Dossier de presse EXILITH

Transcription

Dossier de presse EXILITH
DOSSIER
de PRESSE
SAISON 05/06
Exilith
de Reza
Baraheni
d'après l'œuvre en persan, inédite en français
mise en scène Thierry
Bedard
mardi 21, mercredi 22 et vendredi 24 mars à 20h30
jeudi 23 mars à 19h
rencontre avec l’équipe du spectacle jeudi 23 mars à l’issue de la représentation
Création janvier 2006
de Reza Baraheni
musique Daunik Lazro
mise en scène Thierry Bedard
lumière Jean-Louis Aichhorn
réalisation sonore Jean-Pascal Lamand
conseil chorégraphique Aurore Gruel
conseil scénographique Bruno Cluzel
régie générale Gildas Burille
avec
Marie-Charlotte Biais
Aurore Gruel
Daunik Lazro
production
notoire / Paris, Bonlieu Scène Nationale / Annecy
avec l'aide du C.C.A.M. Scène Nationale / Vandoeuvre-les-Nancy
et l'aide de la SPEDIDAM
Thierry Bedard, avec notoire, est artiste associé à Bonlieu Scène nationale d'Annecy
Exilith est l’histoire de la première femme, Lilith, la femme d'avant la femme. Insoumise à
Adam, elle doit fuir : c'est la première exilée.
Reza Baraheni, dans l’inépuisable fond d’histoires liées au mythe, trouve support à certaines
de ses plus étonnantes conceptions sur la poétique et la philosophie, la politique - la femme
et la démocratie – et la théologie - la genèse des grands monothéismes (et de ce qu’il
considère avec humour comme le mensonge théologique premier : dieu est mâle) -, la
sexualité…
Exilith lui permet d’exercer son hilarante ironie aux dépends des puissants, aux dépends des
« mâles » et de la figure de dieu... Mais l’histoire de cette femme révoltée est bien une
histoire tragique.
Exilith
Exilith, une histoire immémoriale
Exilith, c’est l’histoire de Lilith, l’histoire de la première femme, le premier humain femelle.
C’est la créatrice du langage qui fut diabolisée car la langue créée était celle de l’éros pur, la
pure langue du rêve.
Exilith, c’est un théâtre de lutte à mort entre le langage, féminin, et les mythologies, les
religions, les littératures du monde, toutes sous domination du logos, mâle.
Lilith est indomptable. Lilith s’est d’abord volontairement exilée du monde des hommes, dans
les cavernes des bas-fonds archaïques. Puis elle s’est transformée en une créature
impossible, insaisissable pour la seule conscience. Son langage est fait de fragments sans
structure, de langues pré-adamites ou pré-oedipiennes, et tout autant de phrases si longues
qu’on ne peut les serrer dans un livre. Elle apparaît et elle disparaît, elle murmure, elle hurle.
Puis elle se transforme en ce que signifie son nom : Lil, la « nuit ». On l’a jetée dans la nuit
noire ; elle est devenue nuit noire. Elle est la voleuse de feu, la voleuse de subconscient,
celui d’Adam, celui de tous les hommes. Elle s’empare des pensées et des désirs illicites.
Elle plonge Adam et Ève dans le sommeil et les subtilise l’un à l’autre pour les pousser entre
des bras interdits. Elle les immerge dans le remugle de l’inceste qu’on leur avait ordonné
d’oublier.
Lilith combat la métaphore, fondée sur l’autorité d’une chose sur une autre. La métaphore
c’est l’ordre reçu de dieu : « Tu te coucheras sous Adam». Elle combat de même la
métonymie – le signe pour la chose, la cause pour l’effet. On l’a placée aux côtés d’Adam
comme une séquelle de l’homme au centre de toutes les attentions.
Lilith ce sont les mots cachés au creux des oracles. Mais elle ne peut se satisfaire de cela.
Lilith c’est le langage en soi, pas un ersatz. Une langue souveraine, pas une langue
machinale. C’est la langue du rêve, le rêve du langage. C’est une langue de joie pure, de
plaisir, de rêve, qui s’est libérée du sens.
Lilith est le maître du théâtre …
Exilith
un mot de l’auteur
Chers tous,
Exilith devrait être lu pour ce qu'il est : un texte sur les femmes, la femme originale, la
première femme, la femme rêvée.
Mais c’est aussi un texte de la souffrance des femmes partout dans le monde, en particulier
la souffrance des femmes au long des âges sous le joug des trois patriarcats d'Abraham Judaïsme, Christianisme et Islam. C’est aussi la souffrance des lieux de désastres politiques
contemporains, mais se référer seulement aux atrocités de régimes violents politiserait le
texte à un degré qui annihilerait sa valeur artistique.
Sans doute le texte est polémique, mais presque tout ce qui est sérieux est polémique, non ?
