RMV 11:Revue 08-09.qxd - Revue de Médecine Vétérinaire
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Aptitudes maternelles de la brebis Djallonké en élevage traditionnel dans la Commune de Banikoara au Bénin A.K.I. YOUSSAO1*, S. FAROUGOU1, B. G. KOUTINHOUIN1, G. BIO BAGOU2, B. D. KORA2 Ecole Polytechique d’Abomey-Calavi, Laboratoire de Recherche en Biologie Appliquée, 01 BP 2009 Cotonou, BÉNIN. Lycée Agricole Médji de Sékou, BP 14 Allada, BÉNIN. 1 2 * Auteur chargé de la correspondance : [email protected] RÉSUMÉ La caractérisation des aptitudes maternelles de la brebis Djallonké en élevage traditionnel dans la Commune de Banikoara a été réalisée pendant 14 semaines dans 5 villages de l’Arrondissement de Founougo. Les paramètres de reproduction et le poids des agneaux ont été collectés sur 37 brebis et 55 agneaux, de race Djallonké. A la mise-bas, 67,6 pour cent des brebis ont donné une portée simple et ce taux était plus élevé (P inférieur à 0,05) que celui obtenu pour les naissances doubles (18,9 pour cent). Les fréquences des portées de 3 et 4 agneaux étaient respectivement de 10,8 et 2,7 pour cent. Le nombre d’agneaux par portée augmentait (r égal à 0,75 ; p inférieur à 0,001) en fonction du rang de mise bas. Les brebis de rang de mise-bas 3, 4 et 5 ont donné en moyenne 1,46 agneaux par portée alors que celles de plus de 6 étaient en moyenne 2,5 agneaux par portée. Le taux de mortalité enregistré dans les 5 premiers jours qui ont suivi la mise-bas était de, 17,9 pour cent et était fortement influencé par la taille de portée. Le poids moyen à la naissance des agneaux de race Djallonké était de 1,88 kg (écart-type de 0,32) et au sevrage, 10,56 (écart-type de 1,88 kg). Le mode de naissance avait un effet hautement significatif sur le poids à 60 et à 90 jours et sur le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours (P inférieur à 0,001). Le rang de mise-bas a peu influencé le poids à 60 jours (P inférieur à 0,05) et plus, le poids à 90 jours et le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours (P inférieur à 0,01). Les portées de grande taille ont des agneaux de poids individuel faible par rapport aux portées de petite taille. A partir de 60 jours, les différences pondérales s’exprimaient clairement. Tout comme la taille de la portée, le rang de mise-bas n’influençait significativement le poids qu’à partir de l’âge de 60 jours. Mots-clés : Aptitudes maternelles, brebis, Djallonké, Bénin. Introduction L’aptitude maternelle étant la capacité qu’a une femelle à concevoir, à mettre bas et à élever ses petits jusqu’au sevrage ; elle peut être appréciée à partir de critères tels que la fécondité, la prolificité, l’allaitement, la viabilité et la croissance des agneaux. Chez la brebis, la production laitière lors de l’allaitement peut être estimée par la croissance des agneaux qui reflète le mieux la quantité de lait disponible, ingérée et transformée par ceux-ci [4, 14, 15]. Une bonne aptitude maternelle permet d’obtenir une meilleure productivité numérique et pondérale au sevrage. Chez les ovins, la prolificité et la mortalité des agneaux sont les principaux facteurs de la baisse de productivité [12]. La mortalité varie selon les auteurs de 20 à 48 % [8], de la Revue Méd. Vét., 2008, 159, 10, 538-544 SUMMARY Maternal aptitudes of the Djallonke ewe in traditional breeding in the Commune of Banikoara in Benin The characterization of the Djallonke ewe maternal aptitudes in traditional breeding in the Commune of Banikoara was carried out during 14 weeks in 5 villages of the District of Founougo. The reproduction parameters and the lambs’s weights were collected on 37 ewes and 55 lambs, of Djallonke breed. On 37 births, 67.6 per cent gave single birth. This rate was higher (p lower than 0.05) than that obtained with the double births (18.9 per cent). The litters of 3 and 4 lambs occupied respectively 10.8 and 2.7 per cent. More the parity increases, more litter size also increases (r equal to 0.75; p lower