Fiche objectif – la morale et la vérité

Fiche objectif – la morale et la vérité
Alafindelaleçon,jedoisêtrecapablede…
I. Vocabulaire :
a)définirlanotionetdistinguerlestermesvoisins:
- Vérité:adéquationdudiscoursetduréel.
b)définir/distinguerlestermessuivants:
-secretmédical;
-catégorique(Kant);
-moraledéontologique/conséquentialiste;
-labonnefoi/lamauvaisefoi;
-raisond’Etat;
-illusion/erreur(Freud);
II. Problématisation + thèses et arguments + citations
a)derepérerlesproblèmesliésàcettenotion:
- Faut-iltoujoursdirelavérité?A-t-onledroitdesetairequandonconnaîtlavérité?
- Avons-nousledevoirdechercherlavérité?
- +bonheur:Faut-ilpréférerunevéritédécevanteàuneillusionréconfortante?
- +politique:Lapolitiquepeut-elleéchapperàl’exigencedevérité?
- +Etat:L’Etata-t-illedroitdementiraunomdel’intérêtgénéral?
b)deciter3référencesphilosophiquesetd’endémontrerlesthèses,d’enévaluerles
conséquences:
Moraledéontologique
Moraleconséquentialiste
Ethiquedelavertu(Aristote,
(Kant)
(l’utilitarisme:J.Bentham,J.
MarthaNussbaum)
S.Mill,PeterSinger)
Lamoralitéd’uneaction
Lamoralitéd’uneaction
Uneactionestmoralement
s’évalueparsonrespectde
s’évalueparsesconséquences
bonnesielledéploieune
principesmorauxuniversels,
(pourl’utilitarisme,le
vertuhumaine:honnêteté,
quelsquesoientlesrésultats.
bonheurduplusgrand
générosité,sagesse,courage,
Ex.:mentirn’estpasmoral,
nombre).Ilfautcalculerles
etc.Cesvertuspermettent
carlemensongenepeutêtre conséquencespourmaximiser l’épanouissementdel’humain.
érigéenrègleuniverselle.
lebonheur.Ex.:mentirest
Ex.:mentirparintérêt,c’est
moralsicelasertlebonheur
êtremalhonnête.
duplusgrandnombre.
Nousn’avonsjamaisledroitdementir
Nouspouvonsavoirledroitdementir
(E.Kant)
(B.Constant)
Lemensongenepeutpasêtremoralcarilne
Sic’estpoursauverunamidelamenacede
peutpasêtreérigéenrègleuniverselle.Iln’est criminel,ilpeutêtremoraldementir,carce
doncjamaismoraldementiretlavéracitéest n’estundevoirdedirelavéritéqu’àceluiqui
toujoursundevoir,quellesquesoientles
lamérite.
conséquences.Ledevoirmoraldoitêtre
inconditionnel:sil’onacceptedesexceptions
selonlescirconstances,onperdtoutcritère
clairdecequirelèveounondudevoir.
- Platon, LaRépublique(-5/4e s.): il existe des cas où le mensonge est justifié, voire noble, par
exemple envers un ami que la folie porterait à quelque mauvaise action, il en est de même en
politique pense-t-il. Voici le noble mensonge qu’il faudrait aux citoyens de sa Cité idéale: s’ils
sontfrèrescarissusdelamêmeterre,ilsnesontpourautantpastouségauxcarleDieuquilesa
formé a mis de l’or en ceux qui commandent. L’accès au savoir est présenté comme une
libération des chaînes et de l’obscurité de la caverne dans l’Allégorie de la Caverne; l’art est
dénoncé comme une imitation dégradée de la réalité, comme une forme de mensonge. La
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philosophieestamourdelavérité.LeGorgias:tandisquelessophistescherchentàremporterla
victoiredansundialogue,lephilosopheluicherchelavérité,mêmesicelaimpliqued’êtreréfuté.
Socrate estime même que c’est un plus grand bien d’être réfuté que d’avoir raison, car cela
permetd’êtrelibéréd’uneerreur.
- Aristote, Ethique à Nicomaque: le bonheur, eudaimonia, s’atteint par la réalisation de notre
naturehumained’êtreraisonnable.L’hommeseréalisesanslaquêtedelavérité.
