Vaches maigres pour la plus grande démocratie du monde
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Vaches maigres pour la plus grande démocratie du monde
TOPIC Avril 2009 Vaches maigres pour la plus grande démocratie du monde Depuis septembre 2008, l’économie indienne a brusquement freiné, … Après cinq années en orbite, avec une croissance moyenne de +8,5%, l’Inde remet subitement les pieds sur terre. La crise financière de septembre 2008 a brusquement freiné l’économie indienne, déjà affaiblie par un léger ralentissement de son activité depuis fin 2007. Les sources d’investissements qui irriguaient le tissu économique indien – le marché interbancaire, la Bourse, les crédits - se sont précipitamment taries, laissant un certain nombre d’entreprises indiennes sur le flanc. Pendant cinq ans, de 2002 à 2007, l’économie indienne a pleinement bénéficié d’un environnement domestique et international porteur. Sa croissance s’est appuyée sur deux principaux moteurs : les investissements et la consommation privée. Le taux de croissance des investissements fixes a plus que doublé pendant cette période, de +7% en 2001 à +16% en 2007. Quant à la consommation privée, son rythme de croissance est passé de +5% en 2001 à près de +8% en 2007. Les dépenses des ménages indiens représentaient en 2007 plus de 60% du PIB (contre 37% en Chine), avec un taux d’épargne de 34%. Dans ce quinquennat relativement glorieux, le mythe de la Shining India n’était donc pas seulement le fruit d’une astucieuse propagande. Lorsque les entreprises privées ne s’autofinançaient pas, elles avaient recours à deux autres canaux : les introductions en Bourse et les crédits. Le … touchée par la potentiel de croissance de l’Inde a aussi attiré les investisseurs étrangers. En trois perte de confiance ans, l’indice Sensex de Mumbaï a ainsi vu sa valeur quadrupler, atteignant les des investisseurs, 20.000 points en janvier 2008. Quant aux crédits souscrits, les entreprises du secteur privé indien ont préféré se tourner vers l’étranger, où les taux d’intérêt en particulier étaient plus avantageux. Bref, en l’espace de quelques années, le tissu économique étrangers, … indien est devenu fortement dépendant aux financements étrangers. Un début de ralentissement a été ressenti dès le début de l’année 2008. Il a été précipité par le choc financier mondial de l’automne 2008 suivi par les attentats de Mumbaï de novembre 2008. En un an, l’indice Sensex a dégringolé de -60%. Le scandale Satyam, en janvier 2009, a contribué encore un peu plus à la perte de confiance des investisseurs dans l’économie indienne. Autre facteur de crise : la baisse de la demande domestique et internationale, l’un des socles du dynamisme indien depuis le début des années … et par la baisse 2000. En l’espace de six mois, les indicateurs économiques indiens se sont détériorés. La consommation des ménages a ralenti à +5,4% sur un an. Les ventes de la demande de voitures, de biens d’équipement et de logements ont baissé. Les exportations de domestique et internationale. biens et de services ont continué à croître en 2008, mais à moindre allure (+11,4% au lieu des 20% habituellement). Elles connaissent une croissance négative depuis le mois d’octobre 2008. Ce tassement de la demande a fini par peser sur la production industrielle, qui n’a crû que de +4% sur l’ensemble de l’année 2008, contre +9,9% l’année précédente. Certes, l’Inde est moins dépendante de ses exportations que ses voisins asiatiques : 12% de son PIB à comparer à 36% pour la Chine. Mais 30 millions d’emplois sont liés aux exportations, notamment de textile. D’ores et déjà, on estime à près de 10 millions le nombre d’emplois détruits par la crise depuis le mois d’octobre 2008. Parmi les secteurs touchés par le ralentissement économique, les technologies de l’information et de la communication (TIC), qui représentait en Parmi les secteurs 2008 6% du PIB indien et générait 2 millions d’emplois en Inde. L’inquiétude les plus touchés, dans ce secteur provient de sa très grande dépendance envers la demande les TIC, fortement extérieure. Les marchés américain et britannique représentent respectivement 60% dépendantes de la et 19% (en 2008) des exportations dans le secteur des TIC. demande Les Infosys, les Wipro enregistraient des croissances flamboyantes et, il y extérieure. a encore peu de temps, tenaient des discours stratégiques optimistes : s’il y avait récession en Occident, cela accélèrerait les délocalisations de services informatiques vers l’Inde. Las ! Les entreprises indiennes ont donné l’ordre de réduire la voilure en attendant que passe la tempête : baisse des recrutements, moindre hausse des salaires (qui était habituellement à deux chiffres). Pourtant, le Nasscom, l’organisme indien chargé de promouvoir et développer ce secteur, reste optimiste pour l’année en cours. Dans un communiqué publié en février 2009, il prévoit une croissance de 20% pour cette année, tablant que la demande domestique prendra le relais des marchés extérieurs. Cela semble présomptueux. Quelques industries cependant arrivent à tirer leur épingle du jeu. L’action menée par le gouvernement, en particulier pour le développement des zones rurales, semble