printemps po`tes 27/03 - Philharmonie de Paris
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printemps po`tes 27/03 - Philharmonie de Paris
le printemps des poètes samedi 27 mars 1999 La cité de la musique a choisi de participer à la journée le printemps des poètes à travers une série de manifestations rendant hommage à la fois aux liens intimes qu’entretiennent la musique et la poésie, ainsi qu’à la culture algérienne qu’il importe de soutenir, en particulier aujourd’hui. Cette journée se déroule en trois temps : un spectacle de contes méditerranéens dits par Praline Gay-Para (15h-16h), une série de lectures autour de Kateb Yacine (de 16h30 à 19h30), avec la participation du groupe Raï Kum et une soirée conçue comme un « café littéraire » (à partir de 20h) destinée à présenter plusieurs auteurs algériens contemporains. Autant de manifestations qui, directement ou indirectement, rendront hommage à Kateb Yacine dont les écrits ont marqué toute la génération de la poésie algérienne de l’après-Seconde Guerre mondiale. « Il est urgent de lire, écrivait Jacqueline Arnaud, d’entendre aujourd’hui ce grand auteur de nous-mêmes, ce clandestin qui s’introduit dans notre mémoire à la faveur d’un équivoque passeport de langue française et nous dérange par tant de familiarité mêlée à tant d’étrangeté radicale. Alors que nous nous accrochons aux pans de notre identité, refusant de connaître que l’autre, depuis des siècles, est déjà en nous, Kateb nous force à nous décentrer, à entrer par mimétisme dans son jeu et son monde afin que, dans le Jardin parmi les flammes, notre cœur devienne capable de toutes les formes. » avec le soutien de la RATP samedi 27 mars - 15h amphithéâtre du musée concert - conte à partir de 7 ans Des Rives de la Petite Bleue La conteuse Praline Gay-Para propose pour tout public un spectacle en langue française composé de contes méditerranéens et d’histoires du Maghreb. Praline Gay-Para, conteuse Jean-François Piette, percussion durée : 1 heure samedi 27 mars - 16h30 rue musicale autour de Kateb Yacine lecture et moments musicaux lectures de textes poétiques : Olivier Augrond, Olivier Balazuc, Damien Bigourdan, Rachida Brakni, Alexandra Castellon, Tiago Manaia, Elodie MarteauLaurent, Julie Recoing, Pascal Remeric, Lisa Sans, Anne Saubost, Thomas Scimeca, Hedi Tillette de Clermont Tonnerre, Hyam Zaytoun, étudiants du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique Marcel Bozonnet, directeur du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique Gabriel Garran, mise en espace et choix des textes musique : Abdelkader, Maman, Fichta, Sadia, Raina Raï, Blues, Goulou, Baba Amar, Chihal, Toumali, Bel Ate El Babe, Bini Ou Bik, Zina, Choufi Raï Kum : Yahia Mokeddem, chant Zoubida Azrou, chœur Khoudir Saïdi, batterie Abdelkader Tab, percussions, chœur Cyril Barbessol, claviers Ilan Abou, Hichem Takaoute, guitares basse Kliff Miziallaoua, guitare, chœur durée : 3 heures le printemps des poètes à la Villette Kateb Yacine Kateb Yacine compte parmi les auteurs connus aussi bien en Afrique du Nord que dans le monde entier. Qui n’a pas lu ou étudié Nedjma, son chef-d’œuvre ! Même si les travaux sur Nedjma sont actuellement de plus en plus nombreux, il n’en demeure pas moins que l’œuvre intégrale de Kateb Yacine reste encore à décoder, analyser. Car le lecteur garde un sentiment de grande frustration, de soif de connaître chaque fois plus le sens caché, implicite de cette œuvre plurielle, au symbolisme pluridimensionnel. Comme un fresque, dans son achèvement, elle donne l’impression de l’inachevé. Mais, ce n’est là qu’un mode de penser et de vivre une réalité, propre à Kateb Yacine : celle d’une patrie, d’un mode en construction ; aussitôt fait, le mode se défait... aussitôt construites les idéologies tombent comme un château de cartes sous ses yeux... ses espérances aussi. C’est précisément ce mot de la fin, ou l’achèvement d’une œuvre conçue dans un esprit permanent d'élaboration qui caractérise le monde. Mais la révolution n’est-elle pas née pour continuer ? On ne peut que se joindre à Jacqueline Arnaud, pour dire que la métaphore qui convient d’applique à l’œuvre de Yacine, c’est peutêtre le chantier, comme elle le suggère à propos du Polygone