than 0.001). The ewes of parity 3, 4 and 5 parity gave 1.46 lambs per litter whereas those of more than sixth parity had an average of 2.5 lambs per litter. On 56 lambs at birth, 17.9 per cent of mortalities were recorded in the first 5 following days. This rate was highly influenced by the litter size. In Djallonke breed, the birth weigh was 1.88 (standard deviation of) 0.32 kg and the weight at weaning (90 days) was 10.56 (standard deviation of 1.80 kg). The type of birth had a highly significant effect on the weight at 60 and 90 days and on the average daily gain from birth to 90 days old (p<0.001). The parity of ewes influenced slightly the weight at 60 days (p lower than 0.05) and more, the weight at 90 days and the average daily gain from birth to 90 days old (p lower than 0.01). More the litter size increased, more the individual weight decreased. From 60 days, the weight differences were expressed clearly. Like the litter size, the parity of ewes influenced the weight only from 60 days. Keywords: Maternal aptitudes, ewe, Djallonke, Benin. naissance au sevrage. Chez les moutons Peuhl, un taux élevé de mortalité néonatale (50,24 %) a été enregistré, contre 49,76 % pour les moutons Massa [7]. La plupart de ces mortalités sont dues à la vulnérabilité de l’agneau à la mise bas, à l’insuffisance du lait maternel ou au refus de la brebis d’allaiter son petit [13]. L’amélioration des aptitudes maternelles nécessite peu de moyens financiers et permet d’avoir de meilleures productivités numérique et pondérale au sevrage et, par conséquent, d’augmenter le nombre d’ovins destinés à la boucherie ou à d’autres usages [16, 17]. Au Bénin, dans le cadre du développement de la filière viande, l’élevage des petits ruminants occupe une place de choix [10]. La taille du cheptel national est de 2 110 000 têtes contre 1 762 600 têtes de bovins [6]. Malgré ces effectifs, un déficit important en petits ruminants subsiste, obligeant la population béninoise à recourir aux 539 YOUSSAO (A. K. I.) ET COLLABORATEURS ovins et caprins en provenance des pays limitrophes (Niger et Burkina-Faso), surtout à l’approche des fêtes religieuses. L’accroissement de la production ovine est donc indispensable pour réduire ce déficit. La race Djallonké, dont les potentialités sont reconnues en Afrique tropicale [11, 18, 19, 20] peut contribuer à l’amélioration de la production ovine au Bénin. L’objectif de cette étude est d’évaluer les performances de reproduction et de croissance de la naissance au sevrage, d’estimer la viabilité des agneaux et de proposer des pistes d’amélioration de la productivité numérique et pondérale des ovins Djallonké. Materiels et Méthodes DESCRIPTION DU MILIEU Les travaux ont été effectués dans la Commune de Banikoara située administrativement dans le Département de l’Alibori au nord-est du Bénin. La zone d’étude occupe le nord-ouest du Département de l’Alibori, entre 10°50’ de latitude nord et 2°00’ à 2°55’ de longitude est. Banikoara couvre une superficie totale de 4383 km2. Le climat est de type soudanosahélien marqué par une saison sèche de novembre à avril et une saison pluvieuse de mai à octobre. La pluviométrie moyenne est de 850 mm par an. De décembre à février ; souffle dans cette zone un vent sec et froid : l’harmattan. La végétation de Banikoara est constituée de savane boisée, arbustive et herbacée [1]. MODE D’ÉLEVAGE Les ovins sont élevés selon un mode extensif. Laissés en divagation pendant toute la saison sèche, ils sont mis à l’attache pendant la saison pluvieuse, chez les agriculteurs. Chez les peuhls, les animaux sont au pâturage en même temps que les troupeaux de bovins. Le pâturage naturel est abondant en saison pluvieuse et se compose de graminées et de légumineuses. L’habitat est constitué chez certains éleveurs d’une bergerie traditionnelle ou un enclos qui abrite les animaux la nuit. Aucune gestion de la reproduction n’est mise en œuvre. Lorsque la taille du troupeau est élevée, l’accouplement se fait avec