article importation poulet afp
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Le poulet mondial L’industrie de la viande européenne décharge des milliers de tonnes de poulet, difficilement vendable sur le marché européen dans les pays africains en voie de développement et y cause la faillite des paysans avec ses prix moins chers. A la recherche des traces. Article de MICHAEL OBERT UND MATTHIAS ZIEGLER (FOTOS) Comme un prisonnier l’homme dans son pantalon plissé gris, chemise rayée se presse contre les barreaux de bois ; son regard donne dans la morosité de la stalle vide. Les câbles d'acier pendillent encore de la tôle ondulée, sur lesquels jusqu'à il y a quelques mois, étaient accrochées les mangeoires. Sur le fumier desséché charge un silence étrange. "Ici, j'élevais mes poulets ", dit doucement Kudjo Moussou Winson; et pendant un moment passent dans ses yeux les lumières du temps où le monde des aviculteurs était encore intact. "Ils étaient ma vie." Kudjo livrait 30.000 poulets chaque année aux restaurants, hôtels et marchés de Lomé, la capitale du Togo (pays d'Afrique de l'Ouest). Avec 25 employés sa petite entreprise avait un chiffre d'affaires annuel équivalant à 150.000 euros. Une lueur d'espoir pour le pays en développement désespérément pauvre. Puis les importations de poulets congelés inondèrent le marché´, originaire de l'Union européenne, des États-Unis et du Brésil. 12.000 tonnes, les pays industrialisés exportèrent en 2013 vers le Togo avec ses à peine six millions d'habitants. Sur ces dix dernières années, cela représente une augmentation de 600%. du à des prix défiant toute concurrence sur les marchés. Au Togo - 5000 milles nautiques et 18 jours de Voyage de bateau de Hambourg – le poulet allemand est deux tiers fois moins cher que le domestique. Les frais de transport sont négligeables. Nous avons voyagé au Togo, pays où l'Allemagne était de 1884 à 1914, puissance coloniale, afin de nous lancer sur la piste d'une espèce bien répandue mais peu connue. Son histoire commence dans nos abattoirs [en Allemagne] et se termine à travers un enchainement de préférences d’achat et d’affairisme sans scrupule sur les marchés d'Afrique de l'Ouest. Là-bas l’animal en question, détruit l’existence et la santé de milliers de personnes. Nous sommes sur la piste du poulet mondial. Chez nous, à la maison [en Allemagne], la poitrine blanche et tendre du poulet est très populaire en raison de sa faible teneur en gras. Dans les supermarchés allemands les filets de poitrine constituent près de 80% de poulet vendu. Donc, le filet finance principalement le poulet entier."Les résidus de viandes européennes ruinent nos prix", dit Kudjo, il perce avec un bâton dans la boue, pendant que nous traversons son étal vide. "Le prix que nous pouvons encore demander pour nos animaux aujourd'hui, ne couvre même pas leur coût." Le reste – en particulier les ailes, le cou, les pieds, les os, les abats – représentent pour de nombreux producteurs des déchets, qui doivent être éliminés aux coûts élevés. Mais l'industrie de la viande a trouvé un Cet article a été publié en Allemagne dans le Journal de Greenpeace en moyen d’économiser ces coûts : ce que Août 2014. Traduction en Français : Andrea Müller-Frank (Association de l'Europe ne mange pas, est expédié en tant Conseil Chrétiens et Eglises en Afrique l’Ouest, ACCEAO). que viande congelée vers l'Afrique et ven1 experts agricoles avertissent que la viande à bas prix de provenance des pays industrialisés, bloque après des années de guerres civiles, la reconstruction de l'agriculture et la sécurité alimentaire, menaçant le processus de paix fragile. Le "poulet mondial" congelé détruit le prix des aviculteurs dans les pays d’Afrique de l’Ouest. Kudjo avait investi dans l'élevage de volailles ; il avait contracté des crédits, construit des étables, formé un personnel, mais parce qu'il ne pouvait pas suivre les prix de pacotille européenne, il a dû fermer sa ferme et renvoyé les