Nouvelle indemnisation des victimes de sinistres

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Nouvelle indemnisation des victimes de sinistres
Nouvelle indemnisation des victimes de sinistres
exceptionnels
Loi du 13 novembre relative à l’indemnisation des dommages corporels et moraux découlant
d’un accident technologique ............................................................................................... 2
Contexte ...................................................................................................................... 2
Descriptif détaillé du nouveau système d’indemnisation ...................................................... 2
1.
Champ d’application ............................................................................................ 2
2.
Définitions ......................................................................................................... 3
3.
Exclusions.......................................................................................................... 5
4.
Comité des sages ............................................................................................... 6
5.
Bénéficiaires du système ..................................................................................... 6
6.
Fonds commun de garantie automobile (FCGA) ...................................................... 7
7.
Procédure .......................................................................................................... 8
8.
Indemnisation .................................................................................................... 9
8.1.
Application des règles de droit commun ........................................................ 10
8.2.
Dommage quantifiable ................................................................................ 10
8.3.
Dommage non quantifiable ......................................................................... 10
8.4.
Conséquences d’une offre à titre définitif ...................................................... 11
8.5.
Allongement des délais ............................................................................... 11
8.6.
Réserves ................................................................................................... 11
8.7.
Opposabilité .............................................................................................. 11
9.
Financement du nouveau système ...................................................................... 12
9.1.
Appel de fonds auprès des assureurs branche 13 ........................................... 12
9.2.
Récupération des indemnités et frais encourus par le FCGA ............................. 13
9.3.
Rétrocession aux entreprises d’assurances .................................................... 14
10.
Entrée en vigueur ............................................................................................. 14
2
Loi du 13 novembre relative à l’indemnisation des
dommages corporels et moraux découlant d’un accident
technologique
Contexte
Lorsqu’elles ne sont pas assurées pour les dommages qu’elles encourent du fait de la survenance
d'une catastrophe, les victimes et leurs ayants droit sont le plus souvent contraints d’attendre
l’issue de la procédure avant de pouvoir espérer une indemnisation de leurs dommages.
La nature et la gravité de l’événement ainsi que le nombre de parties impliquées sont autant
d’éléments qui expliquent que les procédures durent le plus souvent plusieurs années. Pendant
toute cette période, s’ajoutant aux souffrances humaines, les difficultés économiques et
financières peuvent s’accumuler et placer les victimes et leurs familles dans des situations
particulièrement délicates et compliquées alors que leur responsabilité n’est en aucune manière
engagée dans la catastrophe.
A la lumière des difficultés rencontrées par certaines victimes, notamment lors de la catastrophe
de Ghislenghien de juillet 2004, la Commission de l'Economie de la Chambre a décidé de mettre
au point un mécanisme qui permet aux victimes d’obtenir une indemnisation provisionnelle voire
même définitive sans devoir attendre l’issue de la procédure relative à la détermination des
responsabilités en cause.
Elle a travaillé sur base de la proposition de loi du 15 mars 2011 de Marie-Christine Marghem
relative à l’indemnisation des dommages corporels et moraux découlant d’un accident
technologique (DOC 1286/001). De nombreux amendements ont été déposés et le texte a
finalement été voté en séance plénière de la Chambre le 7 juillet 2011 et le Sénat n'a pas
évoqué le dossier.
Le Moniteur belge du 24 février 2012 vient de publier la loi du 13 novembre 2011 relative à
l’indemnisation des dommages corporels et moraux découlant d’un accident technologique.
Descriptif détaillé du nouveau système d’indemnisation
1. Champ d’application
La loi du 13 novembre 2011 a pour but de réparer, dans les conditions et limites qu’elle prévoit,
le dommage des victimes et de leurs ayants droit résultant de lésions corporelles, lorsque la
catastrophe technologique de grande ampleur est déclarée sinistre exceptionnel par le Comité
des sages, sans devoir attendre que les responsabilités aient été déterminées (art. 3 §1 er).
La loi instaure une nouvelle voie d’indemnisation pour les victimes, mais ne porte nullement
préjudice au droit de la victime ou de ses ayants de réclamer, conformément aux règles du droit
commun, l’indemnisation de son dommage devant les cours et tribunaux (art. 3 §2). La victime
et ses ayants droits conservent en effet toujours le droit de solliciter en justice la réparation de
leurs dommages, pour autant bien entendu qu’ils n’en aient pas obtenu indemnisation par
ailleurs et qu’ils soient à même de démontrer le dommage, la faute du responsable présumé de
l’accident et le lien de causalité entre les deux. Ce principe vaut pour les dommages qui ne sont
pas indemnisés sur la base de la nouvelle législation, comme les dommages matériels, et il
3
permet également à la victime de choisir la voie judiciaire plutôt que de faire usage du nouveau
système.
La nouvelle procédure est une procédure amiable, facultative et gratuite (art. 3 §3).
La loi ne s’applique qu’aux sinistres exceptionnels qui se produisent en Belgique et qui causent
des lésions corporelles en Belgique, même si le dommage résultant de celles-ci est subi à
l’étranger (art. 3 §4).
Elle ne sort donc ses effets que si une double condition est remplie :

en premier lieu, le sinistre exceptionnel doit être survenu sur le territoire belge : une
explosion en Belgique est visée, par contre une explosion en Angleterre faisant des
victimes belges n’est pas visée, de même un nuage toxique trouvant son origine en
France et causant des victimes sur le territoire belge n’est pas visé ;

