LE FUTUR DU SECTEUR FINANCIER BELGE
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LE FUTUR DU SECTEUR FINANCIER BELGE
LE FUTUR DU SECTEUR FINANCIER BELGE RAPPORT DU HIGH LEVEL EXPERT GROUP ÉTABLI SUR L’INITIATIVE DU MINISTRE DES FINANCES DE LA BELGIQUE BRUXELLES, LE 13 JANVIER 2016 Résumé LES RÉFORMES DU CADRE DE CONTRÔLE ET DE RÉGLEMENTATION APRÈS LA CRISE ONT RENDU LE SYSTÈME FINANCIER PLUS RÉSILIENT. CEPENDANT DE NOUVEAUX RISQUES APPARAISSENT. AFIN D’OBTENIR STABILITÉ ET CROISSANCE, LE SYSTÈME FINANCIER SE DOIT D’ÊTRE RÉSILIENT. LE SECTEUR FINANCIER DOIT ÊTRE COMPÉTITIF ET EFFICACE. IL DOIT ÉGALEMENT BÉNÉFICIER DE LA CONFIANCE DES CONSOMMATEURS. PERSPECTIVE PRINCIPALE SE RETROUVE DANS LES 10 RECOMMANDATIONS PROPOSÉES PAR LE CETTE HIGH LEVEL EXPERT GROUP (HLEG). LE HLEG N’A PAS DRESSÉ DE LISTE QUANT À DES MESURES ET INCITANTS FISCAUX QUI POURRAIENT DIVERTIR L’ATTENTION DES MESURES REQUISES EN TERMES DE POLITIQUE STRUCTURELLE DE LONG TERME CES RECOMMANDATIONS SE CONCENTRENT SUR LES NOUVEAUX DÉFIS, RISQUES ET OPPORTUNITÉS. DES TAUX D’INTÉRÊT FAIBLES, DES EFFETS CONTRE-PRODUCTIFS DES INCITANTS FISCAUX AINSI QUE LA CYBERSÉCURITÉ CONSTITUENT DES RISQUES IMPORTANTS. LA SUR-RÉGLEMENTATION (« GOLD-PLATING ») CONSTITUE UNE NOUVELLE PRÉOCCUPATION MAJEURE ET UN ÉLÉMENT DANS LA POLITIQUE GÉNÉRALE AFIN D’AMÉLIORER LA PLACE DE BRUXELLES EN TANT QUE CENTRE FINANCIER, OÙ LA DIGITALISATION, MAIS AUSSI DES NORMES ÉTHIQUES ÉLEVÉES DOIVENT JOUER UN RÔLE CLEF. UNE PLATE-FORME DE DISCUSSION PERMANENTE POUR LE SECTEUR FINANCIER IMPLIQUANT TOUS LES ACTEURS CONCERNÉS DEVRA ÊTRE CRÉÉE. Historique de la mission 1. La crise financière mondiale en 2007 et 2008 a eu des conséquences importantes pour le secteur financier, en particulier en Belgique, résultant en un soutien important de la part de l'État fédéral. Le coût de cette crise pour l’économie réelle s’est révélé important et son impact est toujours visible aujourd’hui. Huit années après la crise financière, le système financier et en particulier le secteur bancaire en Belgique et dans le monde entier, a subi des changements importants. Néanmoins, ce secteur n’a toujours pas retrouvé tout son potentiel au vu des conséquences encore visibles de la crise financière et des défis posés par l’environnement actuel. 2. C’est en tenant compte de cet historique que le High Level Expert Group (HLEG) a effectué son analyse et établi ses recommandations à la suite de la décision du Ministre des Finances d’évaluer et de réfléchir sur la position actuelle du secteur financier belge, en identifiant les défis principaux auxquels le secteur est confronté à la suite de la crise financière et en explorant les perspectives du secteur à long terme. Il a été demandé au HLEG d’examiner et d’établir des recommandations en particulier sur trois thèmes principaux : 3. A. Création d’un secteur financier robuste et durable B. Le rôle de Bruxelles en tant que centre financier C. Impôts et réglementation concernant le secteur financier Pendant plus d’un semestre, le HLEG a analysé le secteur financier belge dans un contexte international. Le groupe a rassemblé de nombreuses informations factuelles à propos du secteur financier belge et a reçu de nombreuses suggestions de la part des experts et acteurs financiers, ainsi que de la part des partenaires sociaux, afin d’améliorer la santé du secteur financier en Belgique. Le HLEG les remercie tous pour leur aide. 2 Développements récents dans le secteur financier belge 4. Alors que le rapport établi par le comité Lamfalussy (2008-2009) se concentrait principalement sur les causes de la crise financière et les solutions d’un point de vue de réglementation et de contrôle prudentiels, le présent rapport - établi 7 ans plus tard - a comme objectif d’évaluer les réformes et d’examiner les défis qui se posent encore pour le secteur financier afin de protéger l’économie d’une nouvelle crise financière entraînant des conséquences importantes telles qu’on a déjà pu les subir auparavant. Il propose également des pistes afin d’améliorer la compétitivité et l’efficacité du secteur financier dans son ensemble, dans le but de soutenir la croissance économique. 