employés. De sa vision, de promouvoir le développement du Togo avec du poulet de chair fraîche, seules les dettes sont restées : "17 millions de francs CFA" dit-il encore en secouant, décontenancé, la tête ; converti cela fait 26 000 €. Une fortune dans l'un des pays les plus pauvres du monde. Depuis 2010, l'UE a augmenté ses exportations de viande de volaille vers l'Afrique de 182%, et l'Allemagne a presque triplé les siens au cours de la même période. L'an dernier, 42 700 tonnes de viande de volailles allemandes ont inondé les marchés africains. Avec des conséquences dévastatrices : Au Togo avant les importations de masse, chaque année, dix millions de poulets couveraient la demande de viande. Il y en reste aujourd'hui que le peu qui habituellement sert à la subsistance dans le village. Au Bénin voisin, au Ghana, même au Congo – les aviculteurs luttent partout pour la survie compte tenu de l'afflux d'importation. Au Libéria et en Sierra Leone, des Sur l’abattoir, le marché de la viande de Lomé, l'affaire s'est effondrée complètement. "On ne sait plus vers qui se tourner", dit Mme Akakpo Lalevi , vendeuse de poulet, en essuyant les larmes de son visage. Cette mère de trois enfants à trente ans est assise pieds nus entre les paniers tressés de branches d'acacia où les poulets picorent de la farine de maïs. Avant la crise de l'importation leur famille vendait jusqu'à 1000 têtes (volailles) par mois. "Maintenant, à peine 80," dit Lalevi et s'échine à sourire amèrement. "Ce n'est pas la peine de les compter encore". Le prix par kilo de poulet domestique est en moyenne 2300 francs CFA, l'équivalent de 3,50 € ; comme partout ailleurs en Afrique de l'Ouest, il est vendu vivant sur l’abattoir et abattu devant les yeux du client à la demande. Toutefois, le kilo de viande congelée importée d'Europe est déjà disponible pour 800 CFA (1,20 €). Bien que les poulets africains La ferme “mon espoir” à Avétonou tombait en faillite quand le prix commençait à chuter à cause du poulet importé. 2 soient prisés pour leur viande savoureuse, en raison de la différence radicale des prix, les Togolais, se les permettent seulement à des occasions extraordinaires. Il y a des jours que Lalevi ne vend pas un seul animal. Elle ne sait pas comment payer les frais de scolarité de ses enfants. "Ne nous envoyez plus de poulets," nous suppliet- elle, "vos poulets nous tuent." Il était une fois que le poulet était robuste, il servait aux anciens Germaniques comme offrandes funéraires et il pouvait facilement atteindre 15 ans. Aujourd’hui – transformé en animal de haute performance dans des étables européennes – en moins de 40 jours il accumule près de deux kilos de poids d'abattage. Conformément à la demande des consommateurs, l'industrie a créé des races aux seins gigantesques. Ils sont appelés « Cobb 500 » ou « 308 Ross » et sont délivrés avec un manuel d'instruction qui explique comment la créature doit être traitée dans les écuries géantes entièrement automatiques sous illumination permanente avant qu’à la fin de leur courte vie, ils soient jetés dans des boîtes en plastique sur une chaîne de montage, gazés au CO2, coincés à des crochets et démontés avec des lames de coupe automatique de sorte que, pas un seul gramme de graisse de trop ne reste, et que toute chose qui pourrait déranger les clients soit éliminée. Dans la vitrine réfrigérée du supermarché rien ne doit plus rappeler à l’animal. Près de 630 millions de poulets de chair sont abattus chaque année en Allemagne. Surtout en Basse-Saxe, la Mecque d’engraissement en Allemagne, là-bas, sans cesse de nouvelles écuries de masse ont vu le jour ces dernières années. De plus en plus, toujours moins cher, c'est le principe des entreprises de volaille. Ils produisent beaucoup, beaucoup plus que les Allemands peuvent manger. " L’Europe est en train d’endommager ou de détruire l'élevage et l'engraissement de l'Afrique l'Ouest et Centrale avec ses résidus," explique Francisco Marí, expert