- N. Machiavel, Le Prince, chapitre 18 «Comment les princes doivent tenir leur parole»: Le
princeestobligédeviolerlamoraleaunomdel’intérêtgénérals’ilveutmaintenirunEtatstable
et sûr (cf. le concept de raison d’Etat). Le prince ne peut pas suivre la morale, il est contraint
d’userdelaruse,maisildoitquandmêmedonnerl’imagedelamoralité,carildoitàtoutprix
éviter«leméprisetlahaine»desessujets.Prisentrelanécessitédesemontrerimmoralselon
lescirconstancespourmaintenirlepouvoir,ildoitaussiparaîtremoralpourplaireaupeuple:
l’exercicedupouvoirlecontraintàparaîtreetnonpasêtremoral.
-R.Descartes,LettreàElisabethdu6octobre1645:danscettelettre,Descartessedemande«s’il
est mieux d’être gai et content» en se faisant des illusions («en imaginant les biens qu’on
possède être plus grands et plus estimables qu’ils ne sont», etc.) ou d’être «plus triste» mais
conscientdelavérité.Descartesrefusedepenserquelesouverainbienreposedansleplaisir.Il
penseque«c’estuneplusgrandeperfectiondeconnaîtrelavérité,encoremêmequ’ellesoità
notredésavantage,quel’ignorer»,c’estpourquoiilpense«qu’ilvautmieuxêtremoinsgaiet
avoir plus de connaissance.» D’autant que lorsque l’on cherche à se donner du plaisir en
s’illusionnant,ildemeureuneamertume,carl’onsaitaufondqu’ils’agitd’illusions.
-B.Pascal,Pensées(17es.):Lefondementdudroitn’estpaslajusticevéritablemaislesmœurs,
lacoutume.Cettejusticeestdoncarbitraire.Lesdemi-habilesledénoncent.Maisceuxquisont
vraimenthabilessegardededirelavéritésurl’originedudroit,carcelarisqueraitdemettreen
périlsafonctiondepacificationdelasociété.Ainsilasociétésefondesurunepartdemensonge.
Thèmedudivertissement:Parailleurs,l’hommechercheàêtretoujoursoccupé,diverti,afinde
nepasêtreconfrontélavéritédesaconditionexistentielleangoissante.
- J. Bentham (18e s.): fondateur de l’utilitarisme, selon lequel une action est morale si elle
maximiselebien-êtregénéral.Ilfautdonccalculerlesconséquencesdesesactionsd’unpointde
vueglobaletsurlelongterme.Cecalculdoitaussiprendrel’intérêtdechacun.Mentiroudirela
véritépeuventtoutdeuxêtredesactionsmoralesenfonctiondesconséquences.
-E.Kant,FondementsdelaMétaphysiquedesMœurs(18es.):Kantaffirmequelemensongeest
toujoursimmoral.Lecritèrepoursavoirsiuneactionestmoraleconsisteàsedemandersil’on
peutenfaireunerègleuniverselle.Kantformuleainsil’impératifcatégorique:«Agisseulement
d'après la maxime grâce à laquelle tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi
universelle.» Or on ne peut pas faire du mensonge une loi universellesans aboutir à une
contradictionformelle:sitoutlemondementait,lemensongelui-mêmen’auraitplusdevaleur,
carlemensongefonctionneàconditionquel’ondiseleplussouventlavérité.Donclemensonge
est immoral. L’impératif catégorique est désintéressé, inconditionnel et indépendant des
conséquences:iln’estjamaismoral,ditKant,dementir,quellesquesoientlesconséquences.De
plus,lavéracitéestcequipermetlaconfianceetparlàlasociété:sansvéracité,iln’yaplusde
société possible.Surunprétendudroitdementirparhumanité:dans cet ouvrage, Kant répond
auxobjectionsdeBenjaminConstant.Mêmesiuncriminelmeforceàavoueroùsecacheunde
mes amis pour le tuer, il reste immoral de lui mentir d’après Kant. La véracité dans ses
déclarationsestundevoirabsoludel'hommeenverschacun,sigravesoitlepréjudicequipeut
enrésulterpourlui.Ennedisantpaslavérité,mêmesicelanenuitàpersonne,celaresteune
atteinte à la dignité morale de l’ensemble de l’humanité. Le devoir moral ne peut pas subir