J'aime traiter de situations paradoxales et hétérogènes ; j'aime traiter des hybridités, des
désirs cachés pour l'anormalité : l'imaginaire devient très actif dès que vous entrez dans les
divergences de la norme.
Exilith c’est la langue du désir, de l'imaginaire du désir, avec lesquels arrive la douleur que
crée la privation du désir et du plaisir, c’est-à-dire l'oppression.
Je vois ce matériau de prose et de poésie comme un royaume de désir, d'imagination, de
plaisir, et de l’agonie qu'est la privation de tout cela. En ce sens souffrir c'est être privé de
l’accès au plaisir, qui est également l’accès fondamental à l’art. Voyez, même dans la langue
de la religion se distingue le reflet du désir ; c'est pourquoi elle séduit les gens. Lisez ce texte
de ce point de vue je vous prie. Il ne faudrait pas le réduire à une provocation politique ou
religieuse. Nous montons sur scène avec notre désir et notre imagination, et avec la peine
d'en être privé.
Bien à vous, Reza Baraheni
(mail du 8 septembre 2005)
Exilith
note d’intention - Thierry Bedard
Vous répétez depuis quelques semaines Exilith. Quel est ce travail autour d’une des figures
mythiques de la femme ?
Ce travail c’est mettre en jeu deux figures fondamentalement liées. D’une part, la figure du
mythe Lilith, issue de toute une série d’histoires très anciennes, pas la Lilith post-romantique
du 19ème, la femme de mauvaise vie, la prostituée, mais celle que Reza Baraheni est allé
rechercher dans un fond immémorial, avant même la bible, et dans un ailleurs de l’Occident.
Une Lilith qui vient de très très loin…
Et d’autre part, la Lilith, figure de toutes ces femmes dans le monde, ces femmes qui sont
dans un état de souffrance, et aussi dans un état de révolte, bien sûr contre cette souffrance,
mais surtout contre un certain ordre du monde. Il y a des figures de Lilith très
contemporaines ; on les croise sans cesse dans ces endroits de meurtre de masse, de
guerre, de famine, de désastres humains. On a le sentiment de les voir ces femmes, et on
les pressent secrètement mais profondément ancrées au mythe même.
Sans arrêt on cherche à faire apparaître la femme mythique, d’une ancestralité insondable,
et la femme tout à fait contemporaine.
Qui porte la voix de Lilith ?
C’est Marie-Charlotte Biais, une incroyable comédienne, qui porte la voix de Lilith, et auprès
d’elle son double, un double en qui s’incarner. Lilith est un démon femelle, elle ne devient
femme qu’incarnée dans une autre femme, dans le corps d’une autre femme, et même dans
le spectacle, à un certain moment dans le corps d’une enfant de treize ans exposée à un état
de violence extrême.
Mais cette voix de femme porte aussi les autres personnages de bien d’autres histoires, bien
évidemment, Adam, réduit à l’état de pauvre type assez lâche, Eve dont on ne parle même
pas, et surtout Dieu, un dieu vulgaire, un salaud. Lilith est en combat permanent contre Dieu,
bien plus puissant qu’elle, mais elle est très rusée. Dieu est très intelligent, mais ce qui est
extraordinaire dans l’œuvre de Reza Baraheni, c’est qu’il n’a pas de mémoire ! Elle par
contre porte la mémoire du monde, les rêves et les cauchemars du monde, les histoires, et
elle porte le langage qui raconte tout ça. Elle porte « l’obscurité du monde », et elle va
pénétrer dans les rêves de dieu. Et de l’intérieur de ses propres rêves, pendant son sommeil
- car il dort ! - elle peut l’affronter. Le combat est très rude : elle accomplit des actions
radicalement sexuées pour qu’il saisisse l’origine du monde, qu’il a oubliée. Car de fait Lilith
est cette origine même. Et quand elle est au coeur du rêve, Dieu est tellement saisi d’effroi
qu’il se pisse littéralement dessus ! C’est très très drôle…
Puis progressivement arrivent les figures contemporaines de Lilith. Des femmes lapidées,
torturées, qu’on va tuer, souvent pour une raison simple : il est insupportable que ces
femmes jouissent, qu’elles puissent penser le monde comme un état de grâce et de plaisir.
C’est une pensée constante chez Baraheni, qui rejoint son « combat » contre les figures du
patriarcat, que ce soient celles des trois monothéismes ou celles des pouvoirs actuels dans
tout un tas d’endroits dans le monde.
Par la voix de Lilith parlent toutes ces voix - une prostituée, une femme aimée, une enfant
innocente de treize ans, et d’autres voix encore de femmes admirables, contre Dieu et ses
serviteurs, juges et gardiens de l’ordre, violeurs patentés. Il y a même un âne ! un âne qui
me fait hurler de rire !