étoilé : « La figure du Polygone étoilé suggère la multiplicité des facettes et l’image du chantier, Alger chantier, œuvre en chantier (« work in progress »), revient souvent. Kateb est l’homme d’un immense puzzle, auquel sans cesse des pièces sont ajoutées, retaillées, puzzle ou « patch work » qui utilise des étoffes d’origine et de textures différentes ». (L’œuvre en fragments. Paris, Sindbad, 1986, p. 14) Tassadit Yacine (extrait de la revue Awal n° 9, 1992, p. 1) notes de programme | 5 le printemps des poètes à la Villette Kateb Yacine (1929-1989) « Je suis né le 6 août 1929, à Constantine. Mon père était avocat. Mon père, ma mère, mon grand-père et ma grand-mère, mes oncles, mes tantes, cela vient de la même tribu. Nous sommes tous issus de mariages consanguins. Grâce à mon père qui voyageait beaucoup, j’ai parcouru, tout enfant, l’Algérie. J’ai été à l’école coranique d’abord, jusqu’à l’âge de sept ans. Puis, mon père s’est rendu compte que, continuant à étudier la langue arabe sous la forme coranique - sous le régime colonial - ça ne menait à rien. Il a décidé que j’apprendrais puisque la culture française dominait. Mon père avait d’ailleurs la double culture, arabe et française. J’ai donc été à l’école française et j’ai fait des études jusqu’à l’âge de quinze ans. Il y eu alors les événements de 1945, la manifestation anticolonialiste. J’y ai participé, j’ai été arrêté et j’ai été exclu du collège. J’étais en troisième. A partir de là, la classe ne m’intéressait plus, après la prison. Ce qui m’intéressait, c’était la poésie avant tout. Mon père, bien qu’avocat, n’a pas su me dire non. En ce sens, mon arrestation a été bénéfique. Alors, je suis parti... J’ai parcouru une partie de l’Algérie. J’ai rencontré un imprimeur en faillite, il m’a imprimé. C’est ainsi qu’est sorti mon premier recueil de poèmes Soliloques en 1946, dans la ville de Bône, et ce fut mon entrée dans la littérature. Quand j’ai vu le peuple s’emparer de ces brochures, 6 | cité de la musique alors j’ai commencé à devenir un militant. De 1946 à 1947, j’ai été un nationaliste. En 1947, j’ai fait un voyage à Paris, mon premier séjour. Je suis retourné à Alger, et je suis entré à Alger Républicain jusqu’à la mort de mon père en 1950 et je suis retourné en France chercher du travail. Là j’ai écrit Le Cadavre encerclé et Nedjma. L’accueil en France a été bon, mais la guerre a éclaté et il a fallu que je quitte la France. Ce fut l’Italie puis la Tunisie et Hambourg. Un an et demi en Yougoslavie, l’Allemagne, la Belgique et à nouveau Florence pendant un an. » K. Y. œuvres : Soliloques (épuisé) Nedjma (Ed. du Seuil) Le Cadavre encerclé (épuisé) Le Cercle des représailles (Ed. du Seuil) Le Polygone étoilé (Ed. du Seuil) L’Homme aux sandales de caoutchouc (Ed. du Seuil) Le Poète comme un boxeur - Entretiens 1958-1989 (Ed. du Seuil) L’Œuvre en fragments (Ed. Sindbad ; Actes Sud, épuisé) bibliographie : Saïd Tamba, Kateb Yacine (1992, Ed. Seghers) le printemps des poètes à la Villette Kateb Yacine Un ancêtre surgit des flots. Elles se lamentent de Un ancêtre surgit des flots cette farouche apparition. L’ancêtre nage, en s’efforçant d’oublier les charmes de son engeance. Il est à l’âge où tout inceste n’est qu’un bâton de pèlerinage. Il a eu trop de femmes, trop de filles, pour n’avoir pas à les surprendre en leurs ébats. Et faute de rivaux, il se dispute ses épouses. Mais chaque fois ses plans sont bouleversés. Il n’a plus rien d’un chacal. Sorti de l’eau, il plonge dans la forêt. Ni soldat, ni propriétaire, quel est ce spectre sans mémoire dont les enfants se perdent en questions ? Etait-ce un ogre prolifique, un ogre qui mangea ses fils aînés, mais préserva peut-être le dernier ? Qui que tu sois, voyageur opprimé, tu es le maître du désert, et le maître de la forêt. Le fondateur n’a rien à vendre. Sa cabane s’élève contre un boutoir de cactus, tout près d’un faible ruisseau mangé par ses buissons. C’est là que le soir est bien frais. On rêve. Est-il bien vrai que nous sommes en guerre ? Anthologie de la littérature algérienne de langue française, Bordas La seule artère où je veux Ici est la rue des Vandales. C’est une rue d’Alger ou rendre l’âme de Constantine, de Sétif ou de Guelma, de