se comprendre » 1 / 16 Promouvoir les avantages de l`interprétariat

Transcription

se comprendre » 1 / 16 Promouvoir les avantages de l`interprétariat
_Newsletter « se comprendre » 1 / 16
Promouvoir les avantages de l’interprétariat
Le canton de Berne se mobilise
pour inciter les communes à
faire appel aux interprètes professionnels.
occasion. A cet égard, l’organisatrice de
l’événement reste satisfaite de cette journée. « Les interactions entre les participants,
les exercices pratiques et les feed-back ont
été très positifs ».
« Consacrée au thème de l’interprétariat,
notre Conférence sur l’intégration a attiré
moins de personnes que d’habitude »,
constate sans détour Annina Indermühle,
collaboratrice scientifique à la Direction de
la santé publique et de la prévoyance sociale du canton de Berne. Avec une trentaine de participants au lieu de l’habituelle
cinquantaine, cette journée annuelle a
néanmoins permis de précieux échanges
avec les acteurs concernés. Professionnels
des services des habitants, de l’éducation
et de la santé ont en effet pu se familiariser
avec les entretiens avec un interprète grâce
aux ateliers pratiques proposés par les différents services d’interprétariat de Suisse,
dont « se comprendre », présents à cette
Nouvelle pratique
Favoriser la prise de conscience de ce
qu’est l’interprétariat reste cependant un
enjeu de taille. En effet, depuis le 1er janvier 2015, le canton de Berne a lancé son
« modèle bernois » d’intégration, impliquant, au premier échelon, un entretien
personnalisé à la commune, avec un
interprète lorsque les connaissances linguistiques ne suffisent pas. Or, les communes bernoises peinent encore à faire
appel aux interprètes professionnels.
« Les administrations communales ont
toujours donné des informations aux nouveaux arrivants mais nous avons mis en
place quelque chose de spécifique avec
l’entretien personnel et il s’agit d’une pratique encore nouvelle pour beaucoup »,
explique Annina Indermühle. Garde des
enfants, apprentissage de la langue,
structures de loisirs ou associations, cet
entretien vise à transmettre de multiples
informations adaptées à la situation de
« Les interactions entre les
participants, les exercices
pratiques et les feed-back
ont été très positifs »
chaque personne. « Les documents écrits
en plusieurs langues donnent un aperçu
général mais cela ne suffit pas. L’entretien
personnel permet d’évaluer le besoin
de soutien en matière d’intégration et
d’orienter si nécessaire la personne vers
l’antenne d’intégration », précise Annina
Indermühle.
Des freins à comprendre …
Face aux faibles demandes d’interprétariat
de la part des communes, le canton
cherche à comprendre. « Il ne s’agit pas
d’un manque d’informations car toutes les
communes ont été contactées afin de leur
présenter notre nouveau modèle », explique
Annina Indermühle. Ni financier d’ailleurs
car la prestation est remboursée par le
canton. L’organisation semble en revanche
représenter un obstacle. « Quand la personne arrive à la commune pour s’inscrire,
un seul et même entretien est mené, le plus
souvent avec un proche. Le fait de prévoir
un second entretien et de faire appel à un
interprète apparaît comme une contrainte
en terme de temps et d’organisation », précise-t-elle. Autre facteur sous-jacent : le
manque de pratique. « Je pense également
qu’il y a une certaine crainte de faire inter-
Fribourg : bon élève
venir un « tiers » lors de cet entretien au sein
de la commune ».
L’analyse des données des communes
suite à cette première année de pratique
de l’entretien personnel devrait permettre
au canton de mieux cerner les causes de
ce manque de pratique avec les interprètes
et d’explorer de nouvelles pistes.
… pour faire émerger les avantages
« Pour l’heure, je pense que les communes
ont d’abord besoin d’une certaine routine
des entretiens personnels avant de pouvoir
prendre conscience de l’avantage de faire
appel à un interprète », estime Annina Indermühle. Par exemple, en tant que professionnel, l’interprète formé adopte une position
neutre et impartiale. « Il est très important
que les informations soient transmises de
façon complète et bien comprises. Un interprète professionnel offre cette garantie »,
souligne-t-elle. De plus, si les conséquences
de lacunes potentielles d’information sont
moins graves au niveau des communes
que dans un secteur tel que la santé, la
bonne compréhension des informations
reste néanmoins essentielle pour favoriser
le « vivre ensemble ». « C’est souvent le premier contact que les personnes migrantes
ont avec la Suisse. Il est important que
cela se passe bien et de faire passer le
message de comment on aimerait vivre
ensemble. Les migrants apprécient d’ailleurs beaucoup ces entretiens personnels ». Enfin, recevoir le nouvel arrivant
avec un interprète donne un signal fort en
terme d’accueil.