agricole de l'organisation de développement « Pain pour le Monde », qui depuis des années, critique les exportations de masse. "Les prix de la viande de provenance de l’Allemagne et de l'UE sont injustes et constituent le dumping interdit en Afrique de l'Ouest." À Lomé Kudjo n'a dit aucun mot pendant tout le voyage de sa ferme ruinée jusqu’à la ville. Lorsque nous arrivons à sa maison penchée par le vent, il nous emmène dans le petit enclos du jardin et prend sur le bras, l'une des poules avec lesquels il se débrouille maintenant. Mais tout comme lui, de nombreux éleveurs de volailles ont virés à la production des œufs, par conséquence les prix sont arrivés au ras des pâquerettes. Les dettes de Kudjo pèsent lourd. Il n'a plus de compte bancaire. La maison familiale, il a dû la vendre et vit maintenant avec sa famille sans électricité et eau courante entassée dans un espace confiné. "Les poulets sont ce que je fais de mieux", dit Kudjo en laissant glisser tendrement ses doigts à travers le plumage arrière de la poule. "Tout ce que je suis, je le dois aux poulets." De nombreux éleveurs de volailles, comme Monsieur Kodjo Winson, ont viré à la production des œufs. 3 Tout au long de notre voyage, nous rencontrons des affectés. Non seulement les aviculteurs et vendeurs de poulet, mais aussi les bouchers, les éplucheurs et producteurs d’alimentation sont confrontés à la catastrophe. Producteurs de Bovins, de porcins, d’ovins et de caprins, même les pêcheurs perdent leurs clients, car ceux-ci se tournent vers des viandes importées à bas coûts. Des marchés entiers s'effondrent. Mais les poulets congelés importés ont beaucoup plus de conséquences négatives : les recherches récentes du laboratoire d'hygiène alimentaire à Lomé ont montré que la viande européenne à bas prix ne menace pas seulement l'économie locale, mais aussi la santé de nombreux consommateurs Africains. "Ce que les sociétés ne peuvent pas vendre en Europe, ils envoient à l'Afrique, parce qu'ils croient qu'ici la qualité ne pèse pas autant », dit Kazia Tchala, le Directeur du laboratoire. Sur des tables d'examen blanches et carrelées, entourées de tubes et centrifuges, il examinait régulièrement la viande congelée importée. À son arrivée à la douane de Lomé, la viande est déjà souvent contaminée. "Au cours de son chemin à travers les entrepôts frigorifiques et les marchés jusqu'au consommateur le risque remonte de façon spectaculaire», dit M. Tchala. Dans les pays tropicaux d'Afrique de l'Ouest souvent une chaîne de froid intégrée n'est pas garantie. Dans de nombreux endroits, il n'y a pas d'électricité, même dans les capitales, il y a souvent des coupures. "Sur les marchés de Lomé plus de la moitié de la viande importée n'est plus appropriée pour la consommation humaine". Régulièrement le scientifique y découvre pourriture, dégradation, et moisissure, mais aussi la contamination par des matières fécales animales ou humaines, par lesquelles on peut tomber malade, seulement lorsqu’on touche la viande contaminée. Donc, avant même que la viande ne finisse dans l’assiette. "Intoxication alimentaire, typhoïde, diarrhée causée par des salmonelles et d’autres bactéries…" M. Tchala énumère les maladies qui peuvent être mortelles dans les cas graves. "Nos hôpitaux sont pleins de patients ayant mangé la En haut : Avétonou jadis un centre de production de volaille au Togo. A droit : Christian Houenon, aviculteur qui ayant viré à la production d’œufs, A gauche : Kazia Tchala, Directeur du laboratoire de contrôle des aliments à Lomé. viande importée". Au Togo manger de la viande de poulet importée, c'est comme jouer à la roulette russe : vous faites mieux avec vos yeux fermés. Les importations de poulet sont surnommés "Les poulets de la mort" par ceux qui au Togo sont contre. Est-ce que ce sont des exagérations de personnes dont le moyen de subsistance a été détruit? Sur l’abattoir de Lomé, nous nous présentons comme des restaurateurs, qui veulent acheter de grandes quantités de cuisses de poulet. Un commerçant de son congélateur nous présente des cuisses importées. Le carton déchiré a des traces d'eau à mesure qu'ils surviennent lors des décongélations et « re-congélations » perpétuelles. Les jambes qui viennent à la lumière sont à l'intérieur, recouvertes de grandes taches de moisissures noires. 