Cette incroyable matière poétique est la matière même du spectacle. Cette matière est
comme baignée sans cesse d’une matrice sonore, un son qui serait à la fois le son du début
du monde, le souffle même de la terre, le son physique de l’endroit où l’on est, du sol, des
forêts, des montagnes, et de l’endroit d’où l’on naît, du ventre des femmes. Ce son, avant
même d’être musique serait celui d’un lieu d’origine avec ses chaos, sa brutalité, sa violence.
Le tremblement de terre et en même temps le premier cri à la naissance d’un enfant. Et ce
son devrait être aussi le souffle même du verbe de Lilith.
Vous travaillez avec Daunik Lazro…
On cherche une espèce d’accord entre deux dimensions : la voix de Lilith, voix de toutes les
femmes et au-delà de toutes les figures qui oppressent les femmes, et en même temps la
voix de la musique de Daunik Lazro. Il est probable que soient à l’oeuvre des processus
semblables. Quand Daunik travaille avec ses instruments, on n’arrive pas à saisir d’où vient
ce son, qu’est-ce qui se passe entre la pensée et le son émis. Il y a une énigme permanente
dans cette musique. Cette énigme entre la pensée et l’émission de la musique est peut-être
la même qu’entre Lilith et son verbe, entre Lilith et le fait même de raconter le monde.
Vous travaillez avec Aurore Gruel…
Ce qui est assez insensé, c’est que l’on a donc une voix, mais deux corps de femmes. On
cherche dans le concret le corps de cette figure : de quoi elle est faite, quelle est sa peau,
son odeur, comment elle marche, comment elle fait l’amour, et comment elle a d’autres
activités assez troubles. Le travail avec Aurore Gruel est la recherche de la naissance même
de ce corps, et puis de sa mort, la recherche de sa violence avec ses cassures, ses
obstacles. Lilith a passé des dizaines de siècles au fond de l’eau, des millénaires au fonds
des cavernes, elle vole, elle a des fonctions organiques qui lui permettent des prouesses
multiples. Elle se déforme, se réincarne dans toute une série de femmes. On cherche le
corps qui permettrait cette transmutation. D’où naît cette figure, et qu’est-ce qu’elle expose
de ses organes ? Alors, le travail s’est « centré » sur la bouche, les mains et le sexe. Et
comment noue-t-elle son corps autour de sa langue, de sa bouche, de son cerveau…
Pour moi, la figure Lilith est un corps de femme solide, un corps lourd, ancré, qui porte lové
autour de sa tête un autre corps de femme, comme si Lilith serrait sans cesse le cerveau
même d’une autre Lilith, comme pour protéger la mémoire du monde.
Et dans quel décor s’expriment ces différentes « étrangetés » liées au mythe ? Vous
semblez avoir besoin d’espaces impossibles à réaliser. Par exemple, où est Dieu ? Dieu erre
un peu partout, mais il dort dans une maison assez commune, et pas très propre ! Non.
L’univers de ce monde est d’abord celui d’un théâtre. On joue de l’ensemble même de
l’endroit théâtre, avec la scène et la salle. On va partir d’un espace totalement vide et, très
lentement, emplir cet espace architecturé d’un objet simple et souple, un objet qui vole, une
sorte de mauvais tapis persan - Baraheni est iranien n’est-ce pas ? Mais nos tapis persans
sont en fait de pauvres couvertures, comme celles dans lesquelles on enfouit les corps au
moment des catastrophes, celles où s’enroulent ceux qui dorment dans la rue, mais aussi
celles qui protègent nos rêves et nos cauchemars chaque nuit. On va créer à partir de ces
couvertures des espaces architecturés mystérieux dans lesquels erre Lilith, des palais
merveilleux, des cachots… Tout est toujours en mouvement, ces centaines de couvertures
vont comme se mouvoir vers ceux qui en ont peut-être le plus besoin pour se protéger, les
spectateurs… C’est comme si le désordre s’instaurait dans l‘ordre, l’ordre étant celui du
théâtre, du théâtre occidental du moins.
La figure de Lilith n’est qu’un immense cauchemar. C’est la figure même du rêve et du
cauchemar, de ce qu’on ne sait pas, de ce que l’on ne comprend pas, et c’est la figure même
du langage poétique.
RETROUVEZ L’ENTRETIEN DE REZA BARAHENI RÉALISÉ PAR LÉA GAUTHIER POUR LE
MAGAZINE DE BONLIEU SUR : www.bonlieu-annecy.com
à propos de Reza Baraheni
Reza Baraheni est né en 1935 à Tabriz, une des plus vieilles villes du monde située
dans la province d’Azerbaïdjan à l’ouest de l’Iran. Interdit de s’exprimer dans sa
langue maternelle (l’Azéri) il fait ses études à Téhéran, enseigne la littérature
comparée, la poétique anglaise, et s’affirme depuis la fin des années soixante
comme l’un des écrivains majeurs de langue persane, langue qu’il est accusé de «
maltraiter » par ailleurs.