le bélier le plus âgé. Dans la plupart des cas, la saillie se fait à l’insu des éleveurs. En ce qui concerne le suivi sanitaire, aucun soin vétérinaire n’est apporté aux animaux. Les troupeaux visités ont des effectifs très variables. Leur taille moyenne est de 42±25 têtes et les brebis représentent presque la moitié du troupeau (19,4±14,3). L’effectif moyen des animaux par classe d’âge est donné au tableau I. Catégorie d'animaux Brebis Brebis vide Brebis gestante Brebis allaitante Bélier Antenais Agneaux Total Effectif moyen 19,39 3,89 7,74 4,92 0,68 11,32 10,74 42,13 Ecart-type 14,34 3,11 9,00 4,10 0,84 7,11 5,52 24,99 TABLEAU I : Effectif moyen des animaux des troupeaux visités. CHOIX DES ÉLEVEURS ET SUIVI DES ANIMAUX L’étude a été réalisée pendant 14 semaines dans 5 villages de l’arrondissement de Founougo. Les éleveurs ont été choisis en tenant compte des critères suivants : le nombre de brebis en fin de gestation, la conduite des animaux (mode d’élevage), la disponibilité et l’expérience de l’éleveur. Au total, le suivi des animaux a été réalisé auprès de 12 éleveurs dont 4 professionnels, 7 agriculteurs et un commerçant. Les éleveurs sont tous de sexe masculin. Les portées de 37 brebis de race Djallonké ont été suivies pour l’étude des aptitudes maternelles. Les performances de reproduction ont été d’abord enregistrées par brebis. Un suivi régulier des agneaux a été réalisé dès le premier jour de la naissance jusqu’à l’âge de 3 mois. Les agneaux ont été ainsi pesés à la naissance et à 15, 30, 60, et 90 jours d’âge. Les pesées ont eu lieu le matin entre 7 et 9 h. La veille des pesées, les animaux étaient gardés dans un enclos. COLLECTE DES DONNÉES Pour la réalisation de cette étude, 37 brebis ayant agnelé et 55 agneaux, de race Djallonké, ont été enregistrés. Une fiche d’enquête a permis de recueillir les informations sur l’identification de l’éleveur, la taille et la structure du troupeau, le statut du propriétaire, la conduite des animaux, l’exploitation des animaux, les contraintes liées à cet élevage. Les données individuelles récoltées sur les femelles et les agneaux étaient : l’identification de la brebis, la date de naissance, l’âge à la première mise bas, la date de la mise-bas, le rang de mise-bas, la taille de la portée à la naissance, le nombre de mort-nés à la naissance, la mortalité de la naissance au sevrage, le poids à la naissance des agneaux, l’évolution du poids de la naissance au sevrage, la généalogie. Deux balances mécaniques de capacités maximales respectives 5 et 20 kg et de précisions respectives 50 et 200 g ont été utilisées pour les pesées des agneaux pendant la collecte des données. ANALYSES STATISTIQUES Après le dépouillement et l’encodage, les données ont été analysées avec le logiciel SAS (Statistical Analysis System, 1989). Les fréquences ont été calculées par la procédure Proc freq. Les comparaisons entre les fréquences relatives ont été réalisées par le test bilatéral de Z. Pour chaque fréquence relative, un intervalle de confiance (IC) à 95 % a été calculé suivant la formule ci-dessous : P est la fréquence relative et N la taille de l’échantillon. La moyenne à âge type et le nombre d’agneaux par portée ont été calculés pour l’ensemble des agneaux par la procédure Proc means. Un modèle linéaire a été ensuite ajusté aux données de poids et de gain de poids et comprend les effets fixes de rang de mise-bas (4 classes : 1 et 2 ; 3, 4 et 5 ; 6, 7 et 8) et du mode de naissance (simple, double, triple et quadruple). Revue Méd. Vét., 2008, 159, 11, 538-544 APTITUDES MATERNELLES DE LA BREBIS DJALLONKÉ 540 La procédure Proc GLM a été utilisée pour l’analyse de variance. Les moyennes ont été estimées et comparées par le test de t. La corrélation entre la taille de la portée et le rang de mise bas a été calculée par la procédure Proc Corr. Une équation de régression a été générée à partir de la courbe réalisée sur tableur Excel. Sur 37 mises-bas enregistrées au cours de l’enquête, la moyenne des