Livre I du Contrat social de Rousseau

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Livre I du Contrat social de Rousseau
Lycée franco-mexicain
Cours Olivier Verdun
Questionnaire sur le livre I du Contrat social de Rousseau
Repères : « légal / légitime », « en fait / en droit », « origine / fondement »,
« obligation / contrainte ».
1. Quel est, à la lecture du préambule, l’objet du Contrat social, du livre I en
particulier ? Que se propose d’examiner Rousseau ?
La question posée par le Contrat social est la suivante : pour quelles raisons les
citoyens d’un Etat doivent-ils se soumettre aux lois ? Quels sont les fondements légitimes
de l’autorité politique ? Paru en 1762, le Contrat social est un traité de droit politique,
c’est-à-dire une théorie générale de l’Etat, un exposé méthodique des principes d’une
législation juste. Alors que le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité
parmi les hommes est essentiellement une critique de la corruption des sociétés établies,
le Contrat social propose les conditions d’une société juste. Le Contrat social décrit donc
une forme juridique rationnelle qui rend possible l’obéissance volontaire des citoyens à
l’Etat.
2. Le propos de Rousseau est-il celui d’un historien ou d’un politologue ? Pour
répondre à cette question, vous distinguerez « origine » et « fondement »,
« en fait / en droit » (repère)
Le Contrat social est un traité de droit politique, c’est-à-dire une théorie générale de
l'État, un exposé méthodique des principes d’une législation, d'une société justes. Il s’agit
d’aborder la question des fondements de l'État, non d’un point de vue descriptif ou
historique, mais d’un point de vue rationnel et philosophique. Plutôt que de décrire ce qui
est, Rousseau expose ce qui devrait être. Comment les institutions devraient-elles être ?
Rousseau entend ne s’intéresser qu’au droit et mettre de côté les faits.
L’origine désigne la condition de possibilité d’un phénomène, son principe d’être, sa
source ; l’origine désigne aussi la première apparition d’un phénomène, ce qui lui a
donné naissance. L’origine a donc soit un sens chronologique, soit un sens géographique
ou topographique (la provenance : un produit du terroir « d’origine contrôlée », par
exemple), soit un sens logique (l’origine d’un phénomène est sa cause). Le fondement
renvoie à la légitimité, c’est-à-dire au droit. Lorsqu’on se demande, par exemple, si sa
peur est fondée, on cherche moins à savoir quelle est son origine chronologique, d’où elle
vient, qu’à en connaître le motif, la raison. Ainsi parle-t-on d’une rumeur sans
fondement : la rumeur existe certes, elle n’est pas sans origine, mais on veut dire par là
qu’elle n’a pas de raison d’être, de source objective. Rousseau s’intéresse non pas à
l’origine historique de l’Etat, mais à son fondement, c’est-à-dire à sa légitimité.
Cette distinction du fondement et de l’origine recoupe celle du fait et du droit, du légal
et du légitime : l’origine concerne le fait dans sa dimension chronologique ; le fondement
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a trait à la légitimité d’un phénomène, au droit qui le fonde. Le légal se rapporte au fait,
tandis que le légitime a partie liée avec le droit. Le fait est la situation effective, la réalité
telle qu'elle est, ce qui a lieu effectivement ou ce qui a eu lieu. Le droit renvoie à la
sphère du juste, du légal ou du légitime. Ce qui est ne doit peut-être pas l'être, ce qui a été
fait n'est peut-être pas légal ou prévu par la loi ; ce qui doit être n’est, n’existe peut-être
pas encore. De même ce qui est légal n’est pas forcément légitime (exemple de la
violence, du racisme). Inversement, ce qui est légitime n’est pas toujours légal (il peut
être légitime d’aider quelqu’un qui souffre à mourir, mais ce n’est pas forcément légal
dans les pays où l’euthanasie est interdite).
3. De quoi traitent les quatre premiers chapitres du livre I ? Faites-en le plan.
Les chapitres 1 à 4 sont les plus polémiques en ce qu'ils s'efforcent de mettre au
jour les manières illégitimes de fonder la souveraineté. Il s'agit là du moment négatif du
premier livre. Qu'est-ce qui fait la légitimité d'un régime politique ? Quel régime est
capable de disposer els hommes à obéir spontanément ? L'objet politique n'est pas,
comme chez Hobbes, la sécurité, le bonheur ou le bien-être des citoyens, mais leur
liberté. C'est l'objet du chapitre 1.
Rousseau commence par considérer tous les fondements illégitimes de la souveraineté
tels qu'ils ont pu être allégués par la tradition philosophique. Il réfute la thèse de ceux qui
affirment que le pouvoir politique pourrait être une extension du pouvoir paternel,
familial. Le pouvoir politique n'est pas issus du pouvoir naturel (biologique,
généalogique, familial...). C'est l'objet du chapitre 2.
Dans le chapitre 3, Rousseau réfute l'idée que la force pourrait être au fondement de
l'autorité politique. L'expression « droit du plus fort » est une contradiction dans les
termes. La force ne fait pas droit. Du moment que les individus n'obéissent pas
volontairement et que l'autorité n'est pas l'expression de leur liberté, l'obligation politique
n'est pas légitime.
