opéra de Philip Glass d`après le roman de Jean Cocteau direction

Transcription

opéra de Philip Glass d`après le roman de Jean Cocteau direction
opéra de Philip Glass
d’après le roman
de Jean Cocteau
direction musicale
Emmanuel Olivier
mise en scène
Stéphane Vérité
23 nov › 2 déc 2o12
nouvelle production
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lesenfantsterribles
Avant d’être un opéra de chambre, Les Enfants
terribles fut d’abord un livre de chevet. Le chevet
d’un malade, Jean Cocteau, qui, en 1929, tente
une nouvelle fois de se désintoxiquer de l’opium
dans une clinique de Saint-Cloud. Dans sa chambre
de convalescent, il reçoit des visites : celles d’André
Gide, de Marcel Jouhandeau, et d’un familier de l’Athénée, le décorateur
Christian Bérard. “Il me racontait une autre chambre, celle d’amis à nous. (…)
Ces frère et sœur vivaient en vase clos, en Thermos. Ils ne pouvaient pas
supporter les microbes de l’extérieur.” 2 Par une troublante symétrie, ils
se prénomment Jean et Jeanne. Elle est modèle ; il est magasinier en usine,
beauté limpide et bref amour de Cocteau (autre symétrie, autres miroirs :
Le Roy, Desbordes, Marais, ou ici Bourgoint… Les amours de Jean Cocteau
se sont souvent prénommés Jean).
Bérard continue de fréquenter le repaire des Bourgoint rue Rodier, y dormant
parfois sur une pile de coussins, sous des vieux manteaux. Pour Cocteau,
il réinvente Jean et Jeanne, les mythifie. Ses récits feront bientôt la matière
d’un roman, que Cocteau écrit fiévreusement, en trois semaines. À toute
vitesse, le livre s’échappe de son auteur en même temps qu’il s’affranchit de
ses modèles, devient un miroir trompeur comme Cocteau les aime. “Lorsque
nous lûmes le livre à Jean B. dans une chambre d’hôtel rue de Bourgogne,
(je sortais de la clinique) il ne reconnut ni lui ni sa sœur.” 3
Pas besoin d’opium.
Tout est drogue
à qui choisit pour
y vivre l’autre côté.
Henri Michaux1
La chambre de la rue Rodier, Cocteau l’a déplacée rue Montmartre, près d’un
lieu de son enfance, le lycée Condorcet, où il rencontra l’élève Pierre Dargelos.
Dans Les Enfants terribles, il ressuscite cette gouape héro que, ce “ca d éro­tique
et brutal” 4, image primitive qui n’en finira pas de le hanter, dont Raymond
Radiguet fut l’un des avatars et Jean Genet sans doute l’incarnation la plus
aboutie. Au duo innocent et cruel que composent Paul et Élisabeth, Cocteau
oppose Dargelos et son double, son angélique résurrection – Agathe, l’orpheline, l’enfant perdue. Et seul reste Gérard, le témoin et narrateur (qui n’est pas
sans évoquer le narrateur originel, Bérard, dont seule une lettre le sépare).
1 “L’insoumis”, Plume, éd. Gallimard, 1963 | 2, 5, 7 Jean Cocteau, Autoportrait d’un inconnu,
documentaire d’Edgardo Cozarinsky, 1983 | 3 Jean Cocteau, Le Passé défini, extrait inédit daté du 6 mars
1956, reproduit avec la permission des éditions Gallimard par Bertrand du Chambon dans Le Roman
de Jean Cocteau, éd. L’Harmattan, 2001 | 4, 6 Pierre Bergé, Album Cocteau, La Pléiade, Gallimard,
2006 | 8 1947. Réédition, Le livre de poche Biblio.
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Si les héros ne sont que des reflets lointains de leurs modèles, la chambre
existe bel et bien. Après la mort de Raymond Radiguet, autre enfant perdu,
soufflé par le typhus à 20 ans “comme un fétu de paille” 5, Jean Cocteau s’est
installé dans “une existence soucieuse de baladin, sans ressources fixes,
d’hôtel en hôtel, et de g tes en aumône” 6. Depuis des années, il ne vit plus
que dans une succession de chambres, ou plutôt dans une unique chambre qui
se déplace. À Grasse, à Monte-Carlo, au Lavandou, au cap Nègre. À l’Hôtel
Welcome, au Carlton de Londres, à la clinique des Thermes urbains, à l’Hôtel
des Réservoirs, au Chantecler, à l’Hôtel de l’Étoile… Mais aussi chez les Daudet,
chez Gabrielle Chanel, chez Marcelle Garros, chez Picasso…
Cette chambre sans cloisons ni contours, devenue son décor naturel, est l’habitat
sans issue des Enfants terribles. Elle a sa vie propre, ses lois, elle se transporte
et se transforme. Elle est un incubateur, une fabrique d’incubes, de succubes
et autres démons ; mais aussi une couveuse, rêvée en plein sevrage pour remplacer la tétée des pipes d’opium.
De cet opium, à l’analyse, il reste des traces dans le roman. Le jeu auquel
s’adonnent Paul et Élisabeth est un voyage dans l’immobilité de la chambre
mobile, un trip opiacé, et comme l’opium un plaisir sans jouissance : on dit
toujours “je pars”, on ne dit jamais “je viens”.