agneaux par portée a été de 1,49±0,8 avec un minimum de 1 et un maximum de 4. Cette moyenne a varié fortement en fonction des rangs de mise-bas (P<0,001). Les brebis qui étaient à leurs premier et deuxième rangs de misebas ont donné un agneau par portée. Plus le rang de mise-bas augmentait, mieux le nombre d’agneaux par portée était important. Les brebis de rangs de mise-bas 3, 4 et 5 ont donné en moyenne 1,46 agneaux par portée alors que celles de plus de 6 rangs de mise-bas ont en moyenne 2,5 agneaux par portée. Le tableau III présente le nombre moyen d’agneaux par mise-bas en fonction du rang de mise-bas. Résultats et discussion DISTRIBUTION DES NAISSANCES EN FONCTION DU MODE DE NAISSANCE Au cours de l’enquête, des naissances simples, doubles, triples et quadruples ont été enregistrées. Sur les 37 brebis ayant mis bas au cours de la période, 67,6 % ont donné une portée d’un seul agneau. Ce taux a été plus élevé (P<0,05) que celui obtenu pour les naissances doubles (18,9 %). Les portées de 3 et 4 agneaux représentent respectivement 10,8 et 2,7 % du total. De même, sur 55 agneaux, 45,4 % provenaient d’une naissance simple tandis que 25,4 et 21,8 % des agneaux étaient issus respectivement des portées doubles et triples. Les agneaux provenant d’une portée de 4 agneaux étaient rares (7,3 %). Les fréquences de naissances doubles et triples de la présente étude étaient relativement plus élevés que celles observées chez le mouton Peul - Peul à Kolda au Sénégal où 96,2 % des naissances étaient simples et 3,8 % doubles [7]. Le tableau II présente la distribution des naissances en fonction du mode de naissance chez les brebis et chez les agneaux. LA PROLIFICITÉ La prolificité est un élément essentiel de la productivité pondérale des agneaux de la portée par brebis au sevrage. Source de variation Brebis (N=37) Agneaux (N=55) Mode Simple Double Triple Quadruple Simple Double Triple Quadruple Au Sud du Bénin, la prolificité est de 1,28±0,45 chez la brebis Djallonké à la Ferme de la Faculté des Sciences Agronomiques, où les animaux sont élevés dans des conditions d’élevage beaucoup plus améliorées que dans les élevages traditionnels [8]. Cependant, cette prolificité n’est pas meilleure à celle obtenue dans la présente étude malgré le mode d’élevage traditionnel. Dans les élevages traditionnels du plateau de Kolda au Sénégal, CLÉMENT et al. [7] rapportent que la taille moyenne de la portée passe de 1,27 à 1,33 du 1er au 8e agnelage chez les moutons Peul-Peul à gros format. Dans le cas de notre étude, les brebis de rangs de mise-bas 3, 4 et 5 ont donné en moyenne 1,46 agneaux par portée alors que celles de plus de 6 rangs de mise bas avaient en moyenne 2,5 agneaux par portée. De nombreux résultats allant dans ce sens ont été rapportés : le taux d’ovulation et la prolificité augmentent avec l’âge des femelles [9]. Cette observation pourrait être liée à la croissance des femelles puisque les premières naissances se produisent avant que celles-ci n’aient atteint leur poids adulte et selon WILSON [20], la fertilité augmente avec le poids des femelles. Des prolificités variant de 1,12 à 1,95 ont été rapportées par de nombreux auteurs [5, 8]. La prolificité est également influencée Fréquence Absolue 25 7 4 1 25 14 12 4 Fréquence relative (%) 67,57a 18,92b 10,81bc 2,70c 45,45a 25,45b 21,82b 7,27c Intervalle de confiance (%) 15,08 12,62 10,01 5,23 13,16 11,51 11,51 6,86 Les fréquences relatives de la même colonne non suivies d’au moins une lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%. TABLEAU II : Distribution des naissances en fonction du mode de naissance. Rangs Rangs 1 et 2 Rangs 3, 4 et 5 Rangs 6, 7 et 9 Effectif 16 13 8 Moyenne 1,00a 1,46b 2,50c Les moyennes de la même colonne non suivies d’au moins une lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%. TABLEAU III : Nombre moyen d’agneaux par mise bas en fonction du rang de mise bas. Revue Méd. Vét., 2008, 159, 11, 538-544 Erreur standard 0,14 0,16 0,20 541 YOUSSAO (A. K. I.) ET COLLABORATEURS par de nombreux facteurs dont la saison [2] et l’année de mise-bas et selon CLÉMENT et al. [5], la taille de portée est plus élevée lorsque la mise-bas a lieu en saison sèche au Sénégal. Par ailleurs, le mode de naissance et le rang de mise-bas sont fortement liés. La corrélation entre ces deux effets a été hautement significative (P<0,001) et positive (r=0,75). Plus le rang de mise-bas augmente, plus la brebis a la chance d’avoir une portée multiple. La figure 2 présente un diagramme en nuage de points suivi d’une droite et d’une équation de régression du nombre d’agneaux par portée en fonction du rang de mise-bas. MORTALITÉ PÉRINATALE DES AGNEAUX Sur 55 agneaux nés vivants, 17,9 % de mortalités ont été enregistrés dans les 5 premiers jours qui ont suivi la mise-bas. Ce taux était fortement influencé par la taille de la portée. Aucune perte d’agneaux n’a été enregistrée dans les portées simples. En revanche, pour la portée de 4 agneaux, il a été enregistré 50 % de mortalité pendant les 5 premiers jours. Toutefois, aucune différence significative n’a été enregistrée entre les taux de mortalité des agneaux issus des portées doubles, triples et quadruples (P>0,05). La mortalité des agneaux est le principal facteur de la baisse de productivité chez la brebis. Elle varie selon les auteurs de 20 à 48 % [8], de la naissance au sevrage. La distribution de la mortalité périnatale des agneaux en fonction du mode de naissance est donnée au tableau IV. les moutons Peulh, un taux élevé de mortalité néonatale (50,24%) a été enregistré, contre 49,76% pour les moutons Massa [7]. L’alimentation des brebis allaitantes doit être améliorée pour augmenter la production laitière des brebis et par conséquent la survie des agneaux [3]. Banikoara étant la première Commune productrice de coton au Bénin, la graine de coton peut constituer la base d’une complémentation alimentaire. C’est un aliment relativement bien pourvu en matière azotée (15 à 25%), en matière grasse (10 à 23%) et en cellulose (25 à 30%) dont une bonne proportion est parfaitement digestible ; la teneur en matière grasse influence fortement la valeur énergétique qui peut atteindre 1,25 UF/kg de MS. EVOLUTION PONDÉRALE DES AGNEAUX DE LA NAISSANCE AU SEVRAGE Si aucune perte d’agneaux n’a été enregistrée dans les portées simples, cela pouvait être dû à la disponibilité totale du lait de la mère à l’agneau. Dans le cas des portées multiples, la totalité du lait doit être partagée par toute la portée. Chez A la naissance, les agneaux de race Djallonké avaient un poids moyen de 1,88±0,32 kg. A L’âge d’un mois, le poids de l’agneau avait plus que doublé (5,32±0,96 kg). Au 2e et au 3e mois, les poids de l’agneau Djallonké étaient respectivement de 7,74±1,42 et 10,56±1,88 kg. La figure 1 présente la courbe de croissance des agneaux Djallonké de la naissance au sevrage. Selon GBANGBOCHÉ [8], le poids à la naissance de l’agneau Djallonké varie de 1,77 à 1,89 kg et de 6,61 à 7,13 kg à 90 jours à la Ferme de l’Okpara, localiséé dans la Commune de Kika, à 15 km de ville de Parakou, au Nord du Bénin. Les performances pondérales des agneaux Djallonké à la Ferme de l’Okpara sont relativement faibles par rapport à celles obtenues à Banikoara sur la même race. Cette différence pourrait être due à la sélection naturelle ; au fur et à mesure que l’on passe du Sud au Nord, le poids des animaux, de même race, au même âge, augmente. FIGURE 1 : Courbe de croissance des agneaux Djallonké de la naissance au sevrage. FIGURE 2 : Evolution du nombre d’agneaux par portée en fonction du rang de mise bas. Source de variation Total Simple Double Triple Quadruple Effectif 55 25 14 12 4 Fréquence Absolue 10 0 5 3 2 Fréquence relative (%) 17,86 0,00a 35,71b 25,00b 50,00b Intervalle de confiance (%) 10,03 0,00 25,10 24,50 49,00 Les fréquences relatives de la même colonne non suivies d’au moins une lettre commune, diffèrent significativement au seuil de 5%. TABLEAU IV : Distribution de la