Télécharger le n°14 de la Revue Congolaise de Gestion

Transcription

Télécharger le n°14 de la Revue Congolaise de Gestion
E.S.G.A.E.
Ecole Supérieure de Gestion
et d’Administration des Entreprises
REVUE CONGOLAISE
DE
GESTION
Numéro 14
Juillet – Décembre 2011
Editions
I
S
C E
E.S.G.A.E.
B.P. 2339
Brazzaville
République du Congo
Courriel : [email protected]
Revue Congolaise de Gestion N°14
Revue Congolaise de Gestion N° 14
Revue semestrielle publiée par l’École Supérieure de Gestion
et d’Administration des Entreprises
Directeur de la publication : Pr. Roger Armand MAKANY
© ICES, Janvier 2012
Z.A. de l’Apport Paris
B.P. 32
91103 Corbeil-Essonnes Cedex
France
ISBN : 2-910153-66-5
ISSN : 1729-0228
Tous droits réservés.
2
Revue Congolaise de Gestion N°14
COMITE
DE LECTURE
Olivier Jean Marie GAUSSEN
Jean Paul LOUIZOT
Philippe MAKANY
BOUSSIENGUE
Odilon GAMELA NGINDU
Bernard TERRANY
Tadas SARAPOVA
Célestin MAYOUKOU
Hervé DIATA
Théophile DZAKA-KIKUTA
Thomas SILOU
Louis BAKABADIO
Fidèle MIALOUNDAMA
Université de Caen, France
Carm_Institute, France
IUT de Cherbourg, France
Université de Kinshasa, RDC
IPAG, France
University of Management
and Economics, Lithuania
Université de Rouen, France
Université Marien Ngouabi,
(UMNG), Congo
UMNG – ESGAE, Congo
UMNG – Ecole Supérieure
de Technologie de Cataractes
UMNG, Congo
UMNG – Université Libre du
Congo
UMNG, Congo
UMNG, Congo
Université de Kinshasa, RDC
UMNG – ESGAE, Congo
UMNG – ESGAE, Congo
Université de Kinshasa, RDC
UMNG – ESGAE, Congo
UMNG, Congo
UMNG, Congo
Université de Kinshasa, RDC
Université Kongo, RDC
Dominique MIZERE
Gabriel KISSITA
Séraphin MVUDI MATINGU
Jacob SABAKINU KIVILU
Sam’OVEY PANQUINA
N’ZINGA LUYINDULADIO
François KABUYA KALALA
Béthuel MAKOSSO
Serge IKEMI
MUKOKO SAMBA
TSHIUNZA MBIYE
Antoine KAMIANTAKO
MIYAMUENI Université Kongo, RDC
3
Revue Congolaise de Gestion N°14
Justin KAMAVUAKO Université Kongo, Institut
DIWAVOVA Supérieur de Commerce RDC
Xavier BITEMO NDIWULU Université Kongo, RDC
Alphonse MVIBUDULU Institut Supérieur de
KALUYITUKAKO Commerce, RDC
Thomas MAKETA LUTETE Institut Supérieur de
Commerce, RDC
Tony LOLINGA LONGANGE Institut Supérieur de
Commerce, RDC
Patrick INKANHA Institut Supérieur de
UNKATIKYE Commerce, RDC
Casimir LUABENGA Institut Supérieur de
KABENDULAMIRE Commerce, RDC
4
Revue Congolaise de Gestion N°14
SOMMAIRE
Éditorial – Pr. Roger Armand MAKANY
L’importation des vêtements de seconde main
et compétitivité des micro-entreprises de
couture au Congo-Brazzaville
André MOULEMVO
Analyse du marketing-mix du produit « Source
eau Mayo »
Claude LIPIKA
L’impact de la stratégie sur le contenu des
tableaux de bord : cas des entreprises au Maroc
Azzouz ELHAMMA
L’impact du micro-crédit sur la croissance
organique des très petites entreprises
camerounaises
Alain TAKOUDJOU NIMPA et
Léopold DJOUTSA WAMBA
La problématique de l’émergence économique
des pays en voie de développement
Marcel MBALOULA
Note sur le problème de financement des
projets au Congo
Dyanhy DIAZONZAMA
Pages
007-008
009-033
035-056
057-077
079-105
107-118
119-126
5
Revue Congolaise de Gestion N°14
6
Revue Congolaise de Gestion N°14
EDITORIAL
Pr. Roger Armand MAKANY
L
es fortes turbulences observées au niveau des marchés
financiers européens ces derniers mois, avec la crise de
l’euro, apparaissent comme le seul problème préoccupant au
niveau mondial. On peut y croire, dans la mesure où
l’intensification de la mondialisation économique affecte
toutes les régions du monde par le jeu des relations
internationales tant qu’économiques que financières.
