Université de Provence CNRS-INSH (Aix-Marseille I)

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Université de Provence CNRS-INSH (Aix-Marseille I)
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Vague B (2012-2015)
Unité mixte de recherche 6570
TELEMME
Temps, Espaces, Langages,
Europe Méridionale-Méditerranée
(Projet 2012-2015)
Responsable : Jean-Marie GUILLON
Université de Provence
(Aix-Marseille I)
CNRS-INSH
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I. PRÉSENTATION
1. Eléments de cadrage
2. Mise en œuvre du nouveau projet quadriennal
II. PROJETS DE RECHERCHE 2012-2015
Introduction
Nouveaux programmes 2012-2015
A. Axes
1 – Environnement, paysages et mutation des territoires
2 – Individus, identités, corps social
3 – Mobilités, circulations, échanges
4 – La culture comme projet
5 – Les espaces du politique (XVIIIe-XXIe siècles)
B. Opérations communes
1 – Atelier transversal « Histoire et sciences sociales »
2 – Journées Jeunes chercheurs
3 – Initiatives diverses et récurrentes
C. Opérations ponctuelles et complémentaires
1 – Opérations ponctuelles
2 – Réponses aux appels d’offres 2010
3 – Pôles MMSH et actions IUF
I. PRÉSENTATION
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1. 1 Eléments de cadrage
Nous ne reviendrons pas sur le cadre dans lequel s’inscrit le travail de
l’unité, ni sur les principes qui guident son fonctionnement, pas plus que
sur les choix, notamment « stratégiques », qui ont été faits (mobilité
internationale, traduction, aide au montage de projets, etc.), qui seront
prolongés et, si possible, renforcés. Tout ceci a été exposé dans la partie
« Bilan » et nous y renvoyons. L’autoévaluation, qui résulte de l’analyse
distanciée que nous avons tirée des activités de l’unité depuis 2006, indique
les améliorations à apporter pour réaliser les objectifs fixés.
Préparer un quadriennal suppose d’avoir une vision sur les évolutions
prévisibles en matière de forces susceptibles d’être mobilisées. En première
analyse, l’unité, bien insérée au sein de la MMSH, menant une politique
volontariste de partenariats en son sein et à l’extérieur, ne souhaite pas
d’évolution de son périmètre. Ses effectifs resteront stables, même si des
mutations pourront affecter son potentiel. Trois membres émérites vont
sortir de ses éléments statutaires dans le prochain quadriennal et deux
professeurs d’histoire contemporaine passeront en éméritat, mais la
politique de l’Université dans nos domaines permet d’envisager
sereinement le renouvellement des enseignants-chercheurs affectés à
TELEMME. D’ores et déjà, cinq recrutements ont eu lieu en 2010 (deux en
histoire moderne, deux en géographie et aménagement, un en espagnol).
Ajoutons que deux enseignants-chercheurs liés jusqu’ici à d’autres
laboratoires viennent rejoindre notre unité pour le nouveau quadriennal. Le
seul point noir est du côté du recrutement de chercheurs CNRS. Le départ à
la retraite d’un CR1 relevant de la section 35 risque de signer la quasidisparition de l’ethnolinguistique au sein de l’unité. Ajoutons que le
renforcement des activités de l’unité nécessite celui de l’équipe technique
et administrative par nos tutelles.
L’ambition de TELEMME est d’être un laboratoire de référence pour
l’étude de l’espace nord-méditerranéen dans les compétences qui sont les
siennes. Dans le cadre de la MMSH, TELEMME doit être le point d’appui
scientifique, ou éventuellement la tête de pont, des réseaux nationaux et
internationaux qui entendent intervenir dans les thématiques où l’unité a
fait ses preuves sur cet espace. C’est pourquoi, dès son origine, TELEMME
a choisi d’orienter ses travaux dans une perspective transnationale et
comparative, dans la longue ou la moyenne durée. Son espace de référence
est, par sa situation et son histoire, un lieu d’observation privilégié pour les
chercheurs en SHS, historiens et géographes en particulier, tant les
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questions qui sont au cœur des sociétés humaines semblent s’y
concentrer hier comme aujourd’hui. L’objectif des travaux de l’unité est de
répondre à certaines d’entre elles, notamment à celles qui concernent les
échanges économiques et culturels, les migrations, les tensions, crises et
risques, les usages des territoires et les problèmes de gouvernance, les
représentations de soi et des autres.
Le projet quadriennal que nous présentons pour 2012-2015 obéit donc
à cette ligne et à quelques principes directeurs qui relèvent de notre
compréhension de la « culture d’UMR » :
- Renouvellement des questionnements et adaptation des structures ;
- Refus de la dispersion et de l’habillage de logiques individuelles ;
- Souci d’améliorer le positionnement national et, surtout,
international de l’unité ;
- Volonté de transdisciplinarité, en particulier, au sein du laboratoire et
dans la MMSH ;
- Ouverture à des partenariats externes (géographique, disciplinaire,
institutionnelle) dans le respect de l’aire géographique de référence ;
- Rotation et partage des responsabilités.
1. 2 Mise en œuvre du nouveau projet quadriennal
Méthodologie
Le projet quadriennal 2011-2016 résulte d’un travail collectif selon
une tradition bien établie dans l’unité. Son élaboration a donné lieu à
débats au sein du laboratoire et à échanges de propositions. Cette
préparation a été encadrée par un conseil scientifique en amont (bilan sur la
mise en place et le fonctionnement du quadriennal en cours) et trois
conseils de laboratoire (cadrage de la préparation, validation de la première
remontée de propositions, validation finale).
Afin de mieux adapter le vocabulaire aux réalités, le conseil de
laboratoire a entériné une relative évolution des structures. Plutôt que de
réunir les groupes de recherche dans des « programmes » aux contours trop
imprécis, le nouveau quadriennal sera organisé en axes, plus souples, tandis
que les programmes proprement dits seront le fait des équipes qui les
composent. La coordination des initiatives et la répartition du financement
sur crédits de l’UMR se fera au niveau du conseil de laboratoire (réunion
annuelle de programmation, projection pluriannuelle pour les initiatives
lourdes de type colloque), puis au niveau des axes, conformément au mode
de fonctionnement actuel.
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Le projet est le fruit des propositions de recherche des membres de
l’unité. Pour être retenues, ces propositions devaient être portées par au
moins cinq membres statutaires de l’unité, chaque membre pouvant
participer pleinement à deux équipes (et ponctuellement à d’autres). Ce
dispositif a permis d’aboutir, au terme d’un processus d’échanges de deux
mois, à la structuration de treize équipes.
La procédure d’élaboration du projet, dont l’objectif était d’éviter
l’émiettement et l’individualisation des propositions, et sa mise en œuvre
supposent la participation à ce cadre collectif. Celui-ci n’empêche
nullement l’unité d’encourager les initiatives particulières, comme son
dispositif en témoigne aussi. C’est ainsi que, pour permettre à des
propositions émanant notamment de jeunes chercheurs ou de nouveaux
entrants dans l’unité ou pour favoriser les projets émergents (avec en
perspective la préparation de réponses à des appels d’offres, type appels
MMSH, PEPS ou ANR), le programme quadriennal a intégré la possibilité
de constituer des ateliers spécifiques/exploratoires ou d’expérimentation,
constitués d’au moins deux membres de l’unité et soumis à l’accord du
conseil de laboratoire. Les ateliers programmés sont susceptibles d’être
complétés par d’autres en cours de quadriennal.
Transversalités
Au terme de ce processus, l’unité a abouti au regroupement des treize
équipes en cinq axes de recherches comprenant de deux à quatre équipes,
plus, pour le moment, deux ateliers qui sont de nature différente (l’un
comme porteur de projet ANR, l’autre comme espace transversal de
réflexion). La plupart de ces équipes sont en codirection, associant parfois
jeune chercheur et membre plus ancien. Pour chaque équipe sont indiqués
les noms des membres statutaires qui la composent, les membres associés
et les doctorants qui ont participé à l’élaboration du projet. Les autres
associés ou doctorants sont en cours d’inscription dans les équipes. Comme
il se doit, les adhésions ou associations ultérieures à l’unité se feront sur la
base de la participation effective aux programmes en cours.
Conformément aux orientations générales de l’unité, la plupart de ces
équipes associent des chercheurs de domaines différents (périodes ou
spécialités). On remarquera en particulier la présence dans plusieurs d’entre
elles de géographes ou d’aménageurs et d’historiens. Ajoutons que cette
association qui relevait antérieurement d’un certain volontarisme s’est faite,
pour le quadriennal que nous proposons, de façon naturelle.
Les équipes définissent leur travail de façon autonome, mais les axes
réunissent des thématiques voisines ayant vocation à se féconder et à se
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redéployer dans des objets communs. Ce dispositif induit des échanges
scientifiques et des initiatives communes entre équipes et axes. La
participation de la plupart des membres de l’unité à deux équipes, qui ne se
trouvent pas forcément dans le même axe, contribue à assurer la cohésion
de l’ensemble.
L’autoévaluation, qui n’était pas pratiquée jusqu’ici, devra être mise
en place au niveau es équipes.
II. PROJETS DE RECHERCHE 2012-2015
Introduction
Le projet présenté s’inscrit dans une certaine continuité, tout en
assurant le renouvellement des problématiques en phase avec le
mouvement général des recherches dans nos domaines.
La continuité est fondée sur les domaines de compétence de l’unité, sa
structuration en équipes reliées les unes aux autres par de multiples
passerelles, le souci partagé de la transdisciplinarité (toutes les équipes
associent des spécialistes de périodes différentes, cinq d’entre elles sont
communes aux géographes et aux historiens). Plusieurs équipes sont issues
de programmes ANR, ou adossées à ces programmes ou à des dotations IUF.
Le renouvellement est sensible. Il se traduit par des inflexions
thématiques pour les équipes qui prendront le relais de groupes existants.
Ces inflexions découlent des questions soulevées durant le quadriennal en
cours ou répondent au souci de participer à un mouvement scientifique plus
général. Le renouvellement est encore plus net, évidemment, pour les
nouvelles équipes, dont il faut noter toutefois que les projets ont été parfois
« testés » à l’occasion d’initiatives prises, elles aussi, pendant le quadriennal
en cours. C’est ainsi que la mise sur pied d’une équipe largement tournée
vers l’étude des migrations (axe 3) a été anticipée par la journée d’études en
hommage à Émile Temime, le 18 février 2009, que nous ne voulions pas
purement commémorative. Elle a été suivie par le projet transversal MiMed
(Lieux et territoires des migrations en Méditerranée XIXe-XXIe siècles),
sélectionné par la MMSH dans le cadre de son appel à projets 2009, porté
par TELEMME avec la participation de deux autres laboratoires de la
Maison. Il en va de même pour l’équipe « Figures du temps » (axe 4) dont
la problématique s’est confirmée après la journée offerte à Bernard Cousin,
ancien directeur de l’unité, le 28 janvier 2009, et qui était centrée sur les
« Récits, figurations et projections de l’avenir ».
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Le renouvellement se marque aussi dans la prise de responsabilités de
onze membres de l’unité qui n’en avaient pas jusqu’à présent. Plusieurs
d’entre eux sont arrivés récemment dans l’unité (quatre dans le quadriennal
actuel). On notera que, sur vingt-six responsables d’équipes, seize sont des
collègues femmes (pour douze en 2008-2011).
NOUVEAUX PROGRAMMES 2012-2015
AXE 1 – Environnement, paysages et mutation des territoires
1 - Environnement, aménagement, développement durable, Europe
méridionale Méditerranée
Responsables : Béatrice Mésini, Sylvie Daviet, Martine Chalvet
2 - Paysages & terroirs méditerranéens (PATERMED)
Responsable : Paul Minvielle
AXE 2 – Individus, identités, corps social
1 - Le Corps : expériences, identités, culture du Moyen Âge à nos jours
Responsables : Anne Carol, Isabelle Renaudet
2 - Écritures de soi. Mots et configurations de l’expérience. Méditerranée–
Afrique. XVe-XXIe siècle - Équipe commune TELEMME/CMMC/CEMAF
Responsable Telemme : Isabelle Luciani
3 - Genre et transgressions : pratiques, stratégies, représentations dans
l’espace euro-méditerranéen (XVIe-XXIe siècles)
Responsables : Karine Lambert, Anne Montenach
4 - Lien social, lien moral : éthique et politique (XIe-XVIIe siècle)
Responsables : Lucien Faggion, Laure Verdon
AXE 3 – Mobilités, circulations, échanges
1 - Migrations, circulations et territoires en Méditerranée XIXe-XXIe siècle
Responsables : Virginie Baby-Collin, Stéphane Mourlane
2 - D’une rive l’autre : les économies méditerranéennes et leurs mondes de
l’époque moderne à nos jours
Responsables : Gilbert Buti, Olivier Raveux
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- Atelier Temps et Territoires de la désindustrialisation en Europe, du
traité de libre-échange (1860) à l’Union européenne (ANR en projet)
Responsable : Philippe Mioche
AXE 4 – La culture comme projet
1 - Figures du temps, projections de l’avenir. Récits, images, cultures
(espace euro-méditerranéen. XVIIe-XXIe siècle)
Responsables : Maryline Crivello et Jean-Luc Arnaud
2 - Ville, culture et grands projets
Responsables : Boris Grésillon, Pascale Froment
AXE 5 – Les espaces du politique (XVIIIe-XXIe siècles)
1 - Culture et politique au XVIIIe siècle et sous la Révolution française
Responsable : Christine Peyrard
2 - Imaginaires nationaux et identités territoriales : du local au
transnational (réseaux, médiations et transferts culturels en Méditerranée
des Lumières à nos jours)
Responsables : Paul Aubert, Eve Giustiniani
3 - L’information dans l’Europe méridionale, du siècle des Lumières au
temps présent
Responsable : Elisabel Larriba
AXE 1 - Environnement, paysages et mutation des territoires
Cet axe, formé de deux équipes, prolonge les travaux antérieurs de
l’unité sur la « production de territoire » (les deux programmes 1 des
quadriennaux 2004-08 et 2008-11). Il est orienté nettement vers les
questions d’environnement, de protection et d’aménagement durable dans
une optique pluridisciplinaire. Il entend répondre à des questions qui se
posent de façon aiguë sur le pourtour méditerranéen. Rassemblant
principalement géographes et aménageurs de l’unité, il intègre aussi une
dimension historienne, en particulier dans son équipe Environnement,
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aménagement, développement durable, Europe méridionale Méditerranée
qui résulte de la fusion de deux projets, dont l’un portant spécifiquement
sur l’histoire de l’environnement en Méditerranée.
1 - Équipe Environnement, aménagement, développement durable
Europe méridionale Méditerranée
Responsables : Béatrice Mésini, Sylvie Daviet, Martine Chalvet
Composition de l’équipe : Sandrine Alinat, Laurence Américi, Angéla Barthes, Martine
Chalvet, Sylvie Daviet, Éric Fabre, Pascale Froment, Béatrice Mésini
Doctorants : Romain Monge, Antoine Grandclément
Chercheurs associés : Marylène Bonfillon, Aurélien Delpirou, Nicole Girard
Une approche transdisciplinaire
L’équipe, composée d’historiens, de géographes et de sociologues,
s’est constituée autour d’une réflexion sur l’environnement et ses
prolongements en termes d’aménagement et de développement durable, en
accordant une attention particulière au débat sur les concepts, leur usage,
voire leur instrumentalisation. Comme dans d’autres équipes du laboratoire
(équipe Migrations, axe 3), le croisement des recherches est doublement
souhaité : entre études sur le passé et sur le présent permettant de relativiser
la nouveauté ou la particularité, et entre disciplines aux méthodes
d’approche différentes traitant pourtant d’objets proches ou similaires. La
multiplication des préoccupations environnementales qui nous alertent sur
la dégradation des milieux et l’épuisement des ressources suscite de
multiples questionnements : d’un point de vue épistémologique, en
interrogeant la question des relations nature/société et la construction de
l’environnement en tant qu’objet de connaissance ; d’un point de vue
sociétal, en interrogeant les transformations des sociétés et des espaces
sous le prisme du nouveau paradigme environnemental.
- Un premier point d’entrée dans la problématique vise donc les
interactions entre l’homme et son milieu qui ont toujours été au cœur des
sciences sociales, en particulier en géographie (de Vidal de la Blache à nos
jours) et en histoire (depuis l’école des Annales où archéologues,
médiévistes et modernistes se sont illustrés dans l’étude des techniques
rurales, des forêts, des déboisements, du climat….). Toutefois, avec les
travaux de l’écologie, de la paléontologie et de la géographie historique, les
outils et les questionnements ont changé. La vision même de la place de
l’homme dans son environnement s’est modifiée. Au-delà de tout
déterminisme, de tout possibilisme ou d’une vision techniciste de maîtrise
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de la nature, on considère désormais l’homme comme partie intégrante des
milieux dans lesquels il évolue. Il ne s’agit plus seulement de prendre en
compte le poids des conditions naturelles ou au contraire les adaptations
des sociétés humaines aux milieux mais les interactions entre les sociétés et
leurs milieux. Cette réflexion semble d’autant plus importante à un moment
où les discours reconstruisent parfois un passé idéalisé.
- Un second point d’entrée vise les transformations des sociétés et des
espaces sous l’angle des modes de gestion politique, économique et sociale
de la question environnementale.
Les préconisations de protection environnementale et de
développement durable qui prônent un développement économiquement
efficace, socialement et spatialement équitable et écologiquement
soutenable ont sensiblement modifié la nature des politiques publiques, des
projets et conflits d’usage, et ouvert la voie à de nouveaux marchés et
sphères d’activité. Les grands sommets internationaux mettent l’accent sur
la question du changement climatique. À l’échelle européenne, la
législation concerne plus largement les propriétés des substances chimiques
produites ou importées (REACH), la préservation de la biodiversité et la
valorisation du patrimoine naturel (Natura 2000…), tandis que les agendas
21 se déclinent à l’échelle nationale et locale…
Cette prise en compte du développement durable active des logiques
d’opportunité et différenciées de la part des acteurs politiques,
institutionnels et des sociétés civiles. Comment s’agencent et s’hybrident
les outils de protection et du développement durable dans les politiques
d’aménagement des territoires en Europe méridionale et en Méditerranée ?