mortalité périnatale des agneaux. Revue Méd. Vét., 2008, 159, 11, 538-544 APTITUDES MATERNELLES DE LA BREBIS DJALLONKÉ 542 FACTEURS DE VARIATION DES PERFORMANCES PONDÉRALES DE L’AGNEAU DJALLONKÉ que les autres (P<0,05). Les mêmes tendances ont été obtenues pour le poids à 90 jours et le gain moyen quotidien de la naissance à 90 jours. Les résultats de cette étude confirment ceux de GBANGBOCHÉ et al. [8] qui ont montré que les portées simples ont un poids à âge type et un gain moyen quotidien plus élevé que les portées doubles dans la même race. Toutefois, le poids de la portée au sevrage est toujours plus élevé. Le tableau VI présente le détail sur le poids et la croissance des agneaux Djallonké en fonction du mode de naissance. L’analyse de variance du poids et du gain moyen quotidien a montré un effet hautement significatif du mode de naissance sur les poids à 60 et à 90 jours et sur le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours (P<0,001). Le rang de mise bas influençait peu le poids à 60 jours (P<0,05), mais davantage le poids à 90 jours et le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours (P<0,01). Pour le poids à la naissance, à 15 et à 30 jours, le mode de naissance et le rang de mise bas n’étaient pas significatifs. Le tableau V présente les résultats de l’analyse de variance du poids et du gain moyen quotidien des agneaux en fonction du mode de naissance et du rang de mise-bas. Effet du rang de mise-bas Tout comme la taille de la portée, le rang de mise-bas n’influençait le poids qu’à partir de 60 jours. Les agneaux issus des rangs 1 et 2 avaient un poids significativement plus faible (P<0,05) que ceux issus des rangs de mise-bas 3, 4 et 5 à 60 et à 90 jours. Toutefois, aucune différence significative n’a été observée entre les poids des agneaux des rangs de misebas 3, 4 et 5 et ceux des agneaux des rangs de mise-bas 6, 7 et 9. Les mêmes différences ont été obtenues pour le gain moyen quotidien. Le tableau VI présente le détail sur le poids et la croissance des agneaux Djallonké en fonction du rang de mise-bas. Les mêmes différences ont été obtenues pour le gain moyen quotidien. Selon GBANGBOCHÉ et al. [8], le rang de mise-bas n’a pas d’influence sur le poids à la naissance et la différence n’apparaît que de 30 à 60 jours. Cependant, il n’a observé aucune différence pour les poids à 90 et à 120 jours. Effet de la taille de la portée Malgré l’absence d’effet significatif du mode de naissance sur le poids à la naissance, le poids à 15 et à 30 jours, il est indispensable de rapporter que le poids des agneaux était inversement proportionnel au mode de naissance. Plus élevée était la taille de la portée, plus faible était le poids individuel. A partir de 60 jours, les différences pondérales s’exprimaient clairement. Ainsi, le poids moyen des agneaux issus d’une portée simple était de 8,7 kg. Ce poids était significativement plus élevé que ceux obtenus chez des agneaux des portées doubles et triples (P<0,05). Le poids des agneaux issus d’une portée de 4 agneaux (4,9 kg) était significativement plus faible Source DDL de variation Mode de naissance 3 Rang de mise-bas 2 R² du modèle - P0 SCE Test 0,55 NS 0,28 NS 0,27 P15 SCE Test 1,59 NS 3,79 NS 0,19 P30 SCE Test 2,54 NS 1,73 NS 0,17 P60 SCE Test 24,87 *** 8,83 * 0,50 P90 SCE Test 51,23 *** 22,39 ** 0,59 GMQ SCE Test 53,85 *** 22,90 .. 0,59 Pi : poids à i jours ; NS : non significatif ; * P<0,05 ; ** P<0,01 ; *** P<0,001 ; SCE : somme des carrés des écarts ; DDL : degré de liberté. TABLEAU V : Analyse de variance du poids et du gain moyen quotidien des agneaux en fonction du mode de naissance et du rang de mise-bas. Source Effectif de variation Mode de Simple 23 Naissance Double 9 Rang de mise-bas Triple 8 Quadruple 2 Rangs 1 et 2 14 Rangs 3, 4 et 5 Rangs 6, 7 et 9 P0 (kg) Moyenne ES 2,01a 0,08 1,85a 0,11 1,65a 1,44a 16 1,62a 1,84a 12 1,74a P15 (kg) Moyenne ES 3,59a 0,21 3,14a 0,28 0,12 2,95a 0,23 0,14 2,74a 2,63a 0,10 3,47a 0,09 3,23a P30 (kg) Moyenne