Pourtant, on note également, des faits particuliers et
révélateurs des mutations socio-économiques qui se profilent
au cœur du monde des entreprises et qui se poursuivent dans
les pays africains. Leur importance est en corrélation avec à
la question du développement économique de ces pays dont
le défi majeur reste, finalement, le développement des
entreprises compétitives sur les marchés domestiques et
internationaux. Il s’agit là d’un thème crucial car il est
consubstantiel à l’amélioration de la croissance économique
et de la création de l’emploi.
Déjà, cette préoccupation fut dans l’agenda de l’École
Supérieure de Gestion et d’Administration des Entreprises
qui, sur la base du contrat Banque mondiale-Esgae, a réalisé
des études sur la Formation et l’emploi au Congo et les
Obstacles et contraintes au développement des Petites et
Moyennes Entreprises au Congo (avril 2011). On comprend
donc pourquoi le présent numéro de la Revue Congolaise de
Gestion a donné la voix aux spécialistes des questions de
7
Revue Congolaise de Gestion N°14
management des entreprises d’une part, et d’économie de
développement, d’autre part, qui ont examiné certaines
contraintes qui pèsent sur certaines entreprises africaines.
Au delà de la question d’ordre théorique, mais très
actuelle portant, sur l’émergence économique, la Revue
Congolaise de Gestion a, une fois de plus, mis l’accent sur
des thèmes combinant l’empirisme et la théorie, vision dictée
par la réalité de l’entreprise africaine encore mal connue dans
son environnement et qui constitue, par conséquent, un objet
pertinent pour la recherche dans le cadre des sciences de
gestion.
Pr. Roger Armand MAKANY,
Directeur de la publication – Directeur de l’ESGAE
8
Revue Congolaise de Gestion N°14
IMPORTATION
DE VETEMENTS DE SECONDE MAIN
ET COMPETITIVITE DES MICRO-ENTREPRISES DE
COUTURE AU CONGO-BRAZZAVILLE
André MOULEMVO
Université Marien Ngouabi
Brazzaville République du Congo
Email : [email protected]
RESUME
La
présente recherche se propose d’analyser l'impact de
l’importation massive de vêtements de seconde main sur les
micro-entreprises de couture au Congo Brazzaville. Le
commerce mondial de vêtements d'occasion a connu un essor
considérable, son chiffre d'affaires a dépassé aujourd’hui un
milliard de dollars par an. Au Congo, la friperie représente
39,17% des produits industriels textiles importés. Afin
d’atteindre l’objectif, une enquête a été menée auprès d’un
échantillon de 34 couturiers choisis aléatoirement. Ces
derniers ont pour la plupart observé une détérioration des
aspects les plus essentiels du fonctionnement de leurs microentreprises. Ces résultats montrent donc que la friperie affecte
le fonctionnement des micro-entreprises locales de couture,
obligeant beaucoup d’entre elles à fermer leurs portes et
poussant les travailleurs indépendants à passer dans des
secteurs moins rémunérateurs de l'économie informelle.
9
Revue Congolaise de Gestion N°14
Mots clés : Vêtements de seconde main, micro-entreprises,
friperies, Congo Brazzaville.
Abstract
This
work analyses the impact of second hand massive
garment import on the micro-sewing enterprise in Congo
Brazzaville. The worldwide trade of second hand garment is
on a considerable rise, its turnover exceeds one billion
dollars per year. In Congo, the flea market represents
39,17% of the textile industry import. To achieve this
objective, a survey had been conducted toward a sample of
34 countries chosen at random. These latter noticed the
deterioration of the most essential aspects of the functioning
of their micro enterprises. These results show that the flea
market affect the functioning of local sewing-micro
enterprises and obliging most of them to go bankrupt and
incite the independent workers to go in vulnerable
employment which is badly pay in the informal sector of the
economy.
