Réaliser les Objectifs de Développement Durable

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Réaliser les Objectifs de Développement Durable
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Laboratoire d’Analyse, de Recherche et d’Etude du
Développement.
Association Sénégalaise des Economistes-Ecole de Dakar.
Symposium sur les ODD
« Réaliser les Objectifs de Développement
Durable »
Dakar, du 12 au 13 avril 2016
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Sommaire de la contribution.
-Des OMD aux ODD ,le point de vue de l’Entreprise privée
africaine et sénégalaise en particulier.
-Comment s’approprier les ODD Après 2015 , et faire
participer le maximum d’entreprises et d’investisseurs
nationaux à leur réalisation à l’horizon 2030 ( c-à-d dans
les quinze années qui viennent ) ?
-Quelle stratégie adopter par l’entreprise locale pour créer
de la richesse , accompagner les pouvoirs publics à
éradiquer la pauvreté et à réduire les inégalités ?
-------------------------------------------------------Article JPNP sur les ODD Déc 2015.docx
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Le passage des OMD aux ODD .
Du millénaire à la durabilité des objectifs de lutte contre
la pauvreté et les inégalités sociales .
Le point de vue de l’entreprise privée africaine .
1. Introduction.
-La déclaration des Nations unies sur les ODD est universelle .
Elle vise l’éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités dans le monde .
Elle décrit une stratégie globale de lutte et devrait ,du point de vue de
l’entreprise privée africaine et nationale en particulier ,se limiter aux seuls
principes généraux à appliquer .
En effet,
Elle est ressentie dans les pays africains comme l’affaire des Etats,contraints d’y
souscrire pour se faire certes bonne conscience mais pour obtenir surtout des
soutiens financiers de la part de la communauté internationale.
Ce n’est pas en conséquence la préoccupation majeure et encore moins l’affaire
des entreprises privées. Tel est le ressenti en général chez les dirigeants
d’entreprises !!!
Il suffit de se reporter aux minutes et rapports des conseils d’administration des
sociétés ou aux exposés des motifs de création des entreprises pour s’en
convaincre .
La lutte contre la pauvreté, c’est l’affaire de la puissance publique.Elle relève des
prérogatives régaliennes de l’Etat .
En l’an 2000 au moment du lancement des OMD ,le secteur privé était considéré
comme le moteur du développement ,car appelé à y jouer un rôle majeur
d’investisseur ( création d’entreprises, de richesses ,pourvoyeur d’emplois
,collecteur d’impôts ,etc... ) . Un slogan bruyamment clamé !.
Le privé national y avait du reste largement souscrit (cfr les discours des
organisations patronales et syndicales des Etats africains respectifs ,aux côtés
des institutions internationales ( la Banque mondiale,le FMI,le BIT ,etc..;.) .
Localement (par exemple au Sénégal) ,le secteur national a été également
associé à l’élaboration du DSRP (Document stratégique de réduction de la
pauvreté ) ,de son pendant la SCA (Stratégie de la croissance accélérée ) .
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On ne peut pas dire ,en toute honnêteté , que le privé ne fût pas associé aux
rencontres consacrées à la lutte contre la pauvreté de l’an 2000 à nos jours .C’est
un fait indéniable .
Cependant ,entre les réunions ,la mise en oeuvre des recommandations et leur
application harmonieuse dans l’entreprise ,le pas n’ a pas toujours été franchi
,surtout par les PME/PMI. en général .
Pourquoi ?
La réponse est à chercher dans :
1 ) la définition elle même des Objectifs (OMD comme ODD ) .
L’entreprise n’est pas nommément citée .
Elle est diluée vaguement dans « création de richesse et d’emplois .
2 )l’évaluation des politiques sectorielles et non pas dans les seuls tableaux de
synthèse macroéconomiques , (qui ne font que restituer des données plus
quantitatives que qualitatives des réalités sociales )
3)
le manque d’engagement citoyen de l’entreprise africaine ,qui n’accorde
pas toujours assez d’importance aux objectifs sociaux et
environnementaux .