Emprisonné sous le régime du Shah, il subit un premier exil dans les années 70 aux
Etats-Unis, où il est proche des avant-gardes littéraires et des mouvements
féministes. Après la révolution iranienne, il reprend à Téhéran ses activités d’écrivain
et d’enseignant avant d’être emprisonné par le nouveau régime. Libéré mais interdit
d'enseignement, il anime durant plus de dix ans un atelier littéraire clandestin dans le
sous-sol de sa maison, où se forme toute une génération d’écrivains et d’intellectuels
iraniens. Au milieu des années 90 il échappe à plusieurs tentatives d’assassinat et
s’exile définitivement au Canada. Auteur prolixe et érudit, Reza Baraheni a écrit plus
de 50 ouvrages, quasiment tous censurés (voire pilonnés) en Iran : poésie, essais (il
est le théoricien de référence de la poétique persane classique), fictions. Baraheni
est la voix d'un Iran intellectuel et érudit. Une voix qui analyse la culture persane,
mais qui conte aussi des histoires faites de chair et de sang, de silences et de
hurlements, qui frappent au coeur et à l'estomac.
Plusieurs romans ont été récemment traduits en français : Les saisons en enfer du
jeune Ayyâz (Pauvert 2000), Shéhérazade et son romancier (Fayard 2002),
Élias à New-York (Fayard 2004). Un recueil de poèmes d’exil est annoncé aux
éditions Virgile, collection Ulysse, et un CD de poésie sonore (zabâniyyat) chez le
label Vand’oeuvre. Fayard poursuit l’édition de l’oeuvre romanesque avec, en 2006 :
Les mystères de mon pays.
“À toute chose, j'
ai besoin de trouver une cause ; sitôt qu'
une pensée me traverse
l'
esprit, mon cerveau la figure en image je commence par voir, renifler, palper cette
pensée, s'
en forment d'
autres qui me sont aussi chères que la prunelle de mes yeux ;
ces pensées qui surgissent d'
un coup à la surface de mon esprit me sont plus
proches que mes mains. Je ne puis être autrement. La nature n'
est que l'
apparence
des choses que j'
ausculte dans les profondeurs de ma pensée, et j'
ai besoin de
partager mes réflexions avec des créatures de Dieu. Je suis en train de moisir dans
ma solitude. J’ai besoin des yeux insatiables de mes amis pour pouvoir, après mes
longues séances de méditation, mettre mes pensées à l’épreuve.”
à propos de Thierry Bedard
Céramiste de 1974 à 1980, il reprend des études d’histoire de l’art et de sémiologie
au début des années 80 et développe une activité de plasticien (expositions,
performances, installations vidéo). Après avoir coordonné plusieurs manifestations
culturelles (événements, festivals, fêtes politiques), il devient régisseur général au
Théâtre de Gennevilliers, au Théâtre du Radeau, et au Studio Théâtre de Vitry
auprès d’Alain Ollivier. Il travaille ensuite avec Pierre Guyotat pour le Festival
d’Automne (1987-1989) et Claude Régy (1988).
Thierry Bedard travaille depuis 1989, entre autres activités, à notoire, sur un « cahier
des charges », qui l’oblige, à oeuvrer essentiellement sur des auteurs du XX ème
siècle, et à présenter les travaux - spectacles « grand public », de recherche,
spectacles d’intervention, spectacles jeune public –sous forme de cycles thématiques
:
Cycle « Pathologies verbales » (en hommage à Littré) sur l’ordre du discours,
autour de textes de Leiris, Foucault, Caillois, Kassner, Blecher, Bierce, Parain,
Paulhan, Daumal. (de 89 à 92)
Cycle “Minima Moralia”, sur la violence « sociétaire », autour de textes de Broch,
Ramuz, Gide, Le Clézio, Cipolla. (de 93 à 95)
Cycle “Argument du menteur”, sur la violence politique, autour de textes de Danilo
Kîs. En autres : Les lions mécaniques et Encyclopédie des morts. (de 96 à 99)
Cycle “La Bibliothèque Censurée“, en soutien et en hommage au Parlement
International des Écrivains (qui au-delà d’une politique de solidarité active envers les
écrivains persécutés dans le monde entier, grâce au réseau des Villes Refuges, est
un lieu de questionnement sur la place de la littérature et de la fiction dans le
monde). La Bibliothèque Censurée autour de textes de Brodsky, Tabucchi, Nadas,
Manganelli, Pomerantsev ; le Cours de narratologie à l’usage des juges et des
censeurs (2002) de Christian Salmon et La Bibliothèque Censurée : en enfer (2003)
d’après Reza Baraheni ; ainsi que de multiples formes d’intervention sur des textes
de Rushdie, Paz, Vargas Llosa, Curnier… (de 00 à 03)
Cycle “Eloge de l’analphabétisme“, en direction du public universitaire et scolaire.