en second lieu, le sinistre exceptionnel doit avoir causé des lésions corporelles en
Belgique, c’est-à-dire que les victimes, indépendamment de l’Etat de leur résidence
habituelle, doivent avoir subi des lésions corporelles en Belgique : les victimes d’un
nuage toxique ayant son origine en Belgique mais qui s’étend en Belgique et en France
ne seront indemnisées que pour autant qu’elles se trouvaient sur le territoire belge au
moment de l’événement, c’est-à-dire que pour autant qu’elles subissent leurs lésions
corporelles en Belgique. La précision « même si le dommage résultant de celles-ci est
subi à l’étranger » signifie que la victime, étrangère ou belge, d’un sinistre exceptionnel
se produisant en Belgique qui a subi des lésions en Belgique peut bénéficier du nouveau
système même si elle retourne chez elle ou part à l’étranger pour se faire soigner.
La loi, qui prévoit une indemnisation sur la base du droit commun belge de la responsabilité
civile, s’est dès lors correctement alignée sur le Règlement européen n°864/2007 du 11 juillet
2007 relatif à la loi applicable aux obligations non contractuelles (« Rome II »). Ce Règlement
détermine en effet la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d’un fait
dommageable principalement en fonction du lieu où le dommage survient.
2. Définitions
Le nouveau système d’indemnisation ne s’enclenche que si certaines conditions sont
rencontrées. Il ne s’applique pas à tout incident catastrophique. La loi prévoit des définitions en
cascade qui déterminent son champ d’application : l’incident doit être un « accident
technologique » qui présente les caractéristiques d’une « catastrophe technologique de grande
ampleur » qui peut à son tour être qualifiée de « sinistre exceptionnel » au sens de la loi par un
Comité des sages. C’est uniquement dans ces circonstances bien précises, face à un sinistre
« exceptionnel » au sens de la loi que les victimes pourront être indemnisées sur la base du
nouveau système d’indemnisation.
Il faut donc tout d’abord être en présence d’un « accident technologique », c’est-à-dire un
« accident dû à une défaillance humaine ou à une cause technique, survenant dans des
immeubles, des ouvrages ou des installations exploitées ou détenues par toute personne
physique ou morale, publique ou privée, que les lieux soient accessibles ou non au public » (art.
2.1.). La définition d’accident technologique vise en réalité tout accident. Sans précision
supplémentaire, il convient selon nous de retenir la notion d’accident au sens classique du
terme, c’est-à-dire un événement qui se produit de manière soudaine et imprévue et qui cause
des dommages. Le système ne joue par conséquent pas lorsqu’il n’y a pas un seul événement,
mais une répétition d’événements dommageables qui occasionnent des lésions corporelles en
série, comme la contamination par le VIH causée par une transfusion, les plantes chinoises,
l'amiante,...
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Cet « accident technologique » est automatiquement considéré par la loi comme une
« catastrophe technologique de grande ampleur » s’il cause « à au moins cinq personnes
physiques des lésions corporelles telles qu’elles entraînent :

le décès de la victime,

son hospitalisation immédiate et ininterrompue d’au moins quinze jours,

ou des séjours répétés en milieu hospitalier sur une période de six mois » (art. 2.2.).
Le caractère catastrophique est attribué automatiquement par la loi dès lors que l’accident
technologique fait au moins cinq victimes graves, ce qui constitue pour le législateur un seuil
suffisamment bas pour ne pas être considéré comme discriminatoire (cf. DOC 53 1286/006, p.
16). L’usage du critère relatif aux « lésions corporelles entraînant des séjours répétés en milieu
hospitalier sur une période de six mois » est délicat :

d’une part, ce critère peut reporter un enclenchement de la procédure devant le Comité
des sages à six mois après la survenance d’un événement ;

