La Pension de César

Transcription

La Pension de César
AVERTISSEMENT
Ce texte a été téléchargé depuis le site
http://www.leproscenium.com
Ce texte est protégé par les droits d’auteur. En
conséquence avant son exploitation vous devez obtenir
l’autorisation de l’auteur soit directement auprès de lui,
soit auprès de l’organisme qui gère ses droits. Cela peut
être la SACD pour la France, la SABAM pour la Belgique, la
SSA pour la Suisse, la SACD Canada pour le Canada ou
d'autres organismes. A vous de voir avec l'auteur et/ou sur
la fiche de présentation du texte.
Pour les textes des auteurs membres de la SACD, la SACD
peut faire interdire la représentation le soir même si
l'autorisation de jouer n'a pas été obtenue par la troupe.
Le réseau national des représentants de la SACD (et leurs
homologues à l'étranger) veille au respect des droits des
auteurs et vérifie que les autorisations ont été obtenues et
les droits payés, même a posteriori.
Lors de sa représentation la structure de représentation
(théâtre, MJC, festival…) doit s’acquitter des droits
d’auteur et la troupe doit produire le justificatif
d’autorisation de jouer. Le non respect de ces règles
entraine des sanctions (financières entre autres) pour la
troupe et pour la structure de représentation.
Ceci n’est pas une recommandation, mais une obligation, y
compris pour les troupes amateurs.
Merci de respecter les droits des auteurs afin que les
troupes et le public puissent toujours profiter de nouveaux
textes.
La pension de César
Page 1
César, Fanny et Marius Raspigoule
dans
La Pension de César
Galejade marseillaise pour public parisien
estranger
Comédie en 2 actes «avé l’accent » de
Vito Rihano
[email protected]
La pension de César
Page 2
Durée :
90 minutes
Décor :
Cuisine ou salle à manger d'un appartement marseillais.
Une table, 3 chaises et un meuble de rangement.
Distribution :
César Raspigoule (le frère ainé)
Fanny Raspigoule (la sœur cadette)
Marius Raspigoule (le petit frère)
Emile Tipietas (le prétendant de Fanny)
Pierre Vallois (le président d’un club de supporter du PSG)
Honorine (la maîtresse de César)
Aline Dupuis (une contrôleuse de la Sécurité Sociale)
Manon Bastide (une autre contrôleuse de la Sécurité Sociale)
Tout public
Résumé :
César, Fanny et Marius forment une fratrie vivant à Marseille. César,
l’ainé, profite d'une pension d'invalidité alors qu’il est bien portant,
Fanny, la grande sœur est employée à la Mairie et Marius, le plus jeune
frère, est supporter professionnel de l'équipe de l'OM tirant profit d’une
association qu’il gère comme une entreprise.
La vie s'écoule tranquillement jusqu'au jour où un contrôle inopiné de la
Sécurité Sociale vient remettre en question la pension de César. Les
deux frères et la sœur s’étaient préparés depuis longtemps à ce
contrôle, mais tout se passera-t-il comme prévu ?
Ajoutez à cela un supporter du PSG, une maîtresse très encombrante
pour César et un prétendant très amoureux de Fanny, et la famille va
se retrouver bringuebalée entre quiproquos et rebondissements dans
une comédie où l’accent et le parlé marseillais tiennent aussi un grand
rôle.
La pension de César
Page 3
Acte 1
Décor : Cuisine ou salle à manger. Une table, 3 chaises, un meuble de rangement,
éventuellement des éléments de cuisine (frigo, gazinière).
Scène 1 César, Fanny
César assis à la table de cuisine en train de lire le journal, un verre et une bouteille
de Pastis posés sur la table. Entre Fanny, avec un panier de courses qui semble très
lourd et qu’elle porte à deux mains.
FANNY. - Ah tu es beau ! Tu ne pourrais pas venir m’aider au lieu de rester là à rien
faire ?
CESAR. - Je ne suis pas là à rien faire, je lis le journal.
FANNY. - Qu’est-ce qu’il y a de si important dans le journal qui t’empêche de venir
m’aider ?
CESAR. - Rien. Je dois juste me tenir au courant.
FANNY. - Au courant de quoi ? Tu regardes les annonces d’emplois pour voir à quoi tu
échappe ? Ou la rubrique nécrologique pour voir combien de tes collègues ivrognes
sont morts cette semaine ?
CESAR. - Bon ça va, je vais t’aider. Je ne voudrais pas que tu te fasses un tournedos.
FANNY. - Ouai ! Finis ta phrase tant que tu y es.
CESAR. - Qu’est-ce que tu racontes ? J’ai rien à ajouter.
FANNY. - Ne me prends pas pour une couillosti. Ce que tu voulais dire exactement
c’est « Bon ça va, je vais t’aider car je ne voudrais pas que ma sœur se fasse un
lumbago… parce que sinon elle ne pourra pas préparer le repas et y aura rien à
grailler à midi». Voilà ce que tu voulais dire.
CESAR. - J’arrête de discuter avec toi car je vois que tu n’es pas d’humeur. Tu seraist-y pas embarrassée ces jours-ci ?
La pension de César
Page 4
FANNY. - ça ne te regarde pas ! C’est des affaires de femmes !
CESAR. - Bon, laisse-moi ta banaste.
César prend le panier des mains de Fanny, le pose par terre à quelques centimètres
devant Fanny et retourne s’assoir.
FANNY en regardant le panier. - Pauvre de moi. Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon
Dieu pour avoir un frère pareil ?!
CESAR. - Dis plutôt en joignant les mains en signe de prière « Merci Seigneur de
m’avoir donné un pareil frère ». C’est quand même grâce à ma pension que tu peux
remplir ton couffin chez le comestible.
FANNY. - Je rappelle à Monsieur le généreux mécène de la famille, que c’est aussi
grâce à mon emploi que je remplis la glacière pendant que toi et tes collègues vous
videz les bouteilles de pastis. Sans parler des goûts de luxe de ton frère qui lui
pompent presque tous ses revenus.
Bé, heureusement qu’on a ta pension. Sans ça on serait à Payole ! Mon salaire à la
Mairie ne suffirait pas à effacer tes ardoises au bar.
Ah ! Je prie tous les jours la Bonne Mère pour qu’elle me sorte de cet enfer où
Lucifer s’est incarné en 2 frères irresponsables. Entre Marius téléphone portable à
l’oreille.
Vé ! Puisqu’on en parle, le voilà le deuxième jobastre !
Fanny commence à ranger les courses.
La pension de César
Page 5
Scène 2 César, Fanny, Marius
MARIUS au téléphone. - Comment le tarif à augmenté ?! …Quoi ?... A cause du prix
de gasoil ?! Oh Lucien, ne me prends pas pour un couillon, le gasoil n‘a pas
augmenté depuis juillet et le prix pour le transport tu me l’as fait il y a 2 semaines et
c’était début octobre. … C’est ça, et puis quoi encore ? Allez, trouves-toi une vraie
excuse. Mais moi, je ne peux pas changer le prix des billets. Les supporters ont déjà
tous payé pour le déplacement, et je ne vais pas leur demander une rallonge à une
semaine du départ, ils vont me tuer…. Quelle marge ? Oh Loule, c’est une
association de supporters à but non lucratif, pas une multinationale ! … Quoi ? …
Hein ?... Pas le choix ou t’annule ?... T’es vraiment….Bon ça va, je t’apporte les
sous qui manquent cet après-midi, mais on en reparlera de retour de Paris.
Trompette va ! Il raccroche, puis regardant le téléphone Brèle ! Bordille !
CESAR. - Qu’est ce que t’as à rouscailler ?
MARIUS. - Y a que la compagnie d’autocar me demande un supplément pour le
déplacement à Paris, soit disant à cause du prix du gasoil qui est plus cher que
prévu.
CESAR. - Et alors, tu ne fais pas une bonne marge sur ce déplacement ?
MARIUS. - Faisais une bonne marge. Mais à cause de cet empaffé… Bon, il faut que
je refasse mes calculs… il sort calculatrice, papier et stylo de sa poche et s’assoit à
la table, Alors, 10 cars de 63 places, soit 700 supporters …
CESAR. - 700 ?
MARIUS. - ça va, je sais compter, c’est juste qu’on tassera un peu dans les bus, bon
alors… prix du billet au Parc des Princes… droit d’adhésion à l’association,
CESAR. – L’adhésion n’est plus annuelle ?
MARIUS. - Le règlement de l’assos prévoit que le droit d’adhésion est renouvelable à
chaque déplacement à l’étranger, bon tu me laisse continuer ?… droit d’inscription
au déplacement à Paris, supplément déplacement à la capitale, … frais de dossier,
assurance en cas d’annulation, assurance en cas de défaillance de l’assurance
annulation, forfait pique-nique aller, forfait pique-nique retour, voilà pour les
encaissements, je crois que j’ai rien oublié. Tout ça je le multiplie par 700, et ça me
fait le total des recettes, … voilà. Ensuite les dépenses,… prix d’achat des billets au
Parc des Princes, prix du transport, panier repas pour l’aller, à savoir une bouteille
d’eau de source et un paquet de chips par participant.
La pension de César
Page 6
CESAR. – Ils ne vont pas avoir d’indigestion.
MARIUS. - Panier repas pour le retour, une bouteille d’eau. A César. Le retour se fait
de nuit, ils n’auront pas faim. Ensuite, la nouvelle tenue de représentation pour le
président de l’association : costume Versace, chemise Ralph Lauren, cravate Lancel,
chaussures Berlutti, ceinture Calvin Klein,… Je crois que j’ai rien oublié. Ah oui !
Lunettes de soleil Rayban, on ne sait jamais, si ça tombe le seul jour de l’année où y
a du soleil à Paris. Ensuite, banderole au nom du président de l’association, puisque
ça tombe le jour de son anniversaire… billet d’avion pour le président de l’association
… ah oui, c’est en classe affaire, …
CESAR. – Le président ne voyage plus avec les supporters ?
MARIUS. - Le président de l’association doit arriver sur place avant les supporters
pour les accueillir, alors il doit prendre l’avion, bon je continue… hôtel et restaurant à
Paris pour le président de l’association … et son invitée
CESAR. - é e
MARIUS. - Quoi ?
CESAR. - Invitée é e.
MARIUS. - Oui et alors ? Il y a des supportrices dans l’association, et il y a eu un
tirage au sort. C’est Fifine, la fille du couvreur qui a gagné.
CESAR. - Ah la belle Fifine ! Ça m’aurait étonné que ce soit un cabestron qui gagne.
MARIUS. - Bon, tu arrête de m’emboucaner ? J’en étais où ? Ah oui, frais divers sur
place pour le président, champagne, petits fours, diner spectacle, … et pour finir le
supplément « gasoil » ahrrr…cela fait une marge de 4534 €, …alors que j’avais
prévu plus de 6300 € !
CESAR. - Ne marronne pas. En tant que « président de l’association » tu n’es pas le
plus à plaindre.
MARIUS. - Oui, mais ça m’escagasse, parce que c’est le déplacement le plus
important de l’année. Tu imagines, PSG – OM ! En plus avec les brèles qu’on a cette
saison dans l’équipe, on ne sera pas foutu de rencontrer ces cons de parisiens en
finale de la coupe.
La pension de César
Page 7
FANNY. - Franchement tu me fais honte. Profiter des gens comme ça. Si Maman te
voyait !
MARIUS. - Oh Fanny ! Mes affaires profitent à toute la famille, et ma cagnotte elle
servira aussi à faire ton installation. En plus le ballon c’est ma passion, l’OM c’est
toute ma vie. Alors tu ne peux pas me reprocher de vivre ma passion ?
FANNY. – De vivre DE ta passion.
MARIUS. – En tout cas, Papa aurait été fier de moi. C’est quand même lui qui m’a
transmis son amour pour l’OM.
FANNY. - Et qui à transmis à ton frère sa passion pour le pastis. Ah Quelle famille !
Heureusement que j’ai pris tout le bon de Maman et que vous m’avez à vos côtés.
Ah oui, vous ne savez pas la chance que vous avez.
CESAR. - Mais bien sûr qu’on sait la chance qu’on a, surtout quand tu fais l’aïoli
comme Maman savait si bien le faire ! Humm !
César se me à chanter avec Marius (air de la chanson des Massalia Sound System):
« Fais-le bouger, fais-le bouger, ton taffanari. Fais-le monter, fais-le monter, ton aïoli
Fanny ». Ils se donnent une tape dans la main.
FANNY. - Méfiez-vous, un jour je risque de partir… Croyez-moi, il ne manque pas
grand-chose pour que je franchisse le pas de cette porte pour vivre ma propre vie, et
vous laisser à vos existences médiocres.
CESAR En exhibant une enveloppe. – Vé, c’est peut-être ça qui te manque ?
FANNY. - Qu’est-ce que c’est ? Une lettre pour moi ? Tu n’as pas intérêt à l’avoir lu !
CESAR. - Rassure-toi, je n’ai pas eu besoin de l’ouvrir pour savoir qui t’écrit et me
douter de quoi elle parle. L’adresse de l’expéditeur est indiquée au dos : Emile
Tipietas, 23 rue des Figuiers à Marseille.
FANNY lui arrache l’enveloppe. - Donne-moi ça tout de suite !
CESAR. - . Ce ne serait pas ton collègue de la Mairie ?
MARIUS. - Qui ça, Tip et Top ? Oh ! Juste lui ?! Ah ah ah !
La pension de César
Page 8
FANNY. - Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle. Et puis pourquoi tu l’appelles Tip et
Top ?
MARIUS. – Ce n’est pas moi qu’il l’appelle comme ça, c’est tout le monde. Pas vrai
César ?
CESAR. - Eh ouai. Il faut dire qu’avec son infirmité qui le fait boiter quand il marche ça
fait Tip et Top, Tip et Top, Tip et Top,.. Notre sœur n’est pas regardante sur les
aptitudes physiques de ses prétendants.
FANNY. - En tous cas il est très gentil et serviable, et au moins il travaille même s’il a
une infirmité. Une vraie infirmité avec un vrai travail lui ! En foudroyant César du
regard. Pas comme certains qui touchent des pensions d’invalidité alors qu’ils sont
en par-fai-te-san-té !
CESAR. - C’est pour moi que tu dis ça ?
FANNY. - Oui Mossieur ! C’est pour toi que je dis ça. Tu as vraiment de la chance de
n’avoir jamais été contrôlé. Si un inspecteur de la Sécurité Sociale venait un jour, tu
rigolerais moins.
CESAR. - Oui, on rigolerait tous moins. Je dirais même que ce serait un vrai malheur
…pour toute la famille.
FANNY. - Pour ceux qui resteront seulement, car moi je ne compte pas faire de vieux
os ici. Avec des frères pareils, je ne suis pas gâtée. Vous êtes des ases, voilà. Mes
frères sont des fadas !
