Lire - Action pour la Famille asbl

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Position synthétique de Christian Brotcorne
Président du Groupe cdH au Sénat
Concernant l’adoption à des couples homosexuels
Dans l’actualité des dernières semaines, la possibilité d’ouvrir l’adoption à des
couples homosexuels a fait la une. La chambre vient de voter le texte
l’autorisant.
Le Sénat, usant de son pouvoir d’évocation, est saisi à son tour du dossier.
Les enjeux d’un tel dossier ne sont pas que symboliques : ils mettent en cause un sujet qui nous tient
à cœur, l’enfant.
1. La position du cdH en la matière :
Elle est très claire. Sans être pour cela homophobes, nous disons franchement non à un projet qui
n’est pas du tout adapté.
Tout d’abord, l’adoption est une figure juridique qui permet une modification de la filiation
d’un enfant qui a pourtant déjà un père et une mère ; l’adoption fait que l’on supprime la famille
d’origine pour créer une nouvelle famille. Une filiation en remplace une autre. Classiquement, cette
nouvelle filiation se fait à l’égard d’un homme et d’une femme, ce qui est somme toute logique
puisque la rencontre d’un homme et d’une femme est encore toujours à l’heure actuelle la manière
d’enfanter… Ce que certains souhaitent maintenant, c’est que cette filiation soit possible à l’égard
de deux hommes ou de deux femmes…
La question fondamentale est celle de l’intérêt de l’enfant et la manière dont son environnement
de base, c’est-à-dire la famille, lui permettra de se structurer en tant qu’être humain à part entière.
Cela étant il existe des situations qu’il convient de régler, sans justement toucher à la notion de
filiation ; il faut abandonner l’idée de l’adoption et se concentrer sur une nouvelle figure
juridique, la parentalité sociale :
cette figure permettrait, sans toucher à la filiation et à l’identité de l’enfant, d’attribuer
l’autorité parentale à une personne qui éduque un enfant qui n’est pas le sien avec le parent
biologique de cet enfant, l’autre parent biologique étant soit inconnu, soit décédé. On règle
aussi les droits de succession, l’obligation d’entretien, la tutelle lorsque le parent biologique
décède,…
Elle assure une égalité de traitement entre tous les enfants. La parentalité sociale permet en effet
de répondre aussi au problème des familles recomposées lorsque les deux parents biologiques sont
en vie et restent investis de l’autorité parentale. Dans ces situations, l’adoption par le nouveau
conjoint ou partenaire qui n’est pas le parent biologique est impossible car elle créerait un lien de
filiation et nécessiterait le consentement des parents biologiques. La parentalité sociale vise à
donner certains droits et obligations liés à l’autorité parentale au parent non biologique qui participe
à l’éducation de l’enfant, sans toucher aux droits et obligations des parents biologiques.
En refusant l’adoption pour les couples homosexuels, le cdH ne désire pas s’attaquer aux
homosexuels mais souhaite trouver une solution alternative plus adéquate en proposant cette
parentalité sociale.
2. Réactions face aux arguments des partisans de l’adoption
Il faut, sur le plan de l’adoption, traiter les couples homosexuels et hétérosexuels de la même
manière :
Notre Réponse :
Le droit à adopter n’existe pas. L’adoption consiste à donner une famille à un enfant et non un
enfant à une famille. Il faut veiller à l’intérêt supérieur de l’enfant. Égalité ne veut pas dire nier la
différence entre les sexes. Avoir des parents du même sexe ce n’est pas la même chose qu’avoir des
parents de sexe différent.
Il faut permettre aux enfants de bénéficier d’un maximum de sécurité juridique quant à la
stabilité du lien qui les unit à ceux qui les élèvent.
Notre Réponse : nous partageons l’objectif !
Il faut légiférer en ce qui concerne l’enfant élevé par une personne qui n’a pas de lien biologique
avec l’enfant. D’ailleurs, la Cour d’Arbitrage demande au législateur de préciser sous quelles
formes et à quelles conditions et selon quelle procédure l’autorité parentale pourrait, dans l’intérêt
de l’enfant, être étendue à d’autres personnes qui n’ont pas de lien de filiation avec lui.
Cependant l’adoption va beaucoup plus loin qu’une extension de l’autorité parentale. Elle va plus
loin que sécuriser des liens familiaux établis : l’adoption instaure un lien de filiation. Or, la filiation
définit l’enfant comme étant issu d’un homme et d’une femme (différence de sexes) et l’inscrit dans
une généalogie (différence de générations). La loi véhicule des symboles et nous ne voulons pas
faire dire à la loi qu’un enfant peut être issu d’un homme et d’une femme ou de deux hommes ou de
deux femmes.
La différence des sexes est l’élément fondateur de notre identité, de la filiation, de la société et il
faut respecter cette différence jusque dans la loi.
Certains enfants auraient une identité/filiation radicalement différente de tous les enfants : une
identité/filiation sexuée chez les uns, et mono sexuée chez les autres.
Les études psychosociales démontreraient que le manque de père ou de mère n’a pas
d’influence sur le devenir de l’enfant :
Notre Réponse : ce n’est pas établi du tout.
