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ARTS & CULTURE
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LE MATIN • MARDI 26 AOÛT 2008
LIVRE
INTERVIEW
MOHAMED SAID RAIHANI,
écrivain et chercheur en littérature
«La nouvelle est le genre qui a été
le moins libéré»
Passionné de la nouvelle, M.Said
Raihani multiplie les actions
pour sa pro m otion.
PROPOS RECUEILLIS PAR KENZA ALAOUI
LE MATIN : Vous paraissez obsédé par la nouvelle. Quel
est le secret de cette passion et quelles en sont les
origines ?
MOHAMED SAID RAIHANI :
Mon premier amour, c’étaient
les arts plastiques. Mais comme
je n’ai pu accéder à l’école des
Beaux-Arts pour des ra i s o n s
familiales, je me suis ori e n té
à la littéra t u re, vers l’âge de 16
ans. J’ai d’abord tenté d’écri re
mon autobiographie en langue
française, par la suite j’ai commencé à écri te des pièces de
th é â t re en anglais, vu qu’ à
l’époque j’étais un passionné
du grand dra m a t u rge George
Bernard Show. Je me suis également essayé à la nouvelle
parce que j’étais fasciné par
E rn e st Hemingway. Toutefois,
quand j’ai te rminé mes études
u n i ve rs i ta i res et que j’ai intégré le corps de l’enseignement,
je suis passé de l’anglais comme
langue d’écriture à l’arabe. J’ai,
en revanche, gardé mon amour
pour la nouvelle qui remontre
à mon enfance.
En fait, quand j’étais petit, une
amie de ma mère nous rendait
visite tous les après-midi et
nous ra c o n tait des contes merveilleux. J’ai appris par la suite
qu’il s’agissait des «Mille et une
nuits». Cet te dame n’ e st autre
que «Satidat al Haki» dont la
photo est exposée au 1er ch apitre de mon «autobio-photographie» intitulée «Quand la
photo parle».
“
La photo est une lueur qui
permet à la vie de s’ouvrir sur des
moments de bonheur oubliés.”
C o n t ra i rement au roman, la
nouvelle reste le seul genre qui
a eu un parcours ininte rrompu
depuis sa naissance dans les
années 40. Ce qui lui a valu une
p roduction assez importante
sur le plan quantitatif. Quant à
la qualité, ce genre reste moins
libéré que les autres en l’occurrence la poésie. La nouvelle n’a
pas pu dépasser la fo rme re ctangulaire. Quant au fond, les
nouvellistes ont opté depuis
le début, d’écri re à la troisième
p e rsonne. Ce qui a eu pour
conséquence de l’éloigner du
«Soi». Les principales caractéri stiques de cet «éloignement»
dans la nouvelle sont une crise
de liberté, de rêve et d’amour.
C’est ce que j’ai appelé les
« Trois clefs». Ces éléments
sont les moins représentés dans
les récits.
choisi la vie. Au j o u rd’hui, j’ai
39 ans et j’ai à mon effe c t i f
39 œuvres dont seulement 6
ont été publiées entre 2001 et
2008, tandis que «Ainsi parlait Santa Lu ga r-Ve rde», le
recueil de nouvelles qui a eu le
p rix de Naji Nouaman en 2005
au Liban ainsi que «Dialogue
de deux gé n é rations», une
œuvre coécri te avec l’écri v a i n
I d riss Sghir, attendent toujours
d’être éditées.
Quel regard jetez-vous sur la nouvelle au Maroc
et quelle évaluation en faites-vous ?
Les expériences littéraires
s’amplifient grâce au cumul des
œuvres au fil des années. Au
Maroc, les genres les plus stables et les plus soutenus en
matière de production sont le
roman d’ex p ression française
et la nouvelle en langue arabe,
en plus de la poésie en dialectal et du théâtre.
Prendre conscience de l’existence d’une crise est le premier
pas ve rs le salut. Mais brosser
un tableau positif de l’écriture
de la nouvelle de demain reste
le meilleur moyen pour maîtriser la situation et contrôler son
d evenir. Pour ce, nous avo n s
insisté sur l’importance de théoriser la nouvelle marocaine
de demain, de manière à ce
qu’elle puisse intégrer les trois
éléments que nous avons cités
et en faire des principes et
des objectifs.