4 Nous sommes à la rencontre du poulet mondial: génétiquement appauvri et rempli d’antibiotiques, engraissé, gazé au CO2, démonté, emballé et expédié pour l'élimination à travers le monde, afin d'atterrir à la fin sur les marchés des pays en développement d'Afrique - déchets de viande. soit exportée vers ces pays, et qui prend en compte qu'elle ne parvienne jamais en état bien comestible aux utilisateurs finaux, agit d’une manière irresponsable. Cela, même si la viande est encore sans risque au point de départ de son voyage »". Avec un ongle le commerçant sur le marché de Lomé de poulet gratte sur les taches noires de cuisses de poulet. "Ça se fera plus voir, une fois que la viande est cuite et arrangée sur l'assiette" dit-il. L'étiquette de l'emballage explique l'origine des cuisses de poulet contaminées. Ils viennent d'Allemagne. De la société « Stolle » de Visbek en Basse-Saxe. Le processeur du poulet fait partie du groupe international « Plukon Food Groupe ». La société-mère néerlandaise est l'un des plus grands producteurs de poulet en Europe. Avec le slogan « Volaille de caractère fine » « Stolle » promet "de haute qualité et de délicieux produits de la volaille." Sur le site de la compagnie on poursuit : "en jouant la sécurité, nous surveillons chaque étape de la production précisément. Chaque produit est vérifié avec grand soin et consciencieusement par nous". À notre demande écrite à l’entreprise « Stolle », nous répond laconiquement Bernhard Lammers, l'un des gérants d’affaires : "Depuis que nous ne travaillons pas directement avec ces commerçants en question, nous ne pouvons pas comprendre le circuit complet du produit". Pour le poulet contaminé au Togo, l’entreprise se décharge de toute responsabilité. Puis, l'Association fédérale de l'industrie allemande de la volaille (ZDG), aussi rejette le blâme pour la viande pourrie de provenance d'Allemagne sur « les marchandeurs des pays tiers ». Le Ministère Fédéral de l'agriculture [de l'Allemagne] ne répond même pas à notre demande. Selon la législation alimentaire de l'Union européenne (UE), l’entreprise allemande est obligée « au cours de toutes les étapes de production, transformation et distribution » d’assurer que sa viande est traitée dans des conditions d'hygiène irrécusables afin de garantir la santé des consommateurs. Ceci s'applique également aux ventes hors d'Europe. Donc, est-ce que « Stolle » adhère encore aux obligations de desserte en exportant de la viande congelée vers des pays qui n'ont pas une chaîne de froid fiable ? Est – ce que « Stolle », ne met pas en danger sciemment la santé de la population togolaise? "Les opérateurs économiques allemands et européenns de la viande savent que la chaîne du froid n'est pas existante dans de grandes parties de l'Afrique de l'Ouest" explique l'expert agricole de « Pain pour le Monde », Marí. "La législation alimentaire de l’UE dit clairement : « L'industrie de la viande au cours de toute la chaîne de vente est responsable de la qualité de leurs produits, et cela s’applique aussi aux exportations. Donc, celui qui pourtant permet que la viande congelée "Ils pensent que nous sommes des citoyens de seconde classe", dit la défenseure des consommateurs Togolais, Essonani Abide Francisca dans la voiture sur le chemin de son travail. Il y a six ans, la sœur de la sociologue résolue, a mangé de la viande importée contaminée et elle a failli mourir d'une intoxication alimentaire. Depuis, Essonani mène un combat volontaire contre la viande congelée en provenance des pays industrialisés. Avec ses partisans, elle procède à des inspections des importateurs. Sous contrôle