayant de
reprendre son souffle. Ce ne fut pas tant le fait de les avoir vues qui
l’empêchait de respirer, mais autre chose, chose qu’elle ne comprit pas
sur le moment. Elle porta la main à sa gorge et tenta de faire glisser cette boule qui encombrait sa trachée. Une femme s’approcha et
demanda à passer, Émeline lui expliqua qu’il y avait un souci et qu’il
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valait mieux prendre celle des hommes. Sans poser d’autre question, la
cliente s’engouffra dans les toilettes voisines. Après avoir repris doucement ses esprits, elle frappa deux coups secs sur la porte et retourna
s’assoir auprès d’Anthony.
Leur assiette fut servie quelques minutes plus tard et sans un mot ils
se mirent à manger. L’instant suivant, Émeline entrevit Anna réintégrer
sa place. Elle l’observa un moment, mince, mais athlétique, la bonne
quarantaine, cheveux mi-longs châtain clair presque blonds, la peau
légèrement hâlée par une exposition au soleil modérée et elle était un
peu plus grande qu’Émeline.
Elle épia Anna du coin de l’œil et vit la jeune serveuse retourner
auprès d’elle, le sourire aux lèvres. Elle remarqua qu’Anna lui effleurait discrètement la main du bout des doigts, d’un geste subtil et anodin, en lui tendant l’argent de l’addition tout en lui souriant. Une vague
de jalousie soudain l’envahit, sans réellement pouvoir l’expliquer, lui
contractant l’estomac. Quand Anna se leva, leurs regards se croisèrent
et Anna esquissa un petit sourire à son intention, Émeline rougit et
baissa rapidement les yeux. Elle acheva son dîner sans un seul mot,
complètement perdue dans ses pensées.
Le soir venu, Émeline se coucha au côté d’Anthony. Il lisait encore
un de ses dossiers en cours. Travaillant dans l’immobilier et promoteur
hors pair, il avait réussi à faire progresser son entreprise très rapidement. Aujourd’hui, il se consacrait exclusivement à la vente de résidences de luxe, laissant les contrats moins lucratifs à ses employés.
Elle se glissa doucement dans le lit et éteignit la lumière de son côté,
elle ferma les yeux et commença à se détendre. Elle l’entendit poser
son dossier et ferma aussitôt la lampe de chevet pour se rapprocher
d’elle aussi vite. Émeline n’avait pas réellement envie ce soir, mais elle
savait qu’il était inutile de lui dire non, car lorsque lui avait décidé de
commencer, rien ne l’arrêtait, que vous le vouliez ou non.
Elle le sentit se coller contre elle et il glissa vivement la main entre
ses jambes. Elle grimaça de douleur dans l’obscurité, mais elle ferma
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les yeux et le laissa faire. Il écrasa ses lèvres, lui laissant à peine le
temps pour respirer. Émeline gémit de douleur quand il empoigna son
sein à pleine main sans aucun égard pour elle. Trop excité, il s’inséra
entre ses jambes et s’introduisit en elle sans s’inquiéter de savoir si
Émeline était prête ou non, la douleur fut telle qu’elle en eut le souffle
coupé. Souffrant sous ses brutaux va-et-vient, elle écarta un peu plus
les jambes, espérant soulager le frottement douloureux qu’elle ressentait. Quand il eut fini, sans un mot et heureux de s’être satisfait, il lui
tourna le dos et s’endormit immédiatement.
Émeline sortit lentement du lit et alla prendre une douche. Elle
laissa l’eau couler sur son visage, une douleur cuisante continuait à
pulser en elle. Elle posa la main sur son sexe, appuyant légèrement
pour essayer de calmer un peu cette sensation de brûlure qui la rongeait
de l’intérieur. Émeline utilisa le pommeau de douche, pour y envoyer
un peu d’eau tiède et ainsi se soulager. Son estomac se révulsa et ne
comprit pas pourquoi. Elle prit appui sur le carrelage de la douche et le
frappa du poing, respirant profondément en fermant les yeux. Elle se
mit alors à pleurer et resta sous l’eau pour en camoufler le bruit. Une
fois calmée, elle retourna se coucher en essayant de ne pas trop bouger
pour ne pas le réveiller.
Le lendemain matin, elle s’éveilla seule, Anthony était parti pour
un rendez-vous professionnel et il ne rentrerait pas avant la soirée. Elle
fut soulagée, car elle redoutait ses envies matinales, surtout après la
douleur du soir précédent. Elle se redressa, mais ne put rester assise
bien longtemps. Il n’avait jamais été aussi brutal, mais le simple fait
de l’avoir contrarié au restaurant l’avait mis de mauvaise humeur. Elle
pensait à juste titre qu’il avait voulu lui faire payer.
Elle prit son petit-déjeuner en salle vers neuf heures. Tout en buvant
son chocolat chaud, elle fouilla la digue du regard et eut, l’espace d’un
instant, l’envie d’y apercevoir Anna. Elle secoua la tête doucement.
« Mais qu’est-ce que tu recherches, ma pauvre fille ! Elle a simplement
voulu être gentille avec toi. » Tout en essayant de se convaincre de sa
naïveté, Émeline décida de rester encore un peu dans le salon.
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