La présente contribution ,pour faire entendre la voix de l’entreprise , s’est
volontairement limitée à deux objectifs majeurs du plan des Nations Unies à
savoir :
-l’Accès à l’énergie pour tous (électricité,eau et assainissement ) ,
-le changement climatique et ses conséquences négatives sur la croissance et le
développement économique .
Le sujet est vaste ,car il nécessite la revue non seulement de la politique
industrielle en vigueur mais aussi l’évaluation de celle-ci dans l’espace UEMOA ,
qui nous est proche et le plus familier .
- Quel rôle attendu de l’entreprise privée africaine ?
Méthodologie.
Etape 1 .De l’appropriation scientifique des concepts OMD et ODD .
Etape 2 -L’ évaluation de l’action de terrain (Ante 2015 ).
Etape 3 . « Réaliser les Objectifs du Développement Durable »
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( les ODD Après 2015 ) .Comment?
<> Etape 1 .De l’appropriation scientifique
des OMD et ODD .
1.1. Le socle théorique fondamental.
-La référence à la théorie de J. Schumpeter (1911) : du rôle de
l’entrepreneur privé .
-La référence à la théorie du développement endogène (S.Amin ,
M.Kassé 1990 ).
,
-La référence à la théorie de l’intégration régionale ( NEPAD originel
la WADE formula -2002 ) .
-La référence à la théorie du développement régional par les
infrastructures (le NEPAD reformulé et ses objectifs ) .
-La référence à la théorie sur les inégalités -Th. Piketty -2004
et sur le capital 2013 .
-la référence à la littérature sur la RSE (Responsabilité Sociétale
de l’ Entreprise ).
Quelle approche théorique retenir ?
Que peut apporter le LARED-ASE -Ecole de Dakar ?
1.2. Les études économiques et sociales empiriques
existantes .
a ) - les contributions des institutions nationales de recherche et
de réflexion :
( CREA ,LARED -ASE , CRES, IFAN CNP, CNES, ,ANSD, DPEE ,
Ministères , etc...)
b ) - les contributions des institutions régionales
( CODESRIA , PNUD ,UA, CEDEA0 ,ONU , CEA et autres ONG ...)
c ) - les contributions des institutions mondiales
( FMI, BM ,UE, BIT ,etc...) .
Que retenir de ces études pour le futur et la mise en oeuvre
des ODD ?
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NOTA - Cette étape1 fera l’objet d’une communication écrite
séparée .
<> Etape 2 -Evaluation de l’action de terrain
(Ante 2015 ).
Les actions des instituts de recherche scientifique et des
structures de développement ou entreprises opérant
respectivement dans :
a) Le secteur primaire Agriculture ,élevage, pêche
.,aquaculture ,biodiversité
(ISRA, ITA, IFAN ,CRDI,SAED ,SODAGRI ,...)
Où en sommes-nous avec les objectifs
> de l’autosuffisance alimentaire ?
>du retour des jeunes à la terre ?
(du Plan REVA à la ferme villageoise, à l’exploitation agricole
moderne ) .
b ) Le secteur secondaire : industries extractives et
manufacturières
(SONEPI, ANSD, DPEE ,CNP ,CNES ...).
Où en sommes-nous avec les objectifs
> de relance et de restructuration des entreprises industrielles
en difficulté ?
i) Le secteur tertiaire : Services télécommunications .assurances-banques, tourisme, .. )
(SONATEL,Banques de développement ,CNCAS,SAPCO .... ) .
Où en sommes-nous avec les objectifs
> de création d’une banque de développement pour relayer le
financement du système bancaire traditionnel ?
> de relance des activités touristiques ,dans les zones
secondaires ex-centrées ou en crise ( Casamance ) ?
Certes les déclarations officielles de septembre 2015 concluent que les résultats
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des OMD sont mitigés .