Tunis ou de Casablanca. Ah ! l’espace manque pour montrer dans toutes ses perspectives la rue des mendiants et des éclopés, pour entendre les appels des vierges somnambules, suivre des cercueils d’enfants, et recevoir dans la musique des maisons closes le bref murmure des agitateurs. Ici je suis né, ici je rampe encore pour apprendre à me tenir debout, avec la même blessure ombilicale qu’il n’est plus temps de recoudre ; et je retourne à la sanglante source, à notre mère incorruptible, la Matière jamais en défaut, tantôt génératrice de sang et d’énergie, tantôt pétrifiée dans la combustion solaire qui m’emporte à la cité lucide au sein frais de la nuit, homme tué pour une cause apparemment inexplicable tant que ma mort n’a pas donné de fruit, comme un grain de blé dur tombé sous la faux pour onduler plus haut à l’assaut de la prochaine notes de programme | 7 le printemps des poètes à la Villette aire à battre, joignant le corps écrasé à la conscience de la force qui l’écrase, en un triomphe général, où la victime apprend au bourreau le maniement des armes, et le bourreau ne sait pas que c’est lui qui subit, et la victime ne sait pas que la matière gît inexpugnable dans le sang qui sèche et le soleil qui boit... Ici est la rue des Vandales, des fantômes, des militants, de la marmaille circoncise et des nouvelles mariées ; ici est notre rue. Pour la première fois je la sens palpiter comme la seule artère en crue où je puisse rendre l’âme sans la perdre. Je ne suis plus un corps, mais je suis une rue. C’est un canon qu’il faut désormais pour m’abattre. Si le canon m’abat, je serai encore là, lueur d’astre glorifiant les ruines, et nulle fusée n’atteindra plus mon foyer à moins qu’un enfant précoce ne quitte la pesanteur terrestre pour s’évaporer avec moi dans un parfum d’étoile, en un cortège intime où la mort n’est qu’un jeu... Ici est la rue de Nedjma mon étoile, la seule artère où je veux rendre l’âme ? C’est une rue toujours crépusculaire, dont les maisons perdent leur blancheur comme du sang, avec une violence d’atomes au bord de l’explosion. Le Cadavre encerclé extrait de Le Cercle des représailles, Seuil, Paris, 1959. Anthologie de la littérature algérienne de langue française, Bordas, p. 74 Les Enigmes du regard 8 | cité de la musique Toute petite, Nedjma est très brune, presque noire ; c’est de la chair en barre, nerfs tendus, solidement charpentée, de taille étroite, des jambes longues qui lui donnent, quand elle court, l’apparence des calèches hautes sur roues qui virent de droite et de gauche sans dévier de leurs chemins ; vastitude de ce visage de petite fille ! La peau, d’un pigment très serré, ne garde pas longtemps sa pâleur native ; l’éternel jeu de Nadjma est de réduire sa robe au minimum, en des poses acrobatiques d’autruche enhardie par la solitude ; sur un tel pelage, la robe est un surcroît de nudité ; la féminité de Nedjma est ailleurs ; le premier le printemps des poètes à la Villette mois d’école, elle pleure chaque matin ; elle bat tous les enfants qui l’approchent ; elle ne veut pas s’instruire avant d’apprendre à nager ; à douze ans, elle dissimule ses seins douloureux comme des clous, gonflés de l’amère précocité des citrons verts ; elle n’est toujours pas domptée ; les yeux perdent cependant de leur feu insensé ; brusque, câline et rare Nedjma ! Elle nage seule, rêve et lit dans les coins obscurs, amazone de débarras, vierge en retraite, Cendrillon au soulier brodé de fil de fer ; le regard s’enrichit de secrètes nuances ; jeux d’enfants, dessin et mouvement des sourcils, répertoire de pleureuse, d’almée, ou de gamine ? Epargnée par les fièvres, Nedjma se développe rapidement comme toute Méditerranéenne ; le climat marin répand sur sa peau un hâle, combiné à un teint sombre, brillant de reflets d’acier, éblouissant comme un vêtement mordoré d’animal ; la gorge a des blancheurs de fonderie, où le soleil martelle jusqu’au cœur, et le sang, sous les joues duveteuses, parle vite et fort, trahissant les énigmes du regard. Anthologie de la littérature algérienne de langue française, Bordas, p. 71 Salut porte fermée Salut porte fermée Couverture d’un autre livre Abattue sur nous Les pages du livre déchiré Nedjma Nedjma ouvre ta porte ou