La région, soumise à de multiples vulnérabilités, à des déséquilibres
croissants (environnemental, climatologique, démographique, foncier,
énergétique…), mais aussi à de nombreux risques naturels, industriels,
chimiques et urbains, se prête particulièrement à l’analyse. L’étude des
tensions, mais aussi des nouvelles façons d’habiter, de se déplacer, de
travailler et de valoriser les ressources nécessite d’intégrer différents angles
d’approches : perceptions, représentations, longue durée et dynamiques
territoriales multi-niveaux…, afin de renouveler nos analyses sur les
discours, les outils, les acteurs, les pratiques et les normes.
Thèmes de réflexion
 L’appréhension des relations homme/milieu avec en particulier une
réflexion méthodologique sur l’histoire de l’environnement et plus
généralement sur les apports des sciences sociales dans la
11





construction du concept d’environnement et des relations
homme/milieu ;
La question des espaces et la dimension méditerranéenne des
questions environnementales : modes d’aménagement des littoraux,
des espaces forestiers, urbains, montagnards, relations entre les
littoraux et les arrière-pays ;
Classification écologique des terres dans l’aire méditerranéenne,
incluant les notions de communauté entre sols, plantes et animaux
(biome, aire biotique, unité écologique, aire biogéographiques, du
micro-habitat à la biosphère) ;
Les dégradations des espaces, les impacts écologiques des façons de
produire, les pollutions d’origine agricole ou industrielle, leurs
conséquences sur la santé humaine, les conflits environnementaux ;
Les modes de gestion des questions environnementales en termes
d’aménagement, de protection, de normes, de labellisation, d’usage
et conflits d’usage, de préservation de la biodiversité ;
Les innovations techniques et sociétales et les logiques
entrepreneuriales, visant les transformations des façons de produire
et d’échanger à l’échelle globale comme au sein des systèmes
locaux, interrogeant les nouveaux modes de développement ;
Collaborations scientifiques
Cette proposition s’appuie sur des actions et échanges engagés au cours du quadriennal
2008-2011 avec notamment :
- En géographie, économie, sociologie, droit, environnement, écologie, urbanisme
 À l’échelle régionale : CRIGE Paca ; fédération de recherche ECCOREV ;
ENSP– Ecole nationale supérieure des paysages ; ENSAM–École nationale
supérieure d’architecture de Marseille ; LAMES UMR 6127 ; Observatoire
Hommes Milieux du Bassin Minier de Provence ; Pôle Développement Durable
et Territoires Méditerranéens (groupement de plusieurs centres de recherche :
CERIC, CEFEM, IUAR, CEREGE, CERGAM, CEJU, TELEMME) ;
 À l’échelle nationale : EHESS ; UMR 7533 LADYSS Paris-Nanterre ; EA 375
GECKO Paris-Nanterre, UMR 5194 PACTE Grenoble ;
 À l’échelle internationale : INAU - Maroc ; Université de Sfax – Tunisie
- En histoire de l’environnement :
Groupe d’Histoire des Forêts Françaises, Groupe d’Histoire des Zones Humides,
RUCHE (Réseau Universitaire de Chercheurs en Histoire Environnementale),
European Society for Environnemntal History.
Les membres de l’équipe développeront leurs travaux dans trois directions
spécifiques.
- « Histoire de l’environnement » (L. Américi et M. Chalvet) ;
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- « Entreprise et environnement » (S. Daviet, A. Grandclément, R.
Monge) ;
- « Aménagement durable des territoires » (B. Mesini, A. Barthes).
Les travaux seront ponctués de rencontres transversales et de journées
d’études communes avec d’autres équipes du laboratoire, dans la
perspective d’un programme transversal au sein de la MMSH :
Journée d’études commune « Environnement et Industrie » avec les
historiens de l’équipe de l’axe 3 « D’une rive à l’autre : les économies
méditerranéennes et leurs mondes de l’époque moderne à nos jours » ;
Journée d’études commune « Transports et mobilités durables » avec
l’équipe de l’axe 4 « Villes, culture et grand projet ».
2 - Équipe Paysages & Terroirs Méditerranéens (PATERMED)
Responsable : Paul Minvielle
Composition de l’équipe : Sandrine Alinat, Roland Courtot, Jean-Noël Consales, Paul
Minvielle, Jacques Daligaux
Chercheurs associés : Stéphane Angles (Université Paris 7, UMR 7533 LADYSS),
Coline Perrin (MCF Université de Nantes)
Le programme « Paysages & Terroirs Méditerranéens »
(PATERMED) a été initié en 2009 par un groupe de chercheurs soucieux
d’étudier les paysages de la vigne et de l’olivier des régions françaises
méditerranéennes et leur insertion dans leurs terroirs. Il s’inscrit dans le
cadre du programme SYSTERRA de l’Agence Nationale de la Recherche
qui l’a choisi et le financera pour une durée de 4 ans (2010-2013). L’équipe
entend mettre sur pied un ensemble scientifique cohérent composé de
plusieurs équipes de recherche afin de constituer un réseau scientifique
centré sur les paysages méditerranéens et leur articulation avec leurs
territoires, urbains et périurbains.
L’équipe TELEMME du PATERMED est constituée de cinq
membres statutaires et de deux chercheurs associés, qui vont travailler
étroitement ensemble, en continuité avec les programmes des précédents
quadriennaux : 2004-2007 groupe 2 : « Territoires, terroirs et paysages »
2008-2011 : « Constructions territoriales et dynamiques socioéconomiques ». Leur engagement est destiné à perdurer au-delà de
l’échéance de l’ANR.
La problématique scientifique s’inscrit dans une recherche-action qui
vise principalement à mettre en place des outils de protection des terroirs
en s’appuyant sur une valorisation des paysages. La collaboration avec les
acteurs locaux du développement et les syndicats de producteurs est au
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cœur de la démarche. Du point de vue méthodologique, trois approches
sont privilégiées :
‐ une approche de géographie historique visant à caractériser les
paysages dans la longue durée en utilisant des sources variées (cartes
et cadastres anciens ; cartes topographiques et photographies
aériennes de différentes générations). Cette approche permettra de
définir une typologie fine et raisonnée des paysages de la vigne et de
l’olivier ;
‐ une approche de géographie appliquée qui se construira par une
procédure systématique d’entretiens de terrains et par l’analyse
approfondie des documents d’urbanisme et des cadastres à échelle
fine grâce aux outils SIG ; l’objectif est de mettre au point une
caractérisation des terroirs à l’échelle parcellaire, directement
utilisable par les collectivités territoriales ;
‐ une approche prospective faisant intervenir des méthodes innovantes
issues de l’analyse spatiale. Il s’agit principalement de développer
une méthodologie de visualisation de scénarii prospectifs grâce à une
simulation de paysages en trois dimensions.
C’est une recherche où la dimension « paysage » est au centre de la
réflexion aux différentes échelles, en particulier celle de la parcelle et de la
question foncière qui s’y développe, où la très large interdisciplinarité
permettra de renforcer le caractère systémique et modélisateur de la
recherche.
L’équipe entend apporter une collaboration active dans le cadre des
différentes tâches du programme à partir de la méthodologie des lectures du
paysage et des études réalisées en France et en Espagne méditerranéenne :
- caractérisation des terroirs face au risque d’urbanisation sur le littoral
varois. Mise en place d’outils d’aide à la décision pour les collectivités
territoriales. Ce travail de caractérisation est un prolongement des études
foncières menées dans le précédent quadriennal (loi littoral, agriurbanisme).
- analyse géographique systématisée des images des paysages de
l’olivier et de la vigne dans les pays de la Méditerranée nord-occidentale
et de leurs évolutions récentes, à partir des documents photographiques
et satellitaires.
- construction de modèles graphiques destinés à représenter les systèmes
géographiques de l’olivier et de la vigne de l’échelle locale à l’échelle
régionale et leur évolution sur le long terme à partir des premières cartes
précises à grande échelle (1/10.000e et 1/20.000e France première moitié
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du XXe siècle). Modélisation 3D de paysages réalistes avec des outils de
simulation (Arcgis 3D).
- élaboration de documents graphiques dans le cadre de l’Atlas des
paysages de la vigne et de l’olivier.
Les partenariats internationaux s’appuieront sur les universités qui
collaborent au programme PATERMED :
- Université de Jaén (paysages de l’olivier en Andalousie)
- Université de Girona (mutations des paysages dans l’Empordá catalan)
- Institut de l’Olivier de Sfax (les paysages oléicoles tunisiens)
De plus, l’équipe participera pleinement au projet d’observatoire
franco-italien de l’agriculture et des paysages, sur le site de l’Institut
culturel de Florence, porté par l’École française de Rome.
Les liens avec les équipes du prochain quadriennal de l’unité sont
induits par les dynamiques géographiques – démographiques et urbaines –
qui impactent fortement le devenir des paysages. Des collaborations sont
donc prévues avec les équipes Migrations (axe 3) et Ville et Culture (axe 4).
AXE 2 – Individus, identités, corps social
Il rassemble volontairement quatre équipes qui se situent, elles aussi,
dans la continuité de recherches menées dans le quadriennal en cours. Ces
équipes se retrouvent sur les questions touchant aux relations de l’individu
aux groupes et à leurs normes, aux expériences, collective et individuelle,
aux comportements des acteurs. Composées d’historiens médiévistes,
modernistes et contemporanéistes, elles intègrent la pluridisciplinarité et le
comparatisme entre aires culturelles par leur association à d’autres équipes
locales ou régionales, par leur participation à des réseaux de recherche
nationaux ou internationaux.
1 - Équipe Le corps : expériences, identités, cultures du Moyen
Âge à nos jours
Responsables : Anne Carol, Isabelle Renaudet
Composition de l’équipe : Régis Bertrand, Damien Boquet, Anne Carol, Aurélia
Dusserre, Michèle Janin-Thivos, Karine Lambert, Isabelle Luciani, Christine Orobitg,
Céline Regnard, Isabelle Renaudet
Doctorants : Francesca Arena, Amélie Nuq, Delphine Peiretti, Isabelle Grenut, Diego
Carnevale
Membres associés : Jean-Marc Chouraqui
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TELEMME a constitué un front pionnier dans l’histoire du corps en
créant un groupe de recherches sur ce thème en 1998. Un enseignement
universitaire a suivi dès 2002.
Le projet présenté ici se propose de prolonger cette voie en explorant
les façons dont, depuis le Moyen Âge et jusqu’à nos jours, le corps a été à
la fois objet de savoirs et de pratiques, sujet d’expérience et support
d’identités. Le projet s’inscrit donc dans une longue durée historique et
privilégie l’espace de l’Europe méridionale (France, Italie, péninsule
ibérique).
L’approche continuera à se faire dans la pluridisciplinarité à travers
les contributions de littéraires, sociologues, anthropologues, historiens de
l’art, et spécialistes des sciences dures dans le cadre de la fusion
programmée des universités.
Le groupe se propose d’abord de travailler sur les cultures du corps : il
s’agit de décrire et d’interpréter à travers des sources variées et en
recourant aux outils méthodologiques de l’anthropologie ou d’autres
sciences humaines et sociales les savoirs sur le corps, qu’ils soient savants
ou communs, les « techniques du corps », les dispositifs de régulation ou
de civilisation qui s’y appliquent.
Ces cultures du corps définissent un mode de relation à soi et aux
autres. Elles participent de fait à la construction d’identités individuelles ou
collectives dont le corps est le support, à des processus d’agrégation ou
d’exclusion, que les critères soient esthétiques, sociaux, religieux, sexués
ou « ethniques ».
En retour, le corps est le lieu d’un vécu à la fois intime et traversé par
les cultures qui le dépassent. Le corps comme expérience de soi, les
rapports entre ressenti et identité constitueront un dernier axe des
recherches.
À partir des thèmes ayant émergé dans le précédent quadriennal, et
des orientations des recherches des membres du groupe, un certain nombre
de thématiques ont été proposées, dont la liste n’est pas limitative : corps et
religions ; corps, identités et altérités ; corps et identification ; le corps au
travail ; corps et violences de guerre ; culture du corps et culture du sport ;
corps et virilité ; corps, soins et santé dans l’aire méditerranéenne.
Par ailleurs, le groupe est aussi impliqué dans un programme ANR
CoRPS (Le corps mort : Recherches sur l’histoire des pratiques et du statut
du cadavre dans l’Europe méridionale, XVIIIe-XXe siècles) qui s’achèvera
le 31 décembre 2012. Certains des thèmes que l’on se propose d’explorer
prolongent les axes de travail définis dans le cadre de ce programme ANR,
16
soit en les complétant, soit en les envisageant sous d’autres aspects que le
corps mort, pour la violence de guerre notamment.
Collaborations scientifiques
- Sur le plan local :
Institut d’études et de culture juives, Espace culturel euro-méditerranéen de l’Assistance
Publique–Hôpitaux de Marseille (participation au projet Santé et Culture–Marseille
2013), Conservatoire du Patrimoine médical de Marseille, Bibliothèque universitaire de
la Faculté de médecine de La Timone, Espace éthique méditerranéen. Au sein de la
MMSH, l’IDEMEC (UMR 6591) et le LAMES (UMR 6127) seront nos interlocuteurs
privilégiés.
- Sur le plan national :
Sont également pressentis pour travailler en collaboration sur le thème Corps, soins et
santé les chercheurs de l’Université de Montpellier (H. Berlan), d’Avignon (B.
Bertherat), Toulouse (CEHM–Framespa).
- Sur le plan international :
Enfin nous poursuivrons nos échanges avec l’Institut d’Histoire de la médecine
(Lausanne), l’Université de Coimbra, l’Université de Valence (Instituto de Historia de
la Ciencia y Documentación, IHCD), l’Université d’Alicante (Medicina Preventiva,
Salud Pública e Historia de la Ciencia) et l’Université d’Elche (Departamento de Salud
pública, Historia de la Ciencia y Ginecología).
Le mode de fonctionnement proposé est le suivant :
- un séminaire mensuel de recherche où seront présentées deux
interventions de membres du groupe ou d’enseignants-chercheurs
invités. L’objectif du séminaire est triple :
- maintenir une veille bibliographique, muséographique et
historiographique sur la question du corps ;
- offrir un espace de présentation et de débats autour de travaux
encore en chantier ;
- offrir un espace d’initiation à la recherche pour les étudiants de
master et doctorat.
Des journées d’études (une à deux par an) auront deux objectifs :
- explorer une thématique en vue d’un ouvrage collectif ; il s’agit de
renouer avec une démarche qui avait abouti dans les quadriennaux
précédents à des publications comme L’exécution capitale ou Le
monstre humain1.
- échanger avec d’autres groupes aux thématiques proches, comme
Écriture de soi ou Genre et transgressions (liste non limitative).
1
R. Bertrand, A. Carol (dir.), L’exécution capitale. Une mort donnée en spectacle, PUP, 2003 ; id., Le
monstre humain, imaginaire et société, PUP, 2005.
17
2 - Équipe Écritures de soi. Mots et configurations de l’expérience.
Méditerranée-Afrique. XVe-XXIe siècle
Équipe commune TELEMME/CMMC/CEMAF
Responsables : Catherine Atlan (CEMAF), Isabelle Luciani (TELEMME), Valérie
Pietri (CMMC)
Composition de l’équipe TELEMME : Marie-Françoise Attard-Maraninchi, Nicolas
Berjoan, Anne Carol, Emmanuelle Chapron, Lucien Faggion, Isabelle Luciani, JeanNoël Pelen, Christiane Raynaud
Doctorants : Christophe Régina
Membres associés : Régis Bertrand, Jacques Guilhaumou (UMR TRIANGLE), Yvan
Gastaud (UMR 7032 URMIS-SOLIS)
Membres CMMC (EA 1193) : Valérie Pietri (coord. pour le CMMC), Olivier Bouquet,
Xavier Huetz de Lemps, Héloïse Hermant
Membres CEMAF (UMR 6124) : Catherine Atlan, Hervé Pennec, Francis Simonis
Orientation
Ce projet s’inscrit dans le renouveau historiographique des écrits
personnels. Il rejoint aussi l’historiographie des pratiques d’écriture, celle
notamment des « écritures ordinaires » (Daniel Fabre) et des « archives
sans qualités » (Philippe Artières). Ces questionnements reflètent un retour
à l’acteur qui envisage l’expérience des individus comme participant, d’une
manière préréflexive ou pleinement critique, de la construction des
catégories sociales (Bernard Lepetit, 1995) : ils mettent en jeu la
construction des identités personnelles et sociales dans le rapport de
l’individu à lui-même et au monde objectivé par l’écriture de soi. En effet,
l’enjeu des écritures personnelles réside dans une tension entre la
cohérence intime d’un individu et la généralisation de son rapport au
monde :
- L’écriture comme forme d’extériorisation du rapport au monde et à
soi
Comment les écritures de soi permettent-elles de configurer les formes
de l’expérience individuelle et collective au fondement de la conscience
pratique des « agents ordinaires » ?
Cette dimension ontologique des écritures de soi conduira à interroger
l’hybridité des genres (n’est-ce pas toujours sur soi que l’on écrit ?) et la
complexité des statuts cognitifs de ces récits parfois tout autant collectifs
que personnels : que dit exactement, et diversement, sur le moi qui écrit, le
journal intime centré sur soi, la correspondance adressée à l’autre, le
graffiti laissé sur un mur, ou bien encore le récit généalogique où la
18
transmission générationnelle, l’hérédité, l’ancestralité construisent
l’identité ?
- L’écriture comme appropriation de soi et du monde
L’écriture permet de prendre position dans un environnement
complexe. La prise d’écriture impose des choix (par exemple
plurilinguisme et choix linguistique) et des appropriations culturelles
(processus d’alphabétisation, place de l’écriture féminine, diffusion des
modèles en contexte de colonisation ou de migration…). Elle suscite aussi
l’autonomie d’un jugement légitime (il est intéressant, par exemple, de
suivre l’affirmation d’une « opinion publique » – et, plus largement,
« politique » – dans les écrits privés…).
Elle mobilise un « savoir narratif » hérité et socialement partagé dans
une expérience singulière. Le récit génétique, par exemple, peut être
envisagé sous l’angle du surgissement de soi à travers une sorte de
« dialogue des morts » qui fait entrer en résonance les différents maillons
de la chaine généalogique. L’écriture de soi, ici, ne peut pas être envisagée
sans la référence primordiale à l’autre (livre de raison, roman familial…).
- L’écriture comme travail de la conscience de soi et construction de la
dignité du scripteur.