CESAR. - Fanny, tu n’as vraiment aucune raison de te faire du mouron à propos de
nous. Papa, sur son lit de mort avait bien réparti les choses. A Marius l’association
de supporters, à moi la pension grâce au piston de Tonton Lucien et à toi…
FANNY. - A moi quoi ?
CESAR. - Euh… à toi… ben… l’emploi à la mairie… et le bon sens de Maman.
FANNY. - C’est justement parce que j’ai hérité du bon sens de Maman que je te dis de
te méfier. Les temps vont changer. Tonton vient de partir à la retraite et comme il ne
travaille plus à la sécu, il ne peut plus te protéger.
La pension de César
Page 9
MARIUS. - Mais non ! Y a rien qui craint. Tonton à dû faire comme Papa, c'est-à-dire
bien préparer son départ et nous assurer la tranquillité encore un moment.
FANNY. - Justement non. Tonton m’a dit l’autre jour que son nouveau chef, arrivé un
mois avant son départ à la retraite, avait l’intention de reprendre les choses en mains
dans son service. Et en plus il est d’Orléans son chef !
CESAR. - Et alors ? Orléans c’est au sud de Paris non ?
FANNY. - Oui, mais pas assez au sud pour être arrangeant. En plus, il parait qu’il veut
faire venir une nouvelle contrôleuse avec qui il a déjà travaillé. Une alsacienne !
Vous vous rendez compte ? Une alsacienne à Marseille ! Il ne manquerait plus que
ça !
MARIUS. - Franchement, je ne crois pas qu’on soit contrôlé de si tôt.
FANNY. - C’est ce que tu crois.
CESAR. – Marius a raison, on craint dégun. Tonton nous a détaillé la marche à suivre
en cas de contrôle. Tout est réglé pile poil. On fait comme il a dit, et la vie continue.
FANNY. – Té, puisque tu en parle, ça fait longtemps qu’on n’a pas répété la marche à
suivre en cas de contrôle… Bon allez zou, on s’y met. Tous en scène. Marius,
aujourd’hui c’est toi qui fais le contrôleur.
MARIUS. - Allez ! ça va ! Y a pas besoin. On connait notre rôle par cœur. Tu ne vas
pas nous faire caguer avec ça ? En plus le contrôleur, je l’ai déjà fait la dernière fois.
C’est toujours mois qui m’y colle.
FANNY. - C’est normal, tu n’es jamais là. Il y a peu de chance qu’il te voit. Bon allez,
pas de discussion, y a au moins 6 mois qu’on s’est pas entrainé. Marius toi tu sors,
César, toi tu restes assis à la table…. à rien faire comme d’habitude. Quant à moi, je
fais le reste… comme d’habitude aussi.
MARIUS en sortant. - Au fait, c’est comment l’accent alsacien ?
FANNY. - Allez file couillon !
MARIUS entre et parle avec un mauvais accent allemand. - Bonchour Matame,
Bonchour Mossieu. C’est pour le contrôle de la Securitat Socialeu.
La pension de César
Page 10
César rigole.
FANNY. - Mais qu’est-ce que tu nous fais là ? C’est quoi cet accent ?
MARIUS. - Ben c’est l’accent alsacien !
FANNY. - Tu va me faire le plaisir de recommencer sans faire le fada s’il te plait. Allez
ouste !
MARIUS ressort puis rentre à nouveau en parlant avec un mauvais accent russe. Bonjour camarades, Ici le contrôle de la securitat socialiste indépendante.
César rigole.
FANNY. - Bon, puisque tu ne veux pas te lever le maffre, alors c’est moi qui vais le
faire. Tu vas prendre ma place. Mets ce tablier. Marius hésite. Ne discute pas !
Fanny sort puis entre en parlant avec un accent allemand très exagéré.
FANNY. - Bonchour Madame, Monsieur, je suis la contrôleuse de la sécurité sociale.
Marius et César rigolent en douce. Silence.
FANNY en criantt. - KONTROL SS ! PAPIREN ! SCHNELL !
César et Marius sont transis de peur.
FANNY sur le même ton. - VOUS ETES BIEN CESAR RASPIGOULE, NE LE 17
DECEMBRE 1968, RESIDENT 18 RUE DU PORT A MARSEILLE 2EME
ARRONDISSEMENT, ENREGISTRE AUPRES DE LA SECURITE SOCIALE SOUS
LE NUMERO 1.68.12.13.002.995.87, DECLARE INVALIDE A 100% DEPUIS LE 3
JANVIER 1989 SUITE A UN ACCIDENT DU TRAVAIL ?!
CESAR effrayé.- Oui c’est ça, mais arrête Fanny, tu me fais peur.
FANNY. - ON REPOND « OUI MADAME », « NON MADAME » OU ON SE TAIT !
La pension de César
Page 11
MARIUS apeuré.- Fanny, s’il te plait, arrête ! C’est vraiment effrayant comme tu nous
parles. Tu ne veux pas qu’on fasse plutôt comme Tonton nous a dit ?
Silence
FANNY. - Bon, vous me promettez de ne plus faire les couillons ?
MARIUS ET CESAR ensembles. - Oui !
FANNY. - Alors on fait mot pour mot comme c’est prévu. Marius, tu gardes le tablier et
tu joues mon rôle. César toi, tu restes assis à lire le journal.
CESAR. - Mais si le contrôleur arrive alors que je suis debout ?
FANNY. - Tonton a dit que te connaissant, il y a neuf chances sur dix que le
contrôleur te surprenne assis à lire le journal ou boire le pastis.
MARIUS. - ou les 2.
FANNY. - En tout cas, c’est à ce moment là qu’il risque d’arriver.
CESAR. - Comme je ne lis jamais le journal l’après-midi, ça prouve bien qu’à la
sécu, ils ne travaillent que le matin. Je m’en suis toujours douté.
FANNY. - Bon, on commence ? Tenez-vous prêts, je sors.
Fanny sort. Marius commence à rigoler mais César lui donne une tape sur la tête
pour qu’il garde son sérieux. Fanny entre.
Fanny sans accent : Bonjour Madame, bonjour Monsieur. Je me présente, Gretel
Stoeffler, contrôleuse de la Sécurité Sociale.
MARIUS. - Oh ! Tu sais déjà comment elle s’appelle ?!
CESAR. - Mais non couillon. C’est un exemple. Stoeffler c’est une marque de
choucroute. « Choucroute Stoeffler, je sais pas le dire mais je la mange bien ».
La pension de César
Page 12
FANNY. - Vous avez fini ? Silence. Monsieur, vous êtes bien César Raspigoule ?
Le reste de la scène est joué avec éloquence exagérée.
CESAR. - Oui Madame, mais je vous prie de m’excuser de rester assis, avec ma
jambe handicapée, je ne peux pas me lever.
MARIUS avec une voix féminine. - Mon dieu César, excuse-moi ! En faisant le
ménage j’ai déplacé ta canne sans le faire exprès. Attends, je vais te la chercher.
Marius se met à chercher dans tous les recoins de la scène. Fanny et César
regardent en silence.
MARIUS. - Où est cette putanasse de canne ?!
FANNY. - Je crois qu’on l’a rangée dans le cafoutche.
MARIUS. - Je vais la chercher
FANNY. - Non, laisse tomber, on continue sans, mais faudra penser à la sortir.
MARIUS mimant le geste de donner la canne. - Voilà mon César. Et encore désolée.
César se lève péniblement.
CESAR. - Mes hommages Madame. Que nous vaut le plaisir de cette visite
inattendue ?
FANNY. - Oh juste un petit contrôle de routine. Je suis venue m’assurer que votre
pension vous était versée correctement et correspondait bien à votre handicap.
CESAR. - Je suis à votre entière disposition chère Madame. Puis-je vous offrir un
verre, nous étions justement sur le point de prendre le pastis. Un pastis, cela ne se
refuse pas. Le pastis, c’est tout un symbole dans une maison marseillaise. Symbole
de l’amitié et du soleil. D’ailleurs, savez-vous d’où vient le nom du pastis ? Eh bien il
vient du provençal « Pastisson » et de l’italien « Pasticchio », qui signifient mélange
ou amalgame. Car, voyez-vous, le pastis n’est pas un simple apéritif, c’est le résultat
d’une subtile association de saveurs, finement élaboré par Paul Ricard, notre Saint-
La pension de César
Page 13
Paul, qui a su trouver dans les années 20 la recette parfaite associant dans un
équilibre parfait, l’anis vert, l’anis …
FANNY. – Stop ! Ton monologue sur le pastis, tu le finiras le jour du contrôle.
CESAR. – Si tu veux,… je reprends sans le monologue,… Puis-je vous offrir un verre,
nous étions justement sur le point de prendre le pastis.
FANNY. - Je vous remercie beaucoup, mais je suis actuellement en service et ne
peux accepter, mais c’est très aimable à vous. Je ne veux pas abuser de votre
temps, aussi pourrais-je juste ausculter votre jambe, objet du handicap mentionné
dans votre dossier ?
CESAR. - Mais bien entendu chère Madame. Comment voulez-vous procéder ?
FANNY. - Je vais simplement reculer de quelques pas et vous avancerez vers moi
quand je vous le dirai. En vous aidant de votre canne, bien entendu. Je ne voudrais
pas vous occasionner un malencontreux accident.
Fanny recule de 2 pas.
FANNY. - Allez-y maintenant si vous voulez bien.
MARIUS. - Sois prudent César. Tu n’as pas l’habitude de marcher une aussi longue
distance.
CESAR. - Ne t’inquiète pas Fanny, Madame sait ce qu’elle fait. Elle est une
contrôleuse compétente, cela se voit.
César avance doucement en boitant et en s’aidant de sa canne.
FANNY. - Très bien Monsieur, je ne vous en demanderai pas plus. Asseyez-vous, je
vous prie, et merci pour cet effort. Marius approche une chaise à César qui s’assoit.
Mon contrôle est terminé et votre dossier est parfaitement en règle. Je ne vais pas
vous déranger plus longtemps.
CESAR. - Mais vous ne nous dérangez aucunement. Vous êtes la bienvenue dans
notre modeste maison. Vous ne voulez pas un verre de pastis avant de partir ? Le
contrôle est terminé, vous n’êtes plus en service.
La pension de César
Page 14
FANNY. - En effet, vous étiez mon dernier contrôle de la journée, je veux dire de la
matinée. J’accepte avec plaisir votre invitation.
MARIUS. - Dans ce cas vous resterez manger avec nous ? J’étais sur le point de faire
un aïoli.
FANNY. - Je ne voudrais pas abuser.
CESAR. - Mais non voyons. Cela nous fait plaisir, et nous n’avons pas souvent
l’occasion de recevoir.
Fanny reprenant sur un ton normal : Et patin-couffin, bon on arrête là. La répétition
est terminée. Si vous faites comme ça le jour du contrôle, tout se passera bien. Il faut
que j’y aille maintenant, j’ai à faire.
Fanny se dirige vers la sortie.
MARIUS. - Et l’aïoli ?
Fanny hausse les épaules et sort.
La pension de César
Page 15
Scène 3 César, Marius
CESAR. – Bon cacou, viens t’assoir et parlons de choses sérieuses maintenant. Ça
fait longtemps qu’on n’a pas parlé des affaires de l’association. Tu ne dépenses pas
tout j’espère ?
MARIUS. – Ne t’inquiète pas. La cagnotte grossit tranquillement,… pour toi et pour
Fanny. Et en ce qui me concerne, j’ai déjà mis assez de côté pour envisager un
excellent déplacement pour la coupe du monde au Brésil. Et je n’oublierai pas mon
frère dans ce voyage…
CESAR. - C’est gentil, mais moi les voyages…
MARIUS. - Et le déplacement à Paris la semaine prochaine ? Tu ne veux pas le faire
avec moi ? Ça fait longtemps qu’on n’a pas fait de déplacement ensembles. C’est
quand même un match important. Paris, tu imagines ?
CESAR. - Mon passeport est périmé.
MARIUS. - Ah oui, c’est embêtant
Silence
MARIUS. - Je trouve que Fanny exagère quand même. Au bout du compte, elle
profitera aussi de l’argent collecté avec l’association.
CESAR. - Tu la connais. Elle rêve de la famille idéale, parfaite. Elle rêve du petit
cabanon dans la calanque. De la petite maison dans la prairie quoi !
MARIUS. - Oui mais d’un autre côté elle est d’accord pour croquer.
CESAR. - Telle mère, telle fille.
MARIUS. - Tel père, tels fils.
Marius et César rigolent et trinquent.
MARIUS. - Papa serait fier de moi.
La pension de César
Page 16
CESAR. - Maman serait fière de Fanny.
MARIUS. - Tu es quand même d’accord avec moi ? Ça a toujours été comme ça dans
la famille. Je ne fais que poursuivre le travail commencé par Papa, non ?
CESAR. - Mais oui, tu as raison. Et on est tous d’accord, même si Fanny rechigne un
peu. Papa a toujours dit que le club de supporter est une association à but non
lucratif qui doit profiter à tous… dans la famille.
On perpétue la tradition, c’est tout. Toi et ton train de vie de ministre, moi et mon
futur bar qui occupera ma retraite, et pour Fanny une belle dote pour qu’elle puisse
fonder sa famille idéale.
MARIUS. - Avec Emile !
Marius et César rigolent et trinquent.
CESAR. - Allez, ne t’inquiète pas pour Fanny. Même si elle parait avoir la boule, au
fond, elle est fière de toi. Y a pas de pet.
MARIUS. - Merci César pour ces bonnes paroles. Santé !
Ils trinquent de nouveau.
La pension de César
Page 17
Scène 4 César, Marius, Pierre Vallois
Pierre Vallois arrive.
PIERRE. - Bonjour Marius, Bonjour Monsieur
MARIUS. - Oh ! Qu’est-ce que tu fais là ?
PIERRE. - j’ai sonné en bas, mais la sonnette ne fonctionne pas et comme la porte
était ouverte, je me suis permis d’entrer. J’espère que je ne dérange pas.
MARIUS. - Euh si, enfin non. César, je te présente … euh… Pedro Valetti.
CESAR. - Oui, je sais qui c’est. Et je ne comprends pas ce que fait dans notre maison
ce monsieur avec cet accent venu du froid et pourquoi tu es si familier avec lui.
MARIUS. - Mais tu ne le reconnais pas ? C’est Pedro, le cousin de Giuseppe Valetti.
Pedro qui est parti faire ses études à … Lyon.
CESAR. - Marius, s’il te plait, ne me prends pas pour un totti ou je te colle un
pastisson. Je sais très bien qui est ce landolfi, et c’est surement pas Pedro Valetti ou
qui que ce soit de la famille de Giuseppe Valetti, qui pour ta gouverne, n’a que des
cousines.
MARIUS. - Mais qu’est ce que tu racontes enfin ?
César. - Puisque tu semble vouloir continuer à t’empêtrer dans tes mensonges, je
vais te dire qui c’est. C’est Pierre Vallois, président des Blue Red Dogs, club de
supporter du PSG. Et je peux même te dire ce qu’il fait à Marseille alors qu’aucun
match n’est prévu.