(de 01 à 05, en cours)
Cycle “Regards Premiers“, muséal, deux commandes du Ministère de l’Education
Nationale / CNDP (L’homme et l’animal fantastique, Les arts de l’Océanie). (de 2003
à 2004)
Le Parlement International des Écrivains à été dissous au printemps 2003, mais
notoire persiste en compagnie de Reza Baraheni, auteur iranien, et a présenté au
Festival d’Avignon 04, une deuxième version du spectacle En enfer et trois « leçons
de poétique », QesKes 1 / 2 / 3.
La collaboration avec cet écrivain d’exception se poursuit, avec une importante
commande : autour de la figure de Lilith. En 2006, Thierry Bedard initie une
recherche au long cours dont un fondement est la rencontre délibérée d’écrivains qui
pensent le monde de manière radicalement autre. Sous le signe de l’étranger(s), ce
cycle débute en mai 2006 par un (faux) Musée des langues du monde pour les
enfants.
à propos de Daunik Lazro
Si le nom de Daunik Lazro nous renvoie à l’histoire du jazz et ses figures marquantes
du saxophone (Ayler, Dolphy, Coltrane, Lacy) qui ont su pousser cet idiome hors de
ses frontières, il serait vain de figer cet esprit libre dans un passé emprunt de
nostalgie.
Daunik Lazro est avant tout un improvisateur hors norme appartenant à la
contemporanéité de la création musicale.
Il oeuvre depuis plus de trente ans à ciseler une musique faite de fureur et de
sensibilité. Au-delà d’un instrumentiste exceptionnel, c’est avant tout un poète
sonore, un passeur de musique qui défait les codes préétablis de toute orthodoxie
culturelle.
Daunik Lazro fait partie des irréductibles de la musique, certainement porteur d'un
souffle unique, un de ces musiciens aux horizons larges et constamment à l'affût de
nouveaux défis. Par le jeu des souffles, des harmoniques, des clés, des
changements de registre avec une rapidité étincelante, et l'utilisation du souffle
continu, Daunik Lazro déploie le chant d'une plainte profonde. Sous-jacente aux
décrochages, sifflets, effritements, barbelures, s'affirme l'identité profonde de la
musique et de la vie.
Parmi ses récentes et mémorables collaborations enregistrées, citons les quatuors
Aérolithes (Michel Doneda, Michaël Nick, Laurent Hoevenars – cd Vand’oeuvre
2005) et Rekmazladzep (Thierry Madiot, Dominique Répécaud, Camel Zekri – cd
33revpermi 2005). Son album solo (saxophones alto et baryton – Zongbook – cd
Émouvance 2000) est une référence.
à propos de Marie-Charlotte Biais
Comédienne formée au Conservatoire de Manosque et au CNSAD de Paris (2000)
elle est très impliquée dans les activités scéniques de comédiens, auteurs et
metteurs en scène de sa génération : Bruno Blairet, Hédi Tillette de Clermont
Tonnerre, Olivier Coyette, Marc Lainé, Vincent Macaigne, Lisa Pajon, Jeanne
Videau…, avec qui elle mène de nombreux projets, et fait un moment partie du
Noyau de comédiens de Théâtre Ouvert.
Comédienne elle travaille avec Joël Jouanneau (Le pays lointain de Lagarce en
2001, L’Adoptée en 2004), Baki Boumaza (Noces à Tipasa de Camus), Alain Timar
(Les chaises de Ionesco) ou Thierry Collet (Maître Zaccharius de Verne).
Avec Thierry Bedard elle poursuit, comme comédienne et danseuse, une
collaboration liée à l’oeuvre de Reza Baraheni : après La Bibliothèque Censurée : en
enfer en 2003, ce seront En enfer (2 ème version) et les « leçons de poétique »
QesKes 1, 2 et 3 au Festival d’Avignon 2004.
Metteur en scène, elle dirige la création de Bonheur d’Olivier Coyette (2003), met en
scène Extermination du peuple de Werner Schwab avec des marionnettes, et
dernièrement Carmelle ou la déraison d’être de Vincent Macaigne.
à propos d’Aurore Gruel
Artiste chorégraphe de formation classique, Aurore Gruel débute la danse
contemporaine à 20 ans, tout en poursuivant des études de philosophie. La
rencontre avec le chorégraphe Michel Raji est déterminante dans son parcours.
Elle participe à des projets alliant danse et théâtre puis, installée en Lorraine, elle
poursuit dans un premier temps un travail dans le théâtre tout en développant une
activité de recherche en danse très personnelle autour de l'improvisation qu'elle
considère comme une discipline à part entière.
Elle explore sa propre identité au travers de rencontres avec des musiciens,
vidéastes et plasticiens. La danse est un cheminement qui se fait en relation étroite
avec l'écoulement de mots : en même temps que les expériences se font, il faut
noter, tracer en mots le flux d'existences. Éprouver le jeu de l'impression et de
l'expression.