Le récit de soi prend alors une dimension herméneutique qu’il
convient d’articuler à une perspective historique du rapport à soi. Le moi
de Montaigne n’est sans doute pas le moi de Maine de Biran et la
divergence des définitions psychologiques, philosophiques ou encore
linguistiques (par exemple la médiéviste B.-H. Rosenwein fondant son
approche sur le psychologue S. Epstein) pourrait être revisitée par l’analyse
des usages concrets du moi dans l’écriture. Cette interrogation pourra
conduire également à celle de la posture du « témoin » écrivant. C’est à ce
sujet protagoniste, témoin, acteur et juge qu’il convient alors de
s’intéresser, dans le processus plus général de la construction d’un sens
commun.
- De l’histoire comparée à l’histoire connectée
Face à la diversité des travaux, des espaces et des périodes, une étude
transversale des écritures de soi, grâce à l’interdisciplinarité (histoire,
anthropologie, sociologie et littérature notamment) mais aussi l’étude de
plusieurs aires culturelles sur le temps long, articulant notamment l’Europe
méridionale et l’Afrique dans des contextes proches d’accès à
l’alphabétisation (Europe moderne – Afrique contemporaine) et/ou de
transferts culturels (colonisation – migration), permettra de dépasser
l’aporie d’une écriture à la fois singulière et socialisée et d’envisager une
histoire des catégories du soi à travers ses configurations narratives.
19
Corpus
Nous entendons par écriture de soi, du sens propre d’écrits personnels
au sens métaphorique de mise en scène de soi consciente ou inconsciente,
un corpus de sources dont l’hétérogénéité peut apparaître comme
constitutive de l’objet étudié : « écritures ordinaires » ; livres de raison et
papiers de famille ; récits génétiques et généalogies ; journaux intimes ;
mémoires et autobiographies ; correspondances ; fictions littéraires ;
écritures scientifiques ; configurations narratives non discursives (formes
graphiques, expression musicale, rituels…).
Fonctionnement
Le fonctionnement de cette équipe repose sur une alternance de
journées d’études et, en amont, d’ateliers transversaux, permettant
d’interroger plus spécifiquement des textes, des objets, des
questionnements historiographiques, sur la construction des formes de
subjectivité par l’écriture et le récit.
Les opérations scientifiques mises en œuvre s’appuient sur des
collaborations déjà fructueuses avec le CMMC et le CEMAF : cf. les
journées d’études, en cours de publication, qui ont eu lieu les 23 mai 2008
et 5 juin 2009 sur Écriture et trouble(s) de soi, le 25 novembre 2009 sur
Récits de femmes, troubles de soi (MMSH) et les journées d’études à venir
le 26 mai 2010 et le 18 juin 2010 sur Écriture scientifique, récit de soi
(Écritures savantes et récits de soi (MMSH, en collaboration avec E.
Chapron, ANR CITERE) ; Les récits génétiques comme récits de soi,
CMMC–Université de Nice Sophia Antipolis) et les 26/27 novembre 2010
sur Configurations narratives (MMSH).
Pour le programme quadriennal 2012/2015, nos activités s’inscriront
dans le calendrier suivant :
Année 1
Année 2
Année 3
Année 4
Aix
Nice
Séminaire commun
TELEMME/CEMAF
CMMC
JE « Juger du public, juger en politique,
JE « Récits d’origine, récits de fondation
et légitimité de la puissance »
« Objets, outils,
juger de soi dans les écrits personnels »
historiographie »
JE : « Dialogue des morts , incorporation JE « Dialogue des morts , incorporation
des ancêtres : généalogie, individu,
des ancêtres : une herméneutique du
Bimensuel en
sujet dans les récits de soi »
identité», en collaboration avec l’équipe
alternance
Corps (Anne Carol, Isabelle Renaudet)
JE « Écrire pour vivre. Pratiques
JE « Travailler pour écrire. L’enquête
d’écriture, configurations de l’expérience, autobiographique et généalogique »
appropriation du quotidien »
Colloque « La construction des formes de subjectivité dans les écritures de soi : régimes d’historicité et
approches comparées »
20
Collaborations scientifiques
Au sein de l’UMR TELEMME : les équipes de l’axe 2 Corps et GeFeM, l’équipe
Figures du temps (axe 4) et l’équipe Information (axe 5).
Avec les laboratoires et groupes de recherche suivants :
- CEPAM UMR 6130, Nice (Germain Butaud) ;
- CEAF UMR 194, EHESS Paris (Aïssatou Mbodj-Pouye) ;
- FRAMESPA, UMR 5136 Toulouse (Sylvie Mouysset) ;
- ANR/GDR 2649 sur Les écrits du for privé (dir. Jean-Pierre Bardet ; François-Joseph
Ruggiu) ;
et participation au projet First Person Writings in European Context (European Science
Fondation).
3 - Équipe Genre et transgressions : pratiques, stratégies,
représentations dans l’espace euro-méditerranéen (XVIe-XXIe
siècles)
Responsables : Karine Lambert, Anne Montenach
Composition de l’équipe : Madeleine Ferrières, Karine Lambert, Martine Lapied, Anne
Montenach, Laure Verdon
Doctorants : Alexandre Lhaa, Vannina Olivesi, Christophe Régina.
Membres associés : Paul Allard (UMR 6012 ESPACE), Daniel Armogathe, Marcel
Bernos, Nicole Cadène, Randi Deguilhem (DR CNRS, IREMAM UMR 6568),
Geneviève Dermenjian, Renée Dray-Bensoussan, Claudine Guiard, Jacques
Guilhaumou (DR CNRS, UMR 5206 TRIANGLE), Chantal Guyot de Lombardon,
Caroline Mackenzie, Pierre Pasquini, Eve Roy, Sabine Savornin (EA 4235 CIELAM,
Université de Provence), Jean-Marie Zingraff
Si l’analyse sociologique ou historique montre comment les
bouleversements vécus par des sociétés données font évoluer, voire
redéfinissent les liens sociaux, l’étude des marginalités permet de repérer
les marges et les failles des systèmes normatifs. Celles-ci offrent –
différemment selon les sexes – la possibilité de contourner le carcan des
règles instituées et produisent des figures féminines que l’on retrouve avec
une certaine constance sur le temps long : femmes divorcées, adultères,
prostituées, filles-mères, brigandes, émeutières, contrebandières,
vagabondes, mais aussi artistes, créatrices en général, militantes
féministes… Mais ces profils transgressifs n’en sont pas moins des
« figures de la norme » si l’on tient compte des interactions avec
l’entourage et des solidarités en jeu. De ce fait, la norme nécessite une
attention renouvelée qui ne se contente pas de la définir comme
oppressante, mais qui prend aussi en compte son utilisation dans les
trajectoires et les réalisations des unes et des autres.
21
Nous chercherons ainsi à comprendre la combinaison des différents
registres de normes. Par une approche microsociologique, nous analyserons
les ressources mobilisées par les femmes pour s’imposer sur les scènes
économique, politique ou sociale en l’absence de droits reconnus, les
résistances auxquelles elles se heurtent et leur manière de négocier avec les
normes institutionnelles et les normes de genre qui les cantonnent dans des
sphères restreintes. Ici seront questionnées les interactions entre le droit, les
cultures et les pratiques transgressives avec un intérêt tout particulier
apporté aux contraintes, aux conventions et aux « règles du jeu » qui
encadrent les actions des hommes et des femmes. Quelles sont les lois et
les normes qui font sens pour les acteurs (qu’ils s’y conforment ou
cherchent à y échapper) ? Quelles sont au contraire celles pour lesquelles
toute répression de la transgression leur paraît illégitime ? Pour une époque
donnée, les normes s’imposent-elles de manière variable selon les
générations ? L’objectif n’est pas seulement de proposer ici une description
de formes transgressives liées au genre mais bien plutôt d’interroger ce qui
est conçu par les individus et les groupes comme des transgressions des
normes de genre et d’explorer parallèlement comment elles sont produites,
négociées et vécues individuellement et collectivement.
On abordera ces pratiques et les discours qui les qualifient en étudiant
des trajectoires personnelles, des parcours, des mobiles, l’inscription de ces
gestes dans des stratégies occasionnelles/durables. Dans cette perspective,
seront interrogées les reconfigurations des normes de genre éventuellement
induites par ces pratiques individuelles transgressives en cherchant à
comprendre comment elles participent à l’élaboration, à la négociation, à la
reformulation des normes de genre, mais aussi comment elles participent
de la re-création de nouveaux rapports à la norme pour l’ensemble des
acteurs sociaux.
Le travail de l’équipe portera également sur les écarts entre les normes
et les pratiques, sur la mise en œuvre, plus difficile à cerner, de conventions
tacites relevant de l’infra-institutionnel et sur les rapports entre conflits et
institutionnalité (par exemple en interrogeant le concept de déviance et les
définitions changeantes des notions de crime économique, crimes
d’honneur, crimes sexuels). Dans cette optique, nous tenterons également
de détecter les passages et gradations possibles entre le monde du licite et
celui de l’illicite. Nous questionnerons le rapport aux normes des individus
en prenant en compte les espaces de transmission (ou socialisation), de
consolidation voire de contestation de ces mêmes normes (comme les
familles), mais aussi d’autres échelles et espaces de fabrication des
individus (la ville, l’école, le travail, le cinéma par exemple). Nous nous
22
attacherons en définitive à interroger la manière dont les pratiques
transgressives contribuent à la production d’espaces sociaux
spécifiques. Enfin, nous analyserons le traitement que leur réserve la
postérité entre banalisation, condamnation, occultation et valorisation.
Le projet, résolument comparatiste, explorera sur le temps long (XVIeXXIe siècles) différents espaces de l’aire euro-méditerranéenne.
Du point de vue méthodologique, nous privilégierons une approche
résolument anti-systémique et praxéologique par l’exploitation des apports
de la microstoria et des case studies tout en jouant sur les variations
d’échelles. Nous tenterons de cheminer au plus près de certains parcours
individuels d’hommes et de femmes replacés dans leur environnement
social et « suivis à la trace ». Cette démarche constitue le préalable
indispensable à un travail de repérage des solidarités et des réseaux en
même temps qu’à une réflexion sur la notion même de stratégies –
individuelles ou collectives.
Le projet se déclinera en trois orientations de recherches :
- Marginalités, conflictualités, criminalités
Dans les situations de remise en cause des systèmes normatifs,
notamment en période de crise, les femmes des catégories populaires
accèdent à la visibilité sur les scènes sociale, politique et économique dont
elles sont, en principe, exclues. Transgression des normes ou recherche
d’un dialogue avec le(s) pouvoir(s), la conflictualité, la violence, l’adoption
de comportements « déviants » ou marginaux constituent pour les femmes
un moyen d’investir la sphère publique. On s’intéressera également à la
manière dont les acteurs de pratiques transgressives peuvent se constituer
en entrepreneurs de norme : soit en revendiquant le caractère désirable et
généralisable de leurs conceptions et de leurs postures à l’ensemble de la
société, soit en imposant à l’intérieur même du cadre marginal où ils
évoluent un certain nombre de règles et de normes de comportement.
- Marginalités et transgressions
Sexualité hors mariage, prostitution, sans-abri, toxicomanies,
conduites agressives, bandes de rue… sont autant de modes de vie et
pratiques féminines à mesurer à l’aune de ce qu’il en coûte de braver les
interdits. Aussi, sans pour autant présumer du lien entre violences et
précarité socio-économique, dans quelle mesure le genre affecte-t-il
l’irruption de pratiques violentes dans des situations de transgression des
normes sociales ? Il s’agira donc ici de mettre en lumière moins les formes
de la marginalité sociale que les processus qui ont favorisé l’émergence de
23
violences, ainsi que les modes de négociation féminins dans les tentatives
de gérer les conflits et de limiter leurs effets.
- Représentations et « self representation »
Cet axe s’attachera à l’étude des représentations et des discours
nourris par les femmes, en particulier dans des sociétés dominées par les
hommes : quelle place pour la parole des femmes ? Comment accéder à ces
voix féminines du passé, pour sortir de la dichotomie femmes
victimes/femmes criminelles ? On étudiera en particulier les stratégies de
contournement et les formes de résistances collectives et individuelles des
acteurs sociaux – hommes ou femmes – aux interdits et aux représentations
discursives et iconographiques qui fixent la norme.
Collaborations scientifiques
MMSH : IREMAM (UMR 6568) ; IDEMEC (UMR 6591) ; Programme transversal
Paternité/Maternité.
Université de Provence : EA 4235 CIELAM.
Sur le plan national :
UMR 5206 TRIANGLE, Lyon, groupe Genre et politique (Anne Verjus) ; Fédération
RING (membre du comité directeur) ; Réseau MSH Gis-GENRE.
Sur le plan international :
- Projet européen ITN « Gendermed ».
- Réseau européen « Gender in the European Town (early modern to modern) » piloté
par Deborah Simonton (University of Southern Denmark, Kolding) et Kirsi VainioKorhonen (University of Turku, Finlande).
- Dalenda Larguèche, professeur d’Histoire, Laboratoire Patrimoine de Tunisie, Faculté
des Lettres, Université La Manouba, Tunis.
- Centre Marocain des Sciences sociales (CM2S) Université Hassan II Aïn Chock,
Casablanca.
- Marta Segarra, professeure, directrice du Centre Dona i literatura, chaire UNESCO
Femmes, développement et cultures, Facultat de Filologia, Universitat de Barcelona.
- Vinciane Pirenne-Delforge, maître de recherche au FRS-FNRS, Université de Liège,
Département des Sciences de l’Antiquité.
- Efi Avdela, professeur en Histoire contemporaine, Département d’Histoire et
Archéologie, Université de Crète.
Fonctionnement
- Séminaire mensuel de recherche où sera présentée une communication
d’un membre de l’équipe ou d’enseignants-chercheurs invités ;
- Journées d’études (1 à 2 par an) dont une journée consacrée aux
travaux de jeunes chercheurs ;
- Collaboration avec d’autres groupes aux thématiques proches relevant
de l’UMR ou de laboratoires de la MMSH ;
- Une publication collective en fin de quadriennal.
24
4 - Équipe Lien social, lien moral : éthique et politique dans
l’Europe méridionale (XIe-XVIIe siècle)
Responsables : Laure Verdon, Lucien Faggion
Composition de l’équipe : Gabriel Audisio, Damien Boquet, Jean-Paul Boyer, Déborah
Cohen, Noël Coulet, Lucien Faggion, Jean-Hervé Foulon, Isabelle Luciani, Thierry
Pécout, Laure Verdon
Doctorants : Jean-Pierre Attard, François Balle, Damien Broc, Christiane Clary, Jean
Luccioni, Laure-Hélène Gouffran, François Otchakovsky-Laurens
Membres associés : Alexandra Gallo, Christine Martin-Portier, Claude Roux, Damien
Ruiz
Cette équipe s’inscrit dans la continuité du groupe 1 du programme 2
2008-2011– Justices, rites et représentations du XIe au XVIIe siècle - tout
comme dans celle du programme ANR GOUVAREN (« Gouverner par
l’enquête au Moyen Âge », ANR-08-022). Il pourra également servir de
point d’ancrage au sein de l’unité à l’entreprise éditoriale et scientifique
LEOPARDUS qui porte sur l’édition intégrale des registres de l’enquête
commanditée en 1332-1334 par Robert Ier de Naples dans le comté de
Provence.
Argumentaire
Le terme « éthique » renvoie, aussi bien dans le langage courant que
dans les sciences sociales qui l’ont défini (philosophie, anthropologie,
sociologie) à une approche normative des conduites humaines fondée sur la
légitimité rationnelle accordée par une société ou un groupe d’individus à
la production des règles de conduite qui doivent le régir. Ces dernières
peuvent être appuyées sur un dogme ou une idéologie mettant en œuvre
certaines valeurs constitutives du système moral ambiant2.
L’objet consiste, ainsi, à s’attacher à l’étude des valeurs élaborées par
le biais de différentes sources (juridiques, théologiques, morales) et dans
un souci moral par les pouvoirs (étatiques, seigneuriaux, communautaires)
médiévaux et modernes des rives nord de la Méditerranée, afin de
construire le lien social (c’est-à-dire constitutif d’une communauté et de ses
règles), ainsi que de soutenir l’action du gouvernement par l’élaboration de
normes déterminées pour orienter la prise de décision politique. Car
« gouverner » suppose une volonté d’agir et la construction d’outils pour y
parvenir ; on peut ainsi déceler les valeurs mises en œuvre dans différents
domaines : le processus de légitimation du pouvoir, les pratiques de
2
Barbara CASSIN (dir), Vocabulaire européen des philosophies, Paris, Seuil, 2004, art.
« Morale/éthique », p. 819-827.
25
pouvoir, le caractère performant du gouvernement, la construction du lien
de sujétion, la construction de l’image de soi et de la représentation sociale
ainsi qu’identitaire (individuelle, familiale, communautaire, professionnelle),
entre Moyen Âge et première modernité3. Le choix de l’espace euroméditerranéen permet de travailler de façon complémentaire et
comparatiste avec d’autres laboratoires de la MMSH dont certaines des
thématiques sont proches du point de vue chronologique et méthodologique
(notamment le LAMM et l’IREMAM–équipe des historiens et juristes).
Les thématiques qui seront suivies peuvent se définir autour des
valeurs suivantes :
LA JUSTICE :
Cette notion peut être abordée dès le XIe-XIIe siècle par la recherche
de références théoriques fondées sur des notions éthiques (telle la « vérité »
reposant sur les évolutions du système probatoire). Les recherches de J.-H.
Foulon portent sur des aspects plus idéologiques : la notion de justicia
chrétienne est le fondement de la recherche de la paix, sous diverses
modalités, dans les conflits qui mettent en jeu les aristocrates. À partir du
XIIIe siècle, paix et justice sont une dialectique fondamentale, et désormais
bien connue, de l’État en formation. La « vérité » se retrouve au cœur des
pratiques de gouvernement par les usages politiques de la procédure
inquisitoire et la notion de pouvoir « juste »/« injuste » qui y est afférente
(GOUVAREN ; LEOPARD). On peut, cependant, aller plus loin en mettant en
lumière les racines éthiques du gouvernement à travers les discours
idéologiques produits par ou pour celui-ci (J.-P. Boyer), l’articulation entre
science politique et pratique administrative dans l’instauration d’un
« dialogue » avec les sujets (GOUVAREN), ainsi que les usages et les normes
politiques instaurées par les élites citadines et les pouvoirs souverains au
début des temps modernes4. La justice, en tant que valeur morale, peut être
saisie à travers les espaces investis par les acteurs de la loi, des pouvoirs et
3
B.M. BEDOS–REZAK, D. IOGNAT–PRAT (dir.), L’Individu au Moyen Âge, Paris, 2005 ; B. CLAVERO, La
grâce du don. Anthropologie catholique de l’économie moderne, première édition en Italie, 1991 [édition
française 1996] ; L. FONTAINE, L’économie morale. Pauvreté, crédit et confiance dans l’Europe
préindustrielle, Paris, 2008 ; L. FONTAINE et alii, Des personnes aux institutions : réseaux et culture du
crédit du XVIe au XXe siècle en Europe, Louvain-la-Neuve, 1997 ; Th. KUEHN, Heirs, Kin, and Creditors
in Renaissance Florence, Cambridge, 2008 ; H. MEDICK, D. W. SABEAN (dir.), Interest and Emotion.