“J’évite d’expliquer ce jeu, maintiendra Cocteau des années plus tard. D’ailleurs, on ne touche pas à ces choses-là avec des mains d’homme. (…)
Le jeu des enfants, dans Guerre et Paix, Tolsto nous le donne en quatre ou
cinq répliques, quand les enfants jouent dans un coin et qu’ils se taisent
quand les parents approchent. On ne touche pas à ce genre de chose. Alors,
j’en parle de loin.” 7
En 1929, Jean Bourgoint s’est converti. Devenu moine trappiste et rebaptisé
Frère Pascal, il a intégré l’abbaye de Citeaux avant de s’exiler aux colonies.
Le roman Les Enfants terribles sort à l’automne, ce sera le premier grand
succès public de son auteur. Suivant une trajectoire de perdition, Jeanne
Bourgoint se suicide peu après la sortie.
Quant à la chambre mouvante, elle poursuit son chemin dans l’œuvre de Cocteau.
On la retrouve chambre d’hôtel dans Le Bel Indifférent, dans le château de
La Belle et la Bête, ou encore dans Les Parents terribles, dont l’appartement,
comme pour contredire la sédentarité de son immeuble, est baptisé “la roulotte”.
On ne sort pas de la chambre, sinon pour l’inventer : elle réappara t dans
Orphée, où Cocteau conçoit un trucage cinématographique bien de sa façon :
pour figurer la traversée d’un miroir, il fabrique un décor où deux chambres
identiques se font face…
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Dans La Difficulté d’être 8, Cocteau décrivait la chambre close de Marcel
Proust, “ce cher bon grand fond”, “cette chère petite grotte”, “où Proust
nous reçoit sur son lit, habillé, colleté, cravaté, ganté, terrifié par la crainte
d’un parfum, d’un souffle, d’une fenêtre entrouverte, d’un rayon de soleil”.
Il observe avec l’œil du connaisseur : personne aussi extrêmement que
Proust n’aura vécu cette dualité entre le salon et la chambre, qui est aussi
la sienne. Le salon est fait pour ces animaux sociaux, brillants, rapides,
bavards, c’est un monde où être mondain, ils y excellent. Mais ce grand
monde n’est qu’une anti-chambre. Car, face à lui, se recrée sans arrêt
et partout son double, l’autre côté, l’autre monde infini, celui de la chambre
où s’accomplit l’intime. La chambre où voyager, écrire, rêver, aimer,
hors d’atteinte, loin du monde. texte Lola Gruber
opéra de Philip Glass
d’après le roman
de Jean Cocteau
direction musicale
Emmanuel Olivier
mise en scène
Stéphane Vérité
23 nov › 2 déc 2o12
adaptation Philip Glass et Susan Marshall scénographie et lumières Stéphane Vérité costumes Hervé Poeydomenge conception des images numériques Romain Sosso et Stéphane Vérité production des images Romain Sosso
avec
les chanteurs : Guillaume Andrieux Paul
Chloé Briot Élisabeth
Amaya Dominguez Agathe
Olivier Dumait Gérard et
le Narrateur
et les pianistes :
Anne-Céline Barrère Nicolaï Maslenko Emmanuel Olivier
coproduction : Opéra national de Bordeaux,
Teatro Arriaga de Bilbao | avec le soutien
du Dicréam et de la Spedidam
coréalisation : Athénée Théâtre Louis-Jouvet
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autourduspectacle
préludes
Avant la représentation, le musicologue Jacques Amblard vient
nous éclairer sur l’œuvre de Philip Glass, en salle Christian-Bérard.
mercredi 28 nov 2o12 19h › 19h 3o entrée libre
cinéma
En partenariat avec le cinéma Le Balzac, projection du film.
Les Enfants terribles de Jean-Pierre Melville (1949).
tarif Athénée 5 3 sur présentation du billet de la pièce ou de votre carte abonné | tarif unique 6,50 3
samedi 1 er et dimanche 2 déc 2o12 › 11 h
prochainement
la voix humaine opéra de Francis Poulenc d’après la pièce de Jean Cocteau
mise en scène Vincent Vittoz avec Stéphanie d’Oustrac
5 › 15 déc 2o12
croquefer ou le dernier des paladins
opérette bouffe de Jacques Offenbach livret Adolphe Jaime et Étienne Tréfeu
blog
de l’Athénée
venez tous les
jours au théâtre blog.atheneetheatre.com
Square de l’Opéra Louis-Jouvet 7 rue Boudreau 75 009 Paris
Mº Opéra, Havre-Caumartin, RER A Auber
réservations 01 53 05 19 19 | athenee-theatre.com
Mio Padre le nouveau bar de l’Athénée, situé au premier étage, vous propose
sa carte d’hiver aux saveurs italiennes, une heure avant et après chaque représentation.
La librairie L’Échappée littéraire vous accueille dans le hall du théâtre les soirs
de représentations.
Le personnel d’accueil est habillé par les créations un été en automne
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malte martin atelier graphique | assisté par adeline goyet | impression moutot | licence nº 19125
suivi de
l’île de tulipatan opéra bouffe de Jacques Offenbach livret Alfred Duru
et Henri Chivot direction musicale Christophe Grapperon
mise en scène Jean-Philippe Salério, Compagnie Les Brigands
2o déc 2o12 › 13 janv 2o13
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