Keys words: Second hand garment, micro-enterprises flea
market, Congo Brazzaville
1-INTRODUCTION
U
ne conséquence immédiate de la libéralisation des
échanges au niveau mondial est le développement du
commerce mondial de vêtements d'occasion qui, selon les
Nations Unies a été "multiplié par 10" entre 1990 et les
années 2000, son chiffre d'affaires dépassant aujourd’hui un
milliard de dollars par an (500 milliards FCFA). En Afrique,
les vêtements d'occasion constituent, dans la majorité des cas,
la garde-robe de gens ordinaires. Plus d'un quart des
vêtements portés ici provient de la friperie.
10
Revue Congolaise de Gestion N°14
L’Afrique s’attend à un afflux encore plus massif de
vêtements d’occasion avec l’entrée en vigueur des accords de
partenariat économique (APE) que l’Union européenne (UE)
négocie actuellement avec les 6 régions des pays d’Afrique,
des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Ces accords appelés à
remplacer le régime préférentiel non réciproque actuel, visent
à promouvoir le développement économique régional par les
échanges entre pays voisins, mais également à intégrer
progressivement les pays ACP de chacune des régions dans
l’économie mondiale (Van Der Steen & Danau, 2006).
Le Congo Brazzaville n’est pas resté en marge du
phénomène d’importation massive de friperie. Le marché de
la friperie connaît aujourd'hui une véritable explosion à
Brazzaville et dans l’ensemble du pays. Les vêtements de
seconde main représentent 39,91% des produits industriels
textiles importés dans le pays et semblent poser la
problématique de l'efficacité des micro-entreprises du secteur
textile. Cette situation nous conduit à nous intéresser à la
question des effets de la friperie sur la production textile
locale.
L’étude du vêtement de seconde main suscite depuis
peu un intérêt grandissant. De nombreuses études sur
l’impact tant social qu’économique du commerce de
vêtements de seconde main dans les pays en développement
ont été réalisées au cours des dernières années, relevant tant
des bienfaits que des méfaits de l’expansion rapide de ce
commerce.
Pour bon nombre d’études, le commerce de friperie
comporte des conséquences graves sur les économies des
pays africains et particulièrement sur leur industrie textile. À
l'instar de l'aide alimentaire, il est de nature à dissuader la
production locale. En effet, la pauvreté monétaire qui est
ambiante au niveau de certaines couches de la population
amène ces dernières à préférer les articles de friperie aux
11
Revue Congolaise de Gestion N°14
produits textiles fabriqués localement (Adjovi, 2006).
L’afflux de vêtements usagés dans les années 1990 est
souvent associé à la fermeture de la grande majorité des
usines d'habillement et de tissu qui a occasionné des
suppressions d’emploi estimées à 12.000 en Zambie, 20.000
au Zimbabwe, 7000 au Sénégal, 5.000 en Ouganda, 20.000
en Afrique du Sud. Le Mozambique, le Togo, la Côte
d'Ivoire, le Ghana sont également très touchés (Quintana &
Sanchez, 2004). Au début des années 1980, l'industrie textile
occupait en termes d’emploi, la première place dans le
secteur industriel du Kenya. Elle représentait 30% de la
main-d’œuvre industrielle et impliquait plus de 200.000
ménages. Mais au début des années 90, cette industrie s'est
effondrée en raison entre autres de facteurs tels que
l’obsolescence du matériel, le manque d'investissements, la
corruption, et l'indisponibilité d'intrants y compris
l’électricité mais aussi l’importation de vêtements de seconde
main, envisagée comme un déterminant fondamental à la
cessation de la production locale de tissus et de vêtements
(Mangieri, 2006).