Essays on the Study of Family and Kinship, Cambridge, 1984 ; F.-J. RUGGIU, « Les notions d’identité,
d’individu, de self et leur utilisation en histoire sociale », M. BELISSA et alii, Identités, appartenances,
revendications identitaires (XVIe–XVIIIe siècles), Paris, Nolin, 2005 ; D.W. SABEAN, S. TEUSCHER, J.
MATHIEU (dir.), Kinship in Europe. Approaches to Long-Term Development (1300-1900), New York–
Oxford, 2007 ; N. TADMOR, Family and Friends in Eighteenth-Century England. Household, Kinship and
Patronage, Cambridge, 2001.
4
Voir, par exemple, L. FAGGION (dir.), « Du lien politique au lien social : les élites », Rives
méditerranéennes, n° 32-33 (2009).
26
le regard, ainsi que l’obéissance, réelle ou présumée, par les sujets des
campagnes, des villes et des États de la première modernité.
Le comportement éthique des individus (des dominants en particulier)
constitue également un angle d’approche privilégié. Ainsi en va-t-il de la
question de la violence et de ses usages, licites ou illégaux, qui posent le
problème du statut de la personne et de son rapport à la morale chrétienne
(violence des clercs par exemple).
LES VALEURS SOCIALES DECOULANT DU DROIT :
Certaines thématiques plus spécifiquement juridiques méritent une
approche singulière, comme la notion de « propriété ». Le travail juridique
auquel elle a donné lieu dans le cadre de l’instauration de relations
hiérarchiques entre le prince et les grands et de la mise en place du droit
public5 se trouve au cœur de la réflexion sur les rapports entre éthique et
politique notamment par le biais des outils qui le forgent, telles les
enquêtes générales qui se définissent, à partir de la fin du XIIIe siècle,
comme un instrument de contrôle des officiers, de rétablissement de la
justice (au sens moral du terme) et de respect des droits des sujets. Ces trois
directions tendent vers un seul but, celui d’instaurer une réforme des
pratiques et de l’image du pouvoir. La question de l’usurpation des droits
souverains et des poursuites judiciaires auxquelles elle donne lieu conduit
le pouvoir à porter un jugement d’ordre moral sur des actions criminalisées
de la sorte (GOUVAREN, L. Verdon). On peut aussi percevoir dans le
domaine juridique et de la construction de la souveraineté les influences du
modèle de pouvoir divin qui n’est pas seulement opérant pour la justice6.
Le droit dans ses différentes déclinaisons et applications contribue à
enrichir les multiples articulations de la vie politique des sociétés d’Ancien
Régime qui parvenaient, par exemple, à jouer et à instrumentaliser les
justices, souvent juxtaposées, afin d’obtenir réparation par le biais des
tribunaux mineurs ou majeurs, ainsi que par ceux relevant des autorités
ecclésiastiques, le Saint-Office ou le Consistoire en terres protestantes.
L’écriture juridique et la production documentaire comme instruments
de l’éthique politique constituent une orientation très en vogue à l’heure
actuelle. Les objectifs poursuivis, la rhétorique employée dans la rédaction
de la loi, la « sensibilité » des législateurs7 permettent également de fixer
une norme et une pratique. Celles-ci sont révélatrices de l’adaptation
opérée par les populations qui sont amenées à définir leurs actes selon un
5
Notamment, P. GROSSI, La proprietà e le proprietà nell’officina dello storico, Naples, 2006.
Alain BOUREAU, La religion de l’État. La construction de la République étatique dans le discours
théologique de l’Occident médiéval (1250-1350), Paris, Belles Lettres, 2004.
7
Pour reprendre une expression de Sophie WAHNICH, Les émotions, la Révolution française et le
présent. Exercices pratiques de conscience historique, Paris, CNRS éditions, 2009.
6
27
vocabulaire et des valeurs qui ne sont pas nécessairement ceux édictés par
les pouvoirs locaux ou souverains8.
La justice, le droit, le concept et la pratique de l’ordre, la notion de
l’obéissance des sujets, de l’identité et de l’image de soi sont des notions
créées et filtrées par l’écriture, qu’elle se déclare littéraire ou qu’elle soit
confinée dans le secret des familles. Elles tentent d’exprimer leur passé et
leur légitimité, elles peuvent également être déjouées selon des modalités
particulières dont rendent compte éventuellement la justice civile et pénale,
ainsi que les plaintes, les doléances, les suppliques, les pamphlets, les écrits
du for privé. Ces sources, manuscrites ou imprimées, aident à lire, sur
plusieurs registres, le facteur du lien social et moral, dans ses multiples
configurations du XIe au XVIIe siècle, selon des modalités spécifiques liées
aux contextes à la fois religieux et politiques, sociaux et institutionnels9.
LES VALEURS MORALES :
Les valeurs morales (comme la bienveillance), chrétiennes et
charitables, sont un troisième axe de réflexion. D’une manière générale, il
convient de mesurer le poids des croyances et des valeurs spirituelles dans
l’élaboration et la mise en pratique de l’éthique du gouvernement. La place
des valeurs éthiques dans la formalisation du lien communautaire apparaît
grande à travers ce que l’on nomme les « émotions politiques ». Celles-ci
semblent aux yeux des historiens, à l’heure actuelle, fondamentales dans la
construction de la relation de sujétion, sur le plan étatique, seigneurial et
communautaire (L. Verdon). Cela construit une dynamique du lien
dominant/dominé qui peut avoir des conséquences sur l’économie même de
la relation d’autorité.
Organisation, mise en œuvre
La mise en œuvre du programme scientifique de l’équipe s’articulera
sur deux types de modalités :
- d’une part, le groupe organisera deux journées d’études par an, dont
une consacrée aux problématiques liées à l’édition des registres
« Léopard » ; des séminaires centrés sur des problématiques plus
restreintes, d’ordre méthodologique, bibliographique ou chronologique,
8
Voir, par exemple, P. GERARD, F. OST, M. VAN DE KERCHOVE (dir.), Droit négocié, droit imposé,
Bruxelles, 1996, ainsi que C. POVOLO (dir.), Processo e difesa penale in età moderna. Venezia e il suo
stato territoriale, Bologne, 2007.
9
J.-P. BARDET, F.-J. RUGGIU (dir.), Au plus près du secret des cœurs ? Nouvelles lectures historiques du
for privé en Europe du XVIe au XVIIIe siècle, Paris, 2005 ; J.-P. BARDET, F. ARNOUL, F.-J. RUGGIU (dir.),
Les écrits du for privé en Europe (Moyen Âge, époque moderne, époque contemporaine). Enquêtes,
analyses, publications, Peissac, Presses universitaires de Bordeaux, 2009.
28
pourront être proposés chaque année (une demi-journée par an) et
animés par une partie des membres de l’équipe.
- d’autre part, des manifestations plus transversales, en partenariat
avec d’autres groupes du laboratoire ainsi qu’avec d’autres laboratoires
de la MMSH (LAMM, IREMAM, CCJ) pourront être organisées, à
raison d’une par année, sur des thématiques larges suscitant la
comparaison des aires et des méthodes.
AXE 3 – Mobilités, circulations, échanges
Cet axe regroupe deux équipes et un atelier tournés vers la question
des circulations d’hommes, d’objets, d’argent, d’entreprises des époques
modernes aux temps les plus contemporains. Les deux équipes de cet axe
associent étroitement historiens et géographes de l’unité. Par les effets de
ces circulations sur les territoires, les recherches croiseront celles de l’axe
1. Les migrations n’étant pas dissociables des transferts culturels, l’équipe
1 retrouvera les préoccupations de l’équipe « Imaginaires nationaux et
identités territoriales » de l’axe 5.
1 - Équipe Migrations, circulations et territoires en Méditerranée
XIXe-XXIe siècles
Responsables : Virginie Baby-Collin, Stéphane Mourlane
Composition de l’équipe : Laurence Américi, Virginie Baby-Collin, Xavier Daumalin,
Sylvie Daviet, Karima Dirèche, Eve Giustiniani, Béatrice Mésini, Stéphane Mourlane,
Pierre Sintès, Céline Regnard-Drouot
Doctorants : Laurent Bocquillon, Guillaume Javourez, Cristina Nizzoli, Leonardo
Donnaloia, Laurence Pillant, Assaf Dahdah, Romain Monge
Membres associés : Anne-Marie Granet-Abisset (UMR 5190 LARHRA), Rada Liliane
Nasser
L’équipe, composée d’historiens contemporanéistes, de géographes et
de socio-politistes, approfondira l’étude des dynamiques migratoires d’un
point de vue diachronique comme synchronique du XIXe au XXIe siècle, en
accordant une attention particulière au devenir des « acteurs migrants »,
aux modes de « vivre-ensemble » dans les espaces de la migration ainsi
qu’aux rapports sociaux et culturels induits par la gestion quotidienne de
l’altérité.
Dans cette perspective, le décloisonnement des recherches sur les
migrations est doublement souhaité : entre études sur le passé et sur le
29
présent permettant de relativiser la nouveauté ou la particularité, et entre
disciplines aux méthodes d’approche différentes traitant pourtant d’objets
proches ou similaires.
Une démarche contextualisée et comparative
À l’heure de la mondialisation, les circulations et les mobilités
paraissent plus intenses. La grande diversité constatée aujourd’hui des
origines comme des statuts semble largement déterminée par la
flexibilisation des économies imposée par les processus de la
mondialisation économique. Le passage de sociétés industrielles à des
sociétés de l’information et de la connaissance, ou de sociétés coloniales à
des sociétés postcoloniales, ont impliqué un éclatement des logiques de la
migration manifeste dans la plus grande diversité des profils et des
trajectoires des migrants internationaux. Cela a aussi conduit à une plus
grande variété dans les espaces d’implantation ou les secteurs d’activité
dans les pays de destination. A contrario, les modes de gestion spécifiques
en termes de politiques migratoires que suscitent les frontières nationales
ou régionales tendent à s’uniformiser tout en devenant sans cesse plus
sophistiqués.
Pour étudier ce double mouvement, la confrontation des espaces et
des temporalités permettra de mettre l’accent sur l’étude des contextes
historiques et sociopolitiques de réalisation de ces mouvements
migratoires. Nous porterons notre attention sur les espaces migratoires de
l’Europe méridionale. Parmi eux, le sud-est de la France constituera un
observatoire privilégié pour l’ensemble des membres de l’équipe, tout en
conservant les points de comparaison constitués par les domaines
(nouvelles formes de l’immigration en Méditerranée, migration de
travailleurs qualifiés, espaces d’agriculture intensive, zones touristiques,
frontières vives et régions métropolitaines) ou les aires d’étude de chacun
(en particulier les pays d’immigration récente de l’Europe méridionale
comme l’Espagne, l’Italie et la Grèce). Les zones de départ des migrants
seront-elles aussi abordées afin de conduire à un examen complet des
territoires de la migration et rendre compte de manière plus exhaustive des
logiques migratoires (par exemple, la Kabylie et les régions berbères du
Maghreb en relation avec l’espace migratoire franco-algérien).
Les études de ces différents espaces seront ainsi mises en relation,
croisées ou confrontées afin d’envisager des perspectives comparatives.
30
Des postes d’observation et des objets de recherche privilégiés
La réflexion qui privilégiera les dimensions sociales et culturelles
mettra en son centre les acteurs de la migration en vue de les saisir dans
leurs espaces de vie quotidienne, dans leurs modes de gestion de l’altérité.
Afin de rendre possible cette démarche et de pouvoir développer une
réflexion collective, il conviendra de cibler des « postes d’observation »
particuliers, qui seront signalés comme des territoires de transversalité
géographique et historique, permettant à la fois de saisir les contextes et
d’engager des comparaisons à partir d’objets de taille et de nature
analogues. Il s’agit en particulier :
‐ Des mondes du travail, des espaces des entreprises : ouvriers,
employés, mais aussi étudiants, main-d’œuvre qualifiée et mobilité
entrepreneuriale seront pris en considération, tout comme les
conflits, les modes d’organisation professionnelle, les types de
contrats dans les secteurs publics et privés.
‐ Espaces publics : lieux et formes de l’échange : lieux de
constructions de diasporas, de dynamiques communautaires ou
mélangés / multiculturels, modes de relations interculturels, de
conflits, de discriminations, de xénophobie ou de violence.
‐ Des espaces résidentiels, du logement et de l’habitat : des bidonvilles
aux cités de transit et HLM, en passant par les zones d’accueil des
centres villes, et les dynamiques de ségrégation spatiale.
‐ Des espaces marginaux ou liminaux comprenant les frontières
politiques et les périphéries des États, lieux de passage, de tensions,
de cristallisation de conflits.
Orientations de recherche
Les travaux de l’équipe s’inscriront ainsi sous l’angle des rapports
sociaux, des dynamiques culturelles et identitaires, à partir de l’examen de
la confrontation à l’altérité que produit la situation de migration. Ces
éléments seront déclinés selon des thématiques principales :
‐ Comment les parcours et les trajectoires migratoires, envisagés dans
leurs mouvements, leurs circulations, le va-et-vient entre les espaces
de départ, de transit, d’installation voire de retour, permettent de
construire le « transnational », questionnent les relations entre
identités et territoires ? Nous analyserons le fait migratoire tant dans
ses dimensions transnationales, que dans ses effets au sein des
sociétés locales, produisant en retour des nouvelles migrations dans
les pays de départ et d’accueil (entre campagnes et villes, entre
bassins d’emploi…). A cet effet, nous questionnerons l’histoire du
31
modèle de développement promu depuis les années 70 du Nord au
Sud puis du local au mondial en prenant en compte, ses multiples
composantes : sociales, économiques, spatiales, culturelles,
cultuelles, écologiques sur les deux rives de la Méditerranée.
‐ Comment les pratiques culturelles, envisagées sous l’angle des
loisirs, du sport, des fêtes, des pratiques religieuses, des
investissements associatifs, des supports d’expression médiatiques
(presse notamment, média plus généralement), des sociabilités
quotidiennes ou plus ponctuelles, permettent-elles de repenser les
échanges, les transferts culturels, les processus d’intégration, les
situations cosmopolites ou ségréguées, et d’envisager le rapport à
l’altérité dans les espaces de migrations ? Comment les processus de
constructions mémorielles interrogent les relations entre processus
d’identification et modes de territorialisation ?
‐ Comment les rapports sociaux, envisagés sous l’angle des rapports
de domination économique ou politique, des modes de contrôle
social ou policier, des constructions de solidarités ou des
revendications politiques (dans un cadre professionnel, syndical,
associatif, ou militant), posent-ils la question de la gestion de
l’altérité, des modes de vivre ensemble, dans des cadres conflictuels,
négociés, ou dans des processus d’affirmations identitaires
différenciés ?
‐ Comment les initiatives et les pratiques entrepreneuriales, envisagées
sous l’angle de la création d’entreprise et du management
interculturel sont stimulées par les parcours de migration et de
mobilité et soutenues par les réseaux et diasporas ? On s’intéressera
aux stratégies de double investissement des entrepreneurs
transméditerranéen entre pays d’origine et pays d’accueil, au
développement de leurs compétences dans un contexte de mobilité
internationale et au rôle des institutions dans les politiques de
rapatriement des compétences.
Mode de fonctionnement de l’équipe
Il est d’ores et déjà convenu que l’équipe tiendra une réunion
bimestrielle qui sera l’occasion d’échanges non seulement sur l’animation
du travail scientifique collectif, mais aussi sur les travaux en cours.
Collaborations scientifiques
L’équipe entend inscrire résolument sa démarche dans le cadre de partenariats déjà
noués ou en passe de l’être.
32
- Au sein de l’UMR TELEMME : équipe de l’axe 3 D’une rive à l’autre : les économies
méditerranéennes et leurs mondes de l’époque moderne à nos jours autour des
thèmes » entrepreneuriat et mobilité », « dialogue interculturel et mobilité » et « réseaux
de la mobilité » ; équipe Ville, culture et grands projets (axe 4).
- Dans la MMSH : poursuivre les collaborations fructueuses engagées dans le cadre du
programme MIMED, avec des chercheurs de l’IREMAM UMR 6568, de l’IDEMEC
UMR 6591 et du LAMES UMR 6127. Plus le LEST UMR 6123.
- Sur le plan national :
Groupement d’intérêt scientifique (GIS) « Histoire des migrations » dont l’UMR
Telemme est unité fondatrice avec le Centre d’histoire sociale du XXe siècle (UMR
8058), le Centre de recherches historiques (UMR 8558) et la Cité nationale de l’Histoire
de l’Immigration (CNHI) ; UMR 5190 LAHRA Lyon (Anne-Marie Granet-Abisset) ;
UMR 5136 FRAMESPA Toulouse (Laure Teulières) ; équipe de l’ex-MSH de Nice
(Ralph Schor, Yvan Gastaut, Stéphane Kroenenberger, Swanie Potot, Christian
Rinaudo, Gilles Frigoli) ; UMR MIGRINTER 6588 (Poitiers, dir. W. Berthomière) ;
ENS-Lyon (Frédéric Abecassis) ; FRE 3027 ART-DEV (Montpellier, dir. G. Cortes).
- Sur le plan international :
Casa Velázquez, Madrid ; École française d’Athènes ; École française de Rome ;
CERES Tunis ; IRMC Tunis (Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain),
USR 3077 ; UMIFRE 016 CEMCA (Centre d’études mexicaines et centre américaines,
Mexico, dir. Delphine Mercier) ; CRFJ (Centre de recherches français de Jérusalem),
USR 3132.