ES 5,54a 0,25 5,12a 0,34 P60 (kg) Moyenne 8,69a ES 0,29 6,91b 6,49b 0,39 0,84 0,45 4,93c 5,99a 0,32 7,28b 0,29 6,99ab 0,32 4,98a 0,39 0,59 0,73 0,36 4,20a 4,75a 0,27 5,25a 0,24 4,88a 0,46 P90 (kg) Moyenne ES 12,12a 0,40 9,14b 0,48 8,72bc 5,98c 0,58 1,05 0,68 0,38 7,56a 9,68b 0,34 9,77b 0,45 0,52 0,47 GMQ Moyenne 112,26a 81,55b 77,69b 0,4 0,57 50,59c 65,62a 1,04 87,08b 8,87b 0,47 Pi : poids à i jours ; ES : erreur standard ; GMQ : gain moyen quotidien. Les moyennes de la même colonne non suivies d’au moins une lettre commune en exposant, diffèrent significativement au seuil de 5%. TABLEAU VI : Effet du mode de naissance et du rang de mise bas sur le poids et le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours. Revue Méd. Vét., 2008, 159, 11, 538-544 ES 0,40 0,67 0,44 543 CONSANGUINITÉ Sur 55 agneaux nés, les éleveurs ont déclaré que le père et la mère de 72 % de ces agneaux n’avaient aucun parent direct en commun. Pour le reste des agneaux (28 %), les éleveurs n’avaient aucune idée. De même, ces éleveurs ont indiqués que le père et la mère de 17,5 % de ces agneaux n’étaient pas eux-même issus de parents communs. Peu d’informations étaient connues sur le pedigree des agneaux. L’âge moyen des béliers était de 3,69±1,44 ans. Ces géniteurs étaient pour la plupart (90 %) nés dans le troupeau. Il est donc fort probable qu’ils s’accouplaient avec leurs sœurs ou leurs filles, ce qui augmentait le niveau de consanguinité de la progéniture. Aucun programme de gestion de reproduction n’était appliqué et les accouplements se faisaient à l’insu des éleveurs au cours de la divagation. Selon CLÉMENT et al. [5], en élevage traditionnel, l’importance de la consanguinité est difficile à évaluer en l’absence des informations sur les parentés. L’effectif des mâles est souvent faible puisque la majorité est vendue avant l’âge de deux ans, et les mâles sont souvent originaires du troupeau dans lequel ils se trouvent. Cela ne permet pas d’exclure la possibilité de croisements consanguins ; ce qui pourrait diminuer l’héritabilité des caractères. Une méthode de gestion des accouplements doit être envisagée pour réduire les différents effets de la consanguinité sur les performances de reproduction et sur la viabilité des animaux. Conclusion YOUSSAO (A. K. I.) ET COLLABORATEURS - mettre les jeunes femelles en reproduction lorsqu’elles atteignent le poids requis car la fertilité augmente avec le poids des femelles ; - empêcher la saillie précoce des jeunes agnelles, une saillie précoce nuit au développement corporel de la brebis et à la qualité de ses produits; - porter une attention particulière aux portées multiples, car le taux de mortalité est influencé par la taille de la portée ; - avoir une meilleure conduite des animaux afin de limiter leur divagation des animaux qui entraîne de nombreuses pertes et conflits ; - mettre en place d’un programme de prophylaxie et de suivi sanitaire. Bibliographie 1. - ADAM K.S., BOKO M. : Le Bénin, 95 pages, Editions du flamboyant/EDICEF, Vanves, 1993. 2. - ADELEYE I. O.A. : Seasonal effects on lamb production under tropical conditions. Niger J. Anim. Prod, 1984, 11, 168-174. 3. - ADU I. F. OLALOKU E. A., OYENUGA V.A. : The effects of energy intake during late pregnancy on lamb birth weights and lactation of Nigeria Dwarf sheep. Niger. J. Anim. Prod, 1974, 1, 151-161. 4. - AMEGE Y. : Le mouton de vogan (croisé Djallonké x Sahélien) au Togo : I. production lactée et ses relations avec la croissance des agneaux. Revue Elev. Méd. Vét. Pays Trop, 1984, 37, 82-90. 5. - CLEMENT V., POIVEY J. P., FAUGERE O. TILLARD E., LANCELOT R., GUEYE A, RICHARD D., BIBE B. : Etude de la variabilité des caractères de reproduction chez les petits ruminants en milieu traditionnel au Sénégal. Revue Méd. Vét. Pays trop, 1997, 50, 235-249. L’étude des aptitudes maternelles de la brebis Djallonké en élevage traditionnel a permis d’observer que le mode de naissance avait un effet hautement significatif sur le poids à 60 et à 90 jours et sur le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours. Le rang de mise bas influençait peu le poids à 60 jours, mais davantage le poids à 90 jours et le gain moyen quotidien de la naissance à l’âge de 90 jours. Pour les poids à la naissance, à 15 et à 30 jours, le mode de naissance et le rang de mise-bas n’étaient pas significatifs. 