d’une part, ce critère qui sert à déterminer le champ d’application de la loi et la mise en
œuvre du nouveau système d’indemnisation manque de clarté : la notion de séjour
nécessite-t-elle au moins une nuit à l’hôpital et exclut-elle les hospitalisations d’un
jour pourtant de plus en plus généralisées ? suffit-il de deux séjours pour rencontrer la
notion de « séjours répétés » ? suffit-il que les séjours répétés aient lieu pendant les six
mois ou, pour présenter un certain seuil de gravité, doivent-ils s’étaler au moins sur les
six mois ? …
Prenons l’exemple d’un accident qui entraîne le décès d’une victime, l’hospitalisation immédiate
de deux autres victimes pour une durée de trois semaines et des lésions corporelles chez deux
autres victimes. Ce sera le traitement de ces deux dernières victimes qui déterminera, au terme
des six mois, si le Comité des sages doit ou non être saisi du dossier.
Enfin, cette catastrophe technologique de grande ampleur sera « déclarée sinistre exceptionnel
par le Comité des sages s'il constate l’existence d’un problème de détermination de la
responsabilité susceptible d’être invoquée, en tout ou en partie, à l’égard des risques visés par la
branche 13 de l’annexe I de l’arrêté royal du 22 février 1991 portant règlement général relatif au
contrôle des entreprises d’assurances » (art. 2.3.). L’objectif poursuivi par le législateur est
d’éviter aux victimes de devoir attendre la fin de la procédure de détermination des
responsabilités pour percevoir leurs indemnités.
S’il n’y a pas de procédure pour déterminer les responsabilités - qu’il n’y ait qu’un seul
responsable, qu’il y en ait plusieurs dont la responsabilité n’est pas contestée ou qu’il n’y ait pas
de responsable du tout - le nouveau système ne s’applique pas. Il en va de même si l’un des
responsables décide de prendre toutes les indemnités à sa charge en attendant la détermination
des responsabilités. L’on ne peut, à notre sens, réellement considérer qu’il y a un problème de
détermination des responsabilités que lorsqu’il existe une contestation de responsabilité motivée
d’une (de) partie(s) impliquée(s) et de l’ (des) assureur(s) quant à leur intervention.
Lorsque la loi fait référence au « Fonds », elle vise le Fonds commun de garantie automobile
agréé par le Roi sur base de l’article 19bis-2 de la loi du 21 novembre 1989 relative à
l’assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs (art. 2.4.), ciaprès dénommé FCGA.
Seules sont concernées par la nouvelle législation les entreprises d’assurance autorisées à
pratiquer en Belgique la branche 13 visée à l’annexe I de l’arrêté royal du 22 février 1991
portant règlement général relatif au contrôle des entreprises d’assurances (art. 2.6.). L’on verra
par la suite que, comme le financement du nouveau système est fonction des parts de marché,
5
ne sont concernées que les entreprises qui pratiquent réellement cette branche, (cf. infra point
9.1). Le système mis en place repose sur la collaboration avec les assureurs, belges ou non
belges, pratiquant la branche 13 en Belgique, c’est–à-dire la RC générale, autre que la RC
véhicules terrestres automoteurs, la RC véhicules aériens et la RC véhicules maritimes, lacustres
et fluviaux. La raison de ce choix est qu’il reviendra, au terme de la procédure, à un ou plusieurs
de ces assureurs de prendre en charge tout ou en partie du sinistre exceptionnel lorsqu’il y a un
responsable assuré.
La loi précise également que le « Fonds des calamités » est le Fonds national des calamités
publiques ouvert auprès de la Caisse nationale des calamités par l’article 36 de la loi du 12 juillet
1976 relative à la réparation de certains dommages causés à des biens privés par des calamités
naturelles (art. 2.7) et qu’elle entend par « BNB » la Banque nationale de Belgique visée dans la
loi du 22 février 1998 fixant le statut organique de la Banque nationale de Belgique (art. 2.8).
3. Exclusions
Sont exclus du champ d’application de la présente loi les catastrophes qui sont le résultat d’actes
de terrorisme, les catastrophes naturelles ou nucléaires (art. 3 §3. 1°). Ces hypothèses sont
déjà visées par d’autres législations.
La nouvelle loi ne vise pas non plus les actes de guerre, qui ne relève en fait pas de l’objet de la
présente loi (art. 3 §3. 2°): il n’y a en effet dans cette hypothèse pas de problème de
détermination des responsabilités.
Les dommages découlant du défaut d’un produit visé par la loi du 25 février 1991 relative à la
responsabilité du fait des produits défectueux ne sont également pas visés la nouvelle législation
(art. 3 §3. 3°). Il s’agit là d’un choix heureux puisque la loi du 25 février 1991 résulte de la
transposition d’une directive européenne 85/374 du 25 juillet 1985 sur la responsabilité des
produits dans les Etats membres de l’Union européenne qui comporte une solution équilibrée,
qualifiée de « système harmonisé » par la Cour de justice européenne, entre les intérêts de
fabricants et des consommateurs. Modifer cet équilibre au niveau belge n’aurait dès lors pas été
opportun.
Sont exclus du champ d’application de la nouvelle loi les dommages découlant de la
responsabilité civile en matière de véhicules automoteurs soumise à l’obligation d’assurance en
vertu de la loi du 21 novembre 1989 relative à l’assurance obligatoire de la responsabilité en
matière de véhicules automoteurs (art. 3 §3. 4°). Cette exclusion est logique puisque la loi du
21 novembre 1989 prévoit l’indemnisation des dommages subis par les victimes et leurs ayants
droit (à l’exception du conducteur) résultant de lésions corporelles ou du décès en cas d’accident
de la circulation impliquant un ou plusieurs véhicules automoteurs (art. 29bis).
Les dommages découlant de la responsabilité civile des véhicules aériens et de la responsabilité
civile des véhicules maritimes, lacustres et fluviaux ne relèvent également pas du champ
d’application de la nouvelle loi (art. 3 §3. 5°).
Les dommages indemnisés dans le cadre de la loi du 30 juillet 1979 relative à la prévention des
incendies et des explosions ainsi qu’à l’assurance obligatoire de la responsabilité civile dans ces
mêmes circonstances sont exclus (art. 3 §3. 6°). Par cette loi, le législateur a en effet instauré
une responsabilité objective dans le chef de l’exploitant et rendu obligatoire l’assurance de cette
responsabilité avec des montants assurés importants. Les sinistres incendie-explosion
susceptibles d'être « exceptionnels » au sens de la présente loi sont dès lors déjà pris en compte
par la loi du 30 juillet 1979.
Enfin, sont exclus les dommages résultant de soins de santé visés par la loi du 31 mars 2010
relative à l’indemnisation des dommages résultant de soins de santé (art. 3 §3. 7°).
6
Le nouveau système mis en place par la loi ne se substitue donc pas aux mécanismes
d’indemnisation particuliers mis en place par d’autres législations.
4. Comité des sages
La loi crée un Comité des sages qui se compose de huit membres : quatre représentants
ministériels (Justice, Finances, Santé, et Assurances), un représentant des entreprises
d’assurance, un représentant des consommateurs, un représentant du FCGA et un représentant
de la BNB ; ces deux derniers membres ne disposant chacun que d’une voix consultative. La
présidence du Comité des sages est confiée au représentant du FCGA.
Les membres sont nommés par le Roi pour une période de 6 ans renouvelable et sont soumis à
l’obligation du respect du secret professionnel (art. 4 §1er).
Le Comité des sages établit un règlement d’ordre intérieur qui est approuvé par le Roi. À défaut
pour ce Comité d’établir un tel règlement, celui-ci est arrêté par le Roi. Le règlement d’ordre
intérieur fixe notamment les règles applicables en cas de parité de voix (art. 4 §2). Il se réunit
au siège du Fonds qui prend en charge ses frais de fonctionnement (art. 4 §3).
Lorsqu’une « catastrophe technologique de grande ampleur » survient (cf. supra les conditions
pour retenir cette qualification), le Comité des sages a pour mission de déterminer, à la
demande du ministre de la Justice, si l’événement en cause constitue bien un sinistre
exceptionnel au sens de la nouvelle loi, c’est-à-dire qu’il examine si la catastrophe technologique
de grande ampleur donne lieu à un problème de détermination de la responsabilité (art. 5 §1 er),
c’est-à-dire « s’il existe un problème de détermination de la responsabilité civile prima facie en
raison de la pluralité de responsables potentiels » (cf. DOC 53 1286/008, p. 13).
Les décisions du Comité des sages sont prises à la majorité simple dans le mois suivant la
demande du ministre de la Justice (art. 5 §2). S’il reconnaît la catastrophe technologique de
grande ampleur comme sinistre exceptionnel au sens de la loi, cette reconnaissance fait l’objet
d’un arrêté royal qui est publié sans délai au Moniteur belge (art. 5 §3).
5. Bénéficiaires du système
Toute personne physique ayant subi des dommages résultant de lésions corporelles causées par
un sinistre exceptionnel peut bénéficier de l’indemnisation à verser par le FCGA. La personne
physique peut être une victime directe du sinistre ou un ayant droit de cette dernière dès lors
qu’il subit lui-même un dommage.
La loi précise bien que ne sont indemnisés que les dommages résultant de lésions corporelles
(art. 9 §1er). Il s’agit donc des soins de santé, de la perte de revenus éventuelle, du dommage
moral, de l’aide de tiers, des coûts de prothèse, de l’adaptation de la maison, …
En outre, l’indemnisation à laquelle peut prétendre la victime ne porte que sur la partie du
dommage dont la prise en charge n’incombe pas à un tiers (art. 9 §3). C’est la raison pour
laquelle ces derniers doivent tenir informé le FCGA des paiements qu’ils ont effectués ou qu’ils
effectuent au profit des victimes du sinistre exceptionnel ou de ses ayants droits. Ces paiements
seront pris en compte par le FCGA qui pourra correctement apprécier la partie du dommage qu’il
lui reste à indemniser (art. 9 §2 al.2).
Le nouveau système d’indemnisation est ainsi subsidiaire à toute autre source d’indemnisation.
Il ne se substitue pas aux mécanismes d’indemnisation classiques de ce type de dommages.
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Exemples :