5. Des changements importants dans le secteur de l’intermédiation financière ont eu lieu depuis le début de la crise financière en Belgique. La situation financière des banques belges tant en termes de fonds propres que de liquidité s’est améliorée de manière significative. Le système financier belge a réduit ses activités et s’est concentré sur ses activités et marchés principaux, tout en réduisant quelque peu sa complexité. Il a également adapté sa politique en matière de d’appétit au risque. Néanmoins, d’autres ajustements pourraient être nécessaires. 6. Ces réductions et restructurations d’activités bancaires sont allées de pair avec une augmentation des activités non-bancaires et en particulier d’activités dites « shadow banking », ce qui entraîne la diversification des sources et produits de financement, mais aussi des risques potentiels qui doivent être surveillés. Les réductions d’activité ont été initiées par des plans de restructuration imposés par la Commission européenne suite aux aides d'État octroyées au secteur financier. 7. Malgré une restructuration et une réduction des activités importantes, le secteur financier continue à soutenir le financement de l’économie belge, bien qu’il se montre désormais plus prudent pour des projets comportant des risques et à long terme. Le financement d’une économie dominée par les PME reste, dans une large mesure, caractérisé par l’intermédiation financière et en particulier les banques, au lieu d’un financement direct via les marchés des capitaux. 8. L’accès direct aux marchés des capitaux demeure principalement réservé aux sociétés plus importantes. Les efforts pour ouvrir les marchés des capitaux aux PME n’ont jusqu’ici pas eu un franc succès en Belgique. L’union des marchés de capitaux pourrait par conséquent être une opportunité pour la Belgique. 9. Les ménages belges et, dans une moindre mesure, des sociétés non-financières continuent à avoir une large préférence pour des actifs liquides, ce qui crée un excédent de liquidités/économies au niveau de l’économie belge. Le traitement fiscal avantageux actuel réservé à ce type de produits d’épargne favorise les préférences d’investissement au sujet des comptes d’épargne réglementés au détriment d’investissements plus risqués et/ou s’inscrivant davantage dans le long terme. De plus, cet incitant fiscal comporte un risque d’aléa moral potentiel pour le gouvernement. 10. Huit ans après le début de la crise financière, l’environnement macro-financier est caractérisé par une croissance (potentielle) qui demeure obstinément faible et une inflation basse. Les taux d’intérêt nominaux sont également historiquement bas, alors que l’on observe au niveau mondial une compression des primes de risque. Cette situation crée des défis pour l’industrie financière et implique de nouveaux risques potentiels pour ce secteur en cas de nouvelles tensions financières. 3 11. Les réformes du cadre de contrôle et de réglementation ont rendu le système plus résilient. Cependant, l’impact de toutes ces réformes sur le modèle commercial des opérateurs financiers et sur l’économie réelle demeure en partie inconnu. 12. La rentabilité des institutions financières, leur position de liquidité et de solvabilité s’est améliorée ces dernières années, mais des défis importants subsistent afin de maintenir un niveau de rentabilité réaliste et durable. Les compagnies d'assurance sont particulièrement vulnérables aux taux d’intérêt obstinément bas. 13. La modernisation des systèmes IT et la révolution provenant de la digitalisation des institutions financières constituent des défis principaux au vu des répercussions pour les processus, les opérations ainsi que les services destinés aux clients de l’industrie financière. Ceci entraîne des investissements importants et une augmentation de la concurrence de la part d’acteurs non traditionnels qui renforce la pression sur la rentabilité à court terme. 14. La digitalisation augmente les risques liés à la cybersécurité. Cette dernière n’est plus simplement un problème informatique. Les incidents liés à la cybersécurité pourraient avoir un impact sur l’ensemble du système, en raison des interruptions de certaines processus financiers et/ou de la perte de confiance du public dans l’intégrité d’une institution financière en particulière ou dans le système en général. 