Aurore Gruel est cofondatrice de la compagnie Pendule avec Jean Didion et Ishrann
Silgidjian en 2002 (vidéo danse image - Cellule (duo danse vidéo), Accordé-ondanse (duo musique danse) r-zéro (danse musique vidéo lumières) ; fondatrice de la
compagnie Ormone en 2004 (Espaces privés partagés, Atopos contrebasse danse
lumière, Hay que caminar contrebasse danse avec Louis-Michel Marion, Amont Aval
contrebasse danse lumière vidéo avec Louis-Michel Marion, Grégory Nadé et Arnaud
Hussenot, Temps de fonte travail plastique et chorégraphique autour de la glace
avec Emilie Salquebre et autres collaborations, Les filles à la rue trio corps cordes
avec Aude Romary [violoncelle], Emilie Weber [violon], Terreux saxophone danse
avec Sébastien Coste.
Elle participe aux créations de l'ensemble pagaille, depuis 2003 multiplie les
rencontres plus impromptues avec des musiciens et danseurs (Michel Doneda, Lê
Quan Ninh, Camille Mutel, Marie Cambois, Jean-françois Pauvros, Dominique
Répécaud, David Chiesa, Marc Pichelin...).
notoire
mises en scène Thierry Bedard (sauf mentions contraires)
1989 Pathologie Verbale I / L’origine des langues
Alphabet - Michel Leiris
Sept propos sur le septième ange - Michel Foucault
Lésions de certains mots dans le cours de l’usage - Emile Littré
Dictionnaire des onomatopées - Charles Nodier (production Théâtre de la Bastille / Paris)
1990 Pathologie Verbale II / L’ordre du discours
Parler, crier, chanter - Michel Leiris
La Brouille - Roger Caillois
La Chimère - Rudolf Kassner (production TGP / Saint-Denis)
1990 Vive Valeque
Récit d’un jeune médecin - Mikhaïl. Boulgakov (MeS: E. Pommeret)
Une Main - Charles-Ferdinand Ramuz (MeS: E. Rodrigues)
Les Mutilés - Herman Ungar (MeS: M. François)
Ma musicienne est morte... - Louis Wolfson (MeS: A. Neddam)
La Tanière éclairée - Max Blecher (production Théâtre en actes, Théâtre de la Bastille /
Paris)
1990 Pathologie Verbale III / L’ordre du discours
Ce qui tient lieu de cervelle aux imbéciles - Ambroise Bierce
J’ai Faim - Brice Parain
Le don des Langues - Jean Paulhan
Têtes fatiguées - René Daumal
Double trouble - Alain Neddam (MeS: A. Neddam)
La Tyrannie - Roger Caillois (production Le Cargo / Grenoble, Festival
d’Automne, Théâtre de la Bastille / Paris)
1992 Entretien avec Michel Leiris
mise en ordre de Jean Jamin (Production TGP / Saint-Denis)
1992 Minima moralia / Première leçon : L’Indulgence
Un mépris singulier - Herman Broch
La Tour d’Ivoire - Charles-Ferdinand Ramuz
Optimiste et pessimiste - Italo Svevo (MeS : H. Gailly), (production Le Cargo / Grenoble,
TGP / Saint-Denis)
1992 Minima Moralia / L’homme et sa conscience
texte de André Gide (production Festival Nouvelles Scènes / Dijon)
1993 Minima Moralia / Deuxième Leçon: La Cruauté
Le Factice - J.M.G. Le Clezio
Le charme et l’épouvante - Marcel Moreau (MeS: S. Jobert), (production Le Cargo /
Grenoble, TGP / Saint-Denis)
1994 Minima Moralia / Les lois fondamentales de la stupidité humaine
texte de Carlo Maria Cipolla (production Le Cargo / Grenoble, La Rose des Vents /
Villeneuve d’Ascq)
1995 A la foire / A la foire
texte de Michel-Pierre Edmond, (production La Halle aux Grains / Blois, La Ferme du
Buisson / Marne la Vallée)
1997 Argument du menteur / Les lions mécaniques
texte de Danilo Kis (production La Halle aux Grains / Blois, Centre Georges Pompidou /
Paris)
1997 Argument du menteur / Guerre au troisième étage
texte de Pavel Kohout (production Comédie de Picardie / Amiens, Théâtre des quartiers
d’Ivry)
1998 Argument du menteur / Encyclopédie des morts
texte de Danilo Kis (production TGP / Saint Denis, Bonlieu / Annecy, Théâtre des Treize
Vents / Montpellier)
2000 la Bibliothèque Censurée (spectacle inaugural)
textes de Tabucchi, Nadas, Pomerantsev, Brodsky, Manganelli (production Bonlieu / Annecy,
Région Centre, Conseil Régional Rhône-Alpes)
2002 la Bibliothèque Censurée / Cours de narratologie à l'usage des juges et des
censeurs
texte de Christian Salmon (production Théâtre Dijon Bourgogne, cdn / Orléans)
2003 la Bibliothèque Censurée : en enfer
texte de Reza Baraheni (production La Filature / Mulhouse, Bonlieu / Annecy , cdn / Orléans,
Le Cargo / Grenoble, La Ferme du Buisson / Marne la Vallée)
2004 En enfer
texte de Reza Baraheni (production Festival d’Avignon, Bonlieu / Annecy, La Ferme du
Buisson / Marne la Vallée)