un travailleur est toujours indemnisé directement par l’assureur Accident du travail de
son employeur si l’accident est survenu au cours de l’exécution de son contrat de
travail ;

les frais médicaux sont pris en charge par l’assureur « soins de santé » dont bénéficie la
victime ;

l’assureur « revenus garantis » verse les montants contractuellement prévus en cas
d’incapacité de travail de son assuré ;

…
Le but du nouveau système d’indemnisation est de permettre aux victimes et à leurs ayants
droit d’obtenir une indemnisation de leurs dommages corporels non pris en charge par un tiers
sans devoir attendre que les responsables de la catastrophe soient identifiés. Les personnes
pouvant bénéficier du système sont donc les personnes physiques, victimes ou ayants droit, qui
ne peuvent obtenir réparation des dommages qui subsistent après intervention de la sécurité
sociale, des assurances individuelles (hospitalisation, revenu garanti, accident, …) ou collectives
de la victime (accident du travail, hospitalisation, …), du CPAS, …
Ce caractère subsidiaire est un principe de base du nouveau mécanisme d’indemnisation. Il est
énoncé dès l’exposé introductif de la nouvelle loi (cf. Rapport fait au nom de la Commission de
l’économie de M. Van den Bergh, DOC 53 1286/011, p. 5).
Par ailleurs, les tiers subrogés comme les entreprises d’assurances, les organismes assureurs
(mutuelles), … ne peuvent en aucune manière bénéficier du mécanisme d’indemnisation pour
obtenir le remboursement des indemnités qu’ils auraient versées aux victimes dans le cadre de
l’exécution de leur contrat ou de leur mission légale. La loi exclut du bénéfice du nouveau
système d’indemnisation les personnes physiques ou morales, institutions ou organismes qui,
après leur intervention à l’égard de la victime ou de ses ayants droit, peuvent agir en vertu d’un
droit subrogatoire légal ou conventionnel, ou d’un droit propre de poursuite en remboursement
contre le civilement responsable ou l’assureur de la responsabilité (art. 9 §2 al 1 er ). Ces tiers
payeurs devront attendre que les responsabilités soient dégagées avant de pouvoir exercer leur
recours contre le responsable ou son assureur.
Si les tiers payeurs mentionnés ci-avant contestent leur intervention (p. ex. contestation de
l’assureur accident du travail que la victime était sur le chemin du travail), le FCGA indemnise
les victimes du sinistre exceptionnel et leurs ayants droit pour toutes leurs lésions corporelles,
moyennant le droit pour le FCGA de récupérer directement auprès de ces tiers-payeurs ce qu’il a
versé, s’il s’avère que ces derniers auraient dû intervenir (p. ex. il a été jugé que la victime était
bien sur le chemin du travail). C’est la raison pour laquelle le FCGA est légalement subrogé dans
les droits et actions des victimes ou de leurs ayants droit (art. 9 §4).
6. Fonds commun de garantie automobile (FCGA)
Le FCGA a une longue expérience de règlement de sinistres. Dans le cadre de la collaboration
privé-public mise en œuvre par la présente loi, il s’avère que le FCGA constitue un relais de choix
pour centraliser la gestion des dommages résultant de sinistres exceptionnels.
Au terme de la nouvelle loi, la mission du FCGA est vaste :

il évalue l’ampleur du sinistre en additionnant les dommages de toutes les victimes et
ayants droit ;

sur la base de cette évaluation, il procède à l’appel de fonds auprès des assureurs en
fonction de leur part de marché ;
8

il indemnise ensuite les victimes sur la base d’une éventuelle expertise, avec un droit de
subrogation contre le(s) responsable(s) ;