Dans d’autres études, le discours sur la menace que
peuvent représenter les importations de vêtements usagés
pour les industries textiles locales fait par contre l’objet d’un
examen critique. C’est notamment le cas de Field (2004) pour
qui, il est trop simpliste de considérer que« le commerce
d'habillement d'occasion tue l’industrie de produits textiles et
d'habillement ». De même, Hansen (2004) tout en
reconnaissant que le commerce d'habillement d'occasion est
vraisemblablement un facteur minant la production locale de
textile et de l’habillement, montre que celle-ci souffre
beaucoup plus des conséquences de l’environnement actuel
globalement compétitif. Il n'est pas évident que la production
locale récupérerait en l'absence du commerce d'habillement
d'occasion surtout avec les nouvelles importations en
12
Revue Congolaise de Gestion N°14
provenance d’Asie, meilleur marché que les produits
localement produits (Baden & barber, 2005). Field (2004)
relève que dans le secteur informel du Zimbabwe la majorité
des tailleurs et producteurs de vêtements ont affiché une
neutralité sur la compétition avec le commerce des vêtements
d’occasion. Pour eux, les vêtements d’occasion et
l’habillement traditionnel sont deux marchés distincts.
Le commerce des vêtements de seconde main
présente des avantages clairs pour les consommateurs, en
particulier pour ceux à faible pouvoir d'achat (Baden &
barber, 2005). À court terme, les importations de vêtements
de seconde main permettent aux populations de s’habiller à
bas prix. Hansen (2004) analysant le cas zambien relève que
pour les populations, ces vêtements sont les bienvenus dans
le contexte actuel de pauvreté. La capacité de continuer à
bien s’habiller, en dépit du déclin économique, est
extrêmement importante pour la grande majorité des
Zambiens.
Le commerce des vêtements de seconde main soutient
les vies des centaines de milliers de personnes dans les pays
en voie de développement (Baden & barber, 2005). La
friperie est fortement génératrice d’emplois, l’activité directe
du tri génère en effet des emplois salariés sans qualification,
et fait appel à des prestataires extérieurs pour laver et réparer
les vêtements. La vente est elle-même pourvoyeuse de
nombreux emplois dans les villes et les villages : grossistes,
revendeurs, petits commerçants sur les marchés, tailleurs
transformateurs de la fripe. 5 millions de personnes (sur une
une population d'environ 30 millions) sont affectés
directement ou indirectement par les échanges d'habillement
d'occasion du Kenya, par l'emploi et les revenus produits
(Field, 2004). Bien que n’ayant créé que des emplois
précaires et instables (sans contrat de travail, sans droits, sans
sécurité…) (Stommen & Hecquet, 2008), le commerce de
13
Revue Congolaise de Gestion N°14
vêtements d’occasion a eu un impact très positif sur
l'atténuation de la misère au cours de la dernière décennie
caractérisée par un climat économique dur (Field, 2004).
L’importation de friperie génère d’importantes
recettes fiscales pour le budget de l’État. Elle est taxée par les
douanes congolaises au taux de 30% et constitue à cet effet
un sujet de discussion dans le cadre de la mise en œuvre des
APE qui prévoient une réduction considérable du taux
d’imposition. Comme la farine de blé, les cigarettes, la
friperie est considérée comme un produit sensible par les
gouvernements africains GRET, (2005).
Cette revue de littérature suggère que l’impact de la
friperie sur l’industrie textile varie d’un pays à un autre et
d’une étude à une autre. On note cependant que le cas du
Congo Brazzaville où la filière textile ne compte que des
micro-entreprises de couture n’est pas été étudié. C’est ce que
la présente recherche se propose de faire en tentant de
répondre à la question de recherche suivante : En quoi
l’invasion du marché du textile par les vêtements de seconde
main, conséquence de la libéralisation de l’économie, modifie
t-elle les conditions économiques et sociales des microentreprises de couture au Congo Brazzaville ?
La présente recherche a pour but de vérifier
l’hypothèse selon laquelle la prolifération de la friperie
affecte les aspects les plus essentiels du fonctionnement des
micro-entreprises de couture.
L’information nécessaire à notre réflexion est
recueillie au moyen d’une recherche documentaire ainsi
qu’une série d’entretiens avec des couturiers de Brazzaville
(un échantillon de taille 34 couturiers) et les responsables de
l’Agence Nationale de l’Artisanat (ANA).
14
Revue Congolaise de Gestion N°14
2- CADRE
DE
L’ETUDE
2-1 : Mondialisation et commerce de vêtements de
seconde main
Le commerce de l'habillement d'occasion en Afrique
coloniale a commencé après la première guerre mondiale
avec un afflux de surplus d’uniformes militaires embarqués
par les marchands de vêtements usagés en Europe et dans les
régions de production aux États-Unis (Hansen K. T., 2000).