MARIUS. - Mais,… euh… enfin…
CESAR les yeux baissés sur la table sur laquelle se trouve le journal ouvert. - Il est à
Marseille en tant que témoin assisté, sur convocation du juge d’instruction, dans le
cadre d’une enquête nationale, concernant des malversations au sein des
associations de supporters des clubs de la Ligue 1 de foutebale. Voilà ! Maintenant
que les présentations sont faites, je peux partir.
La pension de César
Page 18
MARIUS. - Mais comment tu sais tout ça ?
CESAR en montrant le journal. - C’est dans le journal de ce matin pauvre couillon.
Avec une belle photo de ton collègue sur une moitié de page !
MARIUS. – Ce n’est pas mon collègue.
PIERRE. – C’est vrai, on n’est pas collègues, on ne travaille pas dans la même
société.
MARIUS à Pierre en lui faisant signe de se taire. – Toi tu peux te la claver.
CESAR. - Bon je m’en vais car ça sent le poisson pourri dans cette pièce. Et quand je
reviendrai, tu auras intérêt à avoir une bonne raison pour expliquer la présence d’un
parisien dans la maison d’une famille aussi respectable que la notre… Marius, tu me
fais peine.
César sort.
Scène 5 Marius, Pierre Vallois
PIERRE. - Il n’est pas commode ton père.
MARIUS. – Ce n’est pas mon père, c’est mon frère. Et puis toi, qu’est-ce que tu fais
ici ?
PIERRE. - Je profite de mon passage à Marseille pour venir te saluer. Tu m’avais dit
« A l’occasion, quand tu passes à Marseille, viens me dire bonjour ». Alors voilà. Je
suis là.
MARIUS. - Oui, mais c’était façon de parler ! Il ne faut pas prendre au pied de la lettre
tout ce qu’on dit ici, surtout quand il s’agit d’une invitation enfin ! Quelqu’un t’a vu
rentrer ?
PIERRE. - Non, je ne pense pas.
MARIUS. – Y avait dégun en bas ?
PIERRE. - Ben, je ne sais pas. Je ne le connais pas.
La pension de César
Page 19
MARIUS. – Dégun, personne quoi.
PIERRE. – Ah. Je n’ai pas regardé. Y avait tellement de monde dans la rue. C’est jour
de marché on dirait.
MARIUS. - Pauvre de moi !
PIERRE. - Bon, ben maintenant que je suis là, autant en profiter pour organiser ton
déplacement à Paris. Ça nous évitera de le faire par téléphone comme d’habitude.
MARIUS. - Ouai, mais on fait ça vite, tu ne peux pas rester ici.
PIERRE. - ça va être rapide. Je voulais juste te parler de l’après match. Pour le match
on fait comme d’habitude. On peut reprendre la même liste d’insultes que pour le
match aller. De notre côté on ajoutera simplement quelques « Allez vous faire mettre
bande de sardines ! », mais il ne faudra pas le prendre au premier degré.
MARIUS. - Ouai ok, ok. Mais pour l’après match, qu’est-ce que tu as prévu ? C’est toi
qui reçois alors c’est toi qui organises.
PIERRE. - Ben j’ai trouvé un endroit très sympa pour la rencontre. Y a une petite rue à
10 minutes à pieds du stade. Je te ferai un plan. Elle est bien éclairée, assez
dégagée et en plus j’ai un copain qui y habite et qui a un grand balcon, comme ça on
verra bien.
Par contre, il faudra qu’on limite à 40 supporters dans chaque camp.
MARIUS. - Et pourquoi que 40 ? J’en fais monter 700 à Paris !
PIERRE. - Parce que j’ai un arrangement avec la police, et ils nous laissent nous
amuser mais à condition de limiter le nombre de participants à 40 par équipe, rapport
au voisinage, tu comprends ?... Mais on a droit aux bats de baseball !
MARIUS. - Oui c’est bien ton idée, mais ça m’arrange pas trop, il va falloir que je
fasse une sélection.
PIERRE. - Si déjà tu interdis aux enfants de participer, ça fera moins de monde.
MARIUS. - Sauf que j’avais justement promis aux minots qu’ils pourraient jouer avec
les grands cette fois. C’est bientôt Noël.
La pension de César
Page 20
PIERRE. - Je suis désolé, on ne peut pas tout avoir. Je t’assure, le balcon de mon
copain est super bien placé et il est vraiment grand. Tu peux proposer à quelques
enfants de venir assister à la bagarre d’en haut.
MARIUS. - Non, je préfère réserver ça à des invités payants. Mais t’inquiète, j’en fais
mon affaire.
PIERRE. - Bon, on reste là-dessus alors ?
MARIUS. - Ouai ouai, mais faut que tu partes maintenant. Y a ma sœur qui risque
d’arriver d’un instant à l’autre et je vais déjà avoir à expliquer ta présence à mon
frère…
PIERRE. – Ok, je file. … Au fait, pour le virement, rapport au dernier déplacement ? Y
a eu des frais et tu as promis de me rembourser.
MARIUS. - J’ai fait le virement avant-hier. Si tu consulte ton compte tu verras
certainement qu’il a été crédité.
PIERRE. - Super. Justement, je dois passer à un guichet retirer de l’argent. J’en
profiterai pour voir si le virement ne s’est pas perdu. Je me méfie toujours avec les
banques.
Allez, à la semaine prochaine…. à Paris !
MARIUS. - Oui, oui, à la semaine prochaine. Allez ciao !
Pierre sort.
La pension de César
Page 21
Scène 6 Marius, César
César entre.
MARIUS. - Il est parti.
CESAR. - Oui, j’ai vu. Silence. Alors ?
MARIUS. - Alors quoi ?
CESAR. - Tu as trouvé une explication qui tienne la route ou il faut que je ressorte
pour te laisser encore un peu de temps ?
MARIUS. - Y a rien à expliquer. Pour la bonne marche des affaires de l’association, il
faut éviter que les guerres soient trop désastreuses. C’est de la politique voilà tout.
CESAR. - La politique faut la laisser aux voyous, ils ont compris que leur intérêt est de
s’en servir pour servir leurs intérêts.
MARIUS. - Tout de suite les grands mots. Je ne parle pas de politique politique, mais
de politique… bizinesse. Si le club de supporters marche aussi bien c’est justement
parce que je sais trouver les bons arrangements. Bizinesse !
CESAR. - N’empêche que si Papa te voyais il serait très déçu. Être de connivence
avec l’ennemi historique c’est malsain et ça risque de te retomber dessus. Sans
parler de la honte sur la famille quand ça se saura.
MARIUS. - César, on n’est mal placé dans la famille pour parler de ça. Tu oublies que
Maman était parisienne et que Papa l’a justement rencontré lors d’un déplacement
de l’OM à Paris. Té ! C’est bien la preuve que Papa a au moins une fois été de
connivence avec l’ennemi.
CESAR. - Faudrait voir à pas tout mélanger, et puisque tu sembles avoir la mémoire
courte, je vais te rappeler les faits. Papa est monté à Paris en 1967 pour le match qui
opposait l’OM au Stade de Paris Football Club. Maman était avec les supporters
parisiens parce qu’elle accompagnait son cousin Victor, tonton Victor. L’OM a gagné
2 à zéro. Y eu bagarre après le match, comme d’habitude, et Papa avec ses
collègues ont mis une rouste aux parisiens, comme d’habitude. En conséquence de
quoi, il n’y a pas eu connivence. Maman c’est une prise de guerre, voilà tout !
La pension de César
Page 22
MARIUS. - Voui, vu comme ça.
CESAR. - Je te rappelle aussi que Maman n’est qu’à moitié parisienne puisque Papi
était d’Ajaccio. Et tout le monde le sait, Marseille c’est pile poil entre les 2. Et les
Corses méritent le plus grand respect. Ils ont quand même donné un Empereur à la
France
MARIUS. - et quelques parrains à Marseille.
CESAR. - Et le figatelli,
MARIUS. - Et Patrick Fiori !
CESAR. - oui, ça aussi ça compte beaucoup.
MARIUS. - Oui, mais il ne faut pas oublier que Marseille aussi a beaucoup donné à la
France, et même au monde entier.
CESAR. - C’est vrai, par exemple le pastis
MARIUS. - ça ne m’étonne pas de toi. Moi j’aurais dit le savon de Marseille
CESAR. - ça m’étonne de toi. Tu n’es certainement celui qui s’en sert le plus à la
maison.
MARIUS. - Alors qu’a-t-on donné à la France ?
CESAR. – Fernandel par exemple.
MARIUS. – Tu n’as pas plus récent ?
César. – I AM
Marius. – Oui ! en dansant, Je danse le mia !
CESAR. – Jean-Pierre Foucault
La pension de César
Page 23
MARIUS. – Ouai, c’est votre dernier mot César ?
CESAR. – Maurice Béjard, le chorégraphe. Il est de Marseille.
MARIUS. – Lui, je connais pas.
CESAR. – Henri Martinet, l’auteur compositeur de « Petit Papa Noël»
MARIUS. – Connais pas.
Improvisation sur le thème de personnages célèbres nés ou ayant vécu à Marseille :
Vincent Scotto, Paul Préboist, Arthus Rimbaud (mort à Marseille), Edmond Rostand,
Jean Roucas, Robert Guédiguian, Patrice Lafond, le sculpteur César, Clara Morgan,
etc…
CESAR. – Je ne sais pas, il y en a plein…tiens ! Eric Cantona.
MARIUS. – Ah oui. Eric Cantona !
CESAR. – Ah, je vois que c’est plus à ton niveau.
MARIUS. - Zidane !
CESAR. - Ma qué Zidane ! Il est peut-être de Marseille mais il n’a jamais joué à l’OM
et c’est vraiment dommage pour lui. Il aurait pu être un grand joueur.
MARIUS. - Tu as raison. Notre héros, celui qui a fait Marseille, celui qui à révélé
Marseille aux yeux du monde, c’est... l’homme du 26 mai 1993 ! Tu te rappelle du 26
mai 1993 ?
CESAR. - Evidemment, tout le monde s’en rappelle. Mais il en a peut-être qui ne le
savent pas.
MARIUS. – Quoi ?! Y en a qui ne se souviennent pas du 26 mai 1993 ?! Ce n’est pas
possible !
CESAR. – Oui, il y en malheureusement. Vas-y explique.
La pension de César
Page 24
MARIUS. - 26 mai 1993. Stade Olympique de Munich,… dans le grand nord, près du
cercle polaire ! Finale de la Champion’s League, en français, finale de la coupe
d’Europe des club chmpions, en marseillais : The Finale ! L’OM affronte l’invincible
AC Milan.
64000 spectateurs dans le stade. Cent mille supporters marseillais sont là.
CESAR. – 25000 en fait.
MARIUS. – 12 supporters milanais dans le stade.
CESAR. – N’exagère pas quand même. Y en avait aussi une palanquée.
MARIUS. – Notre équipe est composée de Angloma, Boli, Desailly, Eydelie,
Deschamps, Di Meco, Sauzée, Abedi Pelé, Boksic, Völler et Barthez dans les cages.
Sur le banc de touche, les remplaçants, Casoni, Thomas, Durand, Ferreri et Olmeta.
L’entraineur est Raymond Goethals, dit Raymond la Science.
Dans l’équipe du Milan AC, il y a … quelques joueurs de foot.
CESAR. – Oui, l’histoire a oublié leurs noms.
MARIUS.- L’arbitre donne le coup d’envoi. Le match démarre. Dès le début, la partie
s’annonce très engagée. Les Milanais, invaincus dans leur championnat se montrent
très offensifs. 4ème minute, tête du milanais Machin,
CESAR. – Nijkaard
MARIUS. – Oui, c’est ce que je disais. Le ballon passe à côté des cages de notre
gardien Barthez. 5ème minute, l’OM concède un coup franc aux italiens. Le ballon est
tiré par Donne à Mamie,
CESAR. – Donadoni
MARIUS. – Oui, donc coup franc sur la tête de Machin,
CESAR. – Nijkaard
MARIUS. – le ballon passe au dessus du cadre. 6ème minute, tête croisée de
Chamallow
La pension de César
Page 25
CESAR. – Massaro
MARIUS. – Barthez est pris à contre pied, mais le ballon effleure le poteau droit. 7ème
minute, nouvelle tête de Chamallow,
CESAR. – tu insistes,
MARIUS. – le ballon frôle le poteau gauche des cages de Barthez. 12ème minutes,
CESAR. – Il y a 90 minutes comme ça. Tu ne veux pas m’épargner les détails ?
MARIUS. – Oui, mais chaque minute à son importance !
CESAR. – Pas pour tout le monde. Vas à l’essentiel.
MARIUS. – Le match est très très engagé. Les milanais mettent une pression
monstre. L’OM résiste tout en essayant de trouver la faille. Barthez sauve notre
équipe à 2 reprises. Les minutes s’égrènent sans que le score change.
44ème minute,
CESAR.- On y est, écoutez bien.
MARIUS. – L’OM obtient un corner. Abedi Pelé va le tirer. Il attend que ses coéquipiers soient tous prêts devant les cages milanaises. Tous les italiens sont dans
la surface de réparation, ils sentent le danger. Pelé arme son tir et envoie le ballon
au premier poteau. Basile Boli est la réception, mais Rijkard et Baresi ayant vu le
danger tirent sur le maillot du marseillais malgré le risque du pénalty qui
sanctionnerait cette faute. L’arbitre a-t-il vu ? Oui ? Non ? Tout ce passe très vite. Le
ballon tiré par Pelé arrive sur la tête de Basile Boli qui d’instinct place une tête
croisée qui laisse sur place le gardien italien, et envoie le ballon au fond des cages.
Goaaaallllllll !!!! Marseille vient de marquer ! C’est le but ! Oui ! Oui ! Oui !
Le stade est en folie ! Les 500000 marseillais sont tous debout dans le stade!
Marius soudain plus calme. Mais il reste encore 46 minutes avant la fin du match. La
deuxième mi-temps arrive vite et malgré la pression des milanais, les joueurs de
l’OM appliquent à la lettre les consignes de Raymond la Science, ne concédant pas
un mètre de terrain et jouant au mieux la règle du hors-jeu qui habituellement réussit
plutôt aux milanais. Les italiens sont surpris par la stratégie des marseillais, ils ne
savent pas comment réagir, ils sont déboussolés, mais restent très offensifs. Le
chrono tourne, mais le score reste figé à 1-0 pour l’OM. 87ème minute, 88ème minute,
89ème minute, 90ème minute. Tout le monde attend que l’arbitre siffle la fin du match, il
tarde à le faire. 91ème minute, toujours rien. 92ème minute, toujours rien. 93ème minute
et enfin l’arbitre donne le coup de sifflet final ! On est champion ! On est champion !
La pension de César
Page 26
MARIUS ET CESAR chantant en courant sur la scène. - On est les champion, on est les
champion, on est, on est, on est les champions !