Pour soutenir ce choix, j’ai traduit et publié sur Inte rn et des
œuvres qui servent cette vision.
Dans une pro chaine étape, je
vais procéder à la sélection des
prédécesseurs de la nouvelle de
demain et proposer des lectu-
res dans les «clefs» des pionniers marocains de la nouvelle.
Je vais également sélectionner
les porte - flambeaux de ce genre
en lançant le prix de la nouvelle. Néanmoins, il ne faut pas
que les choses se limitent à des
initiatives individuelles.
L’Etat doit assumer sa respons a b i l i té et contribuer à cet te
action en programmant les trois
œuvres en qu e stion au programme scolaire dans les lycées
et les collèges et en les mettant
à la disposition des élèves et
des étudiants dans les biblioth è ques, sachant que j’ai
financé moi-même la publication de ces œuvres en l’absence
de tout soutien maté riel.
Les médias ont également un
rôle à jouer.
De quoi la nouvelle a-t-elle besoin le plus au Maroc
pour se faire une place de choix dans le paysage
littéraire et culturel dans not re pays et ailleurs ?
“Les trois clefs” re n ferment
une philosophie de l’écri t u re
romanesque. Elles tirent leur
fo rce de la nécessité de pre nd re conscience de la liberté
d ’ ex p ression, de l’amour
de l’œuvre écri te et du fait de
rêver de to u cher le vé ritable
lecteur.
C ’ e st une vo l o n té de ré c o ncilier le tex te avec sa fonction
et sa nature libre. Quand la
liberté en const i t u e ra la toile
de fond, que l’amour en sera la
matièreet le rêve une forme de
récit, la nouvelle aura fait un
grand pas pour se libérer de ses
jougs.
Par ailleurs quand le créateur
p rend conscience que l’immun i té n’ e st pas le seul apanage
des parl e m e n ta i res et des
politiciens et qu’il y a droit, il
pourra écri re des textes libres
où il pourra rêver et aimer
j u s qu’à la lie.
Vous avez écrit un livre autobiographique assez
particulier. En fait, vous avez inventé un genre que
vous avez baptisé «autobio-photographie». Parleznous un peu de ce genre hybride qui relie la lettre
à la photo ?
Mohamed Said Raihani.
La photo est une lueur qui
permet à la vie de s’o u v rir sur
des moments de bonheur
oubliés qui nous entourent et
ne demandent qu’à être vus
grâce à un petit ge ste. Elle
e st, d’un côté, l’opposé de
l ’oubli et de l’autre synonyme
de vérité. Dans les deux cas elle
re ste l’alliée du livre. Cet te
alliance date de longte mp s
grâce aux livres illust rés de
photos et autres moyens dédiés
aux enfants et aux débuta n t s
dans des domaines particuliers
(cuisine, biologie, ast ro n omie…). Cette liaison a été re nfo rcée par le livre en ligne.
Tombée de rideau sur le Moussem
ture de cette manifestation a été
également marquée par une
c é rémonie de remise des pri x
à différentes catégories de Zaïl a chis en l'occurrence la mère
modèle de l'année, la femme
ouvrière, l'artisan, le pêcheur et
le sportif de l'année ainsi qu'un
prix de l'environnement et de la
personnalité de l'année.
Il a été également procédé à la
remise des prix "Ibrahim Mohamed Al Aouiss" d'excellence scolaire et du prix offert par l'ancien
L
ministre égyptien des Aff a i re s
étrangères, Ahmed Maher. A
l'occasion de cette 30e édition,
il a été aussi procédé à l'attribution d'un prix exc e pt i o n n e l .
Cette cérémonie de clôture a
é té notamment marquée par
la présence de SA Cheikh Abdallah Ben Zayed Al Na hya n e ,
ministre émirati des Aff a i re s
é t ra n g è res et de Ab d e l wahab
Benmansour, historiographe du
Royaume. n
MAP
Aux couleurs du Mexique
Le Moussem d'Asilah a été marqué par une effervesce n ce en mat i è re
d 'a rts plastiques.
l'écrivain marocain Moubarak
Rabie et du "Prix Buland Al Haïdari de la poésie arabe" attribué
en ex aequo à la Maro c a i n e
I k ram Abdi et l'Emiratie Khouloud Moualem.