Dans la période post-indépendance, un accent particulier
avait été mis, dans bon nombre de pays d'Afrique sur
l’augmentation de la production domestique de tissus et
vêtement pour le marché local. Ayant adopté des politiques
de substitution des importations, les pays d’Afrique noire ont
pour la plupart interdit l'importation d'habillement d'occasion
en vue de protéger l’industrie naissante.
Les politiques néo-libérales mises en œuvre à l’échelle
mondiale depuis une vingtaine d’années ont provoqué
l’accélération rapide du phénomène de mondialisation dont
les principales caractéristiques sont : intégration des
économies; souveraineté du marché international libéralisé et
déréglementé; extrême mobilité des capitaux, des biens et des
marchandises; délocalisation de la production suivant le
principe de «l’avantage comparatif»; augmentation de la
productivité et des gains; renforcement du pouvoir des pays
créanciers, des multinationales, des institutions financières et
de certaines élites; transfert de la souveraineté des
Etats/nations à des instances supranationales, (Touré, 2002).
En Afrique, c’est dans le cadre des réformes
économiques sous forme de programmes d’ajustement
structurel (PAS), mis en œuvre au début des années 1990 sous
l’impulsion du FMI et de la Banque Mondiale que les
politiques néo-libérales ont été adoptées. Depuis cette
libéralisation et en raison de la paupérisation des populations,
la reprise des articles déjà usagés est devenue un fait social
15
Revue Congolaise de Gestion N°14
généralisé dans tout le Continent. Le marché de seconde main
s’est étendu à la quasi totalité des produits modernes
(voitures, frigos, ordinateurs, médicaments…) (Touré, 2002 ).
C’est ainsi qu’une grande quantité de vêtements de seconde
main y est exportée par des fripiers privés des États-Unis,
d’Europe de l'ouest et du Japon qui les achètent à des prix
dérisoires auprès des organisations à but social. Selon des
données fournies par les Nations unies, aujourd'hui le chiffre
d'affaires du commerce de vêtements de seconde main a
dépassé un milliard de dollars par an (Baden & Barber,
2005).
L’Afrique subsaharienne est l’une des premières
destinations des vêtements de seconde main. Elle en a reçu en
2001 pour une valeur de 405 millions de dollars (30% des
exportations totales du monde), contre 117 millions de
dollars en 1990 (Mangieri, 2006). Comme le montre le
tableau ci-dessous, ces vêtements représentent ici 26,8% des
textiles importés. En 2002, les seuls États Unis d’Amérique y
ont exporté de l'habillement d'occasion pour une valeur de
59.3 millions dollars (Dougherty, 2004).
Tableau 1 : place de la friperie dans les importations de
textiles dans différentes régions du monde (2003 en valeur)
Région
Europe de l’est + ex URSS
Asie de l’est + pacifique
Amérique latine et caraïbes
Moyen orient et Afrique du nord
Asie du sud
Afrique subsaharienne
Source: (Baden & barber, 2005)
%
4,7
0,7
3,8
2,2
15,5
26,8
En Afrique, les vêtements d'occasion constituent, dans
la majorité des cas, la garde-robe de gens ordinaires. Plus
16
Revue Congolaise de Gestion N°14
d'un quart des vêtements portés ici provient de la friperie.
Après cette brève présentation du commerce mondial de
vêtements de seconde main, intéressons-nous au cas
particulier du Congo Brazzaville.
2-2 : Le marché congolais du vêtement de seconde main
Relativement peu important dans les années 80, le
marché de la friperie connaît aujourd'hui une véritable
explosion au Congo Brazzaville. Venant des grands pays
fournisseurs à l'instar de l'Europe occidentale (Belgique,
France, Pays-Bas, Allemagne et Italie) et de l'Amérique du
Nord, la friperie représente 39,91% des produits industriels
textiles importés dans le pays (cf. tableau 2).