MARIUS. – L’OM, champion d’Europe ! L’Olympique de Marseille, seul club français
dans toute l’histoire de la Champion’s League à avoir remporté cette coupe ! Et cela
s’est passé le 26 mai 1993. Alors maintenant, tout le monde se souvient ?
Silence
CESAR. – Bon, alors selon toi l’homme du 26 mai 1993, c’est Basile Boli ?
MARIUS. – Mais non, même s’il a marqué le but de la victoire.
CESAR. – C’est l’entraineur, Raymond Goethals ?
MARIUS. – Non plus, même s’il conduit toute la stratégie.
CESAR. – C’est un autre joueur ?
MARIUS. – Encore non, même s’ils ont tous contribué à la victoire.
CESAR. – Bon, alors selon toi, qui est l’homme du 26 mai 1993. L’homme que
Marseille à donné à la France ? En résumé, l’homme le plus important dans l’histoire
de Marseille ?
MARIUS. – L’homme le plus important dans l’histoire de Marseille, celui sans qui tout
cela ne serait pas arrivé, c’est… BERNARD TAPIE !
CESAR.- Oui, je suis d’accord avec toi, mais tu ne trouves pas que tu exagères un
peu quand même ? Marseille n’a pas donné Bernard Tapie à la France, c’est plutôt
lui qui s’est fait donné par la France.
MARIUS. – S’il te plait, ne remue pas le couteau dans la plaie. Il ne méritait pas tout le
mal qu’ils lui ont fait. C’est notre héros ! Tu te rends compte de tout ce qu’il a fait
pour Marseille ?
1986, il reprend l’Olympique de Marseille qui végète à la quinzième place du
championnat, qui n’a plus gagné de titre depuis 10 ans et qui peine à faire plus de
5000 spectateurs dans le stade. Il engage des jeunes espoirs. Jean-Pierre Papin,
Eric Cantona, Basile Boli, Didier Deschamps, Desailly, Barthez, Abedi Pelé, Chris
Waddle, oh oui, tu te souviens de Chris Waddle ?!
La pension de César
Page 27
CESAR. – Mais qui peut l’oublier ?!
MARIUS. - L’OM gagne le championnat de France en 1989, 1990, 1991 et 1992 !
Vainqueur de la coupe de France 1989. Puis arrive Raymond Goethals, et l’histoire
se met en marche. La consécration, l’apothéose, le saint graal. En se mettant à
genoux. 26 mai 1993 ! Merci Bernard. Sans toi, rien n’aurait été possible. Silence.
Protis et Gyptis ont fondé Marseille en l’an 600 avant Jésus-Christ, Bernard Tapie l’a
révélé aux yeux du monde en l’an 1993 après Jésus-Christ ! Marius toujours à
genoux, joint les mains en signe de prière et ferme les yeux.
Silence.
CESAR. – Bien, sur ces bonnes paroles, moi aussi je vais faire ma prière à SaintPaul… Ricard.
César va s’assoir à table et se sert un pastis.
MARIUS. – Je crois qu’il faut que j’aille prendre un peu l’air. J’ai eu beaucoup
d’émotion. Chaque fois que je repense à ça, ça me bouleverse.
CESAR. – Viens prendre un petit remontant avant de partir. Ça te fera du bien.
César sert un pastis à Marius, et s’en ressert un aussi. Ils boivent en silence, puis
Marius se lève et s’en va.
CESAR. – Mon frère est un garçon sensible. Allez l’OM ! Và !
César se sert un autre verre et fait cul sec.
La pension de César
Page 28
Scène 7 : César, Emile
César semble un peu éméché. Arrive Emile.
CESAR voyant Emile. - Oh Mastre !
EMILE. - Non, moi c’est Emile. Emile Tipietas.
CESAR. - Ô Mastre Emile ! Je te donne le bonjour !
EMILE. - Oui, merci César. Moi aussi je te donne le bonjour.
CESAR. - Mastre Emile ! Que nous vaut le plaisir de ta visite ? Viens-tu t’enquérir des
suites de ta missive à sœur Fanny ?
EMILE. - Euh ? Quoi ? Ché missile ? César, tu vas bien ?… Je passais juste voir si
Fanny a bien reçu ma lettre et si elle y avait déjà répondu.
CESAR. - Reçu ta lettre, oui, Je me suis d’ailleurs assuré personnellement qu’elle lui
parvienne en mains propres.
EMILE. - C’est très aimable à toi César. Mais tu sais ce qu’elle en a dit ?
CESAR. - Bah ! Tu sais moi, je ne suis pas dans sa tête. Va savoir.
EMILE. - Mais à son expression en la lisant, tu as pu voir si ça lui faisait plaisir ou
pas ?
CESAR. - Tu connais ma sœur. Elle ne laisse jamais rien paraître. Mais ne te fais pas
de mouron, elle te répondra sûrement bientôt.
EMILE. - D’accord, merci César, et si tu peux lui dire tout le bien que tu penses de
moi, peut-être ça aiderai à sa réponse. Té, je vous ai porté des navettes de SaintVictor, je sais qu’elle les aime beaucoup.
CESAR. - Tu m’aurais apporté une bouteille de pastis, ça aurait aidé encore plus.
Mais ce n’est pas grave, tu y penseras la prochaine fois.
La pension de César
Page 29
EMILE. - Promis juré ! Je ne t’oublierai pas César ! Bon, il faut que j’y aille. C’est
bientôt l’heure du début de la pause déjeuner et il faut que j’aille pointer.
CESAR. - Mais au fait, rappelles-moi où tu travailles ?
EMILE. - à la mairie
CESAR. - ah oui, je m’en serais douté. Et tu fais quoi là- bas ?
EMILE. - Je suis au parking des voitures des élus. Je m’occupe de la barrière.
CESAR. - Et ils font comment quand tu n’es pas là ?
EMILE. - Oh mais y a une barrière automatique. Ils l’ont installé y a 4 ans. Mais ils ont
conservé mon poste, au cas où.
CESAR. - Au cas où elle tombe en panne
EMILE. – C’est ça ! Mais ça n’arrive jamais.
CESAR. - Elle ne tombe jamais en panne ?
EMILE. - Ben non, puisqu’elle est toujours ouverte.
CESAR. - Si je comprends bien, tu es le gardien d’une barrière automatique qui ne se
ferme jamais ?
EMILE. - On peut dire ça.
CESAR. - Maintenant je comprends mieux.
EMILE. - Il faut que j’y aille.
CÉSAR. - Adesias Ô Mastre Emile !
EMILE. – Adesias César.
Emile sort.
La pension de César
Page 30
Scène 8 : César, Pierre, Honorine
César à table en train de boire. Arrive Pierre en colère.
PIERRE. - Où est Marius ?!
Silence.
PIERRE. - Tu ne comprends pas le français ? J’ai demandé où est Marius.
CESAR. - J’ai bien compris mais je ne parle pas à n’importe qui, surtout quand on
s’adresse à moi sur ce ton et qu’on me tutoie sans me demander la permission.
PIERRE. - Je tutoie qui je veux et je parle sur le ton que je veux. De toute façon je ne
suis pas là pour faire des politesses. Je veux voir cet enfoiré de Marius, et tout de
suite.
CESAR. - Et qu’est-ce que tu lui veux à mon frère ?
PIERRE. - Je veux le voir tout de suite parce qu’il m’a pris pour un con. Voilà ce que je
lui veux. Il m’a dit qu’il m’a fait le virement de l’argent qu’il me doit.
CESAR. - Et il ne l’a pas fait ? Marius tient toujours parole.
PIERRE. - Bien sûr qu’il l’a fait, mais y avait pas le compte.
CESAR. - Et il manque beaucoup ? Marius s’est peut-être trompé, il n’est pas très fort
en calcul.
PIERRE. - Ben oui il en manque. Il en manque même beaucoup. Il ne m’a fait le
virement que du quart de ce qu’il me doit.
CESAR. - C’est bien ce que je disais, il n’est pas fort en calcul. Mais bon, ne te plains
pas. Il lui arrive parfois d’oublier complètement. Tu lui en parles calmement et il te
donnera ce qu’il manque.
PIERRE. - C’est bien ce que je comptais faire au début, et je pensais qu’il me paiera le
reste sans discuter. Mais ce n’est pas ce qu’on m’a dit au bar en bas de chez toi.
La pension de César
Page 31
CESAR. - Et qu’est ce qu’on t’a dit ? Et puis d’abord, qu’est-ce qu’un parisien peut
bien faire au bar en bas ? Tu es suicidaire ?
PIERRE. - J’y suis allé avant de venir ici pour me calmer en revenant de la banque. Et
j’en ai entendu des vertes et des pas mûres à propos de votre famille.
CESAR. - Ah bon ? Vas-y continue, tu m’intéresse.
PIERRE. - D’abord, la patronne du bar se disputait avec son mari à propos de ton frère
qui a laissé visiblement une grosse ardoise et qui n’est pas prêt de la payer. Et de ce
que j’ai compris, ce n’est pas la première fois que ton frère prend les gens pour des
américains, comme vous dites chez vous. Quand j’ai raconté ce qu’il m’a fait, ils ont
tous rigolé et m’ont dit que je me suis fait escaner, et que je ne verrai jamais la
couleur de l’argent. Ça veut dire quoi escaner ?
CESAR. - Rien, rien. C’est comme un geste de tendresse, c’est pareil que se faire
estamper.
PIERRE. - …Et puis ça a parlé aussi de toi et de ton handicap bidon qui te permet de
profiter abusivement d’une pension.
CESAR. - Faut pas croire tout ce qu’on dit. Tu sais, les gens sont très médisants ici,
surtout au contact de parisiens.
PIERRE. - Ouai ! Ce que j’en ai retenu surtout c’est que je peux dire adieu au reste de
mon fric. Mais ça ne va pas se passer comme ça. Marius va me le payer, cette
espèce de…
Arrive Honorine.
HONORINE. - Vé, je crois que Marius vient de se faire un nouveau collègue. Je dois
attendre que ça sèche ou je peux passer la deuxième couche de suite ? En criant Où
est Marius ?!!
PIERRE. - Ce voleur n’est pas ici. Mais on se retrouvera.
Pierre se dirige vers la sortie.
HONORINE. - Si c’est pour moi que tu dis ça, c’est volontiers mon beau. Au fait, tu es
qui ?
La pension de César
Page 32
PIERRE. - Pierre, ennemi juré de Marius. Et je dois partir.
HONORINE. - Et bien ça nous fait déjà un point commun. J’espère qu’on aura
l’occasion de se revoir.
PIERRE. - Cela m’étonnerait, je viens rarement à Marseille.
HONORINE. - Sait-on jamais. La prochaine fois que tu passes en ville, vient me voir.
On pourra jouer à se mélanger les poils.
PIERRE. – Euh oui,… peut-être, bon,… il faut que j’y aille. A une prochaine.
Il sort.
La pension de César
Page 33
Scène 9 : César, Honorine Marius
HONORINE. - Bon, il est où ton frère ?
CESAR. - Et qu’est-ce que tu lui veux toi aussi ?
HONORINE. - Il n’a pas payé une note au bar. Une grosse note.
CESAR. - ça m’étonne de lui. Il est plutôt du genre à régler toutes ses dettes rubis sur
l’ongle.
HONORINE. - Ce n’est pas le cas.
Arrive Marius qui ne voit pas Honorine de suite.
MARIUS. - Oh Fan ! J’arrivais pas à m’en dépéguer de ce con de parisien. J’ai du
rester tanqué au coin de la rue un moment avant qu’il parte sans me voir.
HONORINE. - Ah te voilà !
MARIUS. - Honorine ! Adieu !
HONORINE. - Alors comme çà tu cherches à entuber mon mari ?
MARIUS. - Mais de quoi tu parle ?
HONORINE. - De l’ardoise que tu as laissé au bar samedi quand tu as fêté la victoire
de l’OM avec ton club de supporter.
MARIUS. - Quelle ardoise ?
HONORINE. - 62 pastis,
CESAR à part. - Oui mais du Ricard
HONORINE. - 32 mauresques,
La pension de César
Page 34
CESAR à part. - Pastis et sirop d’orgeat
HONORINE. - 18 perroquets,
CESAR à part. - Pastis et sirop de menthe
HONORINE. - 9 tomates,
CESAR à part. - Pastis et sirop de grenadine
Improvisation en inventant de nouveaux mélanges en fonction du lieu où est jouée la
pièce. Exemples : Une Québécoise sera un pastis avec sirop d’érable, Une
ardéchoise un pastis avec sirop de châtaignes, un andalou sera un pastis avec du
chorizo, etc…
HONORINE. - 3 kilos de cacahuètes, 2 kilos d’olives vertes et 27 paquets de chips.
CESAR à part. - Faut pas trop abuser des chips, ça fait grossir.
MARIUS. - Mais j’ai tout réglé ! En espèce même !
HONORINE. - J’ai refait les comptes avec mon mari, et il en manque.
MARIUS. - Ton mari m’a fait une remise. Il m’a même fait une facture pour ma
comptabilité.
HONORINE. - Oui, c’est ça. Je te dis qu’il manque de l’argent et tu vas me le régler tout
de suite.
MARIUS. - Ecoute Honorine, j’ai payé tout ce que je devais au bar. J’ai une facture
pour te le prouver. C’est ton mari qui me l’a faite, avec le tampon et tout ce qu’il faut.
Alors pour moi cette affaire est close.
HONORINE. - Ne me prends pas pour une coucourde.
MARIUS. - Puisque tu ne me crois pas, je vais te chercher la facture.
Marius sort.
La pension de César
Page 35
CESAR. - Je dois y aller aussi.
César s’apprête à sortir.
HONORINE. - Où vas-tu-toi ?
CESAR. - Ben je vais aider Marius à chercher la facture.
HONORINE. - Toi tu reste. J’ai deux mots à te dire.
CESAR. - Je n’ai rien à te dire moi.
HONORINE. - Je te dis de rester et de t’assoir !
César s’exécute.
HONORINE. - Alors ? Où étais-tu passé hier après-midi ? Je t’ai attendu.
CESAR. - J’étais au bar et je n’ai pas vu le temps passer. Je te demande pardon. On
remet ça à un autre jour si tu veux. Je peux y aller maintenant ?
HONORINE. - Tu ne vas pas t’en sortir comme ça. Je m’étais arrangée pour avoir 2
heures tranquilles sans personne à la maison. Les minots chez ma sœur et mon mari
à s’occuper du bar.
CESAR. - Justement, c’est parce que j’étais avec ton mari que j’ai eu des scrupules.
HONORINE. - Ah bon ?! Mossieur César à des scrupules maintenant ? Ce serait bien
la première fois.
CESAR. - Tu comprends, on discutait, on buvait, et puis au bout d’un moment ton
mari à mis sa tournée, et je me disais que je n’avais pas de figure à profiter de son
pastaga en plus de sa femme.