il récupère ses débours auprès du (des) responsable(s) ou auprès de l’Etat en l’absence
de responsable ou de responsable insolvable ou insuffisamment assuré, en tenant
compte de l’intérêt légal et des frais de gestion et frais et honoraires exposés ;

enfin, il rétrocède les fonds récupérés aux assureurs en fonction de leur part de marché.
Dans le cadre de sa mission, le FCGA est autorisé à traiter les données de santé dans le respect
de la loi du 8 décembre 1992 sur la protection de la vie privée à l’égard des traitements de
données à caractère personnel. Conformément aux dispositions de la loi du 22 août 2002 sur les
droits du patient, le médecin désigné par le Fonds est également autorisé à consulter le dossier
médical de la victime.
Les membres du personnel du Fonds sont tenus de respecter la confidentialité des données qui
leurs sont confiées dans l’exercice de leur mission ou ayant trait à l’exercice de celle-ci, sauf à
l’égard des magistrats chargés de l’information ou de l’instruction du sinistre (art. 12).
Les décisions du FCGA sont susceptibles de recours, qu’il s’agisse du refus de considérer le
demandeur comme une victime du sinistre exceptionnel, qu’il s’agisse du caractère quantifiable
ou non des lésions, du montant de l’indemnisation, … En cas de désaccord avec les décisions du
FCGA, la victime ou ses ayants droit, peut toujours citer le FCGA en application du Code
judiciaire, soit devant le juge où s’est produit le sinistre exceptionnel, soit devant le juge de son
domicile, soit devant le juge du siège social du Fonds (art. 10 §2). La présomption de
renonciation à la demande d’indemnisation (art. 11 §2 al.2) pourrait également être renversée
dans le cadre d’une telle procédure (cf. DOC 53 1286/011, p. 28).
7. Procédure
Dès que se produit une « catastrophe technologique de grande ampleur », le ministre de la
Justice charge le parquet du lieu de la catastrophe de constituer en son sein une cellule d’accueil
et d’accompagnement des victimes. La cellule dresse et tient alors à jour une liste des victimes
de lésions corporelles, de leurs ayants droit et de leurs avocats (art. 6). Cette phase existe dès
lors donc qu’un accident cause des lésions corporelles au sens de la loi à au moins cinq
personnes (cf. supra, point 2). Même si le texte de la loi ne vise que les victimes de lésions
corporelles, l’intention du législateur était initialement de confier à la cellule du parquet une
mission plus vaste puisque la justification de cet article explique que « toutes les victimes de
dommages, qu’ils soient matériels ou corporels, leurs ayants droit et leurs avocats sont
mentionnés sur une liste tenue à jour par cette structure d’accueil ». Elle poursuit en précisant
que ces personnes « sont informées de leurs droits et de la manière dont leurs différents
dommages peuvent être indemnisés, qu’il s’agisse de leur dommage matériel ou du dommage
corporel économique et corporel non économique (moral) qu’elles ont pu subir » (cf. DOC 53
1286/008, p. 13).
Si la catastrophe technologique de grande ampleur est reconnue comme « sinistre
exceptionnel » par le Comité des sages, le ministre de la Justice, dans le mois de la publication
au Moniteur belge de cette reconnaissance, charge la cellule d’accueil et d’accompagnement de
communiquer au FCGA une première liste des victimes, de leurs ayants droit et de leurs avocats
(art. 7).
Les victimes ou leurs ayants droit qui ne seraient pas repris sur cette liste « peuvent se
manifester, par lettre recommandée, auprès de la cellule (du parquet) dans un délai de six mois
à compter de la publication au Moniteur belge (de cette reconnaissance) ou directement auprès
du Fonds » (art. 8). Le but poursuivi en laissant six mois à la victime pour se manifester est « de
permettre à un maximum de victimes d’entrer dans le règlement proposé par la loi, simplement
9
et dans un délai suffisamment long mais pas trop, pour garder à la procédure d’indemnisation sa
rapidité et de permettre à des victimes, sous le choc ou dans le coma, d’avoir le temps
nécessaire pour se prendre en charge et décider de participer au règlement proposé » (cf. DOC
53 1286/008, p. 13).
Dès qu’il connaît leur identité, soit via la cellule du parquet, soit parce qu’ils se sont manifestés
directement auprès de lui, le FCGA prend immédiatement contact avec les victimes, leurs ayants
droit et leurs avocats pour leur proposer de traiter leur dossier et de rendre un avis sur la
possibilité d’obtenir une indemnisation dans le cadre de la nouvelle loi (art. 11 §1 er). A moins
qu’ils ne déclinent cette proposition, le FCGA réunit alors toutes les informations utiles au
traitement de leur dossier.
Dès ce moment, le FCGA informe de son intervention les magistrats en charge de l’information
ou de l’instruction du dossier répressif.
La FCGA contacte également tout tiers-payeur susceptible de prendre en charge tout ou partie
des dommages résultant du sinistre exceptionnel (art. 11 §1er al.3). Cela lui permettra de
calculer le montant de son intervention puisque le mécanisme d’indemnisation mis en place par
la nouvelle loi est un mécanisme subsidiaire et qu’il n’est tenu d’indemniser que ce qui ne l’est
pas déjà par une autre voie (cf. supra, point 5). L’identité des tiers-payeurs peut lui être
communiquée par la victime, tenue d’informer correctement et complètement le FCGA (cf. infra)
ou directement par les tiers-payeurs eux-mêmes, tenus d’informer le Fonds de leur intervention
ou de toute indemnisation qu’ils ont accordée (art. 9 §2 al.2).
Le FCGA dispose d’un large pouvoir d’information. Dans le cadre du traitement de chaque
dossier, il peut demander à toute personne de fournir tous les documents et renseignements
complémentaires nécessaires. Il peut s’adresser à la victime ou ses ayants droit, mais également
à tout autre tiers.
Si la victime ou ses ayants droit refusent de communiquer ces documents et renseignements,
s’ils communiquent des informations délibérément fausses ou trompeuses, ou s’ils ne répondent
pas dans les trois mois de la demande du FCGA, il est présumé qu’ils renoncent à leur demande
d’indemnisation à l’égard du FCGA (art. 11). Cette présomption est réfragable (cf. DOC 53
1286/011, p. 28 et 29, et supra point 6 in fine). Aucune sanction n’est prévue lorsque ce
comportement émane d’un tiers auquel le FCGA aurait adressé une demande de
renseignements.
Dans les trois mois de la réception de la liste des victimes ou de la lettre recommandée adressée
à la cellule du parquet ou directement au FCGA, celui-ci indique à la victime, par avis motivé, s’il
estime que le dommage est de nature à être indemnisé sur la base du nouveau système (art.
13). Le FCGA doit examiner si le cas d’espèce rencontre bien les conditions exigées par la loi,
comme par exemple : s’agit-il d’une victime du sinistre exceptionnel ? est-elle bien un ayant
droit de la victime ? s’agit-il bien de dommages indemnisables au sens de la loi ? …
8. Indemnisation
L’indemnisation des victimes d’un sinistre exceptionnel et son processus sont décrits à l’article