Pourquoi ,les OMD attendus du secteur privé n’ont-ils pas été atteints ?
Au Sénégal ,pourtant , ces derniers objectifs ont été clairement définis dans le
DSRP (Document de Lutte contre la Pauvreté ) et son pendant la Stratégie de
croissance accélérée (SCA ) .
-A-t-on fait l’évaluation du DRSP ,de la SCA et des politiques
sectorielles au Sénégal et dans les autres pays de l’UEMOA ?
Quels sont au moins les points positifs ou encourageants réalisés ?
Des efforts multiples au sein des structures ad hoc et un suivi ont été effectués
pendant près de 15 ans ( de 2000 à 2012 ) . A quoi a servi tout ce travail ?
Quelle évaluation a été faite? Que retenir ?
D’accord pour reconnaître que les OMD n’avaient pas suffisamment mis l’accent
sur les indicateurs du développement durable (d’ordre économique,social et
environnemental sur un plan général ).
Cependant ,la prise en compte de ces deniers va-t-elle clarifier davantage la
situation et aider à atteindre la centaine de nouvelles cibles des ODD d’ici à 2030
?
Etape 3 . « Réaliser les Objectifs du Développement
Durable » ( les ODD Après 2015 ) .
Dans le Plan des Nations unies ,les ODD se résument en 17 objectifs et 160 cibles
. N’est-ce pas trop rechercher ou demander aux Etats africains ?
Quelle structure de l’administration nationale peut raisonnablement ,avec
confiance et efficacité , observer, suivre régulièrement toutes ces cibles ,eu égard
aux actions programmées ou en cours de réalisation ?
-Au plan national (exemple du Sénégal )
Le Plan Sénégal Emergent ( PSE ) a déjà défini sa vision et décliné son
programme 2015-2035 .
Il serait utile de se référer à ce dernier pour vérifier si concordance ou cohérence il
y a entre les ODD et les objectifs arrêtés voire budgétisés ,tant au plan de
l’administration centrale qu’au niveau des démembrements de l’Etat et de la
société civile .
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Par rapport à l’atteinte des ODD que peuvent apporter :
<>les instituts de recherche scientifique et des structures de développement ( à
recenser leur plan stratégique à long terme ) ?
<> les organisations professionnelles (patronat et syndicats ) ,les entreprises
industrielles et commerciales opérant dans
<> le secteur primaire moderne ,
<> le secteur secondaire ,
<> le secteur tertiaire ,
<> le secteur informel ?
-Au plan régional (les pays de l’UEMOA ) .
Il y a lieu de se référer aux rapports et directives de la Commission de l’UEMOA
pour vérifier si une cohérence existe entre les ODD et ceux ,en vigueur
,recommandés aux Etats membres ( par exemple dans l’IRED -Initiative
Régionale pour l’Energie Durable ).
De même ,qu’en est-il des autres structures comme les instituts de recherche
scientifique et des sociétés sous- régionales de développement .
Les résultats des réflexions communautaires et les avis exprimés sont à prendre
en considération dans l’élaboration des ODD .
Enfin.
Quels indicateurs faudrait-il identifier et suivre dans l’entreprise ?
De mon point de vue, l’entreprise qui n’est pas en équilibre financièrement ni
économiquement stable,ne pourra pas participer activement à la réduction de la
pauvreté et encore moins pratiquer une politique de RSE ou de responsabilité
citoyenne.
En effet ,sans une bonne visibilité du futur et sans une perspective de rentabilité
,elle ne sera pas en mesure de verser des salaires décents ni garantir une
couverture sociale pérenne à son personnel .
Dès lors,la question de la santé économique et financière de l’entreprise devrait
figurer dans les cibles et parmi les indicateurs des ODD ,comme des préalables à
réunir pour bien et pour mieux lutter contre la pauvreté et les inégalités .
En outre, il faudrait s’interroger sur l’environnement des affaires .