Ces études n’ont aucun caractère scientifique et ne prouvent rien. Tout au plus démontrent-elles les
facultés d’adaptation ou d’intégration de l’enfant. De plus, leurs résultats sont contradictoires.
Nous défendons, comme la plupart des psychanalystes, l’idée que l’apport de la complémentarité
des deux sexes est nécessaire pour la construction identitaire de l’enfant (la différence des sexes
incarnée dans un corps d’homme et de femme). Il faut adopter un principe de précaution et ne pas
faire de paris sur l’avenir de nos enfants.
La situation principalement visée que l’on veut régulariser est l’adoption de l’enfant par la
partenaire de la mère biologique
Notre Réponse : ce n’est que partiellement vrai.
a. Cela concerne effectivement de façon majoritaire les situations où une femme ou un homme qui
vit déjà en couple homosexuel décide, dans ce contexte en accord avec son partenaire, de procréer
un enfant, avec ses propres gamètes et les gamètes d’une tierce personne, et d’intégrer cet enfant à
partir de sa naissance, dans le couple qu’il forme avec son partenaire : enfant porté par une mère
lesbienne, le plus souvent après insémination artificielle, enfant porté par une mère porteuse, à
l’intention d’un couple gay, enfant issu d’un contrat de coparentalité, passé entre un couple gay et
un couple de lesbiennes, etc…
Dans ce cas, la question de l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels est intimement liée
à l’accès aux procréations médicalement assistées et à l’anonymat du don de sperme, qui est remis
en question dans beaucoup de pays.
Selon la Cour Européenne des Droits de l’Homme, l’enfant a un droit fondamental à une double
filiation paternelle et maternelle et à « une vie familiale normale » ; la Convention des Droits de
l’Enfant dispose que l’enfant à le droit, dans la mesure du possible, de connaître ses parents et d’être
élevé par eux.
Dans son avis, le Conseil d’État émet par ailleurs de sérieuses objections par exemple à l’égard du
recours à la maternité de substitution. Selon lui, la maternité de substitution ou maternité d’emprunt
appelle de sérieuses objections quant au principe de l’indisponibilité du corps humain, de la dignité
de la femme « porteuse » et du respect des principes résultant de la Convention relative aux droits
de l’enfant quant à la continuité entre la parentalité, en ce, y compris la maternité, et la
responsabilité des parents à l’égard de l’enfant.
b. Mais il ne s’agit pas seulement de ces situations.
Cela peut concerner aussi l’enfant né au sein d’un couple hétérosexuel qui est, par la suite, en
raison de la réorientation sexuelle d’un de ses parents, amené à vivre au sein d’un couple formé par
un de ses parents avec un partenaire de même sexe.
S’il s’agit pour un partenaire homosexuel d’adopter l’enfant de son partenaire dans le cadre d’une
recomposition familiale, il va de soi que cela implique que l’autre parent biologique en vie donne
son consentement. On peut comprendre que cela n’arrivera pour ainsi dire jamais. L’adoption n’est
donc pas un statut juridique satisfaisant. Or, c’est principalement dans ces situations que le besoin
d’une législation se fait sentir.
c. Cela concerne aussi – même si c’est de façon minoritaire - la situation où un couple homosexuel
voudrait recueillir ou accueillir un enfant dont les parents de naissance n’auraient pas pu ou voulu
assumer eux-mêmes l’éducation et qui aurait dès lors été confié à une institution de placement.
Dans ce cas, ouvrir l’adoption aux couples de même sexe, c’est organiser pour l’avenir une filiation
homosexuelle à l’égard d’enfants déjà fragilisés.
Éduquer un enfant adopté est particulièrement difficile, car il s’agit d’enfants en souffrance, en
manque ou en mal de liens.
En cas d’adoption par un couple homosexuel, on ajoute encore un élément d’incertitude et un
« manque » car un couple homosexuel ne peut pas offrir à l’enfant ce que ce couple n’a pas, à savoir
la complémentarité des sexes.
Par ailleurs, en ce qui concerne l’adoption internationale plus particulièrement, les débats qui
traversent plusieurs pays européens à propos de l’adoption par les couples de même sexe
interpellent et inquiètent les autorités compétentes des pays d’origine.
En effet, les États d’origine ont le droit de refuser toute possibilité d’adoption pour un couple de
même sexe .
Tout État a aussi le droit de refuser de reconnaître une adoption par des couples de même sexe pour
des raisons d’ordre public et au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant. Ce qui implique que ces
adoptions internationales seront « boiteuses ». Le Conseil d’État nous rend aussi attentifs au fait que
l’enfant de moins de 12 ans ne peut consentir à son adoption, qu’il faut tenir compte d’une
continuité dans l’éducation de l’enfant ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et
linguistique.
Il faut aussi tenir compte, note le Conseil d’État, des effets d’une telle législation sur la possibilité
pour les hétérosexuels d’adopter des enfants venant d’États qui n’acceptent pas l’adoption par les
couples de même sexe.
Rappelons que le nombre d’enfants légalement adoptables est largement inférieur au nombre
de candidats adoptants.