14 qui s’articule en six paragraphes. Elle est fonction du fait que le dommage peut ou non être
quantifiable.
Si le FCGA estime que c’est le cas, il fait une offre d’indemnisation à titre définitif.
Dans le cas contraire, si le dommage n’est pas entièrement quantifiable, s’appliquent alors les
paragraphes 2, 3 et 4, alinéa premier et second, de l’article 14 : versement d’une indemnisation
provisionnelle, organisation d’une expertise médicale amiable, demandes et offres d’avance
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complémentaire et, après remise du rapport médical définitif, offre d’indemnisation à titre
définitif.
Malgré leur localisation, les troisième, quatrième et cinquième alinéas du paragraphe 4
s’appliquent que le dommage soit ou non entièrement quantifiable. Ils concernent le sort de la
demande de la victime qui ne répond pas à l’offre d’indemnisation à titre définitif ainsi que les
conséquences de l’acceptation de cette offre.
Les paragraphes 5 et 6 relatifs aux délais et aux réserves s’appliquent sans discussion que le
dommage soit ou non entièrement quantifiable.
8.1.
Application des règles de droit commun
La subsidiarité du nouveau système mis en place implique que l’indemnisation du FCGA ne porte
que sur la partie du dommage dont la prise en charge n’incombe pas à un tiers-payeur (art. 9 §3
et cf. supra point 5).
Le Fonds indemnise la victime ou ses ayants droit conformément aux règles de droit commun
(art. 10 §1er).
8.2.
Dommage quantifiable
Si le FCGA conclut qu’il y a lieu à indemnisation et que le dommage peut être quantifiable, il fait
une offre d’indemnisation à titre définitif (art. 14 §1er).
Que doit faire le FCGA en pareille hypothèse ? Il résulte en tous les cas du texte de l’article 14
qu’il n’est pas tenu d’organiser l’expertise médicale amiable prévue par la loi lorsque le
dommage n’est pas entièrement quantifiable. Pour évaluer et indemniser le dommage, il est
cependant évident que le FCGA recourra le plus souvent à une telle expertise. Il convient alors
pour le FCGA de s’assurer de l’opposabilité de cette expertise en invitant à participer à celle-ci
les présumés responsables, leurs assureurs, la Caisse nationale des calamités, la mutuelle de la
victime, ainsi que tout éventuel tiers-payeurs.
8.3.
Dommage non quantifiable
Lorsque le dommage ne peut être entièrement quantifié, le FCGA propose le versement d’une
indemnisation provisionnelle tenant compte des frais déjà exposés, de la nature des lésions, de
la douleur endurée et du préjudice résultant des périodes d’incapacité et d’invalidité déjà
écoulées (art. 14 §2 al.1).
A partir du moment où son dommage a évolué de manière significative, la victime adresse une
demande complémentaire au FCGA (art. 14 §2 al.2). Celui-ci fait offre d’avance complémentaire
dans les trois mois de cette demande. Il tient compte, pour ce faire, du dommage encouru aussi
longtemps que l’expertise médicale n’est pas clôturée par un rapport définitif. Le FCGA peut
également faire d’office offre d’avance complémentaire (art. 14 §4 al.1).
En toute hypothèse, lorsque le dommage n’est pas entièrement quantifiable, le FCGA propose à
la victime d’organiser une expertise médicale amiable. Le médecin désigné par le FCGA et celui
désigné par la victime établissent alors une convention d’expertise qui détermine l’agenda qui
sera suivi et les conditions de réalisation de l’expertise conformément aux règles de droit
commun (art. 14 §3), notamment la désignation d’un médecin tiers qui prendra une décision si
le médecin du FCGA et celui désigné par la victime ne parviennent pas à se mettre d’accord sur
les pourcentages d’incapacité et d’invalidité. La loi instaure ainsi « un équilibre et une possibilité
de négociation dans un cadre amiable » (cf. DOC 53 1286/011, p. 32).
Le FCGA a jusqu’à six mois après la remise du rapport médical définitif pour formuler une offre
d’indemnisation à titre définitif. La victime dispose alors d’un délai de trois mois pour accepter
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cette offre et peut, avant de prendre position, formuler des observations, auxquelles le Fond est
tenu de répondre, par lettre recommandée, dans un délai d’un mois. Il peut, à cette occasion,
adapter le montant de son offre (art. 14 §4 al.2).
8.4.
Conséquences d’une offre à titre définitif
Si la victime ne répond pas à l’offre du Fonds dans les trois mois de la réception de celle-ci ou
dans le mois de la réception de l’offre adaptée, le Fonds lui adresse un rappel par lettre
recommandée. À défaut de réaction de la part de la victime, dans le mois qui suit ce rappel,
l’offre est présumée refusée (art. 14 §4 al.3).
L’acceptation de l’offre faite à titre définitif par le FCGA vaut transaction. Le FCGA dispose alors
de 15 jours pour verser le montant de l’indemnisation au compte indiqué par la personne
indemnisée (art. 14 §4 al.4).
Dès réception du montant de l’indemnisation à titre définitif, la personne indemnisée renonce à
toute action pendante ou à venir contre le responsable et son assureur de la responsabilité pour
le même dommage (art. 14 §4 al.5). Cette renonciation ne vaut bien sûr pas, comme précisé par
la loi, pour les dommages ou les postes du dommage qui n’auraient pas été indemnisés par le
FCGA.
8.5.
Allongement des délais
Les délais à respecter par le Fonds peuvent être allongés par le Roi en raison de circonstances
exceptionnelles (art. 14 §5). Cette disposition est opportune dans le sens où le FCGA peut se
trouver dans l’impossibilité matérielle de respecter les délais prescrits si la Belgique devait être
confrontée à un sinistre qui occasionne des lésions corporelles à plusieurs centaines de victimes.
8.6.
Réserves
Le Fonds est habilité à accepter des réserves médicales ou à accorder des réserves fiscales. Il
reste compétent pour gérer et indemniser le dommage tant que lesdites réserves ne sont pas
épuisées (art. 14 §6).
Le sort fiscal d’une indemnité versée à une victime dépend en effet de la loi fiscale et est ou non
taxable selon qu’elle compense ou non une perte de revenus. Lorsque l’indemnité est amputée
d’un prélèvement fiscal, il est par conséquent logique de prévoir que la victime puisse revenir
vers le FCGA pour obtenir une indemnité complémentaire pour compenser ce prélèvement (cf.
DOC 53 1286/011, p. 44).
8.7.
Opposabilité
Les décisions du FCGA, les expertises médicales amiables et les offres d’indemnisation acceptées
sont opposables au responsable du sinistre exceptionnel, à son assureur de la responsabilité
civile, à la Caisse nationale des calamités, aux tiers-payeurs, ainsi qu’à tout tiers (art. 14 §3 al.3
et art. 15).
Le travail du FCGA ne peut être remis en cause ultérieurement par quiconque.
Ainsi, lors de l’exercice par le FCGA de son recours subrogatoire à l’encontre du responsable et
de son assureur, ceux-ci ne peuvent contester les décisions prises par le FCGA quant au montant
de l’indemnisation accordée. Il en va de même pour la Caisse nationale des calamités, ainsi que
pour tout autre tiers.
Ces dispositions sont probablement les plus importantes de la nouvelle législation puisqu’elles