policier. « Viande avariée est confisquée et détruite», explique la quarantaine remuante, avec une voix sévère et elle descend de sa voiture devant un magasin à l'est de Lomé. Encore et encore, Essonani reçoit des menaces de mort : Ils m'appellent et crient : "Si vous ne nous laissez pas seuls, nous allons vous étriper". Les gens avec lesquels font affaires l'industrie de la viande en Allemagne, il ne faut pas badiner avec. Dans le pays voisin du Togo, le Bénin, nous avons réussi à rencontrer un homme, bien tonique, début de sa trentaine, qui connait la mafia par viande de l'intérieur au travers d’un intermédiaire. "Ils arrêtent ceux qui visent à leur mettre des bâtons dans les roues". Nous dit-il dans une pièce sombre près du Port de la capitale commer5 ciale, Cotonou. Avec plus de 175.000 tonnes des importations de volailles en provenance de l’Europe, le Bénin est principal pays importateur pour les morceaux de poulet européens en Afrique de l'Ouest. Presque la même quantité n’est même pas déclarée à leur arrivée au Port, estime le ministère béninois de l'agriculture. L'étroit pays sur la côte ouest-africaine a seulement dix millions d'habitants. 350.000.000 kg de poulet : Qui doit manger ces énormes masses de chair de poulet? "La nuit, nous déchargeons la chose depuis les conteneurs réfrigérés aux camions ", déclare notre informateur, montrant à travers une fente dans le rideau vers le mur du Port, derrière laquelle s'amoncellent des milliers de conteneurs. "Puis, nous les emballons dans des glacières et les mettons sur les chemins détournés vers la frontière du Nigeria." Le Nigeria impose une interdiction d'importation de la viande de poulet. Mais les pays industrialisés la freinent à travers une mafia de la contrebande bien organisée, qui dit-on est aussi impliquée dans commerce de drogue et des armes. Le marché est énorme : Le Nigeria, avec environ 165 millions d'habitants est le pays le plus peuplé et la plus grande économie en Afrique subsaharienne. "Au Nigeria, les prix ne sont deux fois plus élevés qu'au Bénin" le passeur nous dit dans la pièce sombre. Jusqu'à 300.000 tonnes de viande de poulets importés depuis des pays industrialisés pourraient, chaque année, selon les estimations locales, passer en contrebande sur les chemins sombres du Bénin vers le Nigeria. Une affaire d'un milliard de dollars. Nous questionnons notre informateur après ses clients. Il nous regarde avec des yeux perçants. Longtemps il ne dit pas un mot. "Les grands, les patrons", répond-t-il, à la demande pressante de notre intermédiaire. "Les importateurs, les douaniers, la police, les politiciens – jusqu'à la tête du gouvernement. Il y a aussi des blancs entre eux. S'ils découvrent que je vous ai parlé, ils me découpent en morceaux ". Pourquoi il se met en danger ? Il devrait une faveur à notre intermédiaire, dit-il, en se précipitant sur la porte vers le Port. En Afrique de l'Ouest, tourne une spirale fatale. Les pays tels que le Bénin et le Togo sont parmi les Un trafiqueur de poulet congelé souhaite rester inconnue. plus pauvres dans le monde. Environ 80% de la population rurale au Togo survit avec moins de deux dollars par jour. La pauvreté stimule la demande de viande pas chère importée. Et en détruisant les marchés, dont dépendent des dizaines de milliers de familles en Afrique de l'Ouest, le flot des importations entretient la pauvreté. Mais les gens sur le « continent de la faim » devraient être heureux d’acheter du poulet pas cher, on pourrait dire. Mais cet argument est perfide. "En Afrique le commerce des aliments ne vaut pas la peine, c’est la raison importante pour laquelle la faim persiste », précise l’expert agricole Marí. " Le risque de la faim dans les pays pauvres s'aggrave à cause des importations de la viande à bas prix, et non le contraire". Jusqu'à 300.000 tonnes de viande de poulet importées. Les moyens de subsistance détruits, les maladies, la pauvreté, la faim. Pour le bénéfice de notre industrie