Tableau 2 : importations des produits industriels textiles au
Congo Brazzaville
2002
2003
friperie en quantité
(tonnes)
6 858
6 395
friperie en valeur
(millions de F CFA)
4 954
3745
Total
Produits industriels
textiles (en volume)
14025
17498
Total textiles (en
valeur)
11 901 12 230
Friperie en pourcentage
du Total des textiles (en
volume)
48,90
36,55
Friperie en pourcentage
du Total des textiles (en
valeur)
41,63
30,62
Source : (CNSEE, 2007)
2004
2005
7691
7979
4034
3949
18535
19990
12236
13675
41,49
39,91
32,97
28,88
17
Revue Congolaise de Gestion N°14
De plus en plus de congolais sont spécialisés dans le
commerce des vêtements de seconde main. Des marchés
entiers sont spécialisés dans la friperie (Bouemba à
Brazzaville et fond Tié-tié à Pointe noire, par exemple). Dans
les grands marchés des principales villes du pays, des zones
entières sont occupées par des vendeurs de friperie. C’est
notamment le cas pour le marché Total, le grand marché de
Brazzaville. Des points de vente bordent les rues et avenues
des villes. En somme la friperie est devenue un véritable
phénomène de société au Congo.
*
* *
Si jusqu’au milieu des années 80, les congolais,
adeptes de la « sape 1» prisaient les vêtements de mode de
fabrication française ou italienne, aujourd’hui, la grande
majorité fait recours à la friperie. Selon des résultats d’une
enquête, à Brazzaville 5,6% des chefs de ménage affirme
n’acheter que des habits neufs pour eux-mêmes, pour leur
épouse ou pour leurs enfants. 15,9% affirme acheter des
habits à la friperie pour eux-mêmes, pour leur épouse ou pour
leurs enfants. 84% les achète indifféremment à la friperie ou
neuf pour eux-mêmes, pour leur épouse ou pour leurs enfants
(Mbandza, 2004). Ces données et celles relatives à d’autres
localités du Congo sont présentées dans le tableau ci après :
1
SAPE : « Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes ». C’est
une pratique populaire née à la fin des années 1960, chez les jeunes. Il
s’agissait de se distinguer en portant des vêtements de luxe (BazenguissaGanga, 2005).
18
Revue Congolaise de Gestion N°14
Tableau 3: types d’habits achetés par les ménages en
pourcentage, selon la localité.
Types
Brazzaville Mouyondzi Vindza
Lékana
d’habits
Neufs
5,6
2,8
1,2
3,2
Friperies
15,9
73,2
96,2
87,3
Neufs ou
84,5
14
2,6
9,3
friperies
Source : Grepolis, cité par (Mbandza, 2004)
La croissance du commerce de biens d’occasion a
conduit les chercheurs à se préoccuper de la motivation des
consommateurs. Bon nombre de ceux-ci, affirment que le
développement des circuits d’occasion est dû à la baisse du
pouvoir d’achat des classes moyennes (Razzouk & Gourley,
1982) (Sherman, McCrohan, & Smith, 1985). Pour eux, le
bas prix est le premier facteur d’attractivité des vêtements de
seconde main. Au Cameroun par exemple, 89% de la
population se jette sur les produits de la friperie à cause de
leur facilité et de leur prix d'autant plus que le salaire
mensuel du moins nanti est de 37.000 FCFA (Fodouop,
2006).
Cependant, si jusqu’à un passé récent, on considérait
que les habitués des points de vente des habits d’occasion
étaient en majorité des ménages à faibles revenus, tandis que
les classes sociales élevées demeuraient des consommateurs
occasionnels (Roux, 2002), la situation a complètement
changé au cours des dernières années. Aujourd’hui,
étudiantes, fonctionnaires, chefs de famille, patrons
d'entreprises ou modestes salariés, personne ne rechigne à
s'habiller des vêtements de seconde main. D’autres facteurs
pourraient donc expliquer l’engouement autour des vêtements
de seconde main. Il s’agit notamment de :
19
Revue Congolaise de Gestion N°14
L’attrait des grandes marques : Levis, Lacoste, Wrangler
et autres, inabordables neuves y sont offertes. Au pays de la
« sape », cela représente un facteur déterminant de
l’attractivité des habits d’occasion en milieux jeunes. En
effet, les congolais de Brazzaville attachent du prix à
l’habillement considéré depuis toujours, comme le symbole
de la réussite sociale (Samba, 2003). “Il faut paraître même si
l’on est pauvre”.