- En liaison avec les organismes et associations suivants :
Conseil consultatif des Marocains de l’étranger (CCME) ; Génériques, Paris ; Centre
d’informations et d’étude sur les migrations internationales (CIEMI), Paris ; Réseau
pour l’histoire et la mémoire de l’immigration en région PACA (RHMIT : V. BabyCollin et S. Mourlane membres du comité de pilotage).
2 - Équipe D’une rive l’autre : les économies méditerranéennes
et leurs mondes de l’époque moderne à nos jours
Responsables : Gilbert Buti et Olivier Raveux
Composition de l’équipe : Gilbert Buti ; Gérard Chastagnaret ; Xavier Daumalin ;
Madeleine Ferrières ; Anne Montenach ; Olivier Raveux
Doctorant : Christopher Denis-Delacour
Orientation
Banalité d’un constat : le bassin méditerranéen est un espace
d’échanges, un monde de la circulation, une aire de rencontres et de
connexions, un territoire de tensions économiques, sociales, politiques et
culturelles. Des logiques diverses sont à l’origine des déplacements des
hommes, des capitaux, des produits, des techniques, des informations, des
goûts des idées à l’intérieur de cet espace mais aussi vers ou à partir de
celui-ci.
33
Ces mobilités peuvent être éphémères ou durables, épisodiques ou
régulières, spontanées ou raisonnées. Sont-elles connectées à d’autres,
appartiennent-elles à un ensemble articulé et s’inscrivent-elles alors dans le
cadre d’une multipolarité ? Participent-elles à une stratégie économique, à
une manière d’utiliser l’espace comme ressource ?
Par les activités de production et les échanges marchands, on suivra la
volonté de s’adapter, de s’intégrer, de favoriser les interconnexions entre
des réseaux ou des espaces régionaux, ou au contraire de rester en marge.
Au-delà de la commune culture des affaires du monde méditerranéen
(associations, contrats, prêts…), les travaux seront attentifs aux transferts,
aux adoptions et aux appropriations de techniques de production et de
savoirs, aux pratiques d’échanges, en ne négligeant aucun interstice,
procédant pour cela à une variation constante des échelles d’observation
afin d’éclairer les comportements individuels et collectifs des acteurs.
Si des travaux et des rencontres scientifiques ont déjà abordé la
thématique des dynamiques de contact, rares sont encore les recherches à
s’être véritablement interrogées sur la question des ressorts et des
conséquences des situations de confrontations interculturelles et/ou
intercontinentales liées aux circulations économiques, en replaçant sur le
temps long la Méditerranée dans un horizon géographique élargi.
Étudier cette « économie interconnectée » est le dessein que se fixe
ce groupe de recherche par une relecture de l’histoire de l’espace
méditerranéen au moyen de travaux mêlant les approches classiques
(microstoria et histoire comparative) et des démarches innovantes plus
récentes (histoire connectée, histoire globale). L’objectif final est de
resituer, sans la réduire à la simple description de ces connexions, la place
de la Méditerranée dans l’évolution de l’histoire économique globale des
mondes moderne et contemporain.
Les thèmes à défricher par ce groupe de recherche seront divers.
Destinée à constituer une première trame des travaux à entreprendre, une
première liste a déjà été établie : les réseaux marchands ; les figures de
l’intermédiation marchande ; l’articulation entre les routes et les produits ;
les trafics coloniaux : une parenthèse de l’histoire économique
méditerranéenne ? ; la circulation de l’argent et des paiements ; les
structures matérielles de la circulation économique ; les problèmes
juridiques du travail avec l’étranger ; entrepreneurs et mobilités ; les
échanges interculturels… Cette liste n’est pour l’instant ni contraignante ni
exhaustive. Des choix seront faits en fonction des retombées scientifiques
des opérations et des possibilités offertes par les collaborations internes et
extérieures.
34
Collaborations scientifiques
- Avec d’autres équipes de l’unité :
Équipe Migrations, circulations et territoires en Méditerranée, XIXe-XXIe siècle (axe 3)
autour des thématiques suivantes : entrepreneurs et mobilités ; mobilité et dialogue
interculturel ; les réseaux de la mobilité (modalités à préciser) : avec l’équipe
Environnement, aménagement, développement durable, Europe méridionale
Méditerranée (axe 1) autour d’une action ponctuelle sur « Environnement et
industrie » ; avec l’équipe Genre (axe 2) autour d’une rencontre centrée sur « Genre,
normes et transgressions » (modalités à préciser).
- Sur le plan national :
CMMC EA 1193 de Nice (Arnaud Bartolomei, Silvia Marzagalli et Pierre-Yves
Beaurepaire) et avec le GIS d’histoire maritime sur les figures de l’intermédiation
marchande, notamment sur les thèmes des capitaines et des consuls (sur ces deux sujets,
les partenariats peuvent être élargis, notamment auprès de l’IREMAM UMR 6568, du
CEMAF UMR 6124 et de la Chambre de commerce et d’industrie de MarseilleProvence). Cette collaboration s’articulera autour de deux ateliers annuels en 2012 et
2013 (un à Aix, l’autre à Nice) puis de la tenue de deux workshops ou journées d’études
en 2014-2015, l’objectif étant de produire un ouvrage collectif pensé et construit sur
l’ensemble de la durée du programme quadriennal.
Avec les archives départementales des Bouches-du-Rhône autour d’une opération dans
le cadre de Marseille-Provence 2013. Une double exposition avec catalogue,
conférences, colloque et itinéraires de découverte est prévue pour l’été-automne 2013
sur les sites de Marseille, « L’empreinte des ressources ou le patrimoine oublié :
Marseille/Provence, rivage des produits du monde », et d’Aix, « Ouvrières et ouvriers
d’ailleurs en industrie ».
- Sur le plan international :
Université Hassan II Casablanca (L. Maziane) ; Université de Tunis (A. Hénia) ;
University of Melbourne (I. Coller) ; University of California (S. Aslanian) ; Universitat
de Barcelona (A. Sánchez) ; Universitat Pompeu Fabra de Barcelona (E. Martín
Corrales), Università Ca’ Foscari Venezia (A. Caracausi et G. Favero) ; Università di
Bari (B. Salvemini) ; Université de Volos (C. Agriantoni) : Ecole Française de Rome
(C. Denis-Delacour).
3 - Atelier de recherche Temps et Territoires de la
désindustrialisation en Europe, du traité de libre-échange
(1860) à l’Union européenne.
Responsable : Philippe Mioche
Composition de l’atelier : Philippe Mioche, Xavier Daumalin, Olivier Lambert
Doctorants (en cours d’inscription) : Cam Anh Tuan, Alain Etamane
Membres associés : Jean Domenichino, Ivan Kharaba, Mauve Carbonell
Chercheurs extérieurs : Charles Barthel, Anne Dalmasso (UMR 5190 LARHRA),
Pierre-Jean Campocasso, Tarja Salo Richard Cochet
35
Le mot et la réalité de la désindustrialisation ont fait irruption dans le
débat contemporain et dans le quotidien de la gestion des territoires ; est-ce
vraiment nouveau ?
L’objet de cette recherche est la cessation des activités industrielles en
Europe, et tout particulièrement en Europe méridionale.
La période considérée pourrait s’étendre de la Révolution industrielle
à nos jours (le traité de 1860 est un marqueur possible). Il s’agira
d’interroger les formes historiques qui peuvent relever d’un processus de
désindustrialisation sans nécessairement en porter le nom.
La recherche distinguera plusieurs dimensions comparatives :
- les secteurs d’activité. D’une industrie à l’autre, les formes, les
chronologies, les effets sont différents.
- les pays. Là aussi les rythmes sont différents. Pour faire simple,
regardons le Royaume-Uni et l’Allemagne.
- les régions (espaces territoriaux). La désindustrialisation n’a pas le
même sens en Lorraine et en Guadeloupe (fin des sucreries).
- les ensembles géopolitiques comme l’Union Européenne et l’Alena.
Les questions comportent plusieurs volets :
- Chronologie et sémantique : D’où viennent les mots ? Mesure des
rythmes et des effets de la désindustrialisation. Apparition et traitement du
thème dans le débat public.
- Politiques industrielles : Quels sont les effets des politiques publiques ?
La recherche porte sur l’histoire des différents niveaux d’intervention :
politiques européennes, nationales (y compris l’impact industriel des
décisions souveraines de Défense nationale), territoriales.
La désindustrialisation a-t-elle été acceptée, niée, combattue ?
- Management et taille des entreprises : La cessation d’activités
industrielles est-elle le fait des entreprises multinationales ? Une stratégie
de la désindustrialisation existe-t-elle ? Comment évaluer le poids des
contraintes dans le processus de désindustrialisation : contraintes salariales,
environnementales, réglementaires.
- Les résistances à la désindustrialisation : Comment les territoires
résistent-ils à la désindustrialisation (exemple du Creusot) ? Quel est le
niveau d’interprétation des cessations d’activités industrielles par les
acteurs sociaux ? Quelles régulations et/ou dérégulations souhaitent-ils ?
Quelles sont les modalités de lutte contre la désindustrialisation et celles
qui visent à la promouvoir ?
- Les conséquences de la désindustrialisation : Quelles sont les
conséquences de la désindustrialisation pour les marchés, l’emploi et la
36
formation, la gestion des territoires (y compris l’aménagement des
transports et la fiscalité) ? On cherchera à établir les conditions de
fonctionnement, de management, de marchés des entreprises relocalisées
en Europe et on dressera un tableau comparatif de l’avant et de l’après.
Réseaux associés :
Institut pour l’histoire de l’Aluminium, Académie François Bourdon, chaires Jean
Monnet d’histoire de la construction européenne.
Calendrier et activité
L’objectif central de l’atelier est de préparer un projet ANR au cours de
l’année 2010-2011.
AXE 4 - La culture comme projet
Cet axe associe historiens et géographes de l’unité. Ses deux équipes
sont orientées vers la géographie et l’histoire culturelles dans une optique
originale, puisqu’il s’agit particulièrement d’analyser les projections vers
l’avenir. Le temps est au centre du projet de l’une, le territoire au cœur du
travail de l’autre. Cet axe prolonge le travail sur la mémoire et les
représentations du passé qui est une des spécialités de l’unité. Mais ces
thématiques sont associées aux représentations du futur. L’équipe Ville,
culture et grands projets, pluridisciplinaire, travaillera étroitement avec les
équipes de l’axe 1.
1 - Équipe Figures du temps, projections de l’avenir. Récits,
images, cultures (Espace euro-méditerranéen. XVIIe-XXIe siècle)
Coordination : Maryline Crivello et Jean-Luc Arnaud
Composition de l’équipe : Jean-Luc Arnaud, Marie-Françoise Attard-Maraninchi,
Angelo Bertoni, Bernard Cousin, Maryline Crivello, Aurélia Dusserre, Jean-Marie
Guillon, Brigitte Marin, Philippe Mioche, Jean-Noël Pelen
Chercheurs associés : Daniel Armogathe, Anne-Marie Granet-Abisset (UMR 5190
LARHRA), Lisa d’Orazio
Chercheurs extérieurs : François Siino (IREMAM UMR 6568), Philippe Jockey (CCJ
UMR 6573), Valérie Feschet (IDEMEC UMR 6591), Valérie Piétri (CMMC EA 1193,
Université de Nice)
37
Objectifs
Cette recherche concerne l’étude des perceptions culturelles du temps
principalement au regard des formes narratives et iconographiques. Elle
s’inscrit, sans aucune exclusive, dans la continuité de la réflexion collective
sur « Récits, figurations et projections de l’avenir dans l’histoire » ou
comment les hommes du passé voyaient leur futur. L’approche se veut
pluridisciplinaire, s’appropriant de façon transversale la question des
temporalités.
Du point de vue théorique, les recherches bénéficieront de travaux
majeurs tels ceux de Paul Ricoeur (Temps et récit, 1983), de Michel de
Certeau (L’invention du quotidien, 1980), de Reinhart Koselleck (Le futur
passé, 1979), de Mircéa Eliade (Le mythe de l’éternel retour, 1969), de
Jean Chesneaux (Habiter le temps, 1996), de Jacques Revel (Jeux
d’échelles, 1996), d’Alban Bensa (Vivre le temps, 1997), de Norbert Elias
(Du temps, 1997) et des travaux récents d’histoire sociale, politique et
culturelle.
Pour ce quadriennal, l’équipe propose de se centrer autour de cinq
thèmes d’études principales :
- Le temps consolidé et reconstitué
Étude des liens entre tradition et modernité, constructions territoriales
du temps ou spatialisation des temporalités (effets des modes de
patrimonialisation, construction des ruines, mise en scène du passé,
temporalités événementielles dans l’espace urbain, dans l’entreprise,
reconstitutions physiques ou 3D). Le passé se perpétue d’abord par des
traces matérielles, déposées intentionnellement ou non ; c’est sur ces traces,
surtout lorsqu’elles sont écrites, que se fonde le travail de l’historien ; ce
sont des traces physiques, jusque-là dissimulées, que l’archéologue
dévoile… Mais il est aussi une persistance immatérielle, l’empreinte
mémorielle, ou souvenir. L’intensification contemporaine des usages du
passé s’inscrit dans le cadre d’un bouleversement récent des rapports que
notre société a toujours entretenus avec le passé, et des formes nouvelles
que prend sa convocation. D’une certaine manière, nous sommes capables
de fabriquer celui-ci à la demande, de le façonner par le truchement d’une
matérialité mobilisée, faite d’images, de matières et de textures, d’objets,
de corps statiques ou en mouvement, tous ces éléments pouvant se
configurer en scènes, comme ces reconstitutions, généralement qualifiées
d’« historiques », où le passé est, précisément, « rejoué ».
- Le temps figuré
Élaboration de l’iconographie et du désir de fixer le temps (art
pictural, photographie, etc.). L’image (ou les images) et la division du
38
temps : représenter l’instant et représenter la durée temporelle avant ou
après l’invention de l’instantané photographique et du film. « On ne prend
jamais tant de photos ou de films que de cela qu’on sait menacé de
disparition (…). Avec l’anxiété du sursitaire grandit la fureur
documentaire » (Régis Debray, Vie et mort de l’image). Jamais il n’a
semblé plus opportun de penser les rapports de l’image avec le temps. Cela
peut s’entendre au plan technique et esthétique comme le temps incorporé
et vécu dans le sujet photographique ou dans la matière filmique, mais
aussi et surtout il s’agit du temps historique présidant à l’émergence des
images dans la société, la médiatisation. Depuis les travaux de Gilles
Deleuze on sait que le temps inscrit dans l’image ne passerait pas s’il
n’était le degré le plus contracté du passé, « l’image comprend l’avant et
l’après de ce qu’elle montre ». D’où l’interrogation plus que nécessaire
aujourd’hui sur la « pensée de l’archive » et sur son usage considérable
(marques et signes du temps dans les « scènes » commémoratives par
exemple). La recherche se portera sur le territoire méditerranéen (XIXe–
XXe s.) où espace, temps et images sont suffisamment prégnants pour en
assurer la cohérence et en révéler l’utilité (représentations figurées des
cultures, traitement iconique du religieux, échanges en miroir, sociétés en
« modèles réduits » des expositions, guerres coloniales, etc.).
- Le temps politisé
Approche de la construction et des transformations d’un temps social
et politique. L’inscription temporelle des pratiques politiques.
Le temps comme enjeu politique peut constituer une approche
innovante : dans quelles temporalités les acteurs politiques et sociaux
inscrivent-ils leurs actions ? Comment le contrôle des temporalités
constitue-t-il l’un des enjeux majeurs de l’action politique ? On constate
que la maîtrise du temps est au coeur de l’affrontement politique : de la
capacité des acteurs à l’accélérer ou à le ralentir peut dépendre l’issue du
conflit. En liant temps et politique, notamment à travers l’étude des
controverses et des affaires, l’hypothèse serait de montrer qu’il existe une
pluralité de temporalités qui coexistent et qui s’affrontent dans l’espace
public, et que cette dialectique constitue l’un des moteurs du changement.
Étudier le temps politisé en situation permettrait en outre de nuancer l’idée
qu’à chaque période historique correspond une grande « conception du
temps » qui serait partagée indistinctement par toute la société (F. Hartog et
R. Kosseleck). Plus spécifiquement, dans le monde arabe, le point de
départ de la réflexion est le constat d’évidence que l’une des
caractéristiques les plus variables des systèmes de pouvoir est l’inscription
de la domination politique dans le temps. Aux trois types de domination
39
politique proposés par Max Weber – traditionnelle, charismatique,
rationnelle-légale – correspondent d’ailleurs implicitement des formes
différentes d’inscription dans le temps : temps de la dynastie pour la
première, temps de la vie du leader pour la seconde, temps régulé
(constitutionnalisé) des élections pour la dernière.
Les deux autres orientations feront l’objet de recherches conjointes
avec d’autres équipes de l’unité ou externes. L’équipe Écritures de soi de
l’axe 2, l’atelier transversal Histoire et sciences sociales, et des équipes
externes du Centre Camille Jullian et du Centre interdisciplinaire de
recherche sur les territoires et leur aménagement de l’Université Paul
Cézanne.
- Un temps pour soi
Cette thématique recoupe celle de l’équipe Écritures de soi de l’axe 2.
Elle abordera donc l’histoire de l’individuation des pratiques et des
rapports au temps, les écritures du temps et le temps de l’écriture, le temps
vécu et les expériences intimes du temps, l’histoire familiale et la
généalogie.
- Le temps maîtrisé
Outre l’histoire de la mesure du temps, des « narrateurs » du temps
(archéologues, mémorialistes, historiens, etc.), une attention particulière
sera portée aux pratiques de l’urbanisme, tant du côté des processus
d’élaboration que des résultats. En urbanisme, les formes de travail sont
multiples dans leurs temporalités et permettent d’observer les idéologies et
les représentations qui guident la conception des projets.
Collaborations scientifiques
- MMSH :
(CCJ UMR 6573, IREMAM UMR 6568, IDEMEC UMR 6591) et participera aux
actions des pôles de la MMSH dont ses deux coordonnateurs sont également les
responsables (Cartomundi et Image, son et pratiques numériques en SHS).
- Sur le plan local et national :
Un partenariat particulier est noué avec l’équipe « L’expertise et les processus de
conception de projet urbain contemporain » du Centre interdisciplinaire de recherche
sur les territoires et leur aménagement (EA 889/CIRTA, Université Paul Cézanne) que
codirigera Angelo Bertoni.