HONORINE. - Quoi ?!! Il a offert sa tournée ? Vous étiez combien ?
La pension de César
Page 36
CESAR. - Ben je me rappelle plus exactement. Moi, Félix le cordonnier, Olive le
cantonnier, Jo des Aygalades et moi.
HONORINE. - Tu as dis 2 fois moi.
CESAR. - Oui, il m’a offert un deuxième verre. C’est ça qui m’a fait avoir des
scrupules.
HONORINE. - Ah l’encatané ! Il va m’entendre. Quand je pense à tout ce qu’il doit à ma
famille… Si mon père lui a confié le bar ce n’est pas pour qu’il le ruine en tournées !
CESAR. - Enfin tu comprends la situation quoi. Je ne pouvais pas venir te rejoindre
alors qu’il nous racontait tant de choses bien à ton sujet.
HONORINE. - Ah oui ? Et qu’est-ce qu’il disait de si gentil ?
CESAR. - Il disait qu’il avait de la chance d’avoir une femme comme toi, belle,
intelligente, la tête sur les épaules, forte, décidée. Mais hélas pas trop portée sur la
chose et c’est dommage, mais que tu compensais ce manque d’intérêt pour la
bagatelle par toutes tes autres qualités. Il était heureux quoi. Et ça me faisait plaisir
de le voir comme ça.
HONORINE. - ça te faisait surtout plaisir de le voir payer sa tournée. Ah l’estrassi !
C’est une vrai fangoule ! Parler de moi comme ça ! Et toi tu as loupé une belle
occasion de lui prouver le contraire. Alors j’espère que cet après-midi tu t’arrangeras
pour être à l’heure chez moi. J’en peux plus moi. Ça fait 2 jours que j’ai rien fait.
CESAR. - 2 jours ? Mais ça fait une semaine qu’on ne s’est pas vus.
HONORINE. - T’occupe ! T’as intérêt à venir.
CESAR. - S’il te plait Honorine, laisses-moi tranquille quelques jours. Tu n’as
personne d’autre à voir ?
HONORINE. - Non personne qui te soit à la hauteur. J’ai déjà essayé avec tous les
hommes du quartier et alentour, sauf les ravans bien entendu et tu restes le meilleur
coup de Marseille.
César.- Ah oui ? Tu ne veux pas me le redire encore une fois ? Silence. Et ton
mari ? Pourquoi tu ne le propose pas à ton mari ?
La pension de César
Page 37
HONORINE. - Parce que mon mari s’occupe du bar avec moi, et on ne mélange pas le
travaille et les galipettes… Et puis mon mari a couché avec ma sœur.
CESAR. - Oui tout le monde le sait, mais c’était avant votre mariage.
HONORINE. - Justement, je ne veux pas lui laisser le loisir de comparer.
CESAR. - mais alors pourquoi l’as-tu épousé ?
HONORINE. - Parce que mon père avait confiance en lui pour reprendre le bar, et il
plaisait beaucoup à ma mère.
CESAR. - Pourquoi, ta mère aussi…. ?
HONORINE. – Bien sûr que non, même si je sais qu’elle aurait bien voulu. Mais elle
avait déjà couché avec son père et son frère alors elle s’est retenue parce que 2
dans la même famille c’est assez, et en plus elle aimait trop ma sœur pour lui faire
de la peine.
CESAR. - De la peine pour quoi ?
HONORINE. - Justement parce qu’il aurait pu comparer !
CESAR. - Mais ché famille !... J’ai une petite question. Comment vous avez fait pour
avoir vos 2 enfants ? Ils sont bien de lui ?
HONORINE. - Ce n’est pas compliqué. On a fait la procréation in vitro. Maintenant de là
à dire qu’ils sont de lui. Je ne sais pas. Les dates se mélangent dans ma tête, et les
éprouvettes aussi. Ah ah ah... Bon assez discuté, je compte sur toi cet après-midi.
J’ai passé une mauvaise semaine et j’ai besoin qu’on me fasse grimper au rideau.
CESAR. - Tu ne veux pas le proposer à mon frère ? Ça lui fera du bien et à toi aussi.
HONORINE. – Et puis quoi encore ?! Il a déjà baisé mon bras cassé de mari, je ne vais
pas lui donner le plaisir de m’avoir aussi.
CESAR. – Tu veux dire que Marius et ton mari… ?
HONORINE. – Mais non, je parle des belins qu’il lui a escroqués !
La pension de César
Page 38
CESAR. - Ecoute Honorine, ça peut plus le faire entre nous. Y a ton mari, c’est
compliqué pour te voir en cachette, tu en demandes toujours plus et puis…
HONORINE. - Et puis quoi ?
CESAR. - Tu cries très fort et ça me gène. Tu comprends, les voisins… On t’entend
jusque de l’autre côté du Vieux Port.
HONORINE. - Je croyais que ça te plaisait.
CESAR. - Au début oui, mais la dernière fois tu m’as crevé un tympan. Déjà que j’ai
mon handicap à la jambe, si en plus je deviens sourd.
HONORINE. - César, tout le monde sait que ton handicap c’est du bidon. Alors je te le
dis pour la dernière fois, si tu ne viens pas cet après-midi, tu le regretteras. Non
seulement tu deviendras sourd pour de bon à m’entendre te crier dessus, mais en
plus ton handicap ne le sera plus pour de faux. J’espère qu’on se comprend. Silence
CESAR. - Honorine, je te le dis solennellement, je ne viendrai pas. Je ne viendrai
plus. Et tu ne me fais pas peur.
HONORINE. - Espèce de …
Entre Marius.
MARIUS. - Voilà j’ai trouvé la facture !
Silence. Honorine continue à fixer César.
MARIUS. - Tu veux plus voir la facture ?
HONORINE. - Montre-moi ça ! Elle lit le document. Ah le couillosti ! Il va m’entendre !
Et toi Marius, quand il t’a fait ce tarif, tu n’as rien dit bien sûr !...
MARIUS. - Ben qu’est-ce que tu voulais que je dise ? C’est lui le patron du bar !
HONORINE. - Vous êtes une vraie famille de chiapacans. Vous allez me le payer…
tous les deux !
La pension de César
Page 39
Honorine sort. César et Marius s’assoient à table en silence et se servent à boire.
CESAR. - Je crois qu’on s’est fait de nouveaux amis aujourd’hui.
MARIUS. - Oui. C’est une bonne journée. Ils trinquent
NOIR
La pension de César
Page 40
Acte 2
Même décor.
Scène 1 Fanny, Emile
Fanny et Emile assis chacun à un bout de la table mais en faisant face au public.
EMILE. – On choisit quelle date pour le mariage ?
FANNY. - Le 15 juin !
EMILE. – Tu as l’air bien décidée. Pourquoi particulièrement le 15 juin ?
FANNY. - Parce que j’ai reçu ta lettre de demande en mariage le 15 octobre, je t’ai
répondu que j’allais réfléchir le 15 novembre, puis tu m’as refait ta demande
oralement le 15 décembre et j’ai accepté le 15 janvier. Ensuite, le 15 février ça
tombait le jour du salon du mariage au parc des expositions où j’ai choisi ma robe, et
le 15 mars c’est le jour où j’ai enfin trouvé les chaussures assorties à la robe.
EMILE. – Oui, mais alors pourquoi pas le 15 mai ?
FANNY. - Parce que aujourd’hui on est le 15 avril.
EMILE. – Et alors ?
FANNY. - Le 15 avril je déclare qu’on se mariera le 15 juin. Voilà !
EMILE. – Dans ce cas…
FANNY. - Il faudrait maintenant commencer à réfléchir au voyage de noce.
EMILE. – Justement, j’avais une petite idée. Pour le voyage de noce, pourquoi on
n’irait pas au centre de vacances de la Mairie, près de Forcalquier ? Il parait que
c’est bien.
La pension de César
Page 41
FANNY. - Ah ! Ça pas question ! J’y suis déjà allée pendant mes congés payés avec
Jeannine du service des Arrêts Maladie et je ne veux plus y retourner.
EMILE. - Jeannine, la grande brune qui zozote ?
FANNY. - Non, je parle de Jeannine Galibier, la sœur du chef du service de la
comptabilité des RTT. Mais c’est normal que tu confondes. Au service de gestion des
arrêts maladie il y a 3 Jeannine. C’est un gros service, ils sont au moins 30 à pointer
là-bas.
EMILE. - Eh oui, ça fait du monde
FANNY. - La Jeannine avec qui je suis partie, elle est au sous-service de gestion des
arrêts maladie des employés du service des arrêts maladie.
EMILE. - Ah oui ? Et ils sont combien dans son sous-service ?
FANNY. - Je crois qu’ils sont 7, mais c’est pour pouvoir assurer la continuité du
service puisqu’en général il y en a toujours 4 en arrêt maladie.
EMILE. - Eh oui, ça fait du travail.
FANNY. - En tout cas ne me parle pas d’aller au centre de vacance de Forcalquier.
Quand j’y suis allé on a fait une sortie « ballade » qu’ils disaient. Ils m’ont fait faire le
tour de la montagne de Lure à pied ! Même pas un bus ou un tramway. Rien. A pied !
Tu te rends compte ? J’ai eu les pieds gonfles pendant une semaine. Maintenant je
comprends pourquoi on appelle ça des congés payés. Personne ne le ferait
gratuitement.
EMILE. - Eh oui, ce n’est pas reposant… Et si on allait en Italie ?
FANNY. - Ah oui ! C’est une bonne idée. Tu m’emmènes où ?
EMILE. - Bé un truc sympa c’est de faire le marché de Vintimille. Y a un bus qui fait
l’aller retour sur la journée du vendredi au départ du Vieux-Port. Faut se lever tôt
mais on fait l’économie de l’hôtel. En plus on peut faire des bons achats au marché
de Vintimille.
FANNY. - Oui c’est une idée. Je pourrais ramener du pastis à César, c’est moins cher
là-bas. Ce sera toujours ça d’économisé.
La pension de César
Page 42
EMILE. - Eh oui, c’est moins cher… Mais attention, pas d’articles de contrefaçon. Y a
beaucoup de marchands qui en proposent en Italie. En plus, il parait qu’il y a la
douane violente qui fait des contrôles sur la route du retour.
FANNY. - Pas de risque que je prenne ce genre d’article. Marius m’en ramène tout le
temps, sauf que lui c’est des vraies contrefaçons, pas des fausses comme on en voit
souvent au marché de la Plaine à Marseille.
EMILE. - Eh oui, faut faire attention à ce qu’on achète… Bon alors c’est dit. Le voyage
de noces on le fait en Italie.
FANNY. - D’accord !... Mais une seule journée, ce n’est pas un peu court ?
EMILE. - Eh oui, c’est un peu court… J’ai une idée ! Puisque le voyage à Vintimille
c’est le vendredi. Le samedi on peut faire le marché des santons à Aubagne ?
FANNY. - Oui c’est une idée… mais un autre mois alors. Parce que si on se marie en
juin et qu’on fait le marché de Vintimille juste après le mariage, on devra attendre fin
novembre pour aller à Aubagne. Le marché des santons, ils ne le font que pour Noël.
EMILE. - Eh oui, faudra attendre un peu… Mais ce n’est pas grave, on aura
l’impression de faire 2 voyages de noces comme ça.
FANNY. - Reste que ça fait que 2 jours. C’est un peu court pour un voyage de noces.
EMILE. - Eh oui, c’est un peu court… J’ai une idée ! On prolonge sur le Dimanche et
on fait le train des neiges du Conseil Régional. Mais sans en parler aux collègues de
la Mairie parce que ça peut nous porter tort. Tu connais les relations entre le maire
de Marseille et le président du Conseil Régional !
FANNY. - Oui ton idée me plait… Mais le train des neiges je crois qu’ils ne le font
qu’en février. Faudra encore attendre 2 mois après le marché des santons.
EMILE. - Eh oui, faudra encore attendre… Mais regarde ! Ça nous fera un vrai
ouiquende prolongé ! C’est pas beau ça ?
FANNY. - Ah oui c’est génial ! Vendredi, Samedi et Dimanche. Ça c’est un vrai
voyage de noce comme j’en ai toujours rêvé.
EMILE. - Eh oui, ce sera un beau voyage.
La pension de César
Page 43
FANNY. - En plus, avec un peu de chance ça tombera au moment où j’aurai le piston
pour mon changement d’affectation à la Mairie.
EMILE. - Ah oui ? Tu vas changer ?
FANNY. - Oui, je vise la place de Fabrice, le neveu du beau-frère du cousin à Olivier
Olive, l’adjoint au Maire délégué aux apéros de départ des employés municipaux.
Il a une bonne place Fabrice, mais il a bientôt 52 ans et il va certainement prétendre
à ses droits à la retraite.
EMILE. - Eh oui, c’est vieux 52 ans… Et où il travaille Fabrice ?
FANNY. - Il est au service de gestion des heures supplémentaires des employés
municipaux. C’est dire le peu de travail qu’il a !
EMILE. - Eh oui, c’est vrai que des heures supplémentaires on en fait pas beaucoup à
la Mairie.
Fanny. – Oh ! Tout le monde sait que c’est très exagéré… quoi que.
Emile. - Bon, je dois partir. C’est bientôt l’heure de la fin de mon service et il faut
que j’aille pointer ma fin de journée.
FANNY. - Eh oui, il se fait tard, il est presque 4 heures.
EMILE. - Je ne voudrais pas être en retard car mon chef n’aime pas quand on pointe
après l’heure. Ça fait des heures supplémentaires... On ne veut pas donner trop de
travail à Fabrice, hi hi…
FANNY. - Eh oui, surtout à son âge, hi hi… Oh Attends, avant de partir il faut que je te
donne les catalogues pour la liste de mariage, tu pourras les regarder tranquillement
au travail. C’est Nine qui me les a donnés. Elle propose de déposer la liste à sa
droguerie.
EMILE. - Oui, c’est une bonne idée. En plus c’est à côté.
FANNY. - Ne bouge pas, je vais les chercher dans ma chambre.
Fanny sort. Emile reste seul.
La pension de César
Page 44
Scène 2 : Emile, Honorine, Fanny
Arrive Honorine. Emile est toujours assis à la table, face au public.
HONORINE. - Y a quelqu’un ? La porte était ouverte.
EMILE. - Bonjour Honorine.
HONORINE. - Adieu Emile. Tu es seul ? Je suis venue voir César, il n’est pas là ?
EMILE. - Non, il n’est pas là. Je suis avec Fanny, mais elle est sortie une minute. Elle
ne va pas tarder.
HONORINE. – J’ai entendu parler de votre projet de mariage. Félicitation et Bravo.
EMILE. - Merci.
HONORINE. - Eh oui, faut être vraiment courageux pour épouser une Raspigoule.
EMILE. - Pourquoi tu dis ça ?
HONORINE. - Parce que dans cette famille, ils sont tous fadas et méchants.
EMILE. - Pas Fanny. Je peux t’assurer qu’elle est très gentille.
