Lord of War

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Lord of War
Lord of War
LORD OF WAR
Etats-Unis, 2005
Un film d’Andrew Niccol
Avec Nicolas Cage, Bridget Mynahan, Jared Leto, Shake
Tukhmanyan, Jean-Pierre Nshanian…
Scénario : Andrew Niccol
Photographie : Amir M. Mokri
Musique : Antonio Pinto
Production : Nicolas Cage, Andreas Grosch, Andrew
Niccol, Chris Roberts, Philippe Rousselet,
Norm Golightly & Teri-Lin Robertson.
Durée : 2h02
Distribution : SND
SORTIE LE 4 JANVIER 2006
Né en Ukraine, Yuri Orlov a immigré avec sa famille aux Etats-Unis où il a été élevé dans une famille
se faisant passer pour juive. Sa première rencontre avec les armes le pousse à se lancer dans un trafic
qui se révèle être très rapidement fructueux. La chute du bloc soviétique lui permet de réaliser de
lucratives opérations et de se faire un nom dans un milieu très fermé et dénué de pitié. L’argent lui
permettra également de s’attirer les bonnes grâces et l’amour d’Eva, qu’il rêvait de voir à ses bras et
qui ignorera tout de ses activités. Tout en subvenant aux besoins de sa famille, Orlov se créé alors un
véritable empire en écoulant d’impressionnants stocks d’armes de l’ex-URSS, et ce principalement à
travers le continent africain en proie aux conflits multiples. Sans complexe ni mauvaise conscience, il
tente les coups les plus risqués, échappant telle une souris au gros chat qu’est le très acharné
inspecteur Jack Valentine, qui le traque sans relâche… Les années passent et la réussite demeure, mais
l’ombre de Valentine se fait toujours plus présente…
Andrew Niccol, réalisateur
Né en 1964 en Nouvelle-Zélande, Andrew Niccol part encore jeune vers
l’Angleterre, afin d’assouvir son désir de faire du cinéma. Sur place, il s’illustre
dans le domaine de la publicité, mais cela ne lui suffit évidemment pas et il
émigre cette fois pour Hollywood afin de se frotter aux longs-métrages… Son
script du Truman Show intéresse vivement Hollywood mais le budget du film
l’empêchera d’en prendre la barre. Qu’importe, il met en boîte Bienvenue à
Gattaca et obtient la reconnaissance par la profession. Il réalise ensuite S1m0ne
et aura toutes les difficultés du monde par la suite pour obtenir le financement de
ce Lord of War au contenu loin d’être politiquement correct…
Nicolas Cage, acteur
Né en 1964 en Californie, Cage naît dans une famille de cinéma, puisque son oncle
n’est autre que Francis Ford Coppola. Il début sa carrière au milieu des années
quatre-vingt et aborde tous les genres, que ce soit des comédies (Arizona Junior
des frères Coen), le film d’action (Rock, Volte/Face), le sentimental (Family
Man)… Assez éclectique dans ses choix, il passe également derrière la caméra pour
Sonny, qui reste inédit en France à ce jour…
Lord of War. Voilà un film qui vous réveille violemment et vous laisse à la sortie la même
impression de gueule de bois qu’une soirée un peu trop arrosée…On en ressort la conscience
perturbée, avec de quoi réfléchir quelque peu sur la politique de nos gouvernements, et pas très fier
d’avoir eu une vérité aussi peu glorieuse jetée à la figure…
Dès le départ, on prend une claque, et même deux. Premier plan, Nicolas Cage, de dos. Il se
retourne, et avec un grand sourire, nous déclare qu’un homme sur douze possède une arme sur notre
planète. Avant d’ajouter avec un sourire inchangé que la grande question est de savoir comment s’y
prendre pour armer les onze autres. D’entrée le public est pris à froid. Puis vient un générique
d’ouverture non moins innovant et non moins percutant. A son issue, on a bel et bien compris que ce
qui va suivre sera sans concession. Et en effet, ce le sera…
Le comble est peut-être que tout cela est raconté avec un détachement particulièrement
hallucinant. Nicolas Cage nous conte son ascension. On repasse donc la fin de ce siècle en revue. On
découvre ainsi de terribles constats, des montagnes d’armes d’excédents de l’ex-URSS détournées
avec une simplicité sidérante, ainsi que des choix politiques et financiers des grandes nations
simplifiant grandement la tâche des trafiquants. Et cela est relaté toujours avec cette gueule d’enfant
de cœur qui semble presque – pardonnez le jeu de mot – désarmante. Cage colle parfaitement à la peau
de ce trafiquant déroutant, qui ne semble pas un instant éprouver le moindre sentiment face à
l’utilisation faite de ses armes. Ou alors, qui réagit d’une façon des plus surprenantes. Non, bien sûr, il
préfère que ses armes ne tuent pas. Pas par soucis d’humanité, mais plutôt car ça fait une balle de plus
d’utilisée pour rien, et donc le besoin de racheter une balle pour son utilisateur… Le constat est amer,
terriblement amer. Orlov se promène au milieu de guerres civils, assiste quasiment à des exécutions ou
à la préparation de massacres, mais le seul fait qui semble compter, c’est la manière dont il s’en
sortira, si son échange sera fructueux ou pas.
Car la force du scénario, c’est qu’il arriverait presque à nous laisser avoir de la sympathie pour
Orlov. Oui, c’est vrai, il est malin, il s’en sort toujours à temps et agit avec une déconcertante
simplicité pour obtenir et refourguer d’immenses stocks. Et puis, oui, finalement, il est humain, il a
une famille, un gosse à qui il interdit de jouer avec des armes, et un frère dont il prend soin et qui lui
cause de grands soucis. Presque un bon citoyen, en fait. Presque.
Le spectateur fait donc face à ce spectacle surréaliste, à la réussite d’un vendeur de mort, qui
se retrouve continuellement en position de force face aux forces d’Interpol… et cela se poursuit,
comme une sorte d’hallucination malsaine, jusqu’à ce final, qui finit de vous scier dans votre siège. On
croit voir le film se diriger vers les sentiers du classicisme hollywoodien qu’il cherchait à fuir par son
message. On sent la chose venir, et pourtant, non, une fois encore, le spectateur reçoit son plus sévère
retour de manivelle dans le visage. Les cinq dernières minutes du film sont les plus cruciales, et
offrent l’enseignement le plus dur à avaler : la réalité de notre monde...
Un message réellement dur à accepter, d’autant qu’il nous est transmis au travers d’un film
qui, il faut le reconnaître, est en plus d’être dérangeant, très fortement distrayant et prenant. La recette
parfaite pour l’efficacité. Une réussite.
G.H. février 2006