Deuxième plus grand canton de Suisse en
surface et en population – plus d’un million
d’habitants – le canton de Berne entend
bien inscrire l’interprétariat dans les mœurs.
« Même si l’évolution globale reste positive
dans le canton, on voit encore trop souvent d’abord le « coût » de l’interprétariat et
« La pratique de l’entretien personnel
est spécifique au canton de Berne.
Toutefois, dans le canton de Fribourg,
la Ville de Fribourg organise, par
exemple, une manifestation d’accueil
des nouveaux arrivants chaque
automne et les interprètes du service
« se comprendre » y participent. Quant
au Jura, une structure d’accueil existe
également mais nous n’avons pour
l’heure aucune demande des
communes. Ce qui me paraît le plus
paradoxal en comparaison avec la
situation bernoise est que, même non
remboursées, les demandes
d’interprétariat des communes
affichent, à Fribourg, une sensible
augmentation. L’important travail de
sensibilisation réalisé auprès des
communes par le Bureau du délégué
à l’intégration du canton de Fribourg
en est sans doute la cause principale.
La volonté et l’effort d’accueillir les
nouveaux arrivants allophones dans
leur langue sont donc bien présents,
notamment à la Ville de Fribourg.
Toutefois, je pense que l’engagement
de toutes les communes est important
pour favoriser l’intégration des
nouveaux arrivants », explique Barbara
Ouedraogo, responsable du Service
d’interprétariat « se comprendre ».
nous encourageons les services d’interprétariat à mettre en exergue de façon
concrète ses avantages et ses bénéfices »,
conclut ­A nnina Indermühle. (cbu)
Nouveautés du service
Chers
lecteurs,
C’est avec un grand
enthousiasme que
l’année 2016 a
commencé pour
notre service d’interprétariat !
Avec une augmentation de 30 % des demandes d’interventions et une progression constatée dans
les trois régions (cantons de Fribourg et du
Jura et Jura bernois) ainsi que dans tous
les domaines d’intervention, les interprètes
communautaires de « se comprendre » ont
effectué plus de 8200 heures de traduction en 2015.
En fin d’année passée, la 24ème Conférence bernoise sur l’intégration à laquelle
le service « se comprendre » a participé a
porté sur le thème de « l’interprétariat
communautaire », comme vous pourrez le
découvrir dans l’article principal.
En février, une table ronde « Migration et
santé » organisée par la Direction de la
santé et des affaires sociales et la Direction de la sécurité et justice du canton de
Fribourg également sur le thème de l’interprétariat communautaire a réuni les principaux acteurs dirigeants du milieu sociosanitaire fribourgeois, dans le but d’évoquer
ensemble la thématique de l’égalité des
chances en matière de santé. Ces événements démontrent que l’interprétariat communautaire est au centre des débats actuels liés à la migration et qu’il devient un
relai nécessaire dans le domaine de l’intégration des étrangers.
Les principales perspectives pour cette
année sont la mise sur pied d’un atelier de
formation « santé » accessible à tous les
interprètes de Suisse romande et le lancement d’un module de formation intitulé.
« Accompagnement des personnes dans
leur processus d’intégration » inscrit dans
la nouvelle mouture du brevet d’interprète.
De plus, un programme de parrainage
des nouveaux interprètes par les plus
expérimentés prendra forme cette année
au sein du service « se comprendre ».
Ainsi, nous visons à continuer d’assurer
une qualité d’intervention dès les premiers
pas sur le terrain.
Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une
bonne lecture et vous adresser mes plus
cordiales salutations.
Barbara Ouedraogo
Responsable service d’interprétariat
Le portrait
6 questions à un interprète
Comment êtes vous devenu
interprète ?
Elias Khoury, interprète pour l’arabe :
Palestinien né en Israël d’une famille originaire de Syrie et du Liban, l’inter-culturalité
fait partie de mon identité. Je venais de terminer mon master en histoire contemporaine
à l’Université de Fribourg lorsque M. Jutzet,
Conseiller d’Etat, et M. Têtard, Délégué à
l’intégration du canton de Fribourg m’ont
orienté vers le service « se comprendre ».
C’est ainsi que j’ai été engagé en 2015.
Aviez-vous déjà pratiqué
l’interprétariat ?
A titre privé, oui, pour des connaissances
mais jamais professionnellement. Je travaille également sur un projet de traduction
d’un livre de l’arabe en français mais cette
démarche diffère complètement de l’interprétariat que je pratique aujourd’hui. Jamais
je n’avais pensé pratiquer l’interprétariat à
titre professionnel.
Quelle différence observez-vous entre
l’interprétariat et la traduction ?
La traduction est comme un texte … figé.