6. - DIRECTION DE L’ELEVAGE : Rapport annuel, 62 pages, Cotonou, Bénin, 2005. La prolificité variait fortement en fonction des rangs de mise-bas, plus le rang de mise bas augmente, plus le nombre d’agneaux par portée augmente. Les brebis de rangs de misebas 3, 4 et 5 ont donné en moyenne 1,46 agneaux par portée alors que celles de plus de 6 rangs de mise-bas ont en moyenne 2,5 agneaux par portée. Cette observation pourrait être liée à la croissance des femelles puisque les premières naissances se produisent avant que celles-ci n’aient atteint leur poids adulte et la fertilité augmente avec le poids des femelles. Le taux de mortalité est influencé par la taille de la portée. 9. - LAJOUS D. : Mesure du taux d’ovulation et de la mortalité embryonnaire chez la brebis Romaov, 71 pages, Thèse de doctorat, Institut National Polytechnique, Toulouse, France, 1987. La distribution de la mortalité périnatale des agneaux était fonction du mode de naissance et ce taux était fortement influencé par la taille de la portée. Par ailleurs aucun programme de gestion de reproduction n’est appliqué et les accouplements se font à l’insu des éleveurs ; ce qui augmenterait le taux de consanguinité dans les troupeaux. Pour une meilleure productivité numérique et pondérale des ovins, il conviendrait de : - améliorer l’alimentation et le suivi sanitaire des brebis de portées multiples et des leurs agneaux ; 7. - EBANGI A.L., NWAKALOR L.N., MBAH D.A., ABBA D. : Factors affecting the birth weight and neonatal mortality of Massa and Fulbe sheep breeds in a hot and dry environment, Cameroon. Revue Méd. Vét. Pays Trop, 1996, 47, 223-234. 8. - GBANGBOCHE A. B., HORNICH J.-L. ADAMOU-N’DIAYE M., EDORH A.P., FANIR F. ABIOLA F. A., LEROY P.L., 2005 : Caractérisation et maîtrise des paramètres de la reproduction et de la croissance des ovins Djallonké (Ovis amon aries). Ann. Méd. Vét, 149, 170-182. 10. - LOKOSSOU H.R. : Etude sur les caractéristiques techniques et économiques de l’élevage des petits ruminants dans le Borgou (Bénin), 77 pages, Thèse présentée pour l’obtention du grade de Master of Sciences en Production Animale Tropicale, 1994. 11. - LONDON J.C., WENIGER J.H. : Investigation into traditionnaly managed Djallonké-sheep production in humid and subhumid zones of Asante, Ghana. V. Productivity indices. J. Anim. Breed. Genet, 1996, 113, 483-492. 12. - MOULIN C. H., FAUGERE O., FAUGERE B. : L’élevage traditionnel des petits ruminants au Sénégal. III Pratique de conduite et d’exploitation des animaux chez les éleveurs de la communauté rurale de Kaymor (Siné-Saloum, Sénégal). Revue Méd. Vét. Pays Trop, 1994, 47, 223-234. 13. - N’GERE L.O. : Size and growth rate of the west African dwarf sheep and new breed, the Nungua black head of Ghana. Ghana J. Agric. Sci., 1973, 6, 113-117. 14. - NIANOGO A.J. : Paramètres de production des ovins Mossi de Gampèla. In : Lebbi S.H.B., Reynolds L.(eds), African Small Ruminant Research network. International Livestock Centre for Africa (ILRA), Addis-Abeba, 346-421, 1992 15. - PAGOT J. : l’élevage en pays tropicaux, 526 pages, Editions Maisonneuve et Larose, Paris, 1985. Revue Méd. Vét., 2008, 159, 11, 538-544 APTITUDES MATERNELLES DE LA BREBIS DJALLONKÉ 544 16. - POIVEY J.P., LANDAIS E., BERGER Y. : Etude et amélioration génétique de la croissance des Djallonké. Résultats obtenus au Centre de Recherches Zootechniques de Bouaké (Côte-d’Ivoire). Revue Elev. Méd. Vét. Pays Trop, 1982, 35, 421-433. 19. - WILSON R.T. : Production of traditionnel managed small ruminants in an agro-pastoral system in Nothern Burkina-Faso. Trop. 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