Dans le chapitre 4, Rousseau approfondi cette question du prétendu droit du plus fort
avec le problème de l'esclavage. Il s'interroge sur le principe d'une autorité fondée sur
l'aliénation, par le peuple, de sa liberté au profit d'un souverain. Rousseau réfute la
tradition qui pense le contrat social comme un pacte de soumission (possibilité pour un
individu de se défaire de sa liberté au profit d'un autre et de se donner complètement à
lui). Il dénonce le faux contrat de servitude théorisé par Hobbes et par tous ceux qui ont
élaboré un supposé droit de la guerre.
Les quatre premiers chapitres visent à établir que seul un engagement consenti peut
entrainer l'obéissance politique solide et légitime.
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4. Après avoir distingué « obligation » et « contrainte » (repère), dites dans quel
chapitre en particulier cette distinction est opérée (chapitres 1 à 4)
Dans le chapitre 3, Rousseau se demande si la force fait droit. Y a-t-il un droit du plus
fort ? Comment la force peut-elle faire droit puisqu'elle étrangère au droit ? Rousseau
montre que la force ne saurait à elle seule fonder l’autorité ; la supériorité physique ne
peut créer aucun pouvoir durable. La force est du côté de la contrainte, non de
l’obligation. Le secret de la force n'est paradoxalement pas la force, c'est l'apparence du
droit. La force a besoin du droit pour masquer sa faiblesse.
Repère «obligation / contrainte» : distinguer obligation et contrainte permet de ne pas
confondre toutes les limitations de la liberté individuelle et de distinguer celles que nous
subissons (par exemple, la menace d'une arme) et celles qui nous engagent (par exemple,
une dette à rembourser). L'obligation est un impératif moral ou juridique, comme le
devoir, le respect des lois ou celui des engagements que l'on a pris. L'obligation implique
des rapports avec autrui dans un cadre fixé par des règles. La contrainte est une nécessité,
un état de fait qui n'est ni légal ni moral. Pour me sentir obligé et non simplement
contraint, je dois voir un sens à l'impératif qui pèse sur moi.
Le droit suppose une soumission volontaire, une reconnaissance, un acte
d’assentiment de l’esprit. La force, si elle peut me contraindre, ne m’oblige pas : elle
n’implique pas que je me soumette à elle en esprit. Ma soumission est le fruit de ma
faiblesse ou de ma prudence. Mais ce constat n’entraîne pas une reconnaissance légitime.
La force contraint, la droit oblige. L’obligation est une obéissance volontaire et légitime ;
la soumission est le fait d’obéir à une puissance contre son gré ; l’autorité est le pouvoir
légitime d’imposer l’obéissance, de commander à autrui (il s’agit ici d’une obéissance
acceptée excluant la violence directe) ; l’obéissance est l’acte par lequel les individus se
plient volontairement à la loi ou à l’ordre légitime.
5. De quoi traitent les chapitres 5 à 9 ? Faites-en le plan
Rousseau, dans les chapitres 5 à 9, développe sa conception du fondement du pouvoir
politique légitime qui doit reposer sur le contrat social, c'est-à-dire sur le consentement
des individus. Les chapitres 1 à 4 ont été consacrés à réfuter les opinions contraires à la
justice, les principes illégitimes et erronés au nom desquels on a habituellement justifié
l'autorité politique. Le fondement de l’institution politique ne se trouve ni dans la nature
(II), ni dans la force (III), ni dans une convention comprise comme pacte de soumission
(IV). Ces fondements supposent que le peuple ne serait qu’une multitude passive, sans
volonté identifiable.
Le chapitre 5 est une transition : Rousseau introduit une distinction capitale entre
«soumettre une multitude» et «régir une société» : il faut distinguer le despote qui a en
face de lui une multitude et non un peuple et le souverain légitime qui est l'effet de la
réunion d'une multitude d'individus en un peuple.
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La problématique se précise dans le chapitre 5 : il s'agit de chercher «ce qui fait qu'un
peuple est un peuple» et non plus seulement de penser le fondement de l'autorité
politique. La question de la légitimité de l'autorité politique se déplace vers celle de la
nature de l'association qui unit le peuple.
La théorie du contrat est développée à partir du chapitre 6 qui est un chapitre-clé.
Rousseau expose le contexte qui pousse les individus à se rassembler en un peuple : le
seul contrat légitime consiste en une aliénation totale de leur personne; c'est un contrat
que chacun fait avec la volonté générale qui devient la volonté de chacun.
Le chapitre 7 énonce quel le type de rapport qui s'instaure entre le souverain et les
particuliers; il s'agit d'un rapport de soi à soi.
Le chapitre 8 établit ce que l'on gagne lorsque l'on passe de l'état de nature à l'état civil
: l'individu n'agit plus selon ses penchants, mais rationnellement selon les impératifs de la
vie collective; se produit une transformation intime des individus.
Enfin, le chapitre 9 évoque le versant complémentaire du contrat social, de l'union des
volontés : l'union des terrains et des propriétés, des forces et des biens. Les inégalités
sociales qui conduisant aux rivalités et à la domination de tous contre tous sont corrigées
par l'égalité morale résultant d'un accord volontaire des hommes grâce au contrat.
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