Avec l’interprétariat, on est en situation et
le contexte est très important. Là, on n’est
pas dans une traduction littérale mais
dans une relation. Il faut parvenir à reproduire le message en créant des connexions
entre deux modes de pensées. « ÇA VAUT
LA PEINE », par exemple, est presque impossible à traduire en arabe. Telle quelle,
l’expression n’existe pas. A nous alors de
trouver d’autres moyens de faire passer le
message.
Elias Khoury, interprète pour l’arabe
Après quelques mois, quel bilan
tirez-vous de cette première
expérience professionnelle de
l’interprétariat ?
Mon intérêt a augmenté en le pratiquant.
Auparavant, je n’avais pas conscience de
tout ce que l’interprétariat peut représenter. C’est vraiment important car sans interprète, les liaisons sont impossibles. De
plus, les contacts sont nombreux et cela
permet d’apprendre beaucoup de choses.
Comment voyez-vous votre rôle
d’interprète ?
Je me sens parfois comme le pont de la
Poya ! On doit sans cesse tenir compte
du contexte et tenter de surmonter les
obstacles culturels et linguistiques. Cela
demande beaucoup d’efforts, de concentration et de précision. C’est une vraie
responsabilité et un grand engagement.
Quelles qualités sont nécessaires
pour être interprète ?
Maîtriser sa langue maternelle comme la
langue de traduction est très important. Je
vis en Suisse depuis 28 ans et je constate
que plus on connaît les us et coutumes, les
références culturelles et les finesses de la
langue, plus on a d’outils pour faire des
liens entre les deux cultures. L’acquisition
de « nuances » des deux cotés permet à
l’interprétariat de gagner en qualité.
Cap sur la promotion bernoise
Après le Jura, « se comprendre » va à la rencontre des
professionnels du Jura bernois.
toutefois davantage de la stratégie du
canton – cf. article page 1.
« Ils sont un peu intrigués par ma démarche et tous ne connaissent pas se
comprendre », explique Isabelle Rouvroy, chargée de promotion pour le
service « se comprendre ». Avec plusieurs rencontres planifiées en 2016,
« se comprendre » met l’accent sur la
région francophone du canton de
Berne. « Deux axes sont prioritaires :
l’hôpital de Bienne et Multimondo ».
Une stratégie qui ne relève guère du
hasard. « Avec Multimondo, nous
touchons les antennes régionales d’intégration, 2ème niveau du modèle d’intégration bernois ». A ce niveau, les collaborateurs entendent renforcer leurs
compétences. « Ils sont dans une démarche qualitative : ils souhaitent permettre à leurs collaborateurs de mieux
Un ancrage dans la région
La chargée de promotion rencontrera
également les professionnels du Tribunal
des mineurs, de l’Autorité de protection
de l’enfant et de l’adulte (APE) ou des
services psychiatriques du Jura bernois
Bienne Seeland (SPJBB). « Il est important de montrer que « se comprendre » a
un ancrage dans la région et que nous
sommes à l’écoute de leurs attentes »,
explique-t-elle. Sensibilisation, formation,
questionnements, échanges, etc. autant
d’informations qui peuvent faciliter la collaboration et permettre de dépasser certains blocages. Et Isabelle Rouvroy de
conclure : « aller vers l’autre pour mieux
comprendre ce qui va comme ce qui ne
va pas, n’est-ce pas là aussi le rôle de
« se comprendre » ?
savoir comment travailler avec un interprète », explique-t-elle.
Un ou deux bémols
En ligne de mire également, l’hôpital de
Bienne. Hormis le planning familial, les
autres secteurs de l’hôpital connaissent
peu le service « se comprendre ». « Le
manque d’information semble très important mais l’intérêt pour en discuter
est absent. Il est vraiment dommage
de se priver de cette possibilité et d’en
priver les patients migrants « francophones », estime la chargée de promotion. Autre bémol, le silence des communes qui ne font que très peu appel
aux interprètes quand bien même la
prestation est prévue par le modèle
d’intégration bernois. Cet aspect relève
L’invité
Une pratique diversifiée et mesurée
Les services sociaux du Jura utilisent depuis de nombreuses années le service
« se comprendre ». La faculté de ce service
de proposer des interprètes formés et
sensibilisés à l’approche culturelle de la
traduction nous a paru, dès le début, garant d’une qualité de l’approche dont ont
besoin les travailleurs sociaux en lien avec
divers clients. En pratique, nous avons
tenté des approches diversifiées et spécifiques au travail qui est le nôtre face aux
populations suivies :
Pour les bénéficiaires d’aide sociale
L’interprétariat s’avère nécessaire dans
tous les dossiers dont les membres ne
maîtrisent pas suffisamment notre langue
pour comprendre nos informations et répondre aux interrogations qui sont les
nôtres. Ce suivi dure un ou deux entretiens mais se limite à quatre interventions
annuelles maximum. L’apprentissage de
notre langue étant indispensable à l’inté-
gration future des personnes migrantes, la
priorité est donnée à des formations allant
dans ce sens. L’objectif est de pouvoir
progressivement se passer de ce moyen
auxiliaire qu’est l’interprétariat.