Quelle est la situation des entreprises ,créatrices d’emplois,
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en 2015 ?
L’ouvrage du Pr. M.Kassé sur «l’industrialisation africaine est possible » illustrait
,déjà en 2013, la situation de quasi délabrement du tissu industriel au Sénégal
comme dans l’espace UEMOA .
Des suggestions voire des recommandations étaient faites pour relancer
l’économie nationale ,grâce à des investissements massifs modernes ,une
meilleure organisation des implantations industrielles et la recherche de
financements innovants.
Pour ma part j’ajouterai ,afin de mieux répondre aux objectifs des ODD relatifs à
l’accès à l’énergie et à la transition du fossile vers les énergies renouvelables ,
la nécessité :
1) de restructurer le sous-secteur des hydrocarbures (en modernisant la raffinerie
SAR et en la dotant de ressources financières conséquentes ,en harmonie avec
les défis de compétitivité à relever ) .
2) de finaliser la restructuration technologique et financière du secteur de l’électricité
(Sénélec ),de l’hydraulique (Soness, Snas ...)
3) de poursuivre l’accélération de l’électrification rurale (Aser ),le renforcement de
l’alimentation en eau et en assainissement des populations , des conditions majeures
de l’atteinte des ODD en 2030.
4) d’ouvrir dès à présent un large débat national sur la transition énergétique dans la
zone UEMOA .
La mutation vers une économie décarbonée ( avec moins ou pas du tout d’énergie
fossile comme le pétrole et le charbon ) ne se fera pas sans conséquences négatives sur
les ODD mais aussi sur le mode de production des entreprises existantes ainsi que sur le
mode de consommation des populations .5) de se pencher enfin davantage sur
l’économie informelle et son devenir .
Ce secteur ,longtemps négligé et délaissé ,est devenu au cours des deux dernières
décennies, un vivier important ,créateur de richesses et d’emplois ,donc très contributif
à la lutte contre la pauvreté.
il est question de le «formaliser »,de le moderniser ,de l’intégrer davantage dans le
système formel .
Il ne faudrait cependant pas ,pour des raisons de transparence, asphyxier ce segment de
l’économie par des mesures administratives (fiscales et douanières ) de nature à tuer la
poule qui pond encore !!!
CONCLUSION .
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Voilà quelques réflexions ,en guise de contribution au débat sur la réalisation des
nouveaux objectifs du développement durable.
il m’a semblé utile de faire entendre la voix de l’entreprise privée .
Naturellement des voix plus autorisées préciserons les positions des groupements
professionnels respectifs (patronat comme syndicats ).
Toujours est-il ,le débat national est d’ores et déjà amorcé .
En résumé, retenons que l’entreprise privée africaine ne peut rester indifférente à la
lutte contre la pauvreté et les inégalités .
Face aux défis des ODD ,le développement durable devrait s’inscrire impérativement
dans sa stratégie globale ,au cas où cela ne serait pas encore le cas .
Aux côtés des objectifs traditionnels de profit et de sécurité ,il y a lieu d’adjoindre et
d’accorder une place non moins significative à la responsabilité sociétale de l’entreprise
,fondée sur le respect de la dignité de la personne ,la protection des biens et des
ressources humaines ainsi que de l’ environnement
Il est clair, toutefois qu’une telle politique ne peut être appliquée
-sans l’accompagnement et le soutien financier du système bancaire local et
-sans la constitution au préalable des conditions de rentabilité et de stabilité
économique et financière ,seules garantes de la contribution de l’entreprise à la
promotion de ses travailleurs et indirectement à la lutte contre la pauvreté et aux
inégalités sociales .
Telle est la modeste contribution soumise à votre aimable attention.
Par Jean pierre NOEL PIERRE .IAG Louvain ( 71 )
-Ancien Secrétaire Général du Groupement Professionnel de l’industrie du Pétrole (GPP)
-Membre de l’Association Sénégalaise des Economistes (ASE ) .