De plus, la recherche de cette équipe entrera également dans le cadre d’une convention
de partenariat entre la MMSH et la nouvelle Cinémathèque euro-méditerranéenne du
Château de la Buzine ouverte au printemps 2011 aux étudiants et chercheurs
(bibliothèque, vidéothèque, filmothèque en réseau avec l’INA, le FID, etc.) et
disponible pour conférences, journées d’études, colloques.
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2 - Équipe Ville, culture et grands projets
Responsables : Boris Grésillon, Pascale Froment
Composition de l’équipe : Jean-Luc Arnaud, Virginie Baby-Collin, Angelo Bertoni,
Jean-Noël Consalès, Maryline Crivello, Aurélien Delpirou, Pascale Froment, Boris
Gresillon, Pierre Sintès.
Doctorants : Jérémy Garniaux, Jean-Bernard Castet
Membre associés : Lauren Andres (Université de Birmingham), Jean-Lucien Bonillo
(École d’architecture de Luminy), Nicole Girard
Chercheurs extérieurs : André Donzel (UMR 6127 LAMES), Christian Tamisier (École
nationale supérieure du paysage et LAMES)
Projet scientifique
Dans la suite des travaux du groupe La ville mise en scène
(quadriennal 2004-2008), l’équipe Ville, culture et grands projets entend
analyser la place et les enjeux de la culture et des acteurs culturels dans le
fonctionnement des métropoles euro-méditerranéennes et dans les
politiques urbaines, notamment à travers les « grands projets » qui
fleurissent actuellement dans les villes du pourtour méditerranéen. Les
notions de « culture » et de « grands projets » seront interrogées. Dans une
perspective de recherche appliquée, une attention particulière sera portée à
l’opération « Marseille-Provence capitale européenne de la culture 2013 »
dans ses multiples implications spatiales, sociales, économiques et
culturelles. Mais l’équipe a pour vocation d’étudier, sur un plan comparatif,
la manière dont le paradigme culturel (dans toutes ses acceptions :
artistique, festive, ethnique, identitaire, patrimoniale, paysagère,
économique, touristique) est mis en avant, voire instrumentalisé, dans les
politiques urbaines, au service d’une mise en scène de la cité et de ses
habitants.
Comment se constitue un « milieu » culturel local ? Comment
impliquer les opérateurs culturels locaux dans un « grand projet » de
dimension métropolitaine et de rayonnement international ? Dans quelle
mesure, d’une rive à l’autre de la Méditerranée, mais aussi d’une partie de
l’Europe à l’autre, des transferts culturels s’opèrent-ils ? Selon quelles
modalités, quelles étapes ? De Barcelone à Istanbul, de Marseille à
Alexandrie, mais aussi des villes d’Europe du Nord vers les villes d’Europe
du Sud, des modèles culturels circulent – parfois véhiculés par les migrants
et les diasporas –, des référents culturels finissent par s’imposer, de même
que des référents urbains, portés par des « starchitects » nomades. Ne parlet-on pas du « modèle barcelonais », de « l’effet Guggenheim à Bilbao »,
plus récemment du « modèle d’Istanbul » (fondé sur l’essor économique, la
41
régénération urbaine, l’effervescence artistique et la fondation de musées
privés par des industriels mécènes, le tout porté par la médiatisation du
grand événement « Istanbul, capitale européenne de la culture 2010 ») ?
Par ailleurs, le souci du temps long nous permettra d’éclairer les
projets contemporains à la lumière des grands événements passés, comme
par exemple les expositions universelles ou internationales des XIXe et XXe
siècles. L’interrogation sur la pertinence des échelles d’analyse (de
l’échelle locale des lieux culturels liés ou non à un grand projet, à l’échelle
internationale de la mobilité des acteurs culturels et de la circulation des
modèles) devra aller de pair avec un questionnement sur la dissociation des
temporalités (entre la temporalité courte et condensée de l’événement et les
processus longs de fabrication d’un territoire ou d’un « milieu culturel »).
N’y aurait-il pas également à questionner l’appartenance de la zone euroméditerranéenne à une certaine communauté d’identité et d’intérêts
économiques particuliers, à l’échelle des autres aires culturelles urbanisées
du monde, au sein de laquelle la visibilité, l’attractivité et la distinction
seraient décisives en termes de concurrence ?
Enfin, se pose inévitablement la question des objectifs (affichés) et
des destinataires de ces grands projets culturels : quels types de grands
projets culturels sont-ils mis en œuvre, dans quels buts et pour qui ? Il
conviendra, d’une part, d’identifier les opérateurs culturels et urbains
impliqués, d’autre part, de décrypter les stratégies urbaines poursuivies
ainsi que leurs modalités d’application, en synergie ou en rupture avec le
terreau social dans lequel ces projets viennent s’insérer.
Collaborations scientifiques :
- Au sein de l’unité :
Les équipes Migrations, circulations et territoires en Méditerranée XIXe-XXIe siècles
(axe 3), Environnement, aménagement, développement durable Europe méridionale
Méditerranée (axe 1) et Figures du temps (axe 4).
- Sur le plan local et national :
Par essence pluridisciplinaire par ses thématiques et dans son fonctionnement, l’équipe
a vocation à rassembler non seulement les géographes, les historiens, les urbanistes de
l’UMR que ces questions intéressent, mais, au-delà, à collaborer avec les sociologues et
les anthropologues de la MMSH spécialistes du fait culturel et urbain (UMR 6127
LAMES et UMR 6591 IDEMEC) ainsi qu’avec les économistes, architectes et
urbanistes issus d’autres laboratoires (École d’architecture de Luminy, École nationale
supérieure du paysage, Centre interdisciplinaire de recherche sur les territoires et leur
aménagement, etc.).
- Sur le plan international :
Des partenariats sont en cours d’organisation (Birmingham, Berlin, Istanbul, Rome,
Athènes).
42
AXE 5 - Les espaces du politique (XVIIIe-XXIe siècle)
Cet axe repose sur trois équipes qui orientent leurs travaux vers les
cultures et les identités politiques, en privilégiant les XVIIIe et XIXe
siècles, en particulier dans le monde hispanique, et le travail des
intellectuels. Bien insérées dans des réseaux internationaux unissant des
centres de recherches espagnols, français et italiens, ces équipes
prolongeront les travaux effectués dans les quadriennaux précédents, mais
en insistant plus particulièrement sur les questions, fort débattues
aujourd’hui, des transferts culturels.
1 - Équipe Culture et politique (XVIIIe siècle-Révolution
française)
Responsable : Christine Peyrard
Composition de l’équipe : Emmanuelle Chapron, Deborah Cohen, Thomas Glesener,
Elisabel Larriba, Martine Lapied, Brigitte Marin, Christine Peyrard
Membres associés : Nathalie Alzas, Cyril Belmonte, Jacques Guilhaumou (DR CNRS,
UMR 5206 TRIANGLE), Anna-Maria Rao (Université de Naples), Michel Vovelle
Doctorants : Carine Benaim, Diego Carnevale, A. Doria, Filippo Fiorito, Alexandre
Lhâa, Marianne Morel, Julien Saint Roman, Élodie Oriol, Odile Singla, Nobuyki
Tsunoda, Nicolas Vidoni
Orientation
À partir des principes énoncés en 1789 qui fondent un « bloc de
constitutionnalité » (Conseil constitutionnel, 16 juillet 1971), il importe
d’orienter plus avant les recherches sur les réalités politiques et culturelles
de l’Europe méditerranéenne, à partir des travaux les plus récents. Au-delà
d’une archéologie des savoirs, toujours en devenir, mais indispensable à
une réelle approche historique, sera menée une réflexion approfondie sur
les pratiques socioculturelles et politiques du siècle des Lumières et de la
Révolution française, afin de mieux cerner l’affirmation de la citoyenneté,
de la souveraineté nationale et/ou populaire, le droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes et donc l’émergence de Nations nouvelles (ou renouvelées,
« régénérées » ?).
L’apparition d’un espace public (Jürgen Habermas), lieu d’échanges,
de savoirs et de pratiques sociales, ne peut se réduire ni à la « République
des Lettres » (Robert Darnton, Daniel Roche, plus récemment Dale Van
Kley, Sarah Maza ou Antoine Lilti…), ni à une « Europe des Lumières » et des « anti-Lumières » - (Michel Vovelle, Keith M. Baker, D. Mc Mahon,
Zeev Sternhell…), même si ces travaux fondateurs étayent toujours les
43
débats actuels. La Révolution française pose, enfin, la question de la place
des mouvements populaires dans l’élaboration et la construction d’une
« nouvelle époque dans l’histoire du monde » (Goethe, septembre 1792).
Ce groupe de recherche se propose de reprendre l’étude des pratiques
et savoirs politiques et culturels dans l’Europe méditerranéenne (à partir
des travaux fondateurs du groupe tant sur la France méridionale que sur
l’Italie et l’Espagne), sans négliger les apports des mondes anglo-saxons et
germaniques, ni ignorer les autres siècles. Dans le prolongement de la
tradition universitaire aixoise sur le XVIIIe siècle et la Révolution
française, fondée sur d’importants travaux archivistiques, de riches
problématiques et de publications importantes, ce groupe propose de
développer les thèmes suivants :
- Les lieux du politique dans l’Ancien Régime : pratiques, espaces,
temporalité
Dans des sociétés où l’ordre social et politique est d’essence divine, il
n’existe pas de catégorie du politique autonome par rapport au juridique, au
social et au religieux. La politique n’est donc pas confinée aux seules
institutions, mais est présente dans une multitude de lieux : les actions, les
discours et les conflits quotidiens sont autant de manières par lesquelles des
individus ou des groupes investissent et délimitent l’espace pour y
imprimer, par les pratiques, une conception du temps, de la justice et du
bien commun. En abordant la question du politique à travers les formes
d’appropriation de l’espace, l’objectif est d’enrichir l’étude des modes
d’expression politique dans l’Ancien Régime, sans le limiter aux éruptions
de violence populaires ou au dialogue entre le pouvoir royal et les élites et
de permettre ainsi la comparaison entre les sociétés méditerranéennes et
leurs prolongements coloniaux.
- Pratiques révolutionnaires
La Révolution française « associe la continuité à la rupture et à
l’innovation » (Eric Hobsbawn). En cela, elle met en œuvre des pratiques
politiques et sociales originales, au sein desquelles les catégories populaires
jouent souvent un rôle moteur. La recherche portera sur les processus de
mise en visibilité de ce « peuple », notamment en Provence, que la
dynamique révolutionnaire a, difficilement mais pleinement, rendu
souverain.
Dans le cadre du retour en grâce du « social », il importe en effet de
prolonger les études sur la vitalité démocratique de la période
révolutionnaire, que celle-ci prenne la forme d’une appropriation
finalement pas si négligeable du fait électoral (Malcolm Crook) ou d’un
investissement citoyen plus ou moins massif dans les nouvelles institutions
44
locales, bien à l’opposé des tendances à la fermeture sociale
caractéristiques de la période moderne (Guy Saupin). Peut-être convient-il
dès lors d’accorder une attention toute particulière aux meneurs populaires,
à ces « enragés » qui, dans un camp comme dans l’autre, sont en capacité
de mobiliser les foules (dialectique marginalisation/intégration dans les
différents champs de la notabilité, à creuser sur la « moyennement longue
durée ») dans l’espace méditerranéen.
Ainsi, le possible passage d’une protestation populaire d’Ancien
Régime, que celle-ci s’appuie sur les principes de « l’économie morale »
(E.P. Thompson) ou sur une culture juridique socialement répandue, aux
« modernes » mobilisations sous-tendues par la conscience d’avoir des
droits, mérite une étude attentive. Si les élites locales ont en commun une
véritable culture de la gestion publique (Donald Sutherland), peut-être est-il
alors possible, ne serait-ce qu’a contrario, de faire émerger des conceptions
« populaires » de politiques locales à mener. C’est le cas des initiatives
liées à l’effort de guerre dont plusieurs recherches récentes soulignent les
ambitions politiques et sociales (N. Alzas, M. Soula). Il sera sans aucun
doute pertinent, dans la même perspective, de réactiver le vieux chantier de
la liquidation de l’ordre féodal et de ses dérivés. La question des banalités
peut tout à fait servir, par exemple, de révélateur de conceptions populaires
plurielles, entre revendication d’une liberté, moins vexatoire et meilleur
marché, et maintien d’un « service public », jugé indépassable.
Enfin, la prise de parole des journalistes marseillais mérite une édition
électronique des journaux dans le cadre de l’édition scientifique du
Dictionnaire de la presse française pendant la Révolution, conduite sous la
direction de Gilles Feyel par le Centre international d’étude du XVIIIe
siècle à Ferney-Voltaire.
- Pratiques culturelles et espace public
Une troisième voie s’intéressera à la manière dont les pratiques
culturelles participent, entre XVIIIe siècle et Révolution, à la configuration,
au fonctionnement et à la représentation de l’espace public. Les travaux
classiques ou plus récents sur la publication, le théâtre, les loisirs
scientifiques ou les musées ont montré tout l’apport d’une réflexion sur la
construction du « public », théorique ou réel, lié à ces pratiques, et sur les
enjeux politiques de ce processus. Une telle réflexion pourrait s’enrichir de
l’exploration de lieux moins bien connus (bibliothèques, cabinets de
lecture, etc.), mais aussi d’une perspective comparatiste à l’échelle
européenne. Il ne s’agira pas de confronter simplement des « modèles
nationaux », mais de penser la manière dont les mobilités culturelles ont
contribué à modifier la représentation de l’espace public, non seulement
45
dans le contexte d’accueil, mais aussi dans les espaces d’où elles
proviennent et où elles font retour. Deux voies, parmi d’autres, pourraient
ainsi être explorées. Les voyages où se nouent des rencontres et se tissent
des correspondances sont un de ces creusets du « comparatisme de l’espace
public » (Daniel Roche) qui s’alimente du transfert d’objets, de
connaissances et de savoir-faire. On portera également attention aux
circulations imprimées : sans se limiter à une approche passive des
transferts culturels, il s’agira d’examiner les lieux, les milieux, les agents et
les supports (traductions, comptes rendus) qui ont organisé l’accueil des
œuvres et façonné des espaces de réception.
C’est dans ce cadre que s’inscrit le projet du Comité international
Séguier qui vient de se mettre en place début 2010. Ce projet a pour
objectif l’édition électronique des lettres de Jean-François Séguier, érudit
nîmois du XVIIIe siècle dont la correspondance volumineuse constitue une
source de premier ordre en matière de circulation des informations. Cette
correspondance mérite une édition scientifique, qui sera associée à un
répertoire biographique des visiteurs de son cabinet d’antiquités et
d’histoire naturelle. Ce projet de grande ampleur, dont le site vient d’être
créé par l’UMR TELEMME, constitue l’un des chantiers novateurs de
notre équipe.
- Imaginaires sociaux au XVIIIe siècle
En aucune manière, la catégorie de « peuple » ne peut aujourd’hui être
pensée comme un niveau social mesurable (comme c’était le cas chez le
premier Furet ou chez Garden par exemple), ou comme un groupe fermé,
aux caractéristiques sociales et politiques figées. Il s’agira donc ici
d’explorer la notion de peuple comme une relation sociale. Ceci exige de
penser, non pas des caractères et des lieux, des professions et des manières
d’être, mais bien plutôt des dynamiques relationnelles. « Peuple » doit donc
être situé au carrefour de tout ce qu’il n’est pas, dans l’analyse du rapport
aux autres sociaux : vers le haut, la noblesse et la bourgeoisie, vers le bas,
les marges (fluctuantes) et un éventuel lumpenprolétariat. Dans cette
perspective, on analysera le paradoxe suivant : le peuple est, au XVIIIe
siècle, le groupe social qui est défini par son exclusion du politique ; et
pourtant, on peut analyser des formes de rapport « populaire » au politique
– classiquement dans l’émeute, mais aussi dans les formes, individuelles et
collectives, du jeu, du désespoir ou de la folie.
Mise en œuvre
Le travail du groupe s’organisera dans le cadre de séminaires, de
journées d’études et d’un colloque. Au-delà de publications d’actes, une
46
attention particulière sera portée à une édition électronique des sources,
qu’elles soient textuelles ou imagées, manuscrites ou imprimées.
2 - Équipe Imaginaires nationaux et identités territoriales : du
local au transnational (réseaux, médiations et transferts
culturels en Méditerranée des Lumières à nos jours)
Coordination : Paul Aubert, Eve Giustiniani
Composition de l’équipe : Paul Aubert, Nicolas Berjoan, Gérard Dufour, Eve
Giustiniani, Stéphane Mourlane
Doctorants : Julie Fintzel, Marie Gourdon
Membres associés : Severiano Hernández Rojo (Université de Bretagne occidentale)
Orientation
L’équipe engagera une réflexion sur la relation des pays d’Europe
méridionale à leur espace national, en croisant plusieurs échelles (du local
au transnational, en passant par le régional et le national) et en envisageant
diverses modalités de conceptualisation de ces espaces. Une question sera
au centre de ces travaux : dans quelle mesure l’idée que l’on se fait de la
réalité influe-t-elle sur celle-ci ? Dans cette étude des identités en
mouvement et des idéologies qui les portent, l’attention sera
accordée simultanément :
- aux théories de l’articulation du territoire et aux stratégies qui les soustendent,
- aux jeux d’influences réciproques, d’appropriations et de retraductions
que suppose la représentation de l’identité territoriale, dans un rapport
dialectique entre soi et l’autre, entre le national et l’étranger,
- aux acteurs et médiateurs de ces processus de construction identitaire,
en particulier lorsqu’ils se situent sur des zones frontière entre cultures,
langues, systèmes sociaux ou politiques, où se forgent des identités
pluriculturelles ou transnationales. Les politiciens, les intellectuels, les
exilés, les migrants ont chacun une idée de leur pays fondée sur le
territoire, l’histoire et la culture. L’évolution de ces représentations, en
fonction de la situation des acteurs qui les promeuvent, des doctrines qui
les informent et des influences extérieures qui les conditionnent, sera au
cœur du questionnement. L’accent sera mis sur le rôle des modèles, dans
les processus de construction nationale et territoriale : qu’ils soient
antérieurs (droit coutumier, droit local), extérieurs (Révolution française,
interventions napoléoniennes) ou utopiques (cantonalisme, anarchisme,
47
internationalisme). Dans ce processus, il s’agira de saisir les stratégies
étatiques autant que civiles.