La qualité : les vêtements d’occasion sont, selon de
nombreux consommateurs meilleurs et plus durables que les
habits neufs venant d’Afrique de l’ouest, d’Asie ou encore
vite faits dans des ateliers de couture locaux.
Le marché des vêtements de seconde main est donc
florissant au Congo Brazzaville. Analysons à présent son
impact sur les micro-entreprises de couture.
3- MATERIELS ET MÉTHODES
Commençons par présenter le secteur textile dont les
entreprises représentent la population de notre étude.
3-1 : La filière textile à Brazzaville
Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique de
substitution des importations, le Congo s’est doté dans les
années 60 et 70 d’une industrie textile représentée par la
société textile du Congo (SOTEXCO) et son extension,
l’usine de tissus synthétiques (UTS) ainsi que l’unité
d’impression de tissus IMPRECO. Après la fermeture de
toutes ces entreprises, la filière textile n’est plus représentée
que par des ateliers de couture exerçant dans l’informel pour
la plupart. Ceux-ci sont, selon des estimations de l’Agence
Nationale de l’Artisanat à plus 87% des petits ateliers (bas de
gamme) c'est-à-dire occupant une personne et ayant un
équipement réduit à sa plus simple expression (une seule
machine à coudre) et des ateliers moyens (employant de 2 à 6
20
Revue Congolaise de Gestion N°14
personnes équipé de deux machines au moins). On ne compte
que quelques grands ateliers (haut de gamme) employant 7
personnes et plus et ayant un équipement relativement
complet et légèrement sophistiqué.
D’après des données recueillies auprès du service de
l’assiette fiscale de la mairie de Brazzaville, il existerait
actuellement, 480 ateliers de couture repartis comme suit :
Tableau 4 : Ateliers de couture par arrondissement à
Brazzaville (2005)
Arrondissement
nombre d’ateliers de couture
recensés
1
30
2
37
3
163
4
42
5
53
6
56
7
99
Total
480
Source : mairie de Brazzaville
Sans doute, ces statistiques sont aléatoires puisque,
par sa nature, le secteur informel échappe à tout contrôle. On
estime à 55% le nombre de petits ateliers ayant échappé aux
agents de la mairie. En réalité Brazzaville compterait plus de
1000 ateliers.
3-2 : Collecte des données
Pour tenter de vérifier notre hypothèse de travail, nous
avons mené une enquête courant octobre-novembre 2008. En
prenant comme base le fichier du service de la recette fiscale
de la mairie de Brazzaville, nous y avons sélectionné un
échantillon aléatoire de 40 couturiers. Sur eux, seuls 21 ont
21
Revue Congolaise de Gestion N°14
accepté de répondre à notre questionnaire. À l’issue de cette
première sélection, la question de représentativité de
l’échantillon s’est posée. Le plus gros des couturiers (les
couturiers de quartier en particulier) relevant d’un secteur
informel difficile à cerner quantitativement et qualitativement
n’est pas répertorié et l’échantillon s’est trouvé en grande
partie constituée de moyens et grands ateliers. Aussi avonsnous ajouté à celui-ci 13 tailleurs de quartier pour la plupart
rencontrés accidentellement. 34 ateliers font donc partie de
notre échantillon. Voici quelques unes de leurs
caractéristiques en commençant par leur répartition
géographique :
Tableau 5 : répartition géographique des répondants
Arrondissement
1
Nombre de
répondants
4
Répondants en
%
11,76
2
3
8,82
3
5
14,71
4
8
23,53
5
6
17,65
6
2
5,88
7
6
17,65
Total
34
100,00
29,41% de ces ateliers sont spécialisés dans la couture
dames, 23,52% dans la couture hommes et 47,05% de
couture mixte. Six d’entre eux sont classés dans le groupe des
grands ateliers, dix dans le groupe des moyens et 18 dans
celui des petits ateliers.
22
Revue Congolaise de Gestion N°14
Les principales questions posées aux couturiers sont
les suivantes :
Estimez- vous que l’importation massive des « solas2 » a
eu un effet sur les résultats de votre entreprise ?