obligent tout tiers, mais surtout le responsable et son assureur, à respecter les décisions du
FCGA et les interventions auxquelles il a procédé. Ce sont ces dispositions qui garantissent que
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la victime ne devra plus se soumettre à aucune autre expertise et que l’indemnisation qu’elle
reçoit ne pourra être remise en cause.
9. Financement du nouveau système
9.1.
Appel de fonds auprès des assureurs branche 13
Les moyens financiers dont le FCGA a besoin pour faire face à l’indemnisation des victimes lui
sont versés sous la forme d’avances récupérables par l’ensemble des assureurs pratiquant la
branche 13 (assurance de la responsabilité civile) en Belgique.
Ainsi, dès la publication au Moniteur belge de la décision du Comité des sages déclarant que la
catastrophe technologique de grande ampleur constitue un sinistre exceptionnel, le FCGA fait
une estimation des dommages en tenant compte des informations reçues et lance des appels de
fonds auprès des entreprises d’assurances visées par la présente loi (art. 16 §1er).
Les « entreprises d’assurances » au sens de la loi, c’est-à-dire celles qui pratiquent la branche
13, dont la liste est communiquée au Fonds par la BNB, sont tenues de répondre à l’appel de
fonds lancé par le Fonds (art. 16 §2). La loi charge la FSMA de veiller au respect par les
entreprises d'assurances de cette obligation (ajout un nouveau point h à l’article 45 §1 er 3° de la
loi du 2 août 2002 relative à la surveillance du secteur financier et aux services par l’art. 21).
Pour répondre à cet appel de fonds, elles peuvent constituer des provisions pour sinistres
exceptionnels. Ces provisions sont des provisions techniques, au sens de la loi du 9 juillet 1975
relative au contrôle des entreprises d’assurances, dont le plafond est fixé annuellement par le
Roi qui détermine également les conditions et les limites de leur exonération fiscale (art. 16 §3).
Alors que l’entrée en vigueur de la loi est postposée neuf mois après sa publication, ces
provisions peuvent être constituées dès la publication de la loi, pour des sinistres exceptionnels
futurs et en dehors de tout appel de fonds du FCGA. Elles bénéficient, dès ce moment, de
l’exonération fiscale. Cette possibilité de constituer des réserves dès la publication de loi vise à
permettre aux entreprises d’assurance à se préparer à devoir répondre à un appel de fonds du
FCGA dès l’entrée en vigueur de la loi, neuf mois plus tard. Il reste à espérer que, une fois la loi
publiée, le Roi ne tardera pas à fixer le plafond annuel et les conditions et limites de
l’exonération de ces provisions pour sinistres exceptionnels.
Les entreprises d’assurances répondent à l’appel de fonds en fonction de leurs parts de marché.
La loi précise ce qu’il faut entendre par « part de marché » ainsi que la manière et le moment
pour la communiquer au FCGA qui dispose donc d’année en année de cette information dans
l’éventualité de la survenance d’un sinistre exceptionnel.
La part de marché est déterminée sur la base de l’encaissement réalisé en Belgique au cours de
l’exercice précédent dans la branche 13. Pour les programmes internationaux, seul
l’encaissement se rapportant aux risques belges doit être pris en considération.
L’encaissement est constitué par le total des primes brutes, hors taxes et contributions diverses,
provenant de cette branche en Belgique, diminué des commissions et frais d’acquisition.
L’encaissement réalisé en Belgique au cours d’une année civile dans la branche 13 doit être
certifié par un commissaire-réviseur ou un auditeur externe et communiqué au Fonds par ces
entreprises avant le 1er août de chaque année (art. 16 §4).
Toutes les entreprises d’assurances sont tenues de répondre, ensemble, à l’appel de fonds
jusqu’à un montant maximum de 50 millions d’euros par année civile. Ce montant peut être
modifié par arrêté royal, délibéré en Conseil des ministres, pour l’exercice suivant (art. 16 §5).
Ce montant est un maximum annuel absolu, peu importe le nombre de sinistres exceptionnels se
produisant sur l’année ou en cours de gestion auprès du FCGA. Il n’est en effet pas à exclure
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qu’un nouveau sinistre exceptionnel se produise alors que les dommages résultant d’un
précédent sinistre exceptionnel ne soient pas encore entièrement indemnisés.
La loi prévoit également de quelle manière est assuré le financement du système dans
l’hypothèse où une entreprise d’assurances fait faillite. Dans ce cas, les autres entreprises
d’assurances répondent, en fonction de leurs parts de marché, à l’appel de fonds du FCGA en
lieu et place de l’entreprise d’assurances déclarée en faillite (art. 16 §6). Le FCGA s’adresse aux
autres entreprises d’assurances pour prendre en charge la participation de l’entreprise en faillite.
Les entreprises d’assurances interviennent alors dans le cadre du nouveau système comme si
l’entreprise en faillite n’existait pas au moment de la survenance du sinistre exceptionnel.
9.2.
Récupération des indemnités et frais encourus par le FCGA
Le système mis en place est un système subsidiaire. Le FCGA n’a pas vocation à supporter la
charge du sinistre exceptionnel dès lors que cette charge incombe à quelqu’un d’autre, qu’il
s’agisse du responsable, de son assureur ou de toute autre institution ou organisme tenu de
prendre en charge le coût des lésions corporelles des victimes (mutuelle, assureur
hospitalisation, employeur, …) (cf. supra, point 5).
Le FCGA récupère auprès de ces personnes les indemnités, augmentées des intérêts légaux,
ainsi que l’ensemble des frais exposés et honoraires versés et les frais afférents à la gestion des
dossiers (art. 17). Cette récupération se fait sur la base et dans les limites de la subrogation du
FCGA dans les droits des victimes indemnisées prévue par la loi (art. 9 §4) contre toute
personne physique ou morale pour la partie du dommage qui aurait dû être prise en charge par
cette personne.
La subrogation du FCGA ne peut en aucun cas porter atteinte aux droits à l’indemnisation
intégrale des victimes. Ces dernières peuvent également exercer leurs droits pour ce qui leur
reste dû (dommages matériels, dommages consécutifs, …) par préférence à toute personne qui
les auraient déjà indemnisées et qui disposent d’un droit subrogatoire ou propre contre le
responsable ou son assureur.
En l’absence de responsable, ou si le FCGA ne peut récupérer auprès du responsable tout ou
partie des indemnités, augmentées des intérêts légaux, ainsi que l’ensemble des frais exposés et
honoraires versés et les frais afférents à la gestion des dossiers, le FCGA s’adresse à la Caisse
nationale des calamités pour en obtenir le remboursement (art. 18).
La loi prévoit en effet que l’Etat supporte, au titre de la solidarité nationale, via la Caisse
nationale des calamités, tout ou moitié de la charge financière du sinistre exceptionnel que le
Fonds n’a pas pu récupérer, en fonction de l’issue de la procédure judiciaire tendant à
déterminer les responsabilités :