15. Des réformes réglementaires visant les infrastructures de marchés financiers ont augmenté la résistance de ces derniers. Néanmoins, de nouveaux défis importants se présentent à l’horizon, avec l’entrée de nouveaux acteurs non traditionnels, ce qui accroît l’inter-connectivité et les risques liés à la cybersécurité. Environnement actuel et conséquences 16. Tous ces éléments - et en particulier, l’excédent de liquidités, les taux d’intérêt extrêmement bas et la rentabilité en baisse - constituent un environnement difficile pour les autorités afin d’éviter une répétition des dysfonctionnements précédents (recherche de rendement). Les réformes structurelles mises en œuvre en Belgique forment un obstacle à la « recherche de revenus » pour les activités commerciales - en particulier les transactions pour compte propre - des banques. Mais d’autres types de risques pourraient apparaître. 17. Le développement des activités de « shadow banking » (par ex. le secteur des fonds) illustre ce phénomène. Alors que ces activités contribuent à la diversification du secteur financier, elles entraînent également une complexité et une opacité de ce secteur. 18. Le marché immobilier en Belgique a connu une forte croissance ces 20 dernières années. L’endettement des ménages a augmenté, atteignant actuellement presque 60% du PIB. Un chiffre qui est proche – mais toujours en dessous – de la moyenne de la zone euro. Bien que les institutions de crédit belge ont appliqué des critères d’octroi prudents en matière d’emprunts hypothécaires, en comparaison avec d’autres pays, certains segments des portefeuilles de crédits hypothécaires en cours sont néanmoins exposés à des niveaux de risque relativement élevés. Cette situation pourrait entraîner des pertes importantes pour les institutions de crédit belges en cas de récession sévère du marché immobilier belge. 19. La protection des consommateurs a été renforcée au vu de la complexité des produits financiers et des faiblesses observées antérieurement. Un niveau adéquat de protection des consommateurs est vital afin d’assurer et de maintenir la confiance envers le secteur financier. 4 Dans ce contexte, les différentes réformes, appelées directives MIFID, ont été introduites de manière progressive. Ces directives sont devenues complexes d'un point de vue administratif. Un niveau adéquat de formation dans le domaine financier et des normes éthiques appropriées au niveau des institutions financières devraient être encouragées. Recommandations 20. Sur la base de ces observations, le HLEG a formulé 10 recommandations afin d’améliorer la résilience et la position concurrentielle du secteur financier belge Ces recommandations sont l’illustration de l’hypothèse du HLEG selon laquelle l’objectif des autorités publiques belges concernant le secteur financier belge est de garantir le fonctionnement de ce dernier au service de l’économie et de la société belges en contribuant à une croissance durable et stable. 21. Afin d’atteindre la stabilité et la croissance, le système financier se doit d’être résilient. Le secteur financier doit être compétitif et efficace. La résilience financière est plus importante que la seule stabilité financière et implique que le système financier devra être robuste et capable d’absorber les chocs. Si le système s’avère résilient, il ne devrait y avoir aucun conflit entre les mesures pour améliorer la compétitivité et la stabilité financière. 22. Le HLEG désire attirer l’attention sur le fait que les autorités publiques belges devraient apporter une stabilité à plus long terme du cadre légal, prudentiel et fiscal, ce qui augmenterait l’attrait de la Belgique et de Bruxelles et sa compétitivité pour des activités financières. Les autorités publiques belges peuvent également prendre certaines mesures pour améliorer l’écosystème financier de la Belgique et de Bruxelles en particulier. 