ta fenêtre Ou trotte seulement dans ton couloir Ou parle ou crie ou chante ou pleure Jette sur nous le mensonge dû aux fidèles Ou le seau d’eau sur la tête des fous Envoie-nous ton chien ou ton chat Ou l’une des mouches de ta maison Secoue sur nous ton vieux tapis Je ne puis supporter cette solitude ! Le Polygone étoilé (Seghers, p. 177) notes de programme | 9 le printemps des poètes à la Villette Raï Kum, Au commencement était l’idée de fonder un groupe le raï de bonne volonté qui puisse faire la musique qu’il aime, puis l’idée devint chair et hausse de tonalité. Le volume poussé à fond, il manquait un nom de baptême pour répliquer à ceux qui se demandaient si c’était du raï ou de l’infusion maghrébine. C’est un peu les deux mais si la majorité pense que c’est du raï, « raïkum » en arabe, eh bien, dont acte. Ainsi répondait en 1988, Yahia Mokeddem à l’assistance du Baiser Salé, la salle où la bande a effectué ses premiers pas. Yahia, natif de la région de Tlemcen, à l’ouest de l’Algérie, mais installé en France à l’âge de six ans, est l’âme de la formation. Bien que nourri de l’esprit mélodique andalou, chaâbi ou populaire marocain dès son enfance, il n’en demeure pas moins, au départ, un enfant du rock et de la pop. C’est tout naturellement cet univers qui va inspirer ses premières tentatives comme compositeur, bassiste et interprète. A l’époque où Trust s’est aventuré avec succès sur les landes du hard rock, Yahia et son band, le 38 Tonnes, influencé par Toto, Foreigner et Deep Purple, lance un 45 tours contenant un titre qui plaît à des animateurs comme Francis Zégut ou Max Meynier. Quelques passages sympathiques sur RTL permettent juste de décrocher quelques contrats dans certains endroits conviviaux tel que le Caf’Conc’ où Mokeddem et son regretté frère Amar distraient l’auditoire à coups de reprises de standards souvent repris en chœur. En 1986, le raï débarque en force à Paris et sort l’artillerie lourde lors de deux festivals, l’un à Bobigny, l’autre à la Villette. Yahia en connaît un rayon là-dessus et au retentissement des premières notes des Chebs, les souvenirs affluent. D’autant qu’Amar, un temps rentré en Algérie pour se frotter au raï local joué exclusivement dans les cabarets, l’encourage à emprunter la voie des racines. Yahia est séduit par le tempo mais pas par les arrangements approximatifs, « décousus » comme il le souligne. Il accompagne quelques bonnes pointures tels que Cheb Mami ou Cheb Moumen avant de se décider à écrire des mor10 | cité de la musique le printemps des poètes à la Villette ceaux mieux structurés. Jess, ex-batteur de Carte de Séjour reconverti dans la production, adore ce que fait Raï Kum et leur propose d’en intégrer un sur ce qui est la première compilation raï commercialisée en France. Intitulé « Zina » et porté par une rythmique façon Atlas marocain, le titre se démarque, en effet, des autres par ses mélanges généreux. Ce sera désormais la griffe, reconnaissable entre mille, des stylistes mélodiques de Raï Kum. Roulant sans produit jusqu’en 1994, année d’un premier essai discographique (un mini-single) mijoté avec la complicité de la Bougnoule Connection, Raï Kum (signifiant également « Telle est votre volonté ») se distingue surtout par des prestations scéniques de bon niveau qui attirent aussi l’attention de quelques programmateurs de festivals. Entre deux apparitions, le groupe soigne sa musique, remet plusieurs fois l’ouvrage sur le métier et met un point d’honneur à générer un répertoire où pas une note juste, pas un mot ciselé ne manquent à l’appel. Le résultat est là, aujourd’hui, avec l’appui de Sony, à travers un album remarquable par son architecture musicale, ses rythmes reflétant la diversité maghrébine en le domaine et des plages variées et invitant à plusieurs voyages. D’entrée, Raï Kum ne vous laisse pas le temps de vous échauffer, il vous fait transpirer rapidement avec « Fichta » (La fête), ses percussions fiévreuses, son ton chaâbi et ses couleurs chaudes. C’est à une sorte de promenade dans la Casbah avec des castagnettes aguicheuses que l’on nous convie et le reste du parcours, balisé par « Bini Ou Bik » (Entre toi et moi) et son air enjoué, « Choufi » (Regarde) et ses déclinaisons à la Was