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d’exceptionouêtreconditionnéauxcirconstances:sitôtquel’onadmetdesexceptions,ledevoir
moralperdsaforce.Admettremêmeuneseuleinfractionàlamorale,c'estcréerunprécédent
qui conduit à admettre toutes les infractions. De plus, si l’on ment, on est alors juridiquement
responsable de toutes les conséquences qui pourraient en découler. En revanche, si l'on s'en
tientàlastrictevérité,lajusticepubliquenepeuts'enprendreànous,quellesquepuissentêtre
les conséquences imprévues qui en résultent. Dans notre exemple, le meurtrier seul est
responsable.Ilestpossiblequ'aprèsavoirréponduloyalementparl'affirmativeaumeurtrierqui
demandesimonamiestdansmamaison,cedernierensoitsortisansqu'onleremarqueetque
leforfaitn'aitpaslieu.Maissi,fauted'avoirditlavérité,lemeurtrierrencontreparhasardmon
ami, alors c'est moi qui suis responsable du crime. En effet, si j'avais dit la vérité, peut-être le
meurtrierauraitpuêtrearrêtéparunvoisinaccouruetlecrimeauraitalorspuêtreempêché.
Celuiquiment,mêmeavecgénérosité,doitrépondredesconséquencesdesonmensongemême
devantlestribunauxcivils.Lavéracitéestundevoirquifondelepactesocialetsionadmetla
moindreinfractionaudevoir,celui-cis'effondrecariln’estplusinconditionnel.
-B.Constant,Desréactionspolitiques:Imaginonsqu’unamisoitpoursuivipardescriminelset
seréfugiechezmoi;sicescriminelsfrappentàmaporteetmedemandesimonamiestcaché
chez moi, est-il moral de leur mentir? Contrairement à Kant, Constant pense que oui, nous
pouvonsmentirparhumanité,cartouthommen’apasdroitàlavérité.Cen’estàdevoirdedire
la vérité qu’à celui qui la mérite. Benjamin Constant montre ainsi que toute règle morale doit
s’accompagnerderèglessecondaires,rendantsonapplicationpossible.Onnepeutainsisuivre
aveuglément le devoir de dire la vérité sans réfléchir à qui a droit à cette révélation (par
exemple,pasceluiquival’utilisercontrequelqu’un),etdequellemanièrecettevéritédoitêtre
dite(parexemple,l’annonced’undécèsàunenfant,d’unemaladieàunpatient).
- J. S. Mill, L’Utilitarisme (19e s.): celui qui s’y connaît dans un domaine est peut-être plus
facilement insatisfait mais il accède à des plaisirs de meilleurs qualités. Ces plaisirs sont plus
exigeantsmaisprocurentuneformededignité:«Ilvautmieuxêtreunhommeinsatisfaitqu’un
porcsatisfait,ilvautmieuxêtreSocrateinsatisfaitqu’unimbécilesatisfait.»
- F. Nietzsche, Humain,trophumain(19e s.): La philosophie se présente depuis Platon comme
amour de la vérité, mais Nietzsche remet en cause la sincérité de cet amour. Ce n’est pas
naturellementnidefaçondésintéresséequeleshommesdisentlavérité,maissurtoutparceque
«c’estpluscommode;carlemensongeréclameinvention,dissimulationetmémoire»afindene
pas être démasqué. En effet, l’invention d’un mensonge amène souvent à en inventer d’autres
pour préserver le premier… Ce n’est pas l’illusion elle-même que nous détestons, mais les
dommagesquipeuvents’ensuivre.Demêmequenousn’aimonsquelesvéritésquisontutilesà
la conservation de la vie. «Presquerienn'estplusinconcevablequel'avènementd'unhonnêteet
purinstinctdevéritéparmileshommes.» Derrièreledésirdevérité,peutsecacherunvolontéde
dominer (imposer sa vision des choses) et un refus de la vie (insaisissable en une perspective
unique).Derrièrelascience,secachelacroyancequelavéritéestmeilleurequel’illusion.C’est
unecroyancemorale.OrNietzschepensel’illusioncommenécessaireàl’homme:«Ilenestainsi
detouteslesgrandeschosesquineréussissentjamaissansquelquesillusions.»L’artexprimece
goûtpourl’illusion,pourlejeudesapparences.