profiter à certains secteurs, telle la téléphonie mobile. En 2008, ce secteur a enregistré une croissance de +48,5% soit une moyenne de 10 millions d’abonnés supplémentaires par mois (au total, 350 millions d’abonnés fin 2008). Or, depuis le début de l’année 2009, le nombre de nouveaux abonnés s’élève à près de 15 millions par mois ! Nul doute également que les investissements publics orientés vers les infrastructures (routes, autoroutes, infrastructures énergétiques) devraient bénéficier à certaines entreprises, indiennes comme étrangères. Voilà quelques secteurs qui ne connaissent pas la crise. Les multinationales indiennes se sont faites plus discrètes ces derniers mois. Pourtant portées sur le devant de la scène depuis 2006 grâce à l’acquisition de fleurons de l’industrie américaine et européenne (lire notre étude «Indian Firms Go Global», septembre 2008), elles semblent avoir décidé, pour le moment, de Les consolider leurs derniers achats et de suspendre leurs projets d’expansion à multinationales indiennes digèrent l’international. Les acquisitions par Tata de Jaguar et de Land Rover sont plus difficiles à digérer que prévu. La crise de l’acier affecte Corus, acquise par le leurs dernières même Tata, ou Mittal (même s’il ne s’agit pas vraiment d’une société indienne). acquisitions et En témoigne les chiffres des derniers achats réalisés à l’étranger : 15 opérations reportent leurs ont été réalisées au 1er trimestre 2009, contre 61 pour la même période l’année projets dernière. Plusieurs mesures gouvernementales ont été adoptées pour faciliter les d’expansion. investissements indiens à l’étranger, mais contrairement à leurs consœurs chinoises, les multinationales indiennes resteront sages cette année. Parmi ces champions indiens, plusieurs d’entre eux en profitent pour restructurer leur organisation, consolider leurs activités, reporter certains de leurs projets d’expansion. A domicile, l’environnement n’est hélas pas beaucoup plus «business friendly» qu’auparavant. Le feuilleton de 2008 a été l’achoppement violent de l’implantation de l’usine Tata au Bengale, très probablement par suite de manœuvres souterraines massives de son concurrent direct. Les co-entreprises occidentales ne sont pas non plus un lit de roses. Pour les entreprises indiennes les plus fragiles, l’heure est à demander un report du remboursement de leurs dettes. Partout, l’objectif est le même : faire des économies et dégager des liquidités pour survivre en temps de crise. Pour endiguer la crise, le gouvernement central a les mains liées. Le déficit budgétaire existant (-10,3% du PIB pour l’année 2008) est abyssal (période Le déficit électorale oblige) et empêche de mettre en place un plan de relance de grande budgétaire abyssal empêche ampleur, comme en Chine ou aux Etats-Unis. Plusieurs plans à l’échelon des Etats de mettre en place fédérés ont été élaborés en concertation avec le Gouvernement de l’Union et la Banque centrale (RBI). Les mesures adoptées visent à fortifier le marché du crédit, un plan de relance de grande à attirer les capitaux étrangers, à relancer la demande des ménages et les investissements, ou encore à soutenir les exportations. Les infrastructures, ampleur. aujourd’hui principal obstacle au développement indien, sont particulièrement visées par les mesures de relance. Inquiètes de l’impact de la crise sur les projets, les autorités ont autorisé l’émission d’obligations pour permettre de les financer. Pour l’instant, la confiance des investisseurs, en particulier étrangers, tarde à revenir. Les élections au parlement fédéral (Lok Sabha) qui se déroulent de la mi-avril à la mi-mai 2009 font planer une atmosphère d’indécision. La fragmentation des tendances politiques fait craindre l’arrivée au pouvoir d’une coalition divisée, ce qui rendrait difficile la prise de décision pourtant plus que jamais nécessaire dans cet environnement économique. Malgré tout, l’Inde devrait connaître une croissance de +5% en 2009. Malgré tout, l’Inde sortira son épingle du jeu mieux que tout l’Occident réuni, avec une croissance de sans doute +5% en 2009. Il est vrai que cette croissance s’applique à un pays encore pauvre, dont le rattrapage à long terme ne fait que commencer. 5%, c’est bien, mais ce n’est pas le grand décollage annoncé. H.B. A NOTER SUR VOTRE AGENDA… HEC Eurasia a le plaisir de vous présenter sa nouvelle formation CHINE : LE GRAND SEMINAIRE 22 & 23 juin 2009, sur le campus d’HEC à Jouy-en-Josas Un séminaire compact, original, pour la première fois à ce niveau et sous ce format, mené par trois des meilleurs experts contemporains de ce domaine. Contacts : Muriel Dubois – [email protected] – tél : 01 39 67 71 08 Brigitte Brasseur – [email protected] – tél : 01 39 67 73 75 Télécharger le programme et le formulaire d’inscription sur : www.hec.fr/Eurasia Croissance du PIB indien 12 % 10 8 6 4 2 2009-2010 2008-2009 2007-2008 2006-2007 2005-2006 2004-2005 2003-2004 0 Poids financier des plans de relance (en pourcentage du PIB) 16,23% 11,7% 54,89% 14% 5,69% 1,3% Chine Europe Japon Inde 2% Brésil Etats-Unis 24% Afrique du Sud Autres Source: Gallagher, K.P (2009) / Indian Council for Research on International Economic Relations