23. Le HLEG n’a pas dressé de liste de mesures et incitants fiscaux qui pourraient remplacer les mesures requises en termes de politique structurelle de long terme. Ceci aurait rendu notre rapport vulnérable à la pression des lobbys, mais aussi et surtout, l’aurait rendu irréaliste dans les circonstances budgétaires actuelles. Le point commun que nous avons retrouvé dans toutes nos discussions avec les membres de la communauté financière est la primauté de la stabilité fiscale sur les incitants fiscaux. 24. Bien que des réformes majeures ont déjà été introduites afin d’améliorer la résilience du système financier, certains risques persistent, en particulier si les taux d’intérêt restent faibles pendant plusieurs années. Les cinq premières recommandations se concentrent sur ce thème. La recommandation 1 propose d’améliorer le cadre actuel de contrôle et de réglementation. La recommandation 2 propose d’améliorer la résilience du marché immobilier. La recommandation 3 propose des changements au niveau du traitement fiscal des actifs financiers afin d’éliminer les distorsions actuelles et d’obtenir des marchés financiers qui fonctionnent mieux et plus équilibrés. La recommandation 4 prévoit que l’amélioration de la résilience implique aussi l’atténuation des attitudes en matière de prise de risque excessive ainsi qu’une meilleure gestion des risques. Enfin, la recommandation 5 propose d’évaluer à intervalles réguliers les risques du secteur financier pour les finances publiques. 25. Le HLEG souligne qu’un niveau adéquat de protection des consommateurs est vital afin de sauvegarder la confiance dans le secteur financier. La protection des consommateurs est un thème récurrent dans différentes recommandations, qui visent à améliorer le système actuel en augmentant la qualité des 5 informations à ce sujet, réduisant les conflits d'intérêts, en améliorant les pratiques de rémunération et en rendant le système, en particulier pour les paiements, plus résilient aux risques liés à la cyber sécurité. 26. Le HLEG est convaincu que les opportunités existent en Belgique et peuvent être utilisées afin de mettre davantage en avant les forces actuelles, l’expertise ainsi que le développement d’un système financier solide et diversifié. Certains produits ou investissements sont toujours absents et des solutions urgentes doivent être trouvées pour des défis spécifiques, tels que la révolution technologique, les taux d’intérêt bas et le vieillissement de la population. Les cinq recommandations ci-dessous ont pour objectif de soutenir les chaînons manquants dans le système financier belge et d’améliorer sa compétitivité. La compétitivité soulève la question de l’efficacité et de la productivité du secteur financier. Elle requiert également une plus grande variété des instruments et intermédiaires financiers afin d’assurer l’acheminement de l’épargne vers des projets d’investissement, en particulier dans le contexte du vieillissement de la population et compte tenu des surplus d’épargne en Belgique. Ces thèmes sont examinés dans la recommandation 6. La compétitivité pose aussi la question quant à imposer des fardeaux à l’industrie financière nationale plus importants que ce qui a été convenu au niveau européen. La recommandation 7 s’attaque au problème de la sur-réglementation (« gold-plating ») en suggérant certaines lignes directrices aux autorités belges. La compétitivité signifie également que la Belgique devrait se trouver au moins au même niveau que ses voisins en ce qui concerne la transformation numérique et la cyber sécurité. Les recommandations 8 et 9 font certaines propositions spécifiques dans ce domaine. Enfin, la recommandation 10 émet des propositions générales pour la gestion par l'État belge de ses participations dans le secteur financier. 27. Outre ces recommandations, le HLEG appelle également à la création d’une plate-forme de discussion permanente pour le secteur financier réunissant tous les acteurs concernés. L’objectif de cette plateforme devrait être l’échange de vues au sujet de l’environnement réglementaire et commercial ainsi que de l'écosystème financier en Belgique. Une des premières tâches de la plate-forme devrait être de débattre des recommandations énoncées dans le présent rapport. 28. Le présent rapport reflète l'opinion unanime des membres du groupe. 6