HONORINE. - Oui, crois-le, gentil a qu’un œil, et Fanny elle en a deux. Tu es un brave
garçon Emile, et je pense que tu mérites mieux. Mais c’est ton choix.
EMILE. - Oui, c’est mon choix et j’en suis très heureux.
Honorine s’avance vers Emile toujours assis.
HONORINE. - C’est quand même dommage. Un garçon joli comme toi peut prétendre
à mieux que Fanny.
Elle s’avance encore et fait mine de trébucher pour se retrouver assise sur les
genoux d’Emile.
La pension de César
Page 45
HONORINE. - Oh pardon ! J’ai perdu l’équilibre. J’espère que je ne t’ai pas fait mal ?
EMILE. - Non ça va, mais tu veux bien te relever Honorine ?
HONORINE. - On n’est pas bien comme ça mon Emilou ? Elle lui caresse les cheveux.
Ils sont doux tes cheveux. Tu utilises un shampoing en particulier ?
EMILE. - Euh, … non,… juste du savon de Marseille…
HONORINE en caressant le visage d’Emile. - Et ta peau est douce. Tu utilise de la
crème pour le visage ?
EMILE. - Euh… non… juste du savon de Marseille….
HONORINE en approchant sa tête du cou d’Emile. - Et tu sens très bon. Tu utilise un
parfum ? Lequel ?
EMILE. - Euh… non… juste du savon de Marseille…
HONORINE – Ah, le savon de Marseille ! Cela te va si bien !
EMILE. - Arrête Honorine ! Ça me gêne et Fanny va arriver d’un instant à l’autre.
HONORINE. - Ne t’inquiète pas mon biquet… Tu es très confortable… Tu n’as pas trop
chaud ? Tu es habillé comme un Saint-Georges…Oh ! C’est quoi le truc dur que je
sens sous mon taffanari ?
EMILE. - C’est juste ma canne.
HONORINE. - Oh, ta canne ? Je pensais à autre chose… Mais ma foi, la canne c’est
bien aussi. On néglige souvent les accessoires.
EMILE. - Honorine, lève-toi je t’en supplie !
HONORINE. - Tu n’aimes pas quand je te caresse les cheveux mon gari ? Tu préfères
qu’on fasse autre chose ? Elle commence à lui caresser le torse. Tu es bien bâti on
dirait. Tu ne vas quand même pas me faire croire que ça ne te fait aucun effet ? Tu
n’aimes pas quand une galine te touche comme je sais si bien le faire ?
La pension de César
Page 46
EMILE. - Arrête ! Arrête !
HONORINE. - D’accord, mais d’abord dis-moi que tu aimes ça.
EMILE. - Oui, oui, j’aime ça ! Mais, je t’en supplie…
Arrive Fanny sur cette dernière réplique.
FANNY. - Tu aime quoi ?!
EMILE confus. - Fanny !… je vais t’expliquer… ce n’est pas ce que tu crois….
HONORINE en se levant tranquillement - Bonjour Fanny. Je disais justement à Emile
qu’il est un garçon très confortable. Tu as de la chance de l’avoir bientôt comme
mari.
FANNY. - Ce n’est pas encore fait. Loin de là ! Pour l’instant, c’est lui qui a de la
chance que je ne l’étripe pas sur le champ. Et toi aussi par la même occasion.
HONORINE. - Je crois que ça se gâte. Vous avez certainement des choses à vous dire
et je ne veux pas gâcher ce moment d’intimité. J’étais juste venu voir César, mais
comme il n’est pas là, je repasserai. Honorine se dirige vers la sortie. Au revoir
Fanny. A bientôt Emile.
Silence. Fanny va s’assoir en face d’Emile et s’effondre en larmes.
EMILE. - Fanny, je te jure que c’est un malentendu. C’est Honorine qui s’est jetée sur
moi.
FANNY. - Je sais Emile. Je connais Honorine. Tout le monde la connait… Mais tu
n’as rien fait pour la repousser…
EMILE. - Ce n’est pas vrai. Je te jure.
FANNY. - Tu m’as terriblement déçu.
EMILE. - Je t’en prie Fanny, crois-moi. Laisse-moi t’expliquer.
La pension de César
Page 47
Fanny. - Emile,…
EMILE. - Oui Fanny
FANNY. - Sors d’ici.
EMILE. - Mais Fanny !
FANNY. - Sors d’ici de suite ! Boulègue !
Emile sort et Fanny s’effondre de nouveau en larmes sur la table.
La pension de César
Page 48
Scène 3 : César, Fanny, Marius
Arrivent César et Marius, visiblement ivres et rigolards. Marius voit le premier Fanny,
la tête dans les bras croisés sur la table.
MARIUS. - Oh Fanny ! Si tu veux faire un pénéquet, pourquoi ne vas-tu pas dans ta
chambre ? Tu y seras mieux.
CESAR. - Tais-toi couillon ! Tu ne vois pas qu’elle ne dort pas, elle pleure. Fanny, ça
va ?
FANNY. - C’est Emile.
CESAR. - Quoi Emile ? Il lui est arrivé quelque chose de grave ?
FANNY. - Non, c’est à moi qu’il est arrivé quelque chose de tragique.
CESAR. - Mais dis-nous, qu’est-ce qui t’es arrivé ?
FANNY. - J’ai surpris Emile avec Honorine sur ses genoux. Cette radasse était en
train chasper mon Emile. Tu te rends compte ?
MARIUS. - Ma pôvre Fanny !
CESAR. - Tu connais Honorine. On connait tous Emile. Je ne pense pas que c’est lui
qui ait pris l’initiative.
FANNY. - Je sais, mais ça m’a fait quand même un choc. J’étais toute estransinée.
Alors je n’ai pas pu faire autrement que de le mettre dehors.
MARIUS. - Tu as bien fait ! On doit rester toujours dignes dans la famille !
CESAR. - Et maintenant, qu’est-ce que tu vas faire ?
FANNY. - Ben je vais rendre les catalogues à Nine bien sûr ! Qu’est-ce que tu crois ?
CESAR. - Hein ?
La pension de César
Page 49
FANNY. - Laisse tomber. Je ne veux plus en parler et je ne veux plus entendre parler
d’Emile. Je vais prendre l’air.
Fanny s’avance vers la sortie avec les catalogues en main.
MARIUS. - Plutôt que de sortir, tu ne veux pas faire un aïoli ? Ça te changera les
idées.
Fanny se retourne pour regarder Marius puis sort en silence.
Marius et César vont s’assoir à la table et se servent à boire.
La pension de César
Page 50
Scène 4 : César, Marius
CESAR. - C’est dommage, j’aimais bien Emile. Je commençais à m’y habituer.
MARIUS. - Eh ouai.
CESAR. - D’un autre côté c’est embêtant pour Fanny. Ça devient difficile de se caser
à son âge. Elle est pas cabestron, mais elle n’est pas bombasse non plus.
MARIUS. - Je peux regarder dans la liste des membres de l’association s’il n’y en a
pas un qui ferait l’affaire ?
CESAR. - Pourquoi pas, ça mange pas de pain.
MARIUS. - En tout cas c’est un mal pour un bien.
CESAR. - Pourquoi ?
MARIUS. - Parce que si j’avais eu Emile comme beau-frère, j’aurais été obligé de le
prendre comme co-équipier au tournoi de babyfoot, vu que toi tu ne veux plus y
participer, et il joue comme un pied.
CESAR. - Tu n’as qu’à présenter à Fanny le gagnant du dernier tournoi.
MARIUS. - ça c’est une idée !
Ils rigolent et ils trinquent.
CESAR. - Bon allez, elle ne va pas en mourir, et puis de toute façon, je n’avais pas de
cavalière pour le mariage.
MARIUS. - Moi non plus.
CESAR. - J’aurai toujours pu prendre Honorine en désespoir de cause… Honorine la
coquine. Ah ah ah
MARIUS. - Ou alors Jeannette, qui n’a plus toute sa tête. Ah ah ah
La pension de César
Page 51
CESAR. - Ou Joséphine, qui n’est pas très fine. Ah ah ah
MARIUS. - Ou Eleonor, qui perd le nord. Ah ah ah
Ils rigolent et ils trinquent.
CESAR. - Et si je te prenais toi comme cavalière ? César se lève, tend la main à
Marius Mademoiselle, vous dansez ?
Marius avec une vois féminine : Je ne peux pas, je garde le sac de ma copine qu’est
aux cabèches.
CESAR. - Voyons, il peut se garder tout seul le sac, ne vous inquiétez pas, il n’y a pas
de voleur dans cette maison… Allez, pas de chichi…
MARIUS. - Je ne sais pas. Il faut d’abord que je demande à mon frère.
CESAR. - Il est d’accord. Je lui ai déjà demandé la permission.
MARIUS. - Dans ce cas, puisque mon frère est d’accord…
Marius se lève et ils se mettent à danser ce qui ressemble à une valse.
MARIUS. - Oh grand fou ! Tu me donnes le vire-vire !
Arrive Aline Dupuis qui se tient au coin de la scène et les observe.
CESAR. - Oui, j’ai une réputation de très bon danseur dans le quartier. Je suis le roi
du baletti !
MARIUS voyant Aline. - Oh César regarde ! On a de la visite. C’est peut-être ma
cavalière ?
César va vers Aline et la prend dans ses bras pour la faire danser.
CESAR. - Non Marius, c’est la mienne, je l’ai vu le premier.
MARIUS en riant. - Ah César ! Quel danseur ! Et quel tombeur !
La pension de César
Page 52
Aline se dégage des bras de César.
Scène 5 : César, Marius, Aline puis Fanny
ALINE. - Je suppose que vous êtes César Raspigoule ?
CESAR. - Pour vous servir chère Mademoiselle ! Et à qui ai-je l’honneur ?
ALINE. - Aline Dupuis, du service de vérification de la caisse primaire centrale
d’assurance maladie de Marseille
CESAR. - Personne n’est malade ici, mais c’est gentil de vous en inquiéter.
Arrive Fanny avec des béquilles à la main.
FANNY. - César, César, prends vite les béquilles, y a la contrôleuse de la sécu qui est
dans le quartier. Elle va certainement arriver d’un moment à l’autre.
ALINE. - Non. Elle est déjà là !
MARIUS. - Où ?
César retrouvant son sérieux. - En face de moi teste d’aï. Tu n’as pas compris que
c’est Madame ?
ALINE. - Donc maintenant que les présentations sont faites, nous pouvons passer à la
suite. Que dis-je la suite. A la fin tout simplement, car ce que je viens de voir me fait
dire que ce contrôle ne sera qu’une petite formalité. Apportez-moi votre dossier
d’invalidité s’il vous plait.
CESAR. - Vous ne l’avez pas avec vous ?
ALINE. - Je l’ai laissé dans ma voiture, mais si vous faites l’effort de me prêter le
votre, je serai peut-être plus indulgente… J’attends.
Fanny va prendre un dossier dans un tiroir et le porte à Aline qui va s’assoir à table
pour le consulter.
La pension de César
Page 53
ALINE en lisant. -: Hum,.. oui,… oui,… hum,… oui, … silence. Bon. On va donc faire
directement les comptes. Ce n’est pas la peine de perdre de temps, ni le mien qui est
précieux,… ni le votre, Monsieur Raspigoule, puisque vous allez devoir rapidement
vous mettre en quête d’un travail.
CESAR. - Quels comptes ?
ALINE. - Mais ce n’est pas compliqué, vous allez simplement rembourser à la Sécu
toutes les sommes que vous avez illégalement perçues depuis votre déclaration
d’invalidité, il y a … en regardant le dossier… plus de 20 ans ! Sans compter les
intérêts et les pénalités bien entendu. Vous auriez une calculatrice pour que je vous
fasse la note ?
FANNY. - Ecoutez Madame, il y a un malentendu, ça ne devait pas se passer comme
ça. Vous ne voulez pas qu’on recommence du début ? Normalement César devrait
être assis au moment où vous arrivez.
ALINE. - Pardon ?
FANNY. - mais oui, vous arrivez,… César ne peut pas se lever,… moi je viens avec la
canne…
CESAR. - Fanny ce n’est pas la peine… Ce n’est plus la peine.
FANNY. - Mais comment ce n’est pas la peine ?! On préparé tout ça pour rien ?! On
ne peut pas rester là à rien faire !
César. - Madame ne me semble pas du genre que l’on peut berner facilement. Il faut
se rendre à l’évidence, on s’est fait aganter. Cest fini.
ALINE. - Eh oui, les évidences sont parfois trompeuses, mais en l’occurrence il n’y a
aucun doute sur le fait que vous avez abusé la Sécurité Sociale pendant plus de 20
ans.
CESAR. - Et l’indulgence ?
ALINE. - Quelle indulgence ?
CESAR. - Vous nous aviez dit que vous pourriez être indulgente.
La pension de César
Page 54
ALINE. - Doucement ! Avant d’envisager toute indulgence, il faut que j’estime le
montant du larcin.... Calculatrice !
Marius apporte une calculatrice et la pose sur la table.
ALINE. - Vous me laissez quelques instants pour calculer ? C’est qu’il y en a des
chiffres dans cette affaire !
Aline pianote la calculatrice pendant que les autres la regardent. Au bout de
quelques instants, elle reporte un montant sur une feuille posée sur la table et la
tourne vers César.
ALINE. - Voilà le total. Je vous ai fait une ristourne sur les pénalités.
CESAR calmement en regardant le montant. - C’est ce que vous appelez être
indulgente ?
Silence
ALINE. - Vous avez une autre proposition ?
Silence
MARIUS. - Excuses-moi César, mais vu l’orientation que semble prendre cette affaire,
je crois que c’est à moi de prendre le relai.
Marius vient s’assoir calmement à la table, face à Aline. Ils se regardent dans les
yeux.
Marius prend la feuille sur laquelle se trouve le montant inscrit par Aline. Il lit, puis
griffonne à son tour un montant et tourne la feuille vers Aline.
Aline regarde ce que vient d’écrire Marius, raye, inscrit un autre montant et le tourne
vers Marius en ajoutant,
ALINE. - En espèces.
MARIUS en regardant la feuille. - C’est une grosse somme. Il faut du temps pour la
réunir.
La pension de César
Page 55
ALINE. - Je n’ai pas le temps d’attendre.
Marius inscrit un autre montant sur la feuille et la tourne vers Aline en ajoutant,
MARIUS. - Disponible de suite.
ALINE regarde le montant. - Qu’est-ce que entendez par « de suite » ?
MARIUS. - Le temps d’aller le chercher, c’est à dire environ un quart d’heure. C’est
ma dernière offre.
ALINE. – Je ne pense pas que vous soyez en position d’imposer quoi que ce soit,…
Marius. Votre choix est limité. Un mauvais accord avec moi, ou la ruine pour votre
frère et toute sa famille.
MARIUS. – Votre choix aussi est limité,… Aline. Un bon accord avec moi ou
euh…rien. Pause. C’est ma dernière offre.