Intervenant lors de la séance
de clôture de cet te manife station, le secrétaire général de la
Fondation du Forum d'Asilah,
Mohamed Benaïssa, a indiqué
que la ville a vécu, lors de ces
dern i e rs jours, à l'heure de la
culture, de la politique et de la
créativité, qu a l i fiant cette 30e
édition de "distinguée". La clô-
La fête mexicaine d’Asilah a
d u ré tout un mois. Outre les
expositions et les spectacles de
rue quotidiens des Mari a chis à
la place El Ka m ra, d’autre s
artistes sont venus découvrir la
magie d’Asilah et ch a rmer ses
v i s i te u rs avec leur art. Parmi
eux, « El Cuervo », Alberto
Angel qui a donné un concert
le 17 août à la bibliothèque
P rince Bandar ben Sultan. Un
autre musicien d’un horizon
diffé rent a animé la place El
Ka m ra (du 12 au 16 août) et le
palais de la culture (le 11 août).
C’est Jorge Reyes dont l’œuvre
musicale reflète sa relation
intime avec les indigènes mexicains et tout particulièrement
avec les Huicholes. Il fusionne
Aujourd’hui, elle est couronnée
par la naissance de la «Photoauto b i o graphie» ou l’auto b i ographie photo graphiée. Mon
l i v re intitulé «Quand la photo
parle» est une première contribution dans ce parcours. Elle
se présente sous fo rme d’images qui racontent. Des photos
présentes qui renvoient à celles
absentes, des clichés fi gés qui
redonnent vie à des scènes
enfouies dans l’oubli. Toutefois
la photo auto b i o graphie re ste
caractérisée par son aspect fragmentaire, contrairement à l’autobiographie classique qui reste
linéaire. n
Repousser les limites
Roland Barthes considère le
titre comme un élément d’attraction et de séduction. Plus il
e st attirant, plus il est difficile
de lui résister. C’est pour cet te
raison que Mohamed Said Ra ihani pense que la photo est
un élément d’attraction dans
l’œuvre littéraire. Là où elle est
p ré s e n te, une pre u ve y est
comme témoin. Selon lui,
l’image permet également une
c e rtaine intimité.
Pour to u tes ces raisons, la
p h oto ori e n te la réception, la
limite et l’encadre. «La limite la
La ville a vécu à l'heure de la culture, de la politique et de la créativité
ses expositions, dédiées cette
année notamment à l'art mexicain dans le cadre des journées culturelles mexicaines. La
ville d'Asilah a également vibré
aux rythmes de concerts donnés
par des artistes mexicains, espagnols, irakiens, jordaniens, japonais, italiens et marocains.
Trois prix ont été remis lors de
cette manifestation. Il s'agit du
" P rix Tch i c aya U Tam'si de la
poésie africaine" décerné à
l'essayiste et poète nigérian Niyi
Osundar, du "Prix Mohamed
Zafzaf du roman arabe" remis à
Sa o u ssen Abou Chiba remporte
le Prix «Boukornine d’argent»
La Maro caine Sa o u ssen Abou
Chiba a re m p o rté le Prix
"Boukornine d’argent" pour
l'interprétation de la chanson
"Marssoul Al Hob" de
Abdelouahab Doukkali, lors
de la 29e édition du Festival
"Bouko r n i n e" qui s'est
déroulée dans la ville tunisienne Hammam Al Anf.
L'Algérien Maamer Baadhi Maamer a reçu le
"Boukornine d'or" de cette compétition des jeunes
talents maghrébins pour l'interprétation de "Nejma
Kotbia" du chanteur Rabeh Da r ya ssa, alors que le
"Boukornine de bronze" a été décerné ex aequo à la
Tunisienne Jihane Azzouzi et au Libyen Hamza
Mosrati pour les chansons ''Zahr Albanafsaj'' et ''Izz
Al Omr''.
Hadda Ouâkki et Mohamed
Al-Ouardi, la reconnaissa n ce
ASILAH
e rideau est to m b é ,
samedi soir, sur la 30e édition du Moussem culturel
international d'Asilah qui a transfo rmé la ville, trois semaines
durant, en capitale internationale de la culture et des art s .