de volaille. Pour la viande pas chère dans nos assiettes. Au détriment des plus pauvres des pauvres. Et le carrousel de la folie de poulet continue à tourner : afin d’aider le Togo à remonter économiquement, le ministère allemand de développement à monter un projet ici. "Nous voulons aider à établir une production efficace de la viande de poulet en collaborant avec environ 100 familles paysannes", nous dit à Lomé Paul Mathias Braun, de la Société pour la Coopération 6 Internationale (GIZ), qui est chargée de la mise en œuvre de la coopération agricole au Togo. "D'écuries pas chères, du fourrage pas cher – d'intrants à bas niveau". Coûts du projet pour une période d'essai de deux ans : trois millions d'euros. C'est un dimanche dans le Restaurant, Le Galion, juste derrière l'Ambassade d'Allemagne, que M. Braun nous explique autour d’une salade de thon avec mayonnaise, comment il a déjà gagné en tant qu'acheteur, des producteurs de poulet des petits supermarchés, des restaurants et des bonnes femmes. M. Braun est lui-même agriculteur de formation et coopérant très expérimenté dans de nombreux pays africains en développement, il semble vouloir vraiment atteindre quelque chose pour les gens qu'il doit aider. Dans une autre étape, une campagne de publicité était possible afin de stimuler la consommation de poulet local. "Les programmes de télévision avec des récits particulièrement savoureux" dit Braun après avoir mangé et enlevé entre le pouce et l'index le filtre d’une cigarette qu’il alluma ensuite. "Le marché de haute qualité du poulet domestique est là, il a juste besoin d'être exploité." D’abord le poulet de l'UE, aussi d'Allemagne, détruit la totalité de la production domestique au Togo – et maintenant le gouvernement fédéral allemand vise à montrer à quelques petits producteurs comment produire à faibles coûts? M. Braun grimace. Il ne pouvait pas dire de plus. Sur notre demande, destinée à son plus haut employeur, du ministre du développement, Gerd Müller, ce dernier laisse communiquer : une interview sur ce sujet n'est pas possible. On demande pour « l’indulgence cordiale ». En attendant, au Togo, le producteur de volaille ruinée, Kudjo, mène une bataille qui semble être désespérée. Contre la puissance supérieure des opérateurs économiques internationaux de la viande. Contre les mécanismes impitoyables du commerce mondial, qui le font perdant de la mondialisation. Kudjo avait rejoint d'autres éleveurs de volaille dans une association. Depuis des années, ils organisent des marches de protestation et écrivent des pétitions. De la part de leur gouvernement, ils demandent l’augmentation des douanes tarifaires sur les importations de viande congelée, des restrictions et les quotas d'importation pour protéger la production nationale. Un tel système a été introduit il y a quelques années en Côte d'Ivoire. "L'élevage de volailles a une forte hausse là-bas", dit Kudjo en clappant ses mains dans son petit salon. "Des milliers d'emplois ont été créés." Dans de nombreuses régions de l'Afrique de l'Ouest, la réalité est différente. Le Ghana, pays voisin du Togo, a décidé en 2003 d'augmenter les tarifs d'importation sur la volaille. La loi a été approuvée par une large majorité au Parlement. Mais le Fonds Monétaire International (FMI) – une agence spécialisée des Nations Unies, qui se présente comme vecteur des politiques en faveur des pauvres – faisaient pression et menaçait le pays en voie de développement endetté de ne plus accorder de nouveaux crédits, si on insistait sur les tarifs protecteurs. Car ceux-ci seront en désaccord avec le but de réduire la pauvreté, a indiqué le FMI. Les Ghanéens en achetant de la chair de volaille européenne pas chère, créeraient plus de revenus à investir dans d'autres domaines de la vie. Le gouvernement ghanéen a finalement laissé tomber les tarifs protecteurs. Le FMI a donné le coup fatal à la l'industrie de la volaille Ghanéenne, et puis le poulet importé inonda le marché