Pour les suivis de curatelles de
protection de l’enfant
Dans ce domaine la nécessité de l’interprétariat est évidente et habituelle. La
possibilité de bénéficier d’informations au
sujet d’éléments culturels des diverses
provenances des migrants est nécessaire.
A noter que nous recourons également
couramment aux interprètes pour des personnes de notre pays pour qui la maîtrise
du français n’est pas un acquis.
« Nous apprécions
­particulièrement que les
interprètes soient bien
­formés. »
Dans le domaine de la protection
des adultes
Les besoins d’interprétariat sont existants
mais moins souvent indispensables. En effet, les cas où il est possible d’envisager
une gestion administrative et financière par
la personne elle-même sont rares. Les
quelques besoins de traduction sont liés à
des démarches d’ordre strictement personnel (santé, vie de couple, etc.).
En conclusion, notre utilisation des services
de « se comprendre » est importante même
si mesurée. Nous apprécions tout particulièrement le fait que les interprètes soient
bien formés à ce genre d’intervention particulière avec les travailleurs sociaux et qu’ils
amènent parfois les dimensions culturelles
originales. Ceci peut contribuer à une meilleure compréhension face à des problématiques souvent complexes.
Michel Amman,
directeur des Services sociaux régions
de la République et Canton du Jura
Le kiosque de l’interprétariat
Se respecter
Caritas Suisse – Département Fribourg a
mis en ligne le site internet www.serespecter.ch à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination
raciale du 21 mars 2016. Ce nouveau site
offre un espace d’écoute pour toute personne confrontée à une situation de discrimination raciale. Hormis l’ accès à de nombreuses informations sur la thématique de
la discrimination raciale, cette plateforme
interactive propose une boîte à témoignages et des entretiens afin d’offrir un
soutien social et juridique.
Formation continue
L’AVIC (Association Valaisanne d’Interprétariat Communautaire) et la HES-SO du
Valais collaborent étroitement dans la
mise sur pied et le déroulement du module de formation continue « Interprétariat
communautaire auprès des autorités administratives et judiciaires ». Ce module
d’environ 80 heures, ouvert à tous les interprètes de Suisse romande, sera pris en
compte pour l’accès à l’examen professionnel fédéral menant au brevet fédéral
de Spécialiste en interprétariat communautaire et médiation interculturelle.
www.serespecter.ch
www.interpretavic.ch
Mutilations génitales
Le Conseil fédéral intensifie la lutte contre
les mutilations génitales féminines. Durant
la période 2016-2019, l’Office fédéral de
la santé publique et le Secrétariat d’Etat
aux migrations ont prévu de cofinancer
des activités d’information, de conseil et
de prévention dans le cadre d’un « réseau
contre les mutilations génitales féminines », qui sera constitué et géré par diverses organisations. La soumission de
projet est possible via le site ci-dessous.
Migrants et santé
La Croix-Rouge suisse (CRS) a développé
et coordonne migesplus.ch sur mandat de
l’Office fédéral de la santé publique (OFSP).
Cette plateforme Internet présente une
large palette de prestations – traduction,
conseil, soutien financier, outils pour la
production de guides, informations sur les
publications multilingues, exemples de
bonnes pratiques et échanges de savoirfaire – pour faciliter l’information et la communication avec les migrants dans le domaine de la santé.
www.bag.admin.ch
www.migesplus.ch
Journée du bilinguisme
A l’initiative du Conseil des Jeunes, le
Grand Conseil a décidé en février 2015
d’instituer une Journée du bilinguisme
chaque 26 septembre, en même temps
que la Journée européenne des langues.
Cette journée annuelle met en valeur
toutes les richesses du bilinguisme et les
bonnes relations entre les communautés
linguistiques cantonales.
www.fri2frei.ch
Contact/Impressum
Newsletter avril 2016
« se comprendre »
Service d’interprétariat communautaire
Caritas Suisse
Département Fribourg
Boulevard de Pérolles 55
CP 11
1705 Fribourg
Pour demander un/e interprète :
0840 000 999
ou [email protected]
ou www.secomprendre.ch
Rédaction : Clotilde Buhler, Barbara Ouedraogo
Photos : Clotilde Buhler
Graphisme/Impression : Caritas Suisse, Lucerne

Documents pareils