En Occident, la philosophie, l’idéologie politique, les avant-gardes
sont transnationales et cosmopolites, surtout lorsqu’elles ont dû se former à
l’étranger ou vivre l’expérience de l’exil. Comment la rencontre de
l’ailleurs modifie-t-elle la perception du national ? Le jeu des
représentations collectives prend ici un sens particulier, compte tenu du
sentiment diffus, dans les pays d’Europe méridionale, d’un déclin de la
puissance. La culture intervient alors comme un instrument de maintien et
de redressement en diffusant une image valorisante à l’extérieur tout en
construisant une légitimité à l’intérieur. Les recherches prêteront ainsi
attention autant à l’instrumentalisation de la culture et de l’histoire dans la
construction des identités nationales, qu’à la façon dont les relations
culturelles internationales mettent en jeu la définition des identités et leur
rapport à l’altérité. La théorie des transferts culturels, dont la méthodologie
sera exploitée par les travaux de l’équipe, permet de revoir ce qui, dans une
approche essentialiste de l’identité, a longtemps été tenu pour évident :
l’existence de cultures nationales différenciées, d’identités conçues comme
substances closes sur elles-mêmes.
Thématiques
- La Nation, l’État le territoire
La question de l’identité nationale sera d’abord étudiée du point de
vue de sa formulation géopolitique, à partir de l’articulation territoriale.
L’émergence, au tournant du XXe siècle, de multiples projets contredisant
le modèle centralisateur révèle que dans les pays d’Europe méridionale, le
schéma classique de la science politique qui voudrait fonder l’État sur la
nation est loin d’être une évidence. La création d’une conscience nationale
et la centralisation administrative ont souvent buté sur une réalité
plurinationale complexe. Les expériences espagnole, portugaise et italienne
viennent infirmer la certitude induite par les réformes administratives
jacobines : le territoire n’est pas la carte.
L’étude tâchera de saisir ce moment où certains pays de l’Europe
méridionale, comme la Grèce et l’Italie, semblent être en train de se faire,
tandis que d’autres, tels que le Portugal et l’Espagne, semblent à l’inverse
se défaire sous la pression des nationalismes périphériques, du projet
fédéraliste républicain, du municipalisme ou de l’ibérisme.
La question de l’articulation du territoire implique donc une étude des
relations entre le pouvoir local et le pouvoir central. On questionnera en
particulier les efforts du pouvoir local pour vaincre le manque de
48
communication entre le centre et les périphéries, jusqu’au moment où la
consécration constitutionnelle du pouvoir local apparaît comme une forme
de démocratie supérieure.
La tension entre identité et pouvoir, implique une étude des
conséquences de l’adaptation de modèles administratifs étrangers au
territoire national, mais aussi des réactions qu’elles suscitent, par exemple,
la prolifération d’essais sur l’essence nationale et sur le droit
consuétudinaire. On se demandera pourquoi tout discours territorial semble
exprimer l’ambition de sortir du cadre abstrait de la citoyenneté. Avaientils conscience de contribuer à forger une nation, ces intellectuels qui ont
fait un genre littéraire de l’interrogation sur l’essence de l’Espagne ou
l’existence des Italiens ?
Cette histoire croisée des territoires et de leur spécificité ne se
contentera pas de comparer le processus de formation de leurs imaginaires
respectifs, elle l’envisagera comme une construction dialoguée. Sur ce
plan, histoire culturelle et histoire politique sont confondues : l’identité
d’un territoire est déterminée par les idéologies de l’appartenance et les
préjugés nationaux. On sera attentif cependant au passage de la province à
la région et à la communauté autonome au Portugal, en Italie et Espagne
dans le langage de l’État central aussi bien que des autorités régionales et,
au niveau des politiques publiques, au passage des modèles centraux aux
concrétisations locales.
- Transnationalité, cosmopolitisme et avant-gardes en Europe méridionale
Une réflexion spécifique sera menée sur le cas des migrants et des
exilés, comme vecteurs de transferts culturels, dans la mesure où ils
opèrent une reconfiguration des imaginaires territoriaux et une réévaluation
de la culture nationale par le biais de la confrontation avec l’altérité, dans le
processus d’intégration dans la société réceptrice : identité de l’autre,
identité lue par l’autre (entre claustration et métissage, entre rejet et
assimilation). On portera une attention particulière aux intellectuels exilés
qui, face à la fragilisation identitaire provoquée par l’exil et la tension entre
déracinement et intégration, tendent à se réfugier dans un espace fictionnel.
On s’interrogea enfin sur la façon dont la déterritorialisation et la
confrontation avec l’altérité permettent la construction de territoires
imaginaires.
Outre les recompositions de l’imaginaire national qu’implique l’exil,
on s’intéressera au phénomène d’appartenances multiples qu’il provoque.
Les exilés et migrants, qu’ils soient ou non rentrés dans leur pays d’origine,
finissent par se constituer un imaginaire transnational, un paysage culturel
précisément caractérisé par ce qu’il est situé hors frontières, dans un espace
49
d’intersection. On envisagera le cas du retour du migrant, le sens qu’il
donne à l’exil lorsque celui-ci est fini, et le choc produit par la rencontre
entre cet imaginaire national alternatif et celui qui s’est développé dans la
nation retrouvée. Enfin, le nomadisme intellectuel et l’hybridité culturelle
de l’exilé seront envisagés non comme un phénomène passif mais comme
une démarche active, permettant de surmonter les déterminations et les
conditionnements imposés par la logique nationalitaire ou une conception
rigide de l’identité.
La configuration d’imaginaires transnationaux doit beaucoup à
l’éclosion des avant-gardes, dans leurs déclinaisons artistiques comme
politiques. On se demandera comment la référence à l’historicisme ou à
l’universalité de la notion de progrès est venue interférer dans la
représentation nationale.
La circulation des expressions auxquelles les avant-gardes ont donné
lieu au début du XXe siècle en Europe méridionale et notamment après les
définitions que firent Gabriel Alomar et Filippo Marinetti du Futurisme, en
Espagne, en France et en Italie, seront étudiées dans le cadre des rapports
entre tradition et progrès. La réflexion sera sous-tendue par une
interrogation sur la possibilité, les modalités et la signification d’une
culture transnationale, c’est-à-dire d’une identité latine et méditerranéenne.
Mise en œuvre
Les résultats du travail entrepris seront exposés lors de séminaires et
de journées d’études.
Collaborations scientifiques
- Dans l’UMR TELEMME :
initiatives communes avec les équipes de l’axe 5 et les équipes Migrations (axe 3) et
Villes, culture (axe 4).
- Dans la MMSH et l’Université de Provence :
Programme transversal MIMED : Lieux et territoires des migrations en Méditerranée,
XIXe-XXIe siècles ; IREMAM UMR 6568 (Jean-Robert Henry) ; Centre Aixois
d’Études Romanes EA 864.
- Sur le plan national :
IHMC UMR 8066 (Paris I-EPHE-ENS Ulm) : C. Charle, G. Pécout, B. Wilfert.
- Sur le plan international :
Casa de Velázquez, École Française de Rome, Fundación Ortega y Gasset (Madrid) ;
Réseau d’Histoire culturelle de la Méditerranée, coordonné par Jordi Casassas
(Université de Barcelone), Elio d’Auria (Université de Viterbo) et Paul Aubert ;
Université de Barcelone (Jordi Casassas, Adolfo Sotelo Vázquez, Jordi Gracía,
Domingo Ródenas), Université Complutense de Madrid (Antonio Niño, Juan Francisco
Fuentes), CSIC Madrid (Lorenzo Delgado)Université de Málaga (José García Galindo,
Fernando Arcas Cubero), Université d’Alicante (Emilio La Parra), Université de Bilbao
50
(Javier Fernández Sebastián, José Luis de la Granja), Université de Lleida (Ángels
Santa) ; Université de Naples (Paola Gorla), Université de Rome (Roma Tre : Giuliana
Di Febo), Université de Viterbo (Elio d’Auria), Université de Milan (Luis de Llera),
Université de Modena (Alfonso Botti), Université de Trieste (Claudio Venza),
Université de Pise (Gabriele Ranzatto) ; Université de Porto (M. Loff), Université de
Coimbra (Fernando Catroga, Rui Martin) ; Université de Nuremberg (Walter
Bernecker), Université de Bonn (Metchild Albert) ; Université de Nicosie (Konstantina
Zanou).
3 - Équipe L’information dans l’Europe méridionale du siècle
des Lumières au temps présent
Responsable : Elisabel Larriba
Composition de l’équipe : Paul Aubert, Gérard Chastagnaret, Gérard Dufour, Michèle
Janin-Thivos, Elisabel Larriba, Christine Peyrard, Isabelle Renaudet, Beatriz Sanchez
Hita
Membres associés : Marina Bujoli-Minetti, Severiano Hernández Rojo (Université de
Bretagne occidentale)
Doctorants : Joan Cavaillon Giomi, Aurélie Hennebelle, Boubacar Coulibaly
Orientation
De la carta relación de Colomb annonçant aux Rois Catholiques qu’il
venait d’atteindre les Indes par la voie de l’Ouest à l’échec de Masséna
devant Lisbonne faute d’avoir eu connaissance de l’existence des lignes de
Torres Vedras, en passant par les missions d’espionnage scientificoindustriel en Angleterre confiées par le gouvernement de Charles III aux
élèves du Real Colegio de Cirugía y Medicina de Cadix, l’information a
toujours été déterminante dans l’échec ou le succès des gouvernants et la
prospérité ou l’échec économique des nations.
Mais le concept d’information est plus complexe qu’il ne le semble au
premier abord. Si l’on considère aujourd’hui le droit à l’information
comme fondamental et consubstantiel à toute pratique de la démocratie, sa
possession et son exploitation ont longtemps été tenues pour l’apanage du
pouvoir, aussi bien civil que religieux. La censure, tantôt préalable, tantôt a
posteriori, a tenté d’en prémunir les gouvernements ; les index romains ou
inquisitoriaux en ont fait autant pour l’Église. Mais les particuliers euxmêmes, des banquiers de Charles Quint aux « loups-cerviers » de la
Monarchie de juillet, des acheteurs de biens nationaux à la grisette en quête
d’époux ont eux aussi besoin de disposer d’informations. La quête de
l’information est à la base même du fonctionnement de la société.
L’action publique ou privée s’organise autour de l’information selon
un schéma apparemment immuable : collecte, organisation, détention,
51
diffusion ou rétention, voire fabrication, avec en contrepoint la rumeur.
Mais ces différentes étapes de la conquête et usage de l’information ont fait
l’objet de modalités bien différentes selon les états, leurs régimes et
l’évolution des mentalités. D’une information presque exclusivement
véhiculée par les prêtres du haut de leur chaire dans l’Espagne de Philippe
II ou le Portugal de Joaõ IV au ministre de Franco qui déclarait qu’une
« information est une nouvelle officielle », la différence est certes ténue.
Mais elle est abyssale quand on compare cette situation avec celle de la
Grande-Bretagne de Georges III ou de l’Italie de Cavour.
Objectifs
Si le fait de disposer de la meilleure information possible remonte à
l’Antiquité, la volonté et le besoin de la diffuser largement se manifeste
singulièrement à partir du XVIIIe siècle, avec – notamment – le
développement de la presse et l’Encyclopédie. C’est pourquoi nous nous
proposons d’étudier dans la longue durée, du Siècle des Lumières au temps
présent, dans une perspective comparative, l’évolution des mécanismes qui
ont régi la quête, le traitement et la portée de l’information dans les pays de
l’Europe méridionale.
- La quête de l’information :
- au niveau des gouvernements par le biais des sources diplomatiques
(correspondance et mémoires), des rapports des intendants ou préfets ;
ainsi que ceux de la police et des services de renseignement ;
- au niveau des autorités religieuses : en exploitant les séries Esteri et les
rapports de visites pastorales (ad limina) conservés à l’Archivo Segreto
Vaticano ;
- au niveau public : en étudiant les sources de la presse, depuis les
gazetiers jusqu’aux correspondants de guerre, envoyés spéciaux et
correspondants permanents ;
- au niveau scientifique : création et fonctionnement d’académies, de
centres de formation et de revues scientifiques ;
- au niveau industriel : l’espionnage technologique ;
- au niveau privé par l’étude des correspondances familiales (notamment
celle des combattants pendant les guerres).
- Le contrôle de l’information :
- la rétention par la censure : censure d’État (lois sur la presse et leurs
applications) ; censure religieuse (index, procès d’inquisition) ;
- la préservation des secrets militaires ou technologiques ;
52
- la diffusion de l’information : le livre et sa circulation (rôle des réseaux
de libraires) et usage des différents médias, du sermon à l’internet ;
- la propagande et l’usage de la fausse information : « intox » et
« quatrièmes colonnes ».
- Information privée versus information officielle
- la rumeur comme source collective officieuse d’information ;
- la correspondance privée comme contrepoint de l’information
officielle.
Collaborations scientifiques
- Sur le plan local et national :
Institut de Recherche en Sciences de l’Information et de la Communication (IRSIC EA
4262 AMI et AMII), Université de Provence-Université Paul Cézanne (Françoise
Bernard) ; UMR 5611 LIRE Lyon : les Gazettes européennes au XVIII° siècle,
responsable Anne-Marie Faivre-Mercier.
- Sur le plan international :
Universidad de Valladolid, Departamento de Historia moderna, contemporánea y de
América, Periodismo y Comunicación audiovisual y Publicidad. Groupe : Iglesia,
discurso religioso y control social durante la crisis del Antiguo Régimen y la
Revolución liberal, responsable Rafael Serrano García (VI° Plan Nacional de
Investigación Científica, desarrolllo e investigación Tecnologica) ; Institut für
Romanistik Universität Graz - Autriche. Équipe : The reception of the Spectator in the
Romance Discourse, Klaus-Dierter Ertler) ; Centro de Estudios del Siglo XVIII de la
Universidad de Cádiz, Espagne. (Fernando Durán López) ; Departamento de Historia
moderna, Universidad de Alicante, Espagne, Armando Alberola ; Departamento
Humanidades Contemporáneas, Universidad de Alicante, Espagne. Emilio La Parra
López.
Seront également mises à profit les collaborations établies lors du précédent contrat
quadriennal (2008-2011), notamment dans le cadre des travaux développés par le
groupe 3 du programme 3 : Culture politique et opinion publique en Europe
méridionale (des Lumières à nos jours) : De la presse aux médias : émergence et
évolutions du quatrième pouvoir en Europe méridionale, avec des chercheurs français,
espagnols, italiens, portugais, anglais et canadiens.
Mise en commun et confrontation des résultats obtenus
Pour faire le point sur les résultats obtenus et les confronter, nous
organiserons des rencontres régulières réunissant les membres du groupe
de recherche, et faisant appel aux partenaires institutionnels tout en étant
ouvertes à tout chercheur intéressé par nos travaux.
Le point d’orgue de ces rencontres sera constitué par un colloque qui
se tiendra au second semestre de la troisième année du plan quadriennal.
Cela afin de laisser le temps au cours de la dernière année d’affiner les
conclusions auxquelles nous serons arrivés et de nous permettre la
53
réalisation d’un ouvrage collectif faisant un bilan critique des résultats
obtenus.
Ce colloque sera précédé de réunions à périodicité fixe permettant de
faire des bilans d’étape en fonction de l’avancée des travaux selon le
calendrier suivant :
1° année :
février : séminaire
avril-mai : séminaire
novembre : Journée d’étude
2° année :
février : séminaire
avril-mai : séminaire
novembre : Journée d’étude
3° année :
février : séminaire
avril-mai : séminaire
novembre : Colloque
4° année :
avril - mai : Journée d’étude
novembre : Journée d’étude
54
B. Opérations communes
1. Atelier transversal « Histoire et sciences sociales »
Responsables : Déborah Cohen, Thomas Glesener
Le projet d’atelier méthodologique, porté par deux jeunes enseignantschercheurs historiens, est devenu, sur l’avis du conseil de laboratoire, une
action transversale de l’unité.
Objectifs
L’atelier se propose d’être un lieu de réflexion et d’élaboration en
commun plutôt que de présentation de travaux achevés. Il s’agit de
favoriser la confrontation des points de vue et des méthodes autour d’un
objet suffisamment large pour permettre leur diversité. La réflexion se veut
avant tout épistémologique et méthodologique, confrontant notamment les
questions de l’historien à celles de la philosophie et de l’analyse littéraire
et, surtout, aux questions, aux outils et aux méthodes des autres sciences
sociales (sociologie, géographie, anthropologie). L’objectif est de créer un
espace de débats sur l’usage des concepts, en s’appuyant tant sur les acquis
récents des sciences sociales que de nos terrains respectifs. Il ne s’agit
nullement d’engager la discussion sur des points d’érudition historienne.
Cet atelier exploratoire pourrait déboucher sur des formalisations plus
précises de projets transversaux (publication, groupe, ANR, atelier
doctoral, etc.), sans que cela soit cependant l’objectif premier.
Fonctionnement
La périodicité sera bimestrielle. Le thème général est décliné en quatre
thèmes annuels. La réflexion commune s’appuie sur :
- la lecture et la discussion par chacun de textes classiques ou d’actualité
éditoriale immédiate (dans ce cas, l’auteur pourrait occasionnellement
être invité à présenter son travail) ;
- ou la présentation rapide par un ou plusieurs membres de l’atelier de
sources ou de méthodes, et leur discussion.
Thématique : Comment décrire le social ?
Pour ce quadriennal, l’atelier souhaite susciter une réflexion autour
des outils actuels de description des comportements et des configurations
sociales, qui constituent l’un des centres d’intérêt forts de l’unité. Au cours
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des vingt dernières années, l’essor des théories de l’acteur a permis
d’affiner notre connaissance du social en déplaçant les analyses des
structures aux individus et des groupes aux liens sociaux. Dans son sillage,
ce changement a permis un profond renouvellement des outils conceptuels
de description du social. Certains d’entre eux continuent de prouver leur
richesse heuristique (catégories, échelles). Néanmoins d’autres ont montré
progressivement des signes d’essoufflement (stratégie, identité, réseaux). Si
ces derniers ont permis de mieux rendre compte de la fluidité du social, ils
semblent aujourd’hui marqués par le souci de décrire la stabilité des
configurations sociales.