SPECTACLES JEUNE PUBLIC
1991 Pathologie verbale / A.e.i.o.u.
texte de Thierry Bedard / collectif (production Résonances / St Nazaire, Enfantillages / TGP /
St-Denis)
1992 Pathologie verbale / Comment s’est fait l’alphabet
texte de Thierry Bedard (production Enfantillages / TGP / Saint-Denis)
1993 Minima Moralia / Leçon de morale
texte de Thierry Bedard / collectif (production Enfantillages / Le Cargo / Grenoble, Athenor /
Saint Nazaire)
1993 Lecture pratique / Les Blancs
texte de Mona Thomas (production Bibliothèque Publique / Marne-la-Vallée)
1994 Lecture pratique / Lecture pratique
texte de Thierry Bedard (production Le Grand Bleu / Lille, Les Plateaux / Angoulême,
Théâtre Jean Lurçat / Aubusson, La Halle aux Grains / Blois, Théâtre du Pélican / ClermontFerrand, Résonances / St Nazaire, Centre Culturel de l’Albigeois / Albi, La Rose des Vents /
Villeneuve d’Ascq)
1999 L’envers de l’harmonie / notes contre notes
musiques de Bartok, Berio, Bernstein, Schostakovitch... (production Bonlieu / Annecy, Cité
de la Musique / Paris)
2000 La "Presse" de la Bibliothèque Censurée
texte de Bohrumil Hrabal (production la Région Centre / Les Chemins de la Démocratie)
2003 Regards Premiers / Archéologie
texte de Thierry Bedard (production Centre National de Documentation Pédagogique)
2004 Regards Premiers / Arts de l’Océanie
texte de Thierry Bedard (production Centre National de Documentation Pédagogique)
SPECTACLES D’INTERVENTION
1993 Minima Moralia / Conférence autour d’Adorno
(production Le Cargo / Grenoble)
1994 Minima Moralia / A propos de la société humoristique
(production La Rose des Vents / Villeneuve d’Ascq)
1996 argument du menteur / Les arguments 1 : L’acte de communiquer
d’après Paul Watzlawick (production La Halle aux Grains / Blois)
1997 argument du menteur / Les arguments 2
d’après Roger Caillois (production Festival Paroles Plurielles / Blois)
1998 argument du menteur / Les arguments 3 : Traité sur la pomme de terre
texte de Danilo Kis
1999 les Conversations / Conférence à la mémoire d’Herbert Read
d’après Salman Rushdie (production Théatre des treize Vents / Montpellier)
2000 les Conversations / Le pouvoir de la fiction
d’après Mario Vargas Llosa (production La Comédie / Valence)
les Conversations / Conférence en hommage à l’autre Voix
d’après Octavio Paz (production Bonlieu / Annecy)
les Conversations / Le devoir d’accepter
d’après Arthur Koestler (production Bonlieu / Annecy)
les Éloges de l'analphabétisme / Rencontre avec Howard Marshall
d’après Hans Magnus Enzensberger (production Conseil Régional Centre)
2001 les Éloges de l'analphabétisme / Conférence sur l’analphabétisme dans le monde
texte de Thierry Bedard (production Bonlieu / Annecy)
les Éloges de l'analphabétisme / Exposition sur l’analphabétisme dans le monde
texte de Thierry Bedard (production Bonlieu / Annecy)
2002 les Conversations / Le rire manifeste
d’après Jean-paul Curnier (production La Filature / Mulhouse)
2004 les Éloges de l'analphabétisme / Conférence sur l’analphabétisme dans le monde
texte de Thierry Bedard (production La Passerelle / Gap, Bonlieu / Annecy)
Journal l'
Humanité
RUBRIQUE CULTURES
Article paru dans l'
édition du 23 janvier 2006.
CULTURE
Un poète à l’âme ouverte et au regard persan
OEuvres . L’écrivain Reza Baraheni emprisonné et torturé en Iran sous le shah puis sous Khomeiny, exilé au
Canada, nous livre quelques aspects de son expérience.