davantage. Entre temps, les dirigeants du FMI ont reconnu leur erreur fatale dans un document interne : Le FMI avait probablement pas d'informations suffisantes. Pour Kudjo le cas est clair : "L’Europe demande la libre circulation des marchandises, et donc cela signifie avant tout pour ses marchandises à elle-même". Pendant que les pays industrialisés ne rejettent pas les méthodes d'extorsion pour vendre leurs viandes pas chères en Afrique de l'Ouest, les barrières commerciales très strictes rendent difficile l’accès pour les produits africains aux marchés du Nord. Des saucisses ou du fromage de la Namibie dans les supermarchés allemands? Les tarifs élevés punitifs empêchent cela. Mérou de provenance des pécheurs artisanaux du Sénégal? Repoussé parce que les pêcheurs n'ont pas d'argent pour obtenir une certifi7 cation. Si tant est que la soi-disant mondialisation existe, c’est seulement à moitié. C’est les gens comme Kudjo Moussou Winson, qui animés par les actions sans égards des Européens, se rendent par milliers aux embarcations de fortune à travers la Méditerranée. C’est ainsi que se ferme le cercle de folie du poulet mondialisé. À la fin de notre voyage encore une lueur d'espoir. Avant que Ben Fianou nous amène dans ses entrepôts frigorifiques à Lomé, nous devons enfiler nos chaussures, nous vêtir de pochettes plastiques et de blouses blanches stériles, surpasser des tapis désinfectants. En tant que Directeur de la société « Benimex », ce togolais aux mains fines et regard vigilant, importe la viande de poulet de l'Union européenne en particulier de l’Allemagne et de la Hollande. Actuellement jusqu'à 650 tonnes. Les ventes annuelles : près de trois millions d'euros. Mais pour l'avenir M. Fianou a d'autres plans. Il veut changer son entreprise et se réorienter à l’élevage de poulets locaux. "30.000 animaux par mois pour le début, » dit-il, en poussant la porte de la chambre froide. "En parallèle, nous régresserons progressivement l’importation. " Pourquoi M. Fianou veut-il changer les côtés? « Avec la viande congelée en provenance d'Europe, nous avons été ruiné beaucoup au Togo" dit-il; le froid de l'intérieur de l'entrepôt frigorifique nous frappe comme de la fumée. « Il est temps de réparer les dégâts. Étant commerçant, je vois un énorme potentiel dans l'élevage de poulets locaux. » Mais comment M. Fianou veut-t-il craquer les prix indésirables européens? Pour le dédouanement et la déclaration de la viande importée il paie actuellement environ 10.000 euros par conteneur. Ces frais, il vise à les économiser et investir l'argent dans son propre élevage de poulets à moindres coûts. Le maïs, que mangent les animaux, M. Fianou veut le cultiver sur des champs qui sont à lui. Il a également prévu un centre de formation pour les employés. Puis des écloseries pour les poussins et un abattoir propre à l’entreprise, dans la périphérie de Lomé. Encore cette année, l'usine entrera en fonction. Investissement total: 5 Mio €. Une partie du capital pro- vient des partenaires d'affaires de la Hollande et de la Russie. Avec ça M. Fianou peut produire moins cher que les éleveurs comme Kudjo. "Dans cinq ans, nous aurons complètement laissé tomber l'importation et produirons entièrement localement", explique M. Fianou. Dans la chambre froide à moins 18 degrés sont empilées jusqu' au plafond, les viandes importée allemande et néerlandaise. Bientôt devront être stockés ici, des poulets élevés au Togo, découpés et emballés comme la marchandise importée, mais sans long circuit de transport – mais le filet inclu en revanche. Domestiquer le poulet mondial. Battre le commerce mondial avec ses propres armes. Si je réussis, d'autres importateurs suivront et après nous expulserons la viande étrangère", dit M. Fianou en fermant la porte de l'entrepôt frigorifique. Et sinon? « Nous resterons un pays dépendant de l’aide étrangère. » Ben Fianou, importateur de poulets congelés á Lomé, veut se réorienter vers l’élevage de poulets locaux. 8