- S. Freud, L’avenird’uneillusion: Freud distingue l’erreur involontaire de l’illusion provoquée
parledésir.Seréfugierdansl’illusionestunmanquedecourage.Unbonheurfondésurl’illusion
estpathologique.Poursedélivrerdelanévrose,ilfautaccepterlavéritésursondésir.Cequej’ai
refoulé,cequejemecacheàmoi-même,nedisparaîtpaspourautantetcontinueàinfluencerma
viepsychique.Lalevéedurefoulement,l’acceptationdelavéritésurnosdésirsestdifficile,c’est
pourquoi nous avons besoin du psychanalyste comme médiateur. Une difficulté de la
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psychanalyse:d’aprèsFreud,leprogrèsdelascienceauraitinfligétroisblessuresnarcissiques:
ladécouvertequelaterren’estpasaucentredel’universparCopernic,quel’hommedescenddu
singeparDarwinetquelemoin’estpasmaîtrechezluiparFreud…
-J.-P.Sartre,l’ÊtreetleNéant:iln’estpasvraimentpossibledesementiràsoi-même,carnous
sommes à la fois le trompeur et le trompé. Il n’y a donc pas vraiment de refoulement
inconscient:noussommesconscientsdenotremensonge.Ilfautplutôtparlerdemauvaisefoi.
L’homme est de mauvaise foi chaque fois qu’il se cache sa transcendance (sa liberté) ou sa
facticité.Toutêtrehumainestincertaindecequ’ilest:cetteincertitudevientdulibrearbitre,
car l’homme n’est pas, il se fait. Cependant nous sommes angoissés par cette incertitude, et
l’hommeéprouvelebesoindesedéfinir:ils’identifiealorsàunpersonnagepoursedonnerun
être.Jemetrompemoi-mêmeenmedisantquesiautruicroitàmonpersonnage,c’estquepeutêtrejesuisréellementcepersonnage.Enmentantauxautres,jememensàmoi-même:lamême
personnefabriquelefauxetsefaitcroirequecen’estpeut-êtrepasfaux.C’estdelamauvaisefoi.
SituationsII: l’écrivain est responsable moralement de dire la vérité quand il la connaît et de
dénoncer les injustices. Il est autant responsable de son silence que de ses paroles: «Je tiens
FlaubertetGoncourtpourresponsablesdelarépressionquisuivitlaCommuneparcequ'ilsn'ont
pasécritunelignepourl'empêcher.Cen'étaitpasleuraffairedira-t-on?MaisleprocèsdeCalas,
était-ce l'affaire de Voltaire ? La condamnation de Dreyfus, était-ce l'affaire de Zola ?
L'administrationduCongo,était-cel'affairedeGide?Chacundecesauteurs,enunecirconstance
particulièredesavie,amesurésaresponsabilitéd'écrivain.»Dansunedesesnouvellesintitulée
LeMur,Sartreracontel’histoired’unrésistantarrêté,dontlesbourreauxleforcentàdire,sous
peine de mort, où sont cachés ses amis. Le résistant ment et donne une fausse adresse. Par
malheur, entre temps ses amis ont changé de cachette et se trouvent justement à l'adresse
donnéeauxbourreaux.Ilssontarrêtés.
c)dereteniretexpliquercescitations:
- «Il ne faut pas toujours dire tout, car ce serait bêtise; mais ce qu’on dit, il faut qu’il soit tel
qu’onlepense,autrementc’estméchanceté.»Montaigne,Essais,II,17.
- «À supposer que la vérité soit une femme, n'aurait-on pas lieu de supposer que les
philosophes,danslamesureoùilsontétédogmatiques,n'ontriencomprisauxfemmes?»F.
Nietzsche,Par-delàbienetmal?
d)deciter3référenceslittéraires,historiquesoucinématographiques:
- Lemensonged’EtatsurTchernobyl;
- Ledevoirdevéritéenhistoire;
- Lemur,deJ.-P.Sartre;
- Œdipe-roi,deSophocle;