Silence
ALINE. - OK
CESAR. - Quelle garantie avons-nous que vous ne reviendrez pas où qu’un autre
contrôleur ne passera pas bientôt ?
ALINE. - ma parole… puis en regardant Marius… C’est important la parole en affaires,
n’est-ce pas, Marius ?
MARIUS fixant Aline dans les yeux. - Oui c’est très important, Aline… puis à César… Il
n’y aura pas de problème.
ALINE. - Bon, je ne vais pas rester ici à attendre que vous reveniez. Je vais faire un
tour et repasserai dans un quart d’heure.
Aline sort. Les autres restent un moment sans rien faire.
CESAR à Marius. - Qu’est-ce que tu attends ? Allez file chercher les belins !
Boulègue !
Marius sort.
La pension de César
Page 56
Scène 6 : Fanny, César puis Emile
César et Fanny s’assoient à la table. Fanny dos à la porte.
FANNY. - Fallait bien que ça arrive un jour.
CESAR. - On s’en sort plutôt bien.
FANNY. - Oui mais quand même ! Avec tout ce qu’on a fait pour se préparer au
contrôle, on ne mérite pas ça.
CESAR. - C’est la faute à pas de chance.
FANNY. - C’est la faute à tonton.
CESAR. - Il n’y est pour rien.
FANNY. - Il n’avait qu’à pas partir à la retraite. Voilà !
CESAR. - Tu dis ça parce que tu es en colère.
FANNY. - Oui je suis en colère et en plus c’est pas ma journée !
CESAR. - Tu es embarrassée ?
FANNY. - ça ne te regarde pas ! C’est des affaires de femmes !
CESAR. - Je ne dis plus rien.
Silence. Arrive Emile. César et Fanny on les yeux baissés et ne le voient pas.
EMILE hésitant. - Hum Hum
CESAR lève les yeux et voit Emile. - Oh Mastre !
La pension de César
Page 57
EMILE. - Non, moi c’est Emile. Emile..
CESAR. - ça va, on ne va pas répépier ! On l’a déjà fait ce passage.
EMILE. - Oui tu as raison… Fanny, s’il te plait, j’aimerais que tu m’écoutes. Il y a eu
un vrai malentendu.
FANNY. - Je ne veux pas savoir. Va-t’en !
EMILE. - Mais Fanny !
FANNY. - Tu n’as pas compris ? Fout moi le camp ! Boulègue !
CESAR. - Faut l’excuser, elle est embarrassée.
FANNY à César. - Toi, tu te la clave !
CESAR à Emile. - Tu vois ?
EMILE. - Oui, moi aussi je suis très embarrassé …César le regarde étonné…par ce
qui s’est passé.
FANNY. - Ce n’est pas la même chose.
EMILE. - Ben oui je sais. Ce n’est pas toi qui avais Honorine sur les genoux.
FANNY. - Mais il ne comprend rien à rien ! Arrête Emile, tu ne fais que m’engatser
encore plus.
EMILE. - Je me tais… silence… oui mais comment t’expliquer ?
FANNY. - Mais qu’il est lourd ! Dis-lui César s’il te plait.
CESAR. - Emile, il n’y a rien contre toi, mais tu tombes plutôt mal. Mais ne t’inquiètes
pas, ça va finir par s’arranger avec Fanny.
La pension de César
Page 58
FANNY. - Minute papillon ! Je ne vais pas passer l’éponge aussi facilement.
EMILE. - Dis-moi ce que tu veux que je fasse et je le ferai sans discuter.
FANNY. - Je vais réfléchir, mais prépare-toi à un gros châtiment. Tu m’as quand
même fait perdre figure devant cette radasse d’Honorine qui ne va pas se gêner pour
le raconter à tout le monde dans le quartier. C’est une vraie bartavellle.
La pension de César
Page 59
Scène 7 : César, Fanny, Emile, Marius
Arrive Marius avec un sachet plastique transparent contenant les billets.
CESAR à Marius. - C’est quoi ce saquetti ? Tu n’as rien trouvé de mieux pour mettre
l’argent ? Tu as l’air d’un boumian. Pense un peu à la réputation de la famille ! On
traite une affaire importante !
Marius. - C’était pour être plus discret dans la rue. J’ai bien une mallette, mais elle
me sert pour les voyages en Suisse. Et puis j’ai vu qu’Aline avait un grand sac à
main. Je pense que ça ne la gênera pas.
CESAR. - Aline ?!
MARIUS. - Quoi ? Ce n’est pas comme ça qu’elle s’appelle ?
CESAR. - Oui, mais je la verrai mieux avec un nom d’oiseau.
MARIUS. - Tu es en colère ou tu es jaloux ?
CESAR. - Ni l’un, ni l’autre. Je trouve juste que tu es un peu trop familier avec cette
voleuse.
MARIUS. - On s’en sort plutôt bien. Et je n’ai pas souvent l’occasion de faire des
affaires avec une femme. Jolie en plus !
CESAR. - Parce que tu appelles ça faire des affaires ? Faudrait voir à te calmer. Tu
as vu comme tu la bades ? J’ai l’impression que le portefeuille te descend un peu
trop bas dans le pantalon. Es-tu au moins certain d’avoir négocié au mieux de nos
intérêts ?
MARIUS. - Enfin César ! Le bizinesse ça me connait !
CESAR. - Bon de toute façon, ce qui est fait est fait. Maintenant donne-moi l’argent,
c’est moi qui lui donnerai, et toi tu peux partir.
MARIUS. - Mais non ! J’ai commencé, je termine. C’est moi qui dois lui remettre les
belins en mains propres.
La pension de César
Page 60
CESAR. - Je t’ai dit de me donner ce saquetti. Ne discute pas.
MARIUS. - Viens le chercher.
César s’avance vers Marius qui part de l’autre côté de la scène en rigolant.
CESAR. - Ah ouai ? Tu veux jouer à ça ? Commence une course poursuite entre les 2
frères.
FANNY. - Ah les minots !
EMILE. - Bon, je vois que vous avez à faire. Je ne vais pas vous déranger plus
longtemps.
Emile s’avance vers la sortie où Manon Bastide qui venait d’arriver, regardait César
et Marius courir sur scène. Emile boite canne à la main, en direction de la sortie..
La pension de César
Page 61
Scène 8 : César, Marius, Fanny, Emile, Manon Bastide
MANON. - Bonjour. Contrôle de la Sécurité Sociale.
Tout le monde se fige. César en profite pour prendre le sac à Marius.
MARIUS. - Encore ?! Mais vous êtes combien oh !? Y aura pas de belins pour tout le
monde. Faudra voir à vous arranger entre vous.
MANON. - Mais de quoi parlez-vous ?
CESAR. - Ben de l’autre contrôleuse. Y en a déjà une qui vient de passer.
MANON. - Ah bon ? Ah mais non ! Il y a erreur. Je suis la seule habilitée sur le
secteur. Mais cela ne m’étonne qu’à moitié. Il y a une fausse contrôleuse qui sévit en
ville depuis quelques jours, et qui extorque les pensionnés en leur faisant croire qu’ils
ont trop perçu de la sécu. Vous en avez été victimes ?
CESAR qui cache le sac d’argent dans le dos. - Hélas oui madame. Elle a essayé de
nous faire tomber dans sa trapannelle. Elle vient juste de partir, mais on n’a rien
raqué !
MANON. - Il faut réagir tout de suite. Si vous voulez je peux enregistrer votre plainte.
Je suis assermentée.
CESAR. - Vous êtes aussi dans la police ?
MANON. - Restrictions budgétaires dans les administrations, on devient multitâche. Je
suis à la fois contrôleuse de la Sécurité Sociale et officier de la Police Nationale.
Mais j’ai de la chance, j’ai un collègue qui cumule un poste à la sécu avec un autre
de cantonnier au service des routes. ... Le temps de sortir le bon formulaire et je
prends note de votre plainte.
MARIUS. - Merci, mais ce n’est pas la peine. Elle n’a pas réussi à nous entuber et
nous ne voulons pas avoir d’histoires. Vous savez… les représailles et tutti quanti.
FANNY. – Bien sûr que si qu’on va porter plainte. On ne va pas la louper cette
piacampi !
La pension de César
Page 62
CESAR à Fanny. – Marius à raison, ce n’est pas le moment de se faire remarquer.
FANNY. – Ouai. Mais elle ne perd rien pour attendre.
MANON. - C’est vous qui voyez. Bon, ben puisque je suis là on peut commencer le
contrôle. Regardant Emile avec sa canne. Je suppose que vous êtes César
Raspigoule ?
EMILE. - Euh… ben…
TOUS LES AUTRES EN CHŒUR en le montrant du doigt. - OUI, C’EST LUI !
MANON. - Bien, je m’en doutais. Je me présente, Manon Bastide, et voilà ma carte
professionnelle attestant de ma fonction. Merci de vérifier.
Manon présente sa carte à Emile qui la regarde sans avoir l’air de comprendre.
Fanny lui arrache la carte des mains, la regarde et la fait passer à Marius qui à son
tour la regarde et se la fait prendre par César qui regarde la carte attentivement.
CESAR. - Vous êtes plus jolie en vrai qu’en photo, Madame … ou Mademoiselle ?
MANON intimidée. - Euh…Merci …c’est mademoiselle.
EMILE. - J’allais partir, alors je vous laisse.
FANNY. - Toi tu ne bouge pas, compris ?! Emile se fige. Euh, je veux dire, viens
t’assoir à table… en s’approchant d’Emile… CESAR… En aparté à Emile. Tu n’as
pas intérêt à broncher ! Si tu veux payer ta dette, c’est le moment.
Emile va s’assoir à la table. Fanny lui prend la canne.
FANNY à Manon. - Excusez-moi, il fallait que je trouve mes marques. Voilà. On est
prêt. Vous pourriez recommencer du début s’il vous plait ?
MANON. – Euh,.. Oui,.. bon… je disais…ah oui… Je me présente, Manon Bastide,
contrôleuse de la Sécurité Sociale.
MARIUS. - Vous ne vous appelez pas Gretel Stoeffler ?
La pension de César
Page 63
César donne une tape sur la tête de Marius.
MANON à Emile. - Vous êtes bien César Raspigoule ?
CESAR vient se mettre debout derrière Emile. - Oui Mademoiselle, c’est lui. Mais je
vous prie de l’excuser de rester assis, avec sa jambe handicapée, il ne peut pas se
lever.
FANNY. - Mon dieu César, excuse-moi ! En faisant le ménage j’ai déplacé ta canne
sans le faire exprès. Attends, je vais la chercher. Fanny prend la canne d’une autre
main et la tend à Emile. Voilà mon César, et encore désolée.
CESAR. - Mes hommages Mademoiselle. Que nous vaut le plaisir de cette visite
inattendue ?
MANON à Emile. - Oh juste un petit contrôle de routine. Je suis venue m’assurer que
votre pension vous était bien versée et correspondait bien à votre handicap.
CESAR. - Je suis, je veux dire Emm..César est à votre entière disposition chère
Mademoiselle. Puis-je vous offrir un verre, nous étions justement sur le point de
prendre un pastis. Un pastis, cela ne se refuse pas. Le pastis, c’est tout un symbole
dans une maison marseillaise. Symbole de l’amitié et du soleil. D’ailleurs, savez-vous
d’où vient le nom du pastis ?
MANON. - Eh bien il vient du provençal « Pastisson » et de l’italien « Pasticchio », qui
signifie mélange ou amalgame.
CESAR. – Oui c’est ça ! Le pastis n’est pas un simple apéritif,
MANON. - C’est le résultat d’une subtile association de saveurs,
CESAR. – finement élaboré par Paul Ricard, notre Saint-Paul, qui a su trouver dans
les années 20 la recette parfaite associant dans un équilibre parfait,
MANON. – L’anis vert
CESAR.- L’anis étoilé
MANON.- Et la réglisse !
La pension de César
Page 64
César et Manon éclatent de rire.
CESAR.- Vous êtes une connaisseuse.
MANON. – Mon père a fait toute sa carrière chez Pernod.
CESAR.- Ce n’est pas croyable ! Mon père a fait toute sa carrière chez Ricard !
MANON. – Les ennemis jurés,
CESAR. – Mais qui ont décidé de s’unir en 1975 pour créer le groupe Pernod-Ricard !
MANON. – L’année de ma naissance.
CESAR.- Alors on est presque de la même famille ?
MANON. – On s’est peut-être même déjà vu aux réunions familiales de la société.
CESAR. – Alors, vous ne refuserez pas de prendre le pastagua avec moi ?
MANON. - Je vous remercie beaucoup, mais je suis actuellement en service et ne
peut accepter,… et il n’est que quatre heures, mais c’est très aimable à vous. Je ne
veux pas abuser de votre temps, à Emile, aussi pourrais-je juste ausculter votre
jambe, objet du handicap mentionné dans votre dossier ?
CESAR. - Mais bien entendu chère Mademoiselle. Comment voulez-vous procéder ?
MANON. - Je vais simplement reculer de quelques pas et vous avancerez vers moi
quand je vous le dirai. En vous aidant de votre canne, bien entendu. Je ne voudrai
pas vous occasionner un malencontreux accident.
Manon recule de 2 pas.
MANON. - Allez-y maintenant si vous le voulez bien.
FANNY à Emile. - Debout toi !
La pension de César
Page 65
Emile s’exécute. César le pousse en avant.
MARIUS avec une voix féminine. - Sois prudent César. Tu n’as pas l’habitude de
marcher une aussi longue distance. Fanny fait les gros yeux à Marius… Pardon. Un
réflexe.
CESAR. - Ne t’inquiète pas Fanny, Mademoiselle sait ce qu’elle fait. Elle est une
contrôleuse compétente, cela se voit.
Emile avance doucement en boitant et en s’aidant de sa canne.
MANON. - Très bien Monsieur, je ne vous en demanderai pas plus. Fanny se précipite
avec une chaise pour l’obliger à s’assoir. Je vous remercie pour cet effort. Mon
contrôle est terminé. Il faut maintenant que je remplisse quelques papiers et j’en
aurais complètement fini. Je peux m’assoir ?
César lui présente une chaise en souriant : Manon s’assoit à table et ouvre le dossier
qu’elle avait avec elle. Emile est toujours assis sur une chaise au milieu de la scène.
EMILE. - Et moi, qu’est-ce que je fais ?
FANNY. - Tu restes assis et tu te la clave !
MANON regarde le dossier. - Ah zut ! Le numéro de sécurité sociale est illisible. A
Emile. Vous n’auriez pas votre carte Vitale sur vous ?
EMILE en mettant sa main dans la poche. - Oui bien sur.
CESAR sort une carte de sa poche et la tend à Manon. - La voilà ! A Emile. Tu l’avais
faite tomber César.
Emile qui vient de sortir une carte Vitale de sa poche la regarde sans comprendre.
MANON. - Merci. Au fait, nous n’avons pas été présentés. Vous êtes ?
