DRAGUE 2.0, LA PANACÉE ?
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DRAGUE 2.0, LA PANACÉE ?
360° – NOVEMBRE 2014 360° – NOVEMBRE 2014 DRAGUE 2.0, LA PANACÉE ? Sites et applications de rencontres sont très appréciés de la communauté LGBT pour leur liberté et leur discrétion. Témoignages de ces aventuriers de la toile. Aline Jaccottet SOCIÉTÉ WEB Ludovic reste ainsi connecté pour checker les nouveaux arrivages. DR S ites de rencontres et applis sont (quasi) incontournables, pour un coup d’un soir ou rêver de grand amour. Tout le monde s’y est mis, particulièrement la communauté LGBTI pour qui la liberté de ton et l’anonymat d’Internet permettent d’échapper à la « pression normative », selon les termes du chercheur français Alain Léobon. « Dans le milieu LGBT, utiliser la toile pour faire des rencontres, c’est bien moins tabou que pour les hétéros qui croient encore que c’est réservé aux cas désespérés », note Rita, une Genevoise. Ainsi, ce lieu de flirt et d’initiations est, pour le meilleur et pour le pire, un immense espace de liberté. Ludovic, Steve, Stéphanie et Ben l’ont expérimenté. UN CYBER-COMING OUT C’est grâce au web que Ludovic a découvert qu’il était gay. « J’étais très timide et j’ai commencé à fréquenter des forums pour faire des rencontres. J’y ai découvert qu’il existait plein de mecs avec les mêmes préférences que moi. C’était une révolution. » Il rencontre 14 360-141 4.indd 14-15 c’est du small talk, des sms... sur Gayromeo, on envoie des mails, c’est plus doux ». Steve a construit trois relations sérieuse à partir de rencontres sur ce site. « Je ne cherche pas de plan cul, mais je n’y suis pas fermé », précise-t-il. Avant Internet, il se demande « comment faisaient les homos pour draguer. Parce que dans la rue, c’est quasi impossible de reconnaître l’orientation sexuelle des gens... » Steve trouve cependant « pénible » de devoir annoncer tout de suite ce qu’il cherche : adieu la spontanéité. « C’est salut ça va, tu cherches quoi ? Et hop, t’es classifié. J’ai envie de répondre : à votre avis, je cherche un canapé-lit ? Une armoire ? » Rita, elle, ne va jamais sur Internet pour trouver ses compagnes. « Ça ôte toute spontanéité et ça ne me correspond pas. Au fond, je n’en ai jamais eu besoin : mes compagnes, je les rencontre par des amis ou par hasard », dit-elle. Quant à Stéphanie, en couple stable depuis plusieurs années, elle est rebutée par l’aspect « supermarché » et n’a fait usage qu’une fois du web pour se trouver une copine. « Tout ça, c’est juste du fake, une vitrine bien faite. Internet te permet de rêver quelques instants... jusqu’à la rencontre. Les photos datent, les gens sont mytho, parano. Tout le monde cherche la même chose : quelqu’un d’équilibré, de stable, qui a un job... merci la déception », assène-t-elle. Selon Stéphanie, si les hommes utilisent le web pour « tirer un coup », les femmes y vont parce qu’elles ont « fait le tour » des partenaires potentielles dans leur entourage. Internet est un bon moyen de « chasser » tout en restant anonyme. « Surtout, elles ont besoin de croire encore en le grand amour », estime-t-elle. MIROIR AUX ALOUETTES Le grand amour, encore et toujours. Même si le fait de devoir remplir une liste de critère qui présélectionne les potentiels Roméo ou Juliette est tout sauf romantique. La rencontre n’est dont plus l’œuvre du destin et de la passion, récit socialement valorisé, précisait la sociologue française Marie Bergström. Et puis, difficile de se décider lorsque le choix de partenaires disponibles semble illimité. L’impression constante que l’herbe pourrait être plus verte ailleurs pousse à lorgner les profils sur le web, même quand on est en couple. Ludovic reste ainsi connecté « pour checker les nouveaux arrivages » et dit qu’il est plus difficile de rester fidèle à son partenaire. Steve s’interroge : « Estce que tu exiges de ton mec qu’il se désinscrive, ou est-ce que tu restes inscrit pour l’espionner ? » Enfin, sites et applications peuvent se transformer en miroirs de notre narcissisme profond. « Je ne me connectais que pour voir combien de mecs appréciaient ma belle gueule. Ce côté miroir aux alouettes, finalement, ça m’a gavé : j’ai décidé d’arrêter », raconte Ben. Rapide et facile, sites et applications de rencontres ont certes contribué à faciliter la vie de celles et ceux qui n’osaient pas sortir du placard, mais Internet ne sera jamais « la » formule magique permettant de trouver chaussure à son pied, pour une nuit ou pour la vie – peut-être d’ailleurs qu’il n’y en a pas. Rien n’empêche, en attendant, de s’amuser virtuellement… alors, on se connecte ? SOCIÉTÉ WEB son premier amour sur caramail. « On s’est parlé deux fois sur le forum et j’ai eu le coup de foudre dès que je l’ai vu. » Internet a changé sa vie : il lui a permis de se connecter à l’univers LGBT et de sortir au lieu de rester coincé chez lui. « Ce qui a été super, c’est de pouvoir découvrir cet univers discrètement. A l’époque, les homos n’étaient pas aussi visibles qu’aujourd’hui », rappelle-t-il. Cela fait maintenant quatorze ans que Ludovic est « sorti du placard » et le web s’est développé à une vitesse folle. Aux sites Internet se sont ajoutés des dizaines d’applications permettant de flirter online puis pourquoi pas, de passer au live. Steve a testé le site Gayromeo et l’application Grindr, très populaires et réservés aux hommes gays. « Grindr est plus trash que Gayromeo : je repère un beau mec à 300 mètres de chez moi et voilà, on nique. On peut faire son marché local, ça va plus vite : 15 24.10.14 14:38