Or, les recherches récentes ont eu tendance à insister sur la
fragmentation du social, à souligner ses ruptures et ses discontinuités, à
mettre en avant l’imprévisibilité et la contingence, et à privilégier à la
chronologie longue le temps court des situations. De plus, des notions que
l’on croyait étrangères à la description des comportements sociaux, telles
que l’émotif, l’irrationnel ou l’affectif ont montré qu’elles ont une place
importante dans la compréhension des pratiques sociales.
Enfin, la réflexion sur les outils du chercheur ne doit pas ignorer ceux
employés par les acteurs eux-mêmes pour décrire leur environnement. Les
recherches menées pour préciser le sens de certaines notions (le don,
l’amitié aux époques médiévale et moderne) ont montré toute la fécondité
heuristique d’un retour aux catégories endogènes. Cette tendance récente
s’est accompagnée d’une attention accrue portée aux sources, à leur
vocabulaire et aux conditions de leur production. Dès lors, cet atelier
cherchera à préciser les contours d’un empirisme réflexif comme méthode
d’investigation des sciences sociales.
Articulation annuelle
L’atelier souhaite revisiter chaque année un grand thème des sciences
sociales, en cherchant à mettre en commun des outils qui permettraient de
renouveler nos approches. Ne sont précisés ici que les thèmes de la
première année, laissant la possibilité de s’adapter pour les années
suivantes à l’actualité scientifique.
I. La mobilité sociale
1. Genèse et définition d’un objet d’étude ;
2. Les formes de la mobilité sociale ;
3. Stratégies et contingences ;
4. Mobilités : le spatial et le social.
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II. Formes des rapports inégaux
La question des relations inégales pourra être abordée par le biais de
l’imitation, de la charité ou de l’envie. Leur transposition dans l’espace, par
l’étude de la distance sociale, pourrait également constituer une approche
suggestive.
III. Penser et écrire le social
Par le biais d’une histoire et d’une protohistoire des sciences
humaines, la réflexion pourrait porter sur la construction des catégories
descriptives du social et permettre d’envisager, par exemple, la manière
dont des problèmes politiques et sociaux deviennent à une époque donnée
des objets d’étude.
IV. Acteurs et institutions
Il s’agira ici de revisiter le thème classique des rapports entre individu,
institution et société, en cherchant notamment à souligner que les
institutions ne sont pas uniquement des éléments de stabilisation du social,
mais contribuent aussi à sa fluidité.
2. Journées Jeunes chercheurs
Responsables : Antoine Grandclément, Julien Saint-Roman et Christophe Régina
Ces journées autogérées par les allocataires de l’unité sont ouvertes
aux doctorants de l’ED 355. La nouvelle équipe désignée en 2010 souhaite
les faire évoluer en les diversifiant.
- Un premier objectif de ces journées consiste en un travail critique et
méthodologique des thèses en cours dont la finalité majeure est de faire
progresser la réflexion des recherches engagées à l’aune des critiques
proposées à la fois par les doctorants et les enseignants-chercheurs de la
MMSH. « Exposer-Discuter-Vulgariser » (devise des jeunes chercheurs),
telle pourrait être la finalité de ce type de journée généraliste. La prise en
charge de cette journée devrait être assurée en partie par l’école
doctorale ED 355. Cette journée non thématique aura lieu en décembre.
- Un deuxième aspect serait plus spécialisé. Il s’agira d’une journée
d’études thématique, dont le thème sera proposé un an à l’avance en
avril. Cette journée sera ouverte non seulement aux autres laboratoires
de la MMSH, mais encore aux équipes de recherche externes. Cette
journée d’études sera encadrée par des discutants et des présidents de
séances. Ces présidences seront mixtes et associeront doctorants et
57
enseignants-chercheurs. La prise en charge des doctorants intervenants
extérieurs sera assurée par leur laboratoire de rattachement ou leur école
doctorale.
Cette journée pourrait être proposée au plan de formation académique du
rectorat afin de renforcer les liens entre les équipes enseignantes du
secondaire et le monde de la recherche. Cette journée aurait pour finalité de
présenter l’actualité de la recherche à un public plus étendu. Les actes de
ces journées pourraient faire l’objet d’une publication (numérique ou
papier), soit sur le site de l’UMR, soit dans une version électronique de la
revue Rives méditerranéennes ou, éventuellement, ailleurs.
- Un séminaire trimestriel sera consacré à des points plus concrets de
méthodes et de recherches en sciences sociales. Les doctorants y
confronteraient leurs problèmes et leurs solutions afin de faire progresser
mutuellement leurs démarches. Ces séminaires suivraient un calendrier
fixé à l’avance pour en assurer la régularité et en planifier le
fonctionnement. Ce séminaire serait ouvert aux doctorants et étudiants
de master de l’Université d’Aix-Marseille et au-delà.
La présence de membres statutaires serait très enrichissante, afin
qu’ils puissent critiquer et réagir aux propositions faites dans le cadre de
ces séminaires. Là aussi, nous pourrions envisager des comptes rendus de
méthodologie qui pourraient être publiés en ligne dans l’espace jeunes
chercheurs.
3. Actions récurrentes
Nous signalons pour mémoire quelques-unes des initiatives que
l’unité porte et continuera de porter, outre les tâches de formation
permanente. Pour plus de détails, nous renvoyons à la partie "Bilan".
Séminaires de spécialité et journées à destination du monde enseignant
de l’Académie d’Aix-Marseille
Les équipes disciplinaires perdureront, assurant des prises en charge
spécifiques et continuant à organiser des séminaires à vocation plutôt
méthodologique destinés à la formation des étudiants de master et de
doctorat.
De même, les journées spécifiques organisées avec le Rectorat pour le
public enseignant de l’académie (mais ouvertes aux autres publics)
perdureront. Ces journées – une ou deux par an - ont vocation à présenter
un état des recherches de l’unité sur un thème choisi en commun par les
organisateurs (unité et Rectorat). Les journées « Décryptages », organisées
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avec l’APHG depuis 2009, afin d’analyser une thématique des programmes
de l’enseignement secondaire, sont également destinées à perdurer.
Site de l’unité et ressources électroniques
L’évolution du site, en relation avec la politique de communication de
la MMSH et des tutelles de l’unité, restera une priorité. Elle se fera sur les
indications du comité d’usagers qui vient d’être créé par décision du
conseil de laboratoire. Ce comité a vocation de proposer les améliorations à
y apporter et de susciter ses développements ultérieurs (carnets de
recherche, espaces collaboratifs bibliographiques, bases de données textes
et images, etc.). L’unité est, par ailleurs, attentive aux initiatives concernant
le projet des « Humanités numériques » portée par l’UMS CLEO.
Publications
Tout en poursuivant une politique active d’aide à la publication,
notamment dans le cadre de l’unité et de l’Université, l’unité entend
encourager la diversification des supports (y compris électronique).
La politique de traduction mise en place vise à encourager cette
orientation. Cette aide commence à faire sentir ses effets, mais l’effort
devra être amplifié si les moyens financiers de l’unité le permettent.
La politique d’aide aux revues sera maintenue. Cette volonté passe,
notamment, par une politique raisonnée, appuyée sur les moyens de
communication actuels, de diffusion des travaux réalisés au sein de l’UMR.
Ainsi, la revue du laboratoire, Rives méditerranéennes, a-t-elle été
entièrement repensée ces dernières années, tant sur le plan de son aspect
formel que dans le sens d’une amélioration de sa qualité éditoriale - par
l’adoption notamment d’un système adapté de referees - de manière à
répondre à cet objectif. Les numéros, déjà entièrement accessibles en ligne
au bout d’un an, pourront également, prochainement, être proposés dès leur
parution en format électronique aux personnes abonnées en ligne.
C. Opérations ponctuelles et complémentaires
1. Opérations ponctuelles
L’unité maintient la possibilité de participer à des opérations dites
« ponctuelles », car conjoncturelles, répondant à une demande particulière
et entrant dans le cadre de ses compétences (l’opération « Marseille
capitale de la culture 2013 » donnera lieu, par exemple, à des initiatives de
ce type, en plus de celles qui participent des activités programmées de
certaines équipes).
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2. Réponses aux appels d’offres 2010
La réactivité de l’unité s’est incontestablement affirmée, mais de
façon inégale selon les thématiques et selon les types d’appels d’offres. La
montée en puissance des réponses aux appels d’offres ANR est
particulièrement notable : au premier semestre 2010, sept dossiers ont été
instruits dans le cadre de TELEMME (au lieu de 2 à 3 les années
précédentes). Ces projets, dont l’unité est le porteur ou un partenaire
privilégié, s’inscrivent comme il se doit dans ses axes. S’ils sont agréés,
cette année ou par la suite, ils viendront en soutien à la programmation des
équipes.
Liste des réponses à appels ANR au 1er semestre 2010
Programme blanc GEMMA (obtenu)
Genèse médiévale d’une méthode administrative. Formes et pratiques de la comptabilité
des principautés du Sud-est de la France
Coordination : EHESS. Pour Telemme : Thierry Pécout (MCF Histoire médiévale)
Programme franco-allemand CREAMOBIL
Dynamiques des réseaux sociaux, mobilités de la classe créative et compétitivité des
territoires
Coordination : CRESS-Lessor. Pour Telemme : Sylvie Daviet (PR Sciences
géographiques et de l’aménagement)
Programme Villes durables URBANORM
Homogénéisation biotique, sociale et des morphologies urbaines sur la durabilité des
villes : interactions et mécanismes.
Coordination : LPED. Pour Telemme : Jean-Noël Consalès (MCF Sciences
géographiques et de l’aménagement)
Programme Les Suds aujourd’hui II MAGDEV
Nouvelles migrations maghrébines, mondialisations et développement.
Coordination : URMIS. Pour Telemme : Béatrice Mésini (CR1, section 39)
Programme La création : processus, acteurs, objets, contextes CREALU
Création et Aluminium – de la découverte d’un matériau industriel à sa constitution en
objet patrimonial : invention, innovation, marchés (XIXe-XXIe s.)
Coordination : CRH. Pour Telemme : Philippe Mioche (PR Histoire contemporaine)
Programme Open Research Area in Europa CONVERGENCE
Rôle des activités culturelles et créatives dans les transformations urbaines en France et
en angleterre. Vers une convergence des discours et des pratiques ?
Coordination : LISST. Pour Telemme : Boris Gresillon (MCF Sciences géographiques
et de l’aménagement)
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Programme Changements environnementaux et planétaires TRANSEN
La gouvernance de la transition énergétique
Coordination : CIRED. Pour Telemme : Sylvie Daviet (PR Sciences géographiques et
de l’aménagement).
3. Pôles MMSH et actions IUF
Là aussi, pour mémoire, nous rappelons que l’unité est engagée dans
deux pôles de la MMSH, dont les actions complètent notamment celles de
l’axe 4.
Pôle Espace, représentations et usages (resp. Jean-Luc Arnaud)
Les multiples usages de la cartographie – source, instrument
d’investigation, outil de représentation – intéressent tous les laboratoires de
la MMSH. Depuis 2007, ces activités sont structurées dans le cadre du pôle
transversal Espace, représentations et usages. Ce pôle a pour objectif de
promouvoir un vivier de compétences durables en matière d’analyse et
d’utilisation de la documentation cartographique et iconographique par les
chercheurs en sciences sociales. Il propose une expertise en matière
d’usages des représentations graphiques de l’espace et de géolocalisation
des sources anciennes qui, au-delà du périmètre des laboratoires de la
MMSH, au-delà des SHS et du monde méditerranéen, intéresse un large
éventail de partenaires. Les activités du pôle et ses domaines d’expertise
concernent divers domaines : la formation des étudiants et des chercheurs,
l’élaboration de méthodes et de normes, la recherche scientifique, la
participation à des rencontres professionnelles, la production et la diffusion
de documents cartographiques pour la recherche. Le pôle développe un
nouveau site web pour la valorisation du patrimoine cartographique :
CartoMundi.
Dans le cadre du prochain quadriennal, le pôle envisage trois
activités :
- des rencontres internationales relatives à l’utilisation de la cartographie
dans les études urbaines et en archéologie ;
- le recueil de témoignages de chercheurs qui, au contraire des pratiques
les plus partagées de leur disciple, utilisent la cartographie ;
- la mise en place d’un « guichet » d’accompagnement des chercheurs
qui souhaitent utiliser la cartographie.
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Pôle image, son et pratiques numériques en SHS (resp. : Maryline
Crivello et Véronique Ginouvès, USR 3125)
Ce nouveau pôle a pris la suite du pôle « Images, sons ». Les
humanités numériques, couramment appelées digital humanities, sont en
plein essor en France dans le monde la recherche et de l’enseignement
supérieur. Au sein de cette discipline émergente, le pôle choisit d’explorer
les pratiques d’écriture et de production des savoirs induites par les
nouveaux outils de structuration de données numériques. Pour cela, il
s’appuie sur les cyberinfrastructures mises en œuvre par les grands
organismes de recherche, du monde universitaire, et s’intègre dans un
réseau de partenaires nationaux et internationaux au cœur de la révolution
numérique. L’objectif est d’utiliser les outils déjà créés par les opérateurs
des digital humanities en France et de se s’intéresser aux usages
développés en sciences humaines et sociales, dans le domaine de l’image et
du son. Les outils de diffusion s’appuient sur les plateformes techniques du
CLEO (UMS 3596) de l’Université de Provence qui est une référence dans
ce domaine. Parmi les thèmes définis au sein du Pôle, deux sont en lien
avec les travaux du laboratoire TELEMME.
1. Accompagner des programmes scientifiques : images, sons, archives
Financés sur projets, ces programmes sont aussi l’occasion de
constituer des corpus numériques audiovisuels qui viennent accroître la
masse critique des documents organisés dans les bases de données de la
MMSH.
Le programme MEDMEM (Euromed-Héritage IV–INA-Méditerranée)
Les archives télévisuelles constituent une ressource indispensable
pour appréhender la connaissance d’un patrimoine méditerranéen. Le parti
pris du projet est d’assurer, simultanément, la numérisation, la visibilité
immédiate des archives audiovisuelles de la Méditerranée et la réflexion
scientifique
sur
leurs
usages.
http ://www.ina.fr/video/MAN9104115974/bande-annonce-du-sitemedmem-english.fr.html.
Histoire orale et Médias (MMSH-INA). Un projet en cours d’élaboration
propose de constituer une banque de données audiovisuelles fondée sur des
enquêtes orales auprès des acteurs de la télévision française et si possible
de ceux des télévisions de la Méditerranée. La naissance des télévisions
après-guerre ou dans le contexte des décolonisations fera l’objet d’une
première phase de travail. La constitution de ces sources orales viendra
compléter les acquis documentaires du précédent programme.
62
2. Questionner les pratiques numériques en SHS. Production et écriture en
Méditerranée
Programme : « Je me souviens » (MMSH-MP2013-ZADIG
Productions).
L’appréhension de récits singuliers ou familiaux permet de construire une
mosaïque de savoirs et de compréhensions de l’espace méditerranéen. Sur
les fondements de travaux publiés dans le cadre du Pôle Euromed ou de
l’ANR IMASUD, nous souhaitons décliner le concept perecquien de « Je
me souviens ». Pour autant le projet, plus ambitieux s’articulera autour de
quatre thématiques :
- Recherches en SHS et création cinématographique (production prise en
charge par la société Zadig, avec diffusion sur France Télévision).
Collection audiovisuelle de portraits d’individus emblématiques,
associés à des lieux, archives, etc., qui les relient à l’histoire de la
Méditerranée.
- Exposition autour de ces témoignages-vidéo dans le cadre de
« MarseilleProvence 2013, ville européenne de la culture » (thème d’entrée :
migrations).
- Travail de formation dans deux lieux universitaires expérimentaux
(AixMarseille, Beyrouth) au niveau master sur la capacité d’étudiants inscrits
dans le secteur cinéma à s’approprier le langage, les concepts ou les
démarches des sciences humaines afin de produire une création originale
(projet en cours : Université audiovisuelle de la Méditerranée, portée par
l’INA).
- Dans le courant des Digital Humanities, élaborer un site collaboratif
évolutif
qui rassemble des données documentaires complémentaires à partir d’un
« mur photographique » (en collaboration avec le CLEO- Aix-Marseille
Université).
Actions Institut universitaire de France
Plusieurs membres de l’unité ont été élus à l’IUF et portent dans ce
cadre des initiatives qui seront prolongées dans le quadriennal à venir, soit
par des équipes (E. Larriba), soit de façon complémentaire (D. Boquet, T.
Pécout).
La délégation de Damien Boquet à l’IUF prendra fin en septembre 2013.
Dans le cadre du programme de recherche EMMA (« Les émotions aux
63
Moyen Âge ») qu’il a développé durant le précédent quadriennal, l’année
2012-2013 sera l’occasion d’un bilan général. Ce bilan prendra la forme
d’un colloque international (« Rencontre EMMA 5 »), organisé à
l’automne 2012 en partenariat avec l’Université du Québec à Montréal
(UQAM) et intitulé : « Faire l’histoire des émotions médiévales : bilan et
perspectives ».
Pour Thierry Pécout, les prochaines étapes envisagées sont :
- Poursuite de l’édition critique de l’enquête générale de Leopardo da
Foligno (projet Leopardus) : sur les trente registres manuscrits concernés,
dix sont déjà édités et parus au sein des trois premiers tomes de la
collection, entre 2008 et 2010. Quatre autres registres sont prévus pour
2011 et 2012, sous la forme de trois nouveaux ouvrages publiés par les
éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques. Ce projet, qui a
donné lieu à un colloque international en 2009, dont les actes sont sous
presse (parution à la rentrée 2010), donne lieu à une journée d’études
annuelle et nourrit la réflexion du programme ANR Gouvaren sur le
gouvernement par l’enquête au Moyen Âge.
- En lien avec les recherches précédentes, un programme ANR a été
proposé et obtenu en 2010 sur le thème des comptabilités princières, XIIIeXVe siècles, et de leur rôle dans la mise en place d’un appareil d’Etat et de
la gestion des justices royales (acronyme GEMMA, projet porté par l’UMR
5648 CIHAM, Lyon). TELEMME y recevra la responsabilité de l’étude,
transcription partielle et mise en ligne d’une documentation conservée aux
Archives départementales des Bouches-du-Rhône et, en association avec
cette dernière institution : les registres de clavaires de la Chambre des
comptes de Provence. L’UMR serait également chargée de l’organisation
d’un colloque international en 2012 sur le thème « Apport et influences des
comptabilités urbaines, marchandes et ecclésiastiques dans la genèse d’une
comptabilité princière ».