L’écrivain iranien Reza Baraheni présentait Exilith, à Gap, mise en scène par Thierry Bédard. Auteur d’une
cinquantaine d’ouvrages, tous censurés, voire pilonnés dans son pays, romancier, essayiste, théoricien de
référence de la poétique persane classique, il est la voix d’un Iran intellectuel et érudit, attentif au sort des
femmes. Souvent comparé à Bataille, qu’il avoue ne pas connaître, ou à Sade dont il affirme : « C’est un écrivain
du mécanisme des postures, je suis un auteur ontologique », Reza Baraheni est à la tête d’une oeuvre de facture
moderne, voire sous certains aspects post-modernes, « car, dit-il, le post-modernisme découle de l’évolution
disharmonique de l’Histoire ». Ce lecteur inlassable, qui a découvert Ezra Pound, Nietzsche et Kafka à dix-sept
ans, a bâti une oeuvre fragmentaire à dessein, ignorant les frontières « comme, dit-il, les personnages au-dessus
des toits de Chagall ». Ces textes sont acérés, nerveux, insolents, pleins d’effroi. Professeur de littérature
comparée, commentateur de la littérature classique persane, Reza Baraheni a formé toute une génération
d’écrivains et d’intellectuels iraniens, en cachette du régime. Nous l’avons rencontré dans un café début janvier.
Voici ce qu’il nous a dit :
« Peu après l’arrivée de Khomeiny au pouvoir, les meurtres ont commencé. Les intellectuels, les gens de gauche,
les communistes ont été jetés en prison, puis fusillés. En 1981, je suis emprisonné. Un jour de prison sous
Khomeiny est alors pire que cent jours sous le régime du shah. J’ai été torturé physiquement sous le shah, mais
sous Khomeiny, je subis la pire torture psychologique qui soit durant trois mois. Le gouvernement de l’ayatollah
fusille plus de huit mille jeunes gens sur une simple question : « Faites-vous votre prière, oui ou non ? » Il
orchestre un mini-holocauste et les meurtres continuent encore après la mort de son chef. Son régime est un
régime d’étouffement, dont les femmes sont les premières victimes. Dans la prison d’Evin, en 1981, lors des
rassemblements, malgré mon bandeau de prisonnier, je perçois la présence d’un grand nombre de femmes.
Aucune oppression dans l’Histoire n’est comparable à l’humiliation qu’elles subissent. Leur héroïsme n’a pas
d’équivalent jusqu’ici. À Lilith, figure maîtresse de ma pièce Exilith, victime de l’étouffement phallocratique durant
plusieurs millénaires, s’ajoute le bâillonnement dont sont victimes les femmes iraniennes depuis quelques
décennies. »
« Je suis emprisonné une seconde fois parce que je défends les femmes et que je suis à la tête de l’Union des
écrivains iraniens. Je venais d’écrire l’Histoire de la masculinité, premier ouvrage à traiter de l’oppression des
femmes et à révéler les racines de la domination masculine, bien avant l’apparition de l’islam en Iran. Ce roman
d’une centaine de pages a été réduit à un chapitre du livre les Cannibales couronnés. Je suis relâché avec
l’interdiction d’enseigner. En 1990 commence la période dite des « meurtres en série ». Ces assassinats
prennent essentiellement pour cible les intellectuels. Mon nom figure en bonne place sur leur liste. En 1994, alors
que je me trouve à l’étranger pour deux semaines, ils encerclent ma maison pour me signifier que si je rentre en
Iran, on m’arrête. Je fais une demande de réfugié pour le Canada, où je vis depuis. Je dois dire que de l’héroïsme
de tous ces jeunes gens au destin tragique est sortie une littérature iranienne brillante. Je reviens en arrière. La
révolution constitutionnelle iranienne, l’une des premières d’Orient, a eu lieu il y a cent ans, quarante-cinq ans
avant celle de la Chine, dix ans avant la révolution russe. Dans une étape suivante, à cause de l’argent du
pétrole, plus de 100 000 Iraniens ont pu faire leurs études en Occident, d’où cette fusion entre deux pensées.
Avant même d’avoir atteint la modernité industrielle, l’Iran avait acquis une modernité littéraire. Nous avons un
sentiment d’ambivalence envers l’Occident. Nous aimons sa culture, sa démocratie, sa science, mais nous
détestons son colonialisme, son impérialisme. Cette ambivalence se retrouve au coeur de la littérature iranienne.
En dix ans, il y a eu une profusion d’oeuvres modernes, post-modernes, réalistes. Ce tiraillement a façonné une
littérature post-coloniale, avec l’émergence d’un nouveau type de narration et une nouvelle façon d’articuler le
récit. C’est très proche de ce que je retrouve en Amérique latine mais aussi de ce que peut produire un écrivain
comme Milan Kundera. Je suis Azéri mais je m’exprime et j’écris les 9/10e de ma production en persan, car ma
langue maternelle m’a été interdite. Je suis donc fragmenté, écartelé, exilé de surcroît. L’Occident a placé un
couteau sur mon âme, m’a divisé en deux et mon âme est restée ouverte comme ça (il ouvre sa paume - NDLR).
Le persan est une langue très rythmée, fragmentée par la respiration. Quand l’islam a interdit la danse, la poésie
a commencé à danser. C’est une des grandes influences de ma pensée. En tant que personne non religieuse, je
suis influencé par les langues qui naissent au croisement de la vie et de la mort. Cela donne Lilith. »
Propos recueillis par Muriel Steinmetz

Documents pareils