Not Was et autres « Baba Aamar » (Père Amar) aux accents gnawi, du nom de ces descendants d’anciens esclaves marocains dont la musique thérapeutique a enchanté Jimi Hendrix, Randy Weston et Led Zeppelin, se veut encore et toujours mouvement. Le propos tourne génralement autour de l’amour-blessure ou de la mélancolie des êtres et des jours ; mais, par-delà les mots bleus, Raï Kum, et ses brillantes individualités tant instrumen11 | cité de la musique le printemps des poètes à la Villette tales que vocales, ne s’interdit pas un brin de fantaisie ou une incitation au festif. Entre raï des villes, des pointes de reggae, des intrusions hip hop, rythmes des champs marocains, envolées chaâbi ou tempo intemporel bédouin (le beau « Maman »), Raï Kum a su trouver la bonne vitesse et la démarche qui combine l’idéal musical de notre temps avec le réel des origines. Soit du raï qui fait aimer le raï. Rabah Mezouane avec l’aimable autorisation de Sony France 12 | cité de la musique le printemps des poètes à la Villette Bini Ou Bik Fichta Entre nous je le promets, si mes yeux ont tout vu, ma bouche, elle, n’a rien dit je le jure si mes oreilles ont entendu ma bouche, elle, n’a rien dit. La fête plateau de métal verres en cristal théières fumantes senteurs de menthe ce soir le marié est notre roi Ma sœur, vis ta vie à ta guise, sans souci de mes crises. Sois tranquille, sois tranquille. Que la vie te soit exquise, n’aie crainte, quoi qu’on dise sois tranquille, sois tranquille. Entre nous pas de méprise, laissons les gens parler, parler entre nous pas de méprise, laissons les nous envier, nous envier. refrain Ma sœur, rire et jouir tu le peux. Qui en est juge à part Dieu ? Suis ton chemin sois tranquille si d’aventure j’y trouvais à redire réserve-moi des châtiments, le pire ! Danses de joie tambours et voix les youyous fusent déjà Le marié est là ! Ce soir, c’est la fête ! (bis) plateau de métal verres en cristal théières fumantes senteurs de menthe ce soir la mariée est notre reine ! Danses de joie tambours et voix les youyous fusent déjà La mariée est là ! Ce soir, c’est la fête ! (bis) Qu’elle est belle dans sa robe blanche ! Les doigts roussis par le henné ! Qu’elle est belle dans sa robe blanche ! Avec au doigt, l’anneau doré ! notes de programme | 13 le printemps des poètes à la Villette Blues Sadia Faut-il marcher ? Faut-il reculer ? Faut-il rire ? Faut-il pleurer ? Saadia, Saadia, j’aimerais tant Saadia, Saadia, j’aimerais tant... J’ai l’âme meurtrie, J’veux juste en parler j’ai l’âme meurtrie qui pourrait me consoler ? Saadia, j’aimerais tant que la paix survive à ces temps. Sadia j’aimerais tant que notre bonheur soit éclatant ah Saadia on dit que tout est écrit pourtant rien n’est acquis J’ai le blues, (bis) amis fidèles j’ai le blues ! En tête à tête avec soi-même, la tête fini par exploser j’veux oublier mes peines, m’oublier et me poser. J’ai le blues, (bis) amis fidèles j’ai le blues ! Faut-il avancer ? Faut-il s’arrêter ? Faut-il parler ? Faut-il se taire ? J’ai l’âme meurtrie, J’veux juste en parler j’ai l’âme meurtrie qui pourrait me consoler ? J’ai le blues, (bis) amis fidèles j’ai le blues ! 14 | cité de la musique Oh, oh, oh, j’ai fait de mauvais choix Oh, oh, oh, je suis en plein désarroi. Ah Saadia, pourquoi ai-je dit ces mots qui ne s’effaceront jamais ? Puisque tout va à la mort, je veux rire encore et rêver ! Oh, oh, oh, j’ai fait de mauvais choix Oh, oh, oh, je suis plein de désarroi. le printemps des poètes à la Villette Maman Bet Ate L’Babe Mère, bonne mère. Dans le taxi tout de blanc vêtue Mère, bonne mère elle est partie mes yeux ont tout vu. Depuis l’enfance, nous étions deux tendres amis. Depuis l’enfance l’un pour l’autre étions promis. Mère, bonne mère, quand je l’ai vu à côté d’elle Mère, bonne mère, Main dans la main, devant l’autel... Mère, bonne mère, Dieu sait combien j’étais fidèle. Mère, bonne mère, j’ai tout inventé pour la rencontrer Mère, bonne mère les yeux baissés elle a pleuré Mère, bonne mère les yeux humides, j’ai regardé mes pieds. Oh Seigneur vingt ans d’amour Oh Seigneur vingt ans d’espoir Oh Seigneur ! Tout s’effrite en une journée ! Mère, bonne mère, dans le taxi, tout de blanc vêtue Mère bonne mère elle est partie mes