EMILE. - C’est César.
La pension de César
Page 66
CESAR. - io !... Césario, le cousin de César. Eh oui, dans la famille nos parents
n’avaient pas beaucoup d’idées.
MANON regardant Fanny et Marius. - Et vous ?
FANNY. - Moi c’est Fanny, la sœur de César, et lui c’est Marius, le caganis… le petit
frère quoi.
MANON. - Oui j’avais compris. Je suis de Marseille vous savez.
FANNY. - Vous n’êtes pas Alsacienne ?
MANON. - Quelle idée ! Même si c’est vrai que j’arrive de Strasbourg où j’avais été
mutée pendant 5 ans. Pour tout vous dire, je suis de Septèmes-les-Vallons.
FANNY. - Ah oui ? Je me disais bien que votre accent était quand même du nord…
de Marseille.
MANON. - Alors comme ça, vous êtes deux frères et une sœur et vous vous appelez
Marius, César et Fanny ? Et votre père, il s’appelait Marcel ?
CESAR. - Comment vous avez deviné ?
MANON. - Oh, juste une intuition… Bon, voyons ce dossier… hum…. Oui….hum…
Oui…Mais ? … César Raspigoule… César Raspigoule… A Emile… D’un coup j’ai un
doute. Vous n’étiez pas dans l’équipe des cadets de l’OM il y a une vingtaine
d’année ?
EMILE. - Euh… ben…
CESAR. - Oui ! Exactement ! J’étais… euh… il était libéro… Et un très bon joueur,
plein d’avenir.
MANON. - Oui c’est ça ! Je me souviens maintenant. J’allais aux matchs avec mon
père et même si on supportait l’équipe de Septème, Papa ne jurait que par vous.
César par ci, César par là. Le petit César, Le prodige du vélodrome. Mon père ne
tarissait pas d’éloges et vous promettait un bel avenir professionnel… Ah quel
dommage cet accident…
La pension de César
Page 67
CESAR. - Eh oui, c’est dommage. Un terrible accident juste avant d’être sélectionné
en équipe réserve pro de l’OM.
FANNY à part. - Et juste après le contrôle antidopage positif qui de toute façon l’aurait
exclu à vie. Une bénédiction cet accident plutôt !
CESAR pensif. - César, le pied droit de Dieu !
MANON plongée à nouveau dans le dossier. - Qu’est-ce que vous venez de dire ?
CESAR. - On disait à l’époque « César, le pied droit de Dieu », rapport à mon … son
talent avec le pied droit.
MANON en regardant le dossier. - Ah mais non, ça ne va pas ! Ça ne va pas du tout !
FANNY. - Y a un pet ?
MANON. - Ben voui. Un gros problème même.
FANNY inquiète. - Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a qui ne va pas ?
MANON. - Je vois dans le dossier « Invalidité totale de la jambe gauche » En
regardant Emile. Et je vois que vous boitez de la jambe droite. Qui plus est, la jambe
au bout de laquelle se trouvait LE PIED DROIT DE DIEU !
CESAR. - Et alors ?
MANON. - Et alors, ce n’est pas le même tarif. Il y a une erreur dans le dossier et la
pension de votre cousin a été sous évaluée. Surtout si on prend en considération le
fait qu’il était sur le point de passer footballeur professionnel à l’OM en raison
justement des qualités de sa jambe droite.
FANNY. - Dans la pratique, ça veut dire quoi ?
MANON. - Qu’il faut que je calcule combien la Sécurité Sociale vous doit au titre des
arriérés de pension depuis le début, plus les intérêts évidemment. Je peux faire le
calcul tout de suite si vous voulez, il me faut juste une calculatrice.
La pension de César
Page 68
Manon n’a pas le temps de finir sa phrase que Marius à déposé une calculatrice sur
la table.
MANON. - Vous me laissez quelques instants pour calculer ? C’est qu’il y en a des
chiffres dans cette affaire !
Manon pianote la calculatrice pendant que les autres la regardent. Au bout de
quelques instants, elle reporte un montant sur une feuille posée sur la table et la
tourne vers Emile.
ALINE. - Voilà le total. Je vous ai arrondi le taux d’intérêt à la valeur supérieure pour
faire un peu plus.
EMILE s’approche de la table et regarde la feuille. - C’est une belle somme. Et c’est
pour moi ?
CESAR, FANNY ET MARIUS en chœur. - NON !
MANON. - Ben si. Pourquoi vous dites non ?
CESAR. - Euh, … c’est pas qu’on a dit non vraiment, euh… c’est juste que…
FANNY. - Que Emcésar est très dépensier et qu’on doit toujours être derrière lui pour
qu’il ne jette pas l’argent par la fenêtre. On veille à ses intérêts sinon il se retrouverait
à Payolle et mettrait toute la famille dans l’embarras.
EMILE. - J’ai un livret A à la Caisse d’Epargne et aussi un plan d’épargne logement.
FANNY. - Oui, c’est bien. On en reparlera tous les deux.
Apparait à la porte Aline, sans que personne ne la voit.
MANON. - Je vais m’occuper des papiers pour le virement dès mon retour au bureau
et vous devriez recevoir la somme d’ici 15 jours sur votre compte bancaire.
La pension de César
Page 69
Scène 9 : Les mêmes + Aline puis Honorine puis Pierre
ALINE. - Alors ? Vous avez l’argent ?
Tous se retournent et la voient.
FANNY. - C’est elle !
MANON. - Qui elle ?
FANNY. - La fausse contrôleuse !
MANON. - Au nom de la loi je vous arrête, pour usurpation d’identité et tentative
d’escroquerie.
ALINE. - Mais qui t’es toi ?
MANON exhibe sa carte professionnelle. - Service de contrôle de la Sécurité Sociale
et officier de police judiciaire, dument assermentée en tant que représentante
officielle de l’autorité publique.
CESAR. - Ah ! Je crois que la roue tourne ma belle !
FANNY. - Arrêtez-la, c’est une voleuse !
ALINE. - Mais je n’ai rien volé.
CESAR. - On ne t’en a pas laissé le temps.
MARIUS. – C’est juste une tentative. Le mal n’a pas encore été fait.
FANNY. - Si, le mal est fait. C’est une voleuse et il faut l’arrêter de suite.
ALINE. - Y a peut-être moyen de s’arranger ?
MARIUS à Manon. - Si vous voulez, je peux négocier.
La pension de César
Page 70
MANON. - Il n’y a rien à négocier, elle est prise en flagrant délit.
ALINE. – Ecoutez, c’est un malentendu. Moi, je ne voulais pas le faire, mais on m’a
obligé. Quelqu’un que j’ai rencontré hier au bar m’a proposé un petit boulot avec une
bonne prime à la clé. Je suis dans une situation financière difficile. Je n’ai pas pu
refuser, vous comprenez ?
MARIUS. – Mais oui on comprend. C’est humain.
FANNY. - Non, on ne comprend pas ! Elle n’est pas humaine !
MARIUS. – Fanny, n’exagère pas.
ALINE. – Merci Marius. Toi tu me comprends.
CESAR. – Il n’empêche que tu as essayé de nous escroquer. Alors maintenant disnous qui t’a envoyé.
ALINE. – Je ne connais pas son nom. Je ne l’ai vu qu’une seule fois, rapidement.
MANON. – Vous êtes bien naïve. Quelqu’un que vous ne connaissez pas vous
aborde, vous propose une affaire malhonnête et vous acceptez sans vous poser de
questions ? Vous expliquerez ça au tribunal !
CESAR. – Bon alors tu vas nous le dire maintenant qui t’envoi ?!
MARIUS à César. – Soit gentil avec Aline. Puisqu’elle te dit qu’elle ne sait pas qui
c’est. Elle n’est pas responsable.
CESAR. – Si tu veux la défendre, tu n’as qu’à devenir avocat. Mais tu as intérêt à
prendre des cours accélérés car ça ne va plus trainer pour qu’elle se retrouve au box
des accusés.
ALINE. – Vous êtes dur avec moi, César…
FANNY. – IO ! Césario !
La pension de César
Page 71
CESAR. – Oui, c’est vrai. Finalement, je suis un peu trop dur, à Manon, il faut être
clément avec quelqu’un qui avoue sa faute.
Arrive Honorine.
MARIUS. – Aline, aide-nous à découvrir qui t’a envoyé et je pourrai t’aider.
ALINE voyant Honorine. – C’est elle !
HONORINE. – Mais qu’est-ce qu’elle raconte celle-là ? Je ne la connais même pas !
ALINE. – Ah oui ?! Tu ne me connais pas ? Tu ne disais pas ça hier soir. Ah quel
toupet ! Aux autres en montrant un papier. La preuve que je dis vrai, elle m’a écrit
votre adresse et m’a détaillé sur cette feuille tout ce que je devais dire et faire.
MANON prend le papier.- Il sera facile de la démasquer avec une analyse
graphologique. Elle lit la feuille et ajoute à Aline, …oui, c’est très clair. En tout cas,
cela n’enlève rien à la gravité de votre acte. Il y aura juste une complice en plus dans
cette affaire.
MARIUS. – Oui, mais cela atténue beaucoup sa culpabilité, et je suis sûr qu’elle
regrette. N’est-ce pas Aline ?
ALINE. – Oui, je regrette d’avoir fait cela Marius, je ne te connaissais pas encore.
FANNY. – Alors y a qu’à mettre toute la faute sur Honorine, et c’est réglé !
MANON. – Mais, ce n’est pas légal !
CESAR. – Oui, ce n’est pas très légal, à Fanny, et tu sais combien dans la famille on
respecte la loi.
MANON. – Ecoutez, cette affaire c’est un brave pastis et ça va me faire une
paperasse énorme. J’ai déjà assez à faire avec la régularisation de la pension. En
plus demain j’ai un jour de RTT et j’avais prévu d’aller à la plage.
CESAR. – Ah bon ? C’est marrant, moi aussi j’avais prévu d’aller passer la journée à
la mer. On a un petit cabanon au Bain-des-Dames. Ça vous dirait d’y venir ?
La pension de César
Page 72
MANON. – Euh.. oui… pourquoi pas ?
CESAR. – Alors c’est réglé. Honorine tu peux dire que tu as le cul bordé d’anchois…
en regardant Manon, et moi aussi j’ai de la chance.
MARIUS. – Tu vois Aline, je savais bien que ça s’arrangerait.
ALINE. – Oui, Marius. Et merci de m’avoir soutenu.
MARIUS. – Tu me sembles assez dégourdie en affaires. Ça te dirait de t’associer avec
moi ?
ALINE. – Tu sais, je débute, mais je suis prête à apprendre.
MARIUS. – avec moi comme professeur, tu apprendras très vite, je te peux te le
garantir.
Arrive Pierre tout essoufflé.
PIERRE. – Marius ! Marius !
Marius se cache derrière Aline.
MARIUS. – Qu’est-ce qu’il me veut celui-là ? A Pierre. Tu n’es pas au stade en train
de t’installer avec tes supporters pour le match ?
ALINE. – Quel match ? Qui c’est lui ?
MARIUS. – Ce soir l’OM reçoit le PSG et celui-là c’est un supporter du parisien, et
c’est un fou !
PIERRE. – Marius, j’ai changé. Je me suis échappé.
MARIUS. – Echappé d’où ?
PIERRE. – J’ai été découvert.
La pension de César
Page 73
MARIUS. – Par qui ? De quoi ?
PIERRE. – Marius, il faut je te l’avoue. J’ai toujours été un supporter de l’OM en
cachette. Les adhérents de mon clubs l’ont découvert et on essayé de me lyncher.
Je veux devenir un membre de ton club! Je demande l’asile Olympique ! Il ouvre sa
veste pour exhiber un maillot de l’OM.
MARIUS. – ça va être difficile, tu sais ? Les parisiens ne sont pas très bien vus chez
nous.
PIERRE. - Je suis prêt à payer ce qu’il faut pour adhérer et faire tout ce qu’il faut pour
me faire accepter.
MARIUS. - Même à payer le double de cotisation ?
PIERRE. - Même le double !
MARIUS. - Ce qui est dit est dit ! Mais il y a quand même une épreuve à passer avant
de pouvoir devenir membre titulaire de mon club.
PIERRE. – Dis-moi laquelle et je le ferai tout de suite.
MARIUS. – La tradition veut que l’on crève d’abord les pneus d’une voiture
immatriculée à Paris.
PIERRE. – C’est déjà fait ! Avant de venir, j’ai crevé les quatre pneus de la mienne !
MARIUS. – Dans ce cas, bienvenu au club, Pedro !
Ils se serrent la main.
PIERRE. – Merci, Président !
HONORINE. - Si je comprends bien, tu quittes Paris pour t’installer ici ?
PIERRE. - Exactement ! Je ne veux plus jamais quitter Marseille.
La pension de César
Page 74
HONORINE en s’approchant de Pierre. - C’est bien ça. On pourra se voir souvent.
J’espère que tu n’es pas épilé.
PIERRE. – Euh, non. Pourquoi ?
HONORINE. – Tu verras, mon chou.
PIERRE. – Quand tu veux !
EMILE. – Fanny, tu es encore fâchée ?
FANNY en souriant. – Mon bicou, mais bien sur que…OUI ! Tu ne dis que des
couillonades ! Tu mériterais que je te passe un savon !
EMILE. – de Marseille !
FANNY. - Mais je t’aime quand même va ! Faudra quand même qu’on reparle de ton
plan d’épargne logement tous les deux.
CESAR. - Alors Manon, on se fait une journée à la mer demain ?
MANON. – Oui Césario.
CESAR. – Tu peux m’appeler César. Ce sera plus simple.
MANON. – Si tu veux, mais on ne risque pas de te confondre avec ton cousin ?
CESAR. – On n’a qu’à l’appeler Emile. Ça lui va bien.
MANON. – Bonne idée !
CESAR. – Alors vivement demain… Manon.
MANON. – Oui, vivement demain… César.
FANNY. – Je suis si heureuse que tout se termine si bien
La pension de César
Page 75
MARIUS. – Alors, maintenant tu peux nous faire un aïoli
TOUS. – Mais Non !
MARIUS. – Et pourquoi non ?
CESAR. – Mais parce qu’à Marseille, on termine toujours …
TOUS EN CHŒUR. - EN CHANSON !
Chanson provençale « La cambo me fai mau »*
Couplet :
I'a proun de gènt
Que van en roumavage
I'a proun de gènt
Que van en Betelèn
Ié vole ana
Ai quàsi proun courage
Ié vole ana
S'iéu pode camina
Refrain chanté repris plusieurs fois :
La cambo me fai mau
Bouto sello, bouto sello,
La cambo me fai mau
Bouto selle à moun chivau
Chorégraphie : tous les personnages font une farandole en boitant.
FIN
* Note au metteur en scène : La chanson peut être remplacée par une autre chanson
marseillaise ou provençale, voire une création.
La pension de César
Page 76

Documents pareils