Chanel expo 5 Palais de Tokyo (L`express Styles)

Transcription

Chanel expo 5 Palais de Tokyo (L`express Styles)
N°5 Culture Chanel ou les codes artistiques imaginaires de Mlle Chanel.
L'exposition décrypte le parfum éponyme en
rendant visibles les liens qui le rattachent à son
époque, les années 20 et à ses courants
d’avant-garde.
Et pourtant point de senteur dans cette exposition !
Elle s’appelait Gabrielle et elle allait, par ses audaces
créatrices, révolutionner l’allure des femmes. Surnommée
plus tard Mademoiselle Chanel, elle est Coco au temps de la
création du N°5 et croise la route d’illustres figures de la vie
artistique des années d’après-guerre : Diaghilev, Stravinsky,
Picasso, Picabia, Erik Satie ou encore Cocteau. Les
photographies, archives, oeuvres d'art (deux acryliques
d’Andy Warhol), ainsi que les objets exposés dans plus de
100 vitrines en Plexiglas, rendent compte des multiples inspirations qui ont nourri son
univers et son imaginaire.
« Chanel a été la première à réunir la femme, le vêtement et le parfum dans la même
magie » a écrit un reporter dans les années 20. Mais c’est en 1924 avec la création des
Parfums Chanel que Gabrielle Chanel institue le métier de couturier-parfumeur. En donnant
sa griffe au parfum N°5, Coco Chanel a été la première à relier le parfum à la haute couture.
Ce serait le grand-duc Dimitri Pavlovitch, petit-fils du tsar
Alexandre II, qui aurait proposé l’idée d’un parfum à Mademoiselle
Chanel en lui faisant rencontrer Ernest Beaux, un parfumeur
français né en Russie et venu s’installer à Grasse.
La légende veut que ce soit le grand-duc
qui dessine le flacon du parfum sur le modèle des flasques à
vodka de la garde impériale. La ligne graphique de ce flacon,
rectangulaire, dépouillé, aux angles nets, avec son bouchon taillé
en émeraude est en total contraste avec les exubérances des objets
de parfumerie des Années folles.
Au cours des années, le flacon s’est réinventé en gardant la simplicité de son design qui
constitue un contraste avec les présentations élaborées des années 1910-1920. « Ce qui est à
l’intérieur est beaucoup plus important que le flacon » disait-elle.
Le choix d’un numéro riche en symboles, pour le nom de ce parfum, est une audace. Le nom
échappe aux modes orientalistes (« Mitsouko » de Guerlain, en
1919), ainsi qu’aux évocations amoureuses (« N’aimez que
moi » de Caron, en 1916), ou à la botanique (« Quelques
fleurs » d’Houbigant, en 1912, « Tilleul » d’Orsay en 1911).
Elle veut promouvoir sa marque. A l’époque on connaît un
parfum par son nom, sans en connaître le créateur. La renommée doit lui revenir, à elle et à sa
Maison, ce sera donc Chanel N°5 !
Dans une série de neuf peintures acryliques, en 1985,
Warhol immortalise le flacon tel un archétype du XXe
siècle. On peut voir deux de ces lithographies originales
dans l’exposition
On raconte que lorsqu’elle rencontra Ernest Beaux, elle lui
demanda de créer un parfum qui rendrait jaloux les autres
parfumeurs, un parfum comme on n’en a jamais fait, un parfum tenace qui soit aussi universel
que ses robes.
Chanel ne voulait pas de soliflore, caractéristique de la parfumerie du XIXe, parfum d’une
seule odeur immédiatement identifiable (muguet, lilas, rose…) tels les senteurs de l’époque,
mais un parfum abstrait, construit, comme une robe. Sobre et chic.
Son idée était de créer un parfum qui coûte très cher pour qu’il soit inimitable : Ernest Beaux
utilisa les plus beaux produits, la rose de mai, le jasmin de Grasse, une qualité spéciale
d’ylang-ylang des Comores, du santal de Mysore et du vétiver Bourbon, auxquels il ajouta
une surdose d’aldéhydes, corps chimiques de synthèse, dérivés des hydrocarbures. Découverts
au tout début du XXe siècle, ils étaient peu utilisés jusque-là car très difficiles à doser et peu
de parfumeurs n’avait encore eu assez de temps pour explorer leur potentiel olfactif. Coco
n’est pas parfumeur, mais elle sait repérer d’instinct l’odeur qui sera un succès.
L’étui du N°5 lui-même est dans la veine de l’époque, un collage, tels ceux des cubistes. Ce
sera un étui de papier gros grain, collé et surligné de noir,
véritable audace dans la parfumerie des années 20.
Plusieurs de ces emballages peuvent être examinés sous toutes
les coutures dans l’exposition : du premier exemplaire, à l’état
brut, aux packaging noir et blanc, plus proches de nous,
toujours minimalistes et en papier gros grain.
Consécration ! En 1959, le packaging du N° 5 entre dans les
collections permanentes du Museum of Modern Art (MoMA)
de New York.
Le parfum N° 5, dit familièrement 5 de Chanel, est devenu au fil du temps l'emblème de la
Maison.
Lancé le 5 mai 1921, la Maison de la rue Cambon lui rend hommage en débutant son
exposition un 5 mai, 92 ans jour pour jour après sa naissance.
Eléonore Testa (Juin 2013)
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Premier flacon de parfum N°5, 1921 – Verre, cordonnet de coton, cachet de cire, 8.3 x 6.2 x 2.2 cm
Ernest Beaux, créateur du N°5, vers 1910 - Photographie,
Gabrielle Chanel et le Grand-duc Dimitri Pavlovitch – 1920 - Photographie
Evolution du flacon Chanel N°5 depuis 1921
Etiquette du flacon de parfum N°5, Chanel – papier grainé gaufré
Andy Warhol, 1985, Chanel (D) - acrylic & silkscreen enamel on canvas – 55.8 x 55.8 cm
Etui pour le flacon de parfum N°5, Chanel – 1921 – carton, papier