yeux ont tout vu elle le sait, je ne suis qu’un pauvre enfant, nous nous aimions trop secrètement qu’est-ce qui nous a séparés ? Qu’est-ce qui nous a fait pleurer ? Elle a fermé la porte elle a fermé la porte me jetant dehors, hurlant inutile de frapper retourne chez elle femme, femme, de quoi parles-tu encore ? Tu fais l’innocent, dit-elle, ta tactique habituelle ! Elle a fermé la porte me jetant dehors, hurlant va t’en, y’a plus rien entre nous ! Femme, pourquoi fais-tu ça ? Quel est mo, tort ? Tu fais l’innocent dit-elle je te connais mon minou ! Elle m’a mis le feu (bis) Elle m’a fermé la porte au nez dans la nuit hurlant va t’en retourne chez l’autre ! Femme je vais chez tes parents dès aujourd’hui ! Je te quitte dit-elle et c’est de ta faute ! Hey mama mon sang est en feu Hey mama, elle m’a mis le feu Elle m’a fermé la porte au nez dans la nuit hurlant va t’en retourne chez l’autre ! Femme, femme ne sois pas si sévère ! Elle a fermé la porte me jetant dehors, hurlant va t’en, retourne chez l‘autre ! Femme, femme, ne sois pas rancunière ! notes de programme | 15 le printemps des poètes à la Villette Chihal Touma Li Longtemps Longtemps, longtemps, j’ai attendu longtemps, longtemps j’ai espéré. C’est vous ! C’est vous qui, c’est vous n’est-ce pas ? C’est vous oui ! Qui vouliez tout ça ! Ces pas sur le pallier, est-ce toi ? Cette lettre, cette sonnerie, est-ce toi ? La jeunesse galère, ne sait plus comment faire qui le lui dira ? Qui lui expliquera ? Cet étang dans mon cœur, est-ce toi qui approche ? C’est vous qui, c’est vous n’est-ce pas ? C’est vous oui ! Qui vouliez tout ça ! Tu sais combien je t’aime, si tu m’entends, réponds-moi. Tu sais combien je t’aime, toutes mes pensées sont pour toi. J’ai besoin de tous mes amis, celle que j’aime m’a abandonné que faire, qu’est-ce qui est permis ? pour quel tort suis-je condamné ? Tu sais combien je t’aime, si tu entends réponds-moi ! Tu sais combien je t’aime, toutes mes pensées sont pour toi. Kham kham kham kham kham kham wa chassera kham kham kham C’est vous qui, c’est vous n’est-ce pas ? C’est vous oui ! Qui vouliez tout ça ! La jeunesse galère, ne sait plus comment faire leur société c’est la bande leur business, la contrebande. Qui leur expliquera Comment vivre sans voler ? Qui les aidera à oublier la fuite ? C’est vous qui, c’est vous n’est-ce pas ? C’est vous oui ! Qui vouliez tout ça ! 16 | cité de la musique le printemps des poètes à la Villette Choufi Zina Regarde loin Ton horizon ne se limite pas à moi regarde loin ne calcule pas Zina où est-elle ? Que fait-elle ? Où est passée Zina, ma belle ? Inutile d’éparpiller tes mots à tous vents tes paroles n’expriment que ta rancune inutile d’éparpiller tes mots à tous vents tes paroles révèlent toutes tes lacunes. regarde loin (bis) la vie est inépuisable demande lui sans relâche Dieu est intarissable tu as ta part que tu le saches ! regarde loin (bis) Dieu est intarissable demande lui sans relâche la vie est inépuisable tu as ta part que tu le saches ! Inutile de lancer tes paroles en tous sens elles sont vides souvent regrettables. Inutile de lancer tes paroles en tous sens elles te tissent un manteau détestable. Un jour sans elle est plus lent qu’un vieux siècle mes amis que savez-vous d’elle ? Et surtout, avez-vous des nouvelles ? Elle est tout pour moi. Pour moi, tout est en elle. Une nuit sans sommeil, c’est encore supportable. Mais une nuit sans elle, quel supplice abominable. Où est-elle ? Que fait-elle ? Où est passée Zina, ma belle ? Mon idée fixe, Zina ma belle, c’est d’attendre tes nouvelles belle Zina, mon obsession c’est de venir dans ta maison Zina ma belle. Zina ma belle puisque tu hésites à dire non dis oui, dis oui, dis-le maintenant. notes de programme | 17 le printemps des poètes à la Villette Goulou Dites-moi (ter) qui aurait prévu tout ça ? dites-moi, dites-moi ! Le frère tue le frère le fils égorge la mère les enfants se dévorent sur la dépouille du père refrain A qui se fier maintenant ? Qui le saura est bien malin ! Tout devient incertain elle est tout proche la fin. Que reste-t-il du mot respect quand la fin semble si proche ? Quel sens revêt le mot paix quand la vie devient si moche ? Ce qui demeure, mon ami, c’est la démence