Cette manifestation culturelle,
lancée le 3 août, a été l'occasion
de débattre de plusieurs thèmes
m aj e u rs dans le cadre de la
23e session de l'Université d'été
Al Moâtamid Ibn Abbad, à
laquelle ont pris part des centaines d'éminentes personnalités
du monde entier. Le programme
de cette 23e session s'est articulé
autour de cinq colloques axés
sur des thèmes ayant trait à "L'Alliance des civilisations dans l'espace ori e n tal, afri c a i n ,
ibéro-latino-américain", "La
réforme du système des Nations
unies et les perspectives d'avenir de la coopération Sud-Sud"
ou encore "L'élite, l'autorité et la
d é m o c ratie dans le monde
arabe" mais aussi "Les médias
à l'horizon du 21e siècle" et
"Le cinéma et la télévision polit i ques dans le monde arabe",
outre une table ronde sur "L'Afrique et le hasard".
Le Moussem d'Asilah, comme
à l'accoutumée, a été marqué
par une effe rvescence en
matière d'arts plast i ques, avec
ses célèbres fresques murales
mais également avec ses diver-
MUSIQUE
JOURNÉES CULTURELLES
Vous œuvrez pour la promotion de la nouvelle
au Maroc. Quelles sont les actions que vous avez
entreprises jusque-là et quels sont vos projets la
concernant ?
Comment cette femme vous a-t-elle influencé ?
Elle a aiguisé ma passion
pour la ré c e ption des histo ires dès mon jeune âge. Elle m’a
également fait aimer l’écriture,
surtout en matière d’expression
écrite quand j’étais au lycée. Ce
qui m’a encoura gé à écri re
des œuvres de fiction. Quant à
la lecture des livres des gra n d s
é c rivains, elle m’a ouve rt les
yeux sur le processus d’écriture,
ses coulisses et ses mécanismes.
En choisissant l’écri t u re, j’ai
EXPRESS
les traditions ancest rales et la
te chnologie d’aujourd ’ h u i .
Les mêmes scènes ont accueilli
le jeune groupe Reik (le 14 août
au palais de la culture et le 15
août à la place El Kamra) et
le chanteur Reyli (le 21 août au
palais de la culture et le 22 août
à la place El Ka m ra). Les premiers, membres de Re i k, origin a i res de Basse Califo rn i e ,
ont influencé les goûts musicaux des jeunes mex i c a i n s ,
m a rquant ainsi une tendance
dans la musique Pop. Le
second, Reyli, est un interprète
et compositeur qui se distingue
par ses chansons re p rises dans
un grand nombre de films et
de séries et par sa popularité
grandissante.
plus importante que ce ge n re
perm et de fra n chir c’est l’accord préalable entre l’auteur et
le ré c e pteur sur la lecture du
texte écrit sous la photo. Si l’autobiographie permet de s’ exprimer, la photo constitue un
m oyen efficace pour re n fo rcer le plaisir de lecture et celui
de l’expérience humaine racontée. Elle re l è ve d’un cran l’intimité de l’œuvre écri te. C’est
ce qui manque justement
aux placards de nos libra i ries
et de nos kiosques», conclut
l’écrivain.
Un hommage a été rendu,
vendredi soir, à la grande dame
de la chanson amazighe du
Moyen-At l a s, Hadda Ouâkki et
au poète amazigh Mohamed
Al-Ouardi à Aîn Fandal
(prov i n ce de Ta za), au terme
de la 3e édition des Journées
culturelles, initiée par
l'Asso c i ation "Aârimen Nayet Wa rayen" pour le
développement et la protection de la cu l tu re et du
pat r i m o i n e. Hadda Ouâkki, née en 1953 à la zaouiya
d'Aït Ishaq (prov i n ce de Khénifra), est une figure
emblématique de l'art de l'Aîta. Elle a débuté sa
ca r r i è reart i stique en 1969 en co m pagnie de
l'a rt i ste amazigh Bennasser Okhouya. So n
r é p e rtoire co m pte plusieurs chansons amazighes.
Le poète Mohamed Al-Ouardi, né en 1953 à Aïn
Fandal à Tahla, est l'ancien président de
l'Asso c i ation Aïn Fandal pour l'art d'Ahidous. Dès
l'âge de 20 ans, Al-Ouardi commença à co m p oser
des poésies en amazigh et en arabe.