Fidel Castro et la question de la démocratie à Cuba

Transcription

Fidel Castro et la question de la démocratie à Cuba
Fidel Castro et la
question de la
démocratie à
Cuba
Suite au décès de Fidel Castro,
la
plupart
des
medias
occidentaux
ont
présenté
Castro comme un dictateur, et
Cuba quasiment comme une
prison à ciel ouvert. Les
critiques portant sur l’absence
des libertés politiques, la liberté
d’information ou d’expression
sont certes fondées. Des
erreurs ont été sûrement
commises et des répressions
exercées. Mais il faut quand
même voir l’essentiel. Il ne
faudrait pas oublier dans quel
contexte les libertés politiques ont été restreintes: Cuba a dû faire face pendant plus d’un demi-siècle
aux tentatives de déstabilisation de son voisin, l’impérialisme américain, aux efforts de la CIA pour y
implanter des agents à sa solde, aux tentatives d’exploiter toutes les contradictions du régime cubain
pour le renverser. Il a fallu tenir tête des années à ce puissant voisin en assiégé.
Il faut avant tout souligner la dimension anti-impérialiste de Fidel Castro, son internationalisme, son
importance en Amérique latine et même dans le monde entier en soutenant partout les luttes de
libération des peuples opprimés et colonisés. Mandela a ainsi déclaré que sans la victoire des soldats
cubains contre l’armée d’Afrique du Sud en Angola, il ne serait jamais sorti de sa prison.
Démocratie versus dictature
Castro a su défendre l’indépendance de son pays, il a rendu au peuple cubain sa dignité, tout en
éduquant la population cubaine à la solidarité avec les autres peuples. En même temps il a su
préserver la solidarité au sein de la population en dépit du boycott des Etats-Unis et de coups durs
qui ont acculé les Cubains à une misère noire notamment au moment de l’effondrement de l’URSS.
Les commentateurs ont soigneusement occulté les acquis de la révolution cubaine: à savoir l’énorme
effort pour alphabétiser l’ensemble de la population, le développement de l’éducation, de la
recherche, la construction d’un système de santé hors pair, gratuit pour tous les citoyens cubains,
tout comme l’éducation. Et cela, malgré le blocus des Etats-Unis.
Cuba a envoyé des médecins, des enseignants, des alphabétiseurs, des ingénieurs dans de nombreux
pays d’Amérique latine dans des échanges fondés sur la réciprocité.
Les commentateurs insistent sur la pauvreté qui règne à Cuba, mais s’abstiennent de comparer avec
la situation des pays voisins d’Amérique centrale, dans lesquels sévit la malnutrition, des taux de
mortalité infantile records, la misère et une insécurité endémique.
Démocratie versus dictature. Tous les commentaires tournent autour de cette opposition. La plupart
des médias occidentaux tendent à considérer les formes démocratiques en vigueur dans nos sociétés
comme une forme accomplie, un horizon indépassable répondant pleinement à cet idéal. Rien n’est
plus faux! En fait, la forme démocratique occidentale est de plus en plus dévoyée: sous la forme
démocratique se cache le pouvoir de plus en plus absolu de l’argent et cette forme tend de plus en
plus vers un régime oligarchique. Quelle démocratie est-ce là, en effet, qui fonctionne
systématiquement au profit d’une infime minorité de milliardaires dans le monde, ne cesse
d’appauvrir la grande majorité de la population et de renforcer toutes les inégalités sociales? Sabre
dans les services publics et renforce partout le pouvoir des multinationales tout en dépossédant les
Etats/nations de leur pouvoir de décision? Aggrave toutes les inégalités entre pays riches ou
pauvres? Favorise la spéculation au niveau mondial et les activités prédatrices des multinationales au
détriment des pays pauvres?
Combattre pour la démocratie
Les Etats-Unis, ce «magnifique modèle de pays démocratique», ont systématiquement organisé des
coups d’Etat et implanté des dictatures en Amérique latine durant les années 70 et 80, sans compter
les agressions des «contras» contre le Nicaragua sandiniste, ni les nombreuses guerres conduites par
les Etats-Unis contre les peuples, en particulier au Vietnam, au Laos ou au Cambodge, ou leur soutien
à l’assassinat de 500’000 communistes indonésiens par leur laquais Suharto, dans les années 60.
Alors quand on entend le milliardaire raciste, sexiste, xénophobe Trump, «élu parfaitement
démocratiquement» se féliciter de «la mort d’un dictateur brutal», il y a de quoi s’indigner. L’élection
de Trump? Un symptôme de ce dévoiement des formes démocratiques, mais aussi le résultat de
politiques économiques qui ont renforcé partout les multinationales et abandonné les peuples à leur
misère.
Pour nous, la démocratie est un enjeu pour lequel il faut combattre, contre les tendances
oligarchiques et autoritaires en cours dans nos pays. Elle répond à notre idéal, mais celui d’une vraie
démocratie, une démocratie au service des populations et fonctionnant dans le but du progrès social,
de l’égalité et de la fraternité, de la coopération et de la paix dans le monde.
• Eric Decarro, ancien président du syndicat SSP, critique le traitement du bilan de Fidel Castro dans
les médias occidentaux.

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