et la folie. Ce qui reste je vous le dis n’est que violence et folie. Chacun œuvre à sa perte et celle de ses enfants, de sa famille ! Tous travaillent à leur perte, et celle de leur propre pays. 18 | cité de la musique samedi 27 mars - 20h café de la musique rencontre café littéraire Le café de la musique se transforme en « café littéraire » pour accueillir la revue Algérie Littérature Action dont plusieurs auteurs viennent rencontrer le public et dédicacer leurs ouvrages. Christine Chaulet-Achour, Marie Virolle, présentation avec la participation de : Hassan Bouabdellah, écrivain, cinéaste Slimane Chabouni, poète Lori Dovido-Dabbagh, poétesse Dominique Le Boucher, écrivain Hamid Tibouchi, poète, peintre lectures de textes poétiques de : Soumya Ammar-Khodja El-Mahdi Acherchour Jamel-Eddine Bencheikh samedi 27 mars - 22h café de la musique soirée poétique La soirée se prolonge avec tous les artistes (étudiants du Conservatoire d’Art Dramatique, écrivains, musiciens du groupe Raï Kum). le printemps des poètes à la Villette biographies 20 | cité de la musique Praline Gay-Para En 1985, elle obtient un doctorat en linguistique option ethnolinguistique (Contes de la Montagne Libanaise). Elle publie, entre 1990 et 1998, plusieurs ouvrages : Récits de Vie des Gennevillois, La Planteuse de cumin, L’Orge Gentleman, Oranges Sanguines, Le Fils de la tempête, Louliya et autres contes d’Egypte, Dame Merveille et autres contes d’Egypte ; ainsi que plusieurs articles sur la littérature orale (revue Dire, Cahiers de Littérature Orale, Le Renouveau du conte), et une étude d’une version libanaise de Blanche Neige comparée avec dix-neuf versions issues de différents pays. En 1997 sort en disque compact et cassette La Petite fille nounou. Elle se produit également dans des spectacles pour jeune public : Un cadeau de roi, Boum Boum mille pieds, Collier d’Isles, Collier d’Histoires et Traversées, ainsi que pour tout public : Quand la terre n’avait pas de nom, Contes du Caire, Exils d’Elle, Dame Merveille, Des Rives de la Petite Bleue, Contes du Bâton de Pluie (avec Muriel Bloch). Elle anime des ateliers scolaires (Arts du Récit) : Voleurs d’Histoires à Epinay-sur-Seine depuis septembre 1991 ainsi que dans de nombreux établissements scolaires. Elle participe à des productions telles que A Voix Nue sur France Culture, Entretiens avec Geneviève CalameGriaule (Littérature orale du Mali et du Niger), émissions diffusée du 17 au 21 novembre 1997. Les lieux et festivals où elle est accueillie à Paris incluent Paris Quartier d’Eté, le Musée d’Art Moderne, le Palais de la Découverte, le Centre Georges Pompidou, la Cité des sciences et de l’industrie, l’Institut du Monde Arabe, France Culture, RFI, La Cinq, le Salon du Livre, La Fureur le Lire, et le Musée des Arts et Traditions Populaires ; en province et à l’étranger : le Festival des Musiques Métisses (Angoulême), Parole d’Alès, les Oralies de Haute-Provence, le festi- le printemps des poètes à la Villette val de Chevilly-Larue, la Foire du Livre de Damas, le Festival d’Eté de Québec et le Théâtre Municipal de Fort-deFrance. Jean-François Piette Après des études au conservatoire de musique où il obtient un premier prix de percussion, le ministère de la Culture lui attribue une bourse pour étudier avec le Trio le Cercle (J.P. Drouet, G. Sylvestre, W. Coquillat) le répertoire du théâtre musical et la composition. Cet enseignement lui permet de travailler pour le théâtre (Festival d’Avignon-Théâtre de l’Odéon, compagnie Balaz Géra, Rouge Nocturne-Michel Simonot) et la danse (Compagnie Marylène Breuker, Compagnie Infludanse...). Il forme ensuite, avec Catherine Pavet et Georges Andres, le trio de l’Abdomen musical avec lequel il participe à la création de nombreuses pièces de musiques nouvelles dans divers festivals de musique en France comme à l’étranger. Il s’intéresse dans son écri21 | cité de la musique ture à l’amalgame entre éléments musicaux et extra-musicaux, et considère que tout modèle d’organisation existant dans la nature ou dans la culture peut devenir musique. Son activité de percussionniste improvisateur l’amène à développer un système de transformation du son en temps réel grâce à une interaction entre instruments acoustiques