Cancer du sein et escrime : un mode de prise en charge original
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Cancer du sein et escrime : un mode de prise en charge original
Exemples d’actions régionales identifiées par les services déconcentrés du Ministère des Sports Docteur Dominique HORNUS-DRAGNE Médecin fédéral régional Midi-Pyrénées de la Fédération Française d’Escrime Cancer du sein et escrime : un mode de prise en charge original L’expérience que je vais vous présenter a été initiée par un chirurgien et son anesthésiste, escrimeuse. Après avoir regroupé autour d’eux des maîtres d’armes, un kinésithérapeute des oncologues et des médecins du sport, ils ont tenté de mettre au point des exercices qui permettent à leurs patientes de retrouver une meilleure mobilité de leur bras et une posture plus naturelle. Ces professionnels ont trouvé de nombreux avantages à la pratique de l’escrime. En effet, ce sport : • se pratique habillé, ce qui est capital pour des femmes qui ont été mutilées ; Laura Flessel • est ludique; C’est le buste qui permet la transmission de l’impulsion des jambes au bras • • est un sport de combat, où l’on ne se bat pas contre soi-même mais contre quelqu’un d’autre, pour gagner ; est unilatéral ; ainsi, les patientes se sont toutes entraînées du côté où elles ont été opérées, quelle que soit leur latéralité ; L’escrime, un sport unilatéral • • est un sport individuel, mais qui se pratique en équipe ; une seule patiente a préféré prendre des leçons individuelles ; oblige à adopter une position d’ouverture, ce qui est important pour des femmes qui prennent souvent, après leur opération, une posture de repli ; L’escrime, une position d’ouverture • qui permet une sortie hebdomadaire pour oublier la maladie, comme tous les autres sports. Les entraînements sont réalisés au sabre, parce que c’est une arme légère (moins de 500 grammes), qui permet des touches avec la pointe et le tranchant (plus facile qu’avec d’autres armes), mais aussi parce que les zones de touche se situent au-dessus de la ceinture et nécessitent donc des parades hautes qui mobilisent l’épaule. Pourquoi le choix du sabre ? Les clubs d’escrime locaux, la Fédération ainsi que la Ligue régionale nous ont largement aidés pour mener à bien cette expérience en nous fournissant des salles, des tenues propres et du matériel. La Direction régionale de la Jeunesse et des Sports a permis la gratuité des leçons. En général et sauf contre-indication du chirurgien, l’entraînement commence un mois après l’opération du sein. Il peut être mené pendant la chimiothérapie et la radiothérapie, parallèlement aux séances de kinésithérapie. Avant de commencer les séances, la patiente subit une visite d’inclusion (statut carcinologique, examen du bras, de l’aisselle et du sein) et un bilan de la mobilité de son épaule. L’entraînement est réalisé par des maîtres d’armes formés spécifiquement en interne. Les séances commencent par un travail des fondamentaux. Les patientes s’exercent par exemple à la marche à l’amble en gardant les muscles du haut du corps relâché, contrairement à ce qui est pratiqué dans l’entraînement traditionnel. Par ailleurs, les séances se déroulent sans touches, pour éviter tout danger. Chaque séance se compose de 20 minutes de travail collectif, suivi d’une leçon au plastron de 5 minutes et de 10 minutes de repos. Chaque patiente travaille ainsi à tour de rôle pendant que les autres discutent. Aucune touche n’est portée à la patiente Depuis février 2011, huit patientes ont suivi ce programme. Deux ont débuté l’entraînement pendant leur chimiothérapie ; même si elles éprouvaient de grandes difficultés à s’entraîner durant la semaine où elles subissent leur traitement, elles ont persévéré. Les deux patientes qui ont débuté leurs séances pendant leur radiothérapie n’ont pas éprouvé de difficultés particulières à suivre l’entraînement. Enfin, sur les quatre patientes qui ont commencé l’entraînement à distance des soins, une vient épisodiquement car elle a repris une activité professionnelle à temps plein. Avant que ces patientes ne commencent à s’entraîner, les praticiens qui avaient réalisé leurs visites d’inclusion avaient noté une diminution de la flexion et de l’extension du bras, une induction et une abduction normales, aucun déficit de force musculaire, des anomalies de cicatrices axillaires et mammaires (rétractions, indurations, adhérences superficielles et profondes). Nous avons d’ores et déjà des résultats à présenter pour deux des huit patientes qui ont suivi notre programme. L’une a commencé l’entraînement d’escrime pendant sa chimiothérapie, l’autre plusieurs mois après son traitement. Chez ces deux femmes, nous avons noté un gain de 20 degrés dans la flexion du bras et une disparition totale des adhérences superficielles. Ces premiers résultats sont encourageants. Non seulement aucun effet adverse n’a été constaté mais les patientes éprouvent du bonheur et un bien-être psychologique à venir s’entraîner. Un film de témoignages des patientes du programme d’escrime est diffusé.