Les causes d exoneration en matiere contractuelle

Transcription

Les causes d exoneration en matiere contractuelle
Olivia Franco
Fiche de niveau 3. Le droit des contrats / La force obligatoire du contrat /
2007
Les causes d’exonération en matière contractuelle
Une cause d’exonération est un fait qui va pouvoir être invoqué par le débiteur défaillant
pour se dégager de sa responsabilité.
Lorsque l’obligation à laquelle s’est engagée le débiteur est de moyens (il s’est engagé à
mettre tout en œuvre pour aboutir au résultat promis), le créancier doit non seulement
prouver l’inexécution mais aussi que cette inexécution a été fautive. Le débiteur pourra
alors se défendre en arguant du fait qu’il n’a pas commis de faute. En cas d’obligation de
résultat (le débiteur s’est engagé à parvenir à un certain résultat), le débiteur verra sa
responsabilité engagée alors même qu’il n’a pas commis de faute.
Pour autant, on ne peut véritablement parler de cause d’exonération, notamment lorsque
le débiteur d’une obligation de moyen entend prouver qu’il n’a pas commis de faute. Il ne
peut y avoir cause d’exonération que lorsque toutes les conditions de la
responsabilité contractuelle sont remplies. Malgré la réunion de ces conditions, le
débiteur défaillant pourra s’exonérer de sa responsabilité. Les causes d’exonération sont
au nombre de trois: la force majeure (ou cas fortuit), le fait du créancier et le fait du
tiers.
Les caractères que doivent revêtir ces causes pour être effectivement exonératoires ont
connu une évolution jurisprudentielle récente.
La force majeure
L’article 1148 du Code civil distingue la force majeure et le cas fortuit, mais l’on
considère généralement que ces expressions sont synonymes. La force majeure doit
revêtir plusieurs caractères afin d’être exonératoire de responsabilité. Traditionnellement,
ces caractères sont l’imprévisibilité, l’irrésistibilité et l’extériorité. Lorsque la force
majeure revêt ces caractères, elle est entièrement exonératoire de responsabilité.
Cependant, il semble que certains de ces caractères soient remis en cause. L’extériorité
ne serait plus nécessaire, et certains arrêts ont estimé que seule importait l’irrésistibilité.
L’extériorité est le fait que la force majeure est étrangère au débiteur ou à ses biens. On
considère par exemple que la grève des salariés d’un entrepreneur ne constitue pas un
cas de force majeur pour ce dernier car elle ne lui est pas extérieure. Toutefois,
l’extériorité semble avoir progressivement disparu des caractères traditionnels de la force
majeure et ne paraît plus être nécessaire à sa caractérisation.
L’imprévisibilité est le fait que l’événement de force majeur ne pouvait pas être prévu.
Elle s’apprécie lors de la conclusion du contrat.
L’irrésistibilité est le fait que cet événement ne pouvait pas être évité : même connu, on
ne pouvait l’empêcher. L’irrésistibilité s’apprécie lors de l’exécution du contrat. Certains
arrêts ont pu retenir que la seule irrésistibilité de l’événement suffisait à caractériser la
force majeure, en subordonnant parfois cette possibilité au fait que le débiteur avait pris
toutes les mesures requises pour éviter la réalisation de l’événement. Toutefois,
l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a récemment jugé que la maladie du
débiteur constituait un cas de force majeure dès lors qu’elle présentait un caractère
imprévisible et irrésistible (AP 14 avril 2006, Bull. civ. n°5). Il apparaît dès lors que la
condition d’imprévisibilité est toujours exigée.
Le fait du créancier
Pour être totalement exonératoire de responsabilité, le fait du créancier (la victime de
l’inexécution) doit avoir été la cause exclusive du dommage. Il y aura exonération
partielle dans le cas contraire.
Le fait du tiers
Par tiers, il faut entendre une personne autre que les parties au contrat. Cette personne
ne doit pas être le représentant du débiteur ou son préposé.
Le fait du tiers n’est exonératoire que s’il revêt les mêmes conditions que la force
majeure. Compte tenu des réserves émises plus haut sur les caractères que doit revêtir
la force majeure, on considèrera que le fait du tiers doit être imprévisible et irrésistible.
Bibliographie
I.Guyot, « Le caractère extérieur de la force majeure », Revue de la recherche juridique,
droit prospectif, 2002, p. 212.
P. Jourdain, « Force majeure : l’Assemblée plénière manque l’occasion d’une définition
claire », Dalloz 2006, p. 1577.
C. Radé, « la force majeure », in Les concepts contractuels français à l’heure des
principes du droit européen des contrats, Dalloz, 2003, p. 201.