et ordinateur. Gabriel Garran Fondateur du Théâtre de la Commune et directeurfondateur du Théâtre international de langue française (TILF) depuis 1985, Gabriel Garran est tout à la fois un amoureux des planches, un aventurier et un pionnier. « Dans la polyphonie des cultures du monde explique-t-il, existait une communauté diversifiée, éclatée mais qui avait pour point commun la langue française. Dans le paysage théâtral français manquait un instrument qui puisse rendre compte de la fécondité des écritures théâtrales francophones. » Grâce à cet homme pugnace, c’est désormais chose fait à Paris. Mais il aura fallu attendre huit ans pour que le TILF, foyer vivant de création et d’échanges par son cycle de lectures scéniques et de conférences thématiques (le parloir), ait son lieu à lui, son quartier général au Parc de la Villette. Avec un répertoire à dominante contemporaine, Gabriel Garran, fils d’immigrés d’Europe de l’Est, dont une partie de la famille est québécoise, s’applique avec passion et exigence à faire vivre sur scène « la réalité linguistique que constitue le français à travers le monde ». Chaque année, plus de 15.000 spectateurs - toutes les communautés ethniques de la région parisienne viennent à la saison du TILF, qui aligne depuis sa création un joli palmarès : près de 2.000 représentations, 110 auteurs joués, issus de 35 pays et territoires de langue française, (aussi bien des dramaturges et metteurs en scène reconnus que de jeunes compagnies). le printemps des poètes à la Villette Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique Toutes les réformes que j’ai eu le plaisir d’entreprendre en dirigeant cette école, ont été le fuit d’une réflexion collégiale et d’une intense concertation avec les élèves. Elles ont été approuvées par le Comité Supérieur de l’établissement, la plupart du temps à l’unanimité, et inscrites au règlement intérieur, comme il est d’usage. En développant, autour des classes d’interprétation, véritable cœur de notre enseignement, la notion de département, j’ai voulu dire à nos élèves l’importance des disciplines de l’esprit et du corps, les engager à la rigueur, porter à leur connaissance que le théâtre s’enrichit des autres arts, que la culture, jusque dans l’exercice de l’exactitude, n’est pas l’ennemie de la simplicité et de la ferveur. Qu’enfin, bouger avec grâce ou brutalité, en tous cas assouplir son corps et se reconnaître dans l’espace, chanter, être dans sa voix, se faire entendre du deuxième 22 | cité de la musique balcon, me paraissait être consubstantiel à l’exercice de la scène. Nous avons par ailleurs modifié, en espérant l’améliorer, notre concours d’entrée. Aux scènes précédentes, (elles restent ce sur quoi les candidats sont jugés), nous avons ajouté un stage : les professeurs de l’école rencontrent les cinquante derniers candidats et travaillent avec eux librement. Leurs appréciations peuvent éclairer les membres du jury qui restent toutefois souverains dans leurs votes. Enfin, nous avons réformé en profondeur le cursus des études, en mettant, en quelque sorte, à part les élèves de troisième année, ceux qui sortent, ceux qui s’en vont. La dernière année d’études prend la forme d’ateliers, souvent avec le concours des élèves scénographes de l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs. La dernière semaine de juin 1999, Catherine Hiegel et Stuart Seide, professeurs au Conservatoire dirigeront un atelier de troisième année. Ces ateliers sont ouverts au public : c’est l’instant majeur, tout le travail accompli l’était pour ce moment-là. Louis Jouvet l’a décrit en ces termes : « Et le théâtre n’existe que dans l’acte du théâtre, à ce moment unique où les éléments, les participants - acteurs, spectateurs, auteurs entraînés, dépossédés d’eux-mêmes, dessaisis de leur caractère et de leur choix, restitués à une sensibilité neuve, à une intelligence souveraine, se fondent et se dissolvent peu à peu les uns dans les autres, à ce moment où ils perdent leur personnalité, où toute faculté consciente et raisonnante ne résiste plus à la chaleur de l’acte même. » Marcel Bozonnet technique cité de la musique régie générale Alain Armand Raï Kum régie générale Tassadit Miloudi régie son Didier Delaine