s’il apparaît, qu’il n’y a aucun responsable, l’Etat supporte l’intégralité de cette charge
financière ;

s’il apparaît que la récupération du dédommagement auprès du responsable est
impossible, l’Etat supporte la moitié de cette charge financière.
Le législateur a estimé qu’il était « normal que le financement du FCGA en cette matière
incombe pour partie à la collectivité et pour partie aux assureurs des entreprises qui ont mis en
œuvre des progrès technologiques et généré du profit par le recours à ces technologies » (cf.
DOC 53 1286/011, p. 35).
14
9.3.
Rétrocession aux entreprises d’assurances
Le Fonds rétrocède enfin aux entreprises d’assurances, en fonction de leurs parts de marché
prises en compte pour les appels de fonds, les sommes récupérées par le biais de la subrogation
ou au titre de la solidarité nationale.
10. Entrée en vigueur
La loi entre en vigueur le premier jour du neuvième mois qui suit celui de sa publication au
Moniteur belge, c’est-à-dire le 1er novembre 2012 (art. 22). Concrètement, cela signifie que le
nouveau mécanisme d’indemnisation sera ouvert aux victimes de sinistres exceptionnels se
produisant à partir de cette date. Ce délai de transition est utile pour permettre au FCGA de
s’organiser, au Comité des sages d’établir son règlement d’ordre intérieur et au Roi de prendre
les arrêtés royaux indispensables au bon fonctionnement de la loi, notamment celui qui
détermine le plafond des provisions pour sinistres que les entreprises d’assurances peuvent
constituer, ainsi que celui qui détermine les conditions et les limites de l’exonération fiscale de
ces provisions (art. 16 §3).
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