Comment la situation économique de votre entreprise at-elle évolué au cours des dernières années?
Quels sont les types de vêtements qui ont le plus souffert
de la venue des habits d’occasion ?
Sur quels habits portent actuellement les commandes de
vos clients ?
Votre entreprise a-t-elle réagi aux changements
intervenus sur le marché du textile ?
Pensez vous que l’Etat doit prendre des mesures visant à
limiter l’entrée de la friperie sur le territoire national ?
Nous avons en plus eu des entretiens avec les responsables de
l’Agence Nationale de l’Artisanat (ANA) à qui nous avons
posé des questions sur l’évolution de la filière.
*
* *
4- RESULTATS
Les principaux résultats obtenus à l’issue de l’enquête
sont les suivants :
- À la question “Estimez- vous que l’importation massive
des « solas » a eu un effet sur les résultats de votre
entreprise ? « 88,23% des micro-entreprises répondent par
l’affirmative » (cf. tableau ci-dessous).
2
Appellation locale des vêtements de seconde main.
23
Revue Congolaise de Gestion N°14
Tableau 6 : Effets des « solas » sur l’activité des ateliers
Couture
dames
Pas
d’effet
Faible
effet
Effet
important
Total
Couture
hommes
Haut de
gamme
Autres
ateliers
Haut de
gamme
1
2
1
1
4
1
Couture mixte
Total
Autres
ateliers
Haut de
gamme
Autres
atelier
s
1
2
5
4
14
2
5
9
16
2
8
2
6
2
14
34
Source : notre enquête, 2008
Les habits ayant le plus souffert de l’extension du
commerce de friperie sont les chemises, les pantalons, les
robes, etc.
- La friperie ne profite pas aux couturiers, 61,76% des
répondants déclarent ne pas constater une augmentation
considérable de demande de réparation de vêtements
d’occasion ;
- La quasi totalité des ateliers bas de gamme ainsi que
quelques ateliers moyen de gamme de couture homme et
mixte déclarent réaliser une grande partie de leur chiffre
d’affaires grâce à la confection d’uniformes funéraires et de
tenues scolaires (en début d’année scolaire) ;
- De nombreux ateliers de couture hommes ont dû
s’adapter à la nouvelle situation en passant à la couture mixte.
9 des 16 ateliers de couture mixte visités l’ont fait ;
- La plupart des apprentis (plus de 60%) dans les ateliers
visités sont de sexe féminin ;
24
Revue Congolaise de Gestion N°14
- 85,29% des répondants estiment que l’État devait au
moins limiter, sinon interdire l’entrée des habits d’occasion
sur le territoire national.
Notre entrevue avec les responsables de l’ANA a quant
à elle révélé une réduction considérable du nombre de
couturiers donc une chute de l’emploi dans la filière sans
toutefois nous permettre d’obtenir des statistiques fiables.
5- DISCUSSION
Bien qu’il soit difficile de faire la limite entre les effets
du textile asiatique et ceux des vêtements d’occasion, les
résultats obtenus suggèrent que les micro-entreprises de
couture du Congo Brazzaville sont fragilisées par la
mondialisation, plus particulièrement par l’une de ses
manifestations les plus visibles, la progression continue du
commerce de vêtements de seconde main. Ces résultats
obtenus vont dans le sens de notre hypothèse de travail.
Contrairement à Field (2004) et à de nombreuses autres
études qui présentent une vision globalement positive du
commerce de friperie, nos résultats montrent plutôt des
conséquences multiples et multiformes du commerce de
friperie sur l’activité couture. On peut notamment relever :
- L’effondrement de la production en raison d’une faible
compétitivité. Déjà fortement affectés par les importations de
vêtements neufs fabriqués en Afrique de l’ouest à partir de
textiles chinois, les ateliers de couture sont de moins en
moins compétitifs. La couture est en effet demeurée une
activité rudimentaire sinon artisanale du fait de l’utilisation
massive de la seule machine à coudre à pédale. Seuls
quelques rares ateliers des deux plus vieux arrondissements
de Brazzaville (Poto Poto et Bacongo) sont bien équipés. Ce
sous- équipement explique l’incapacité des micro-entreprises
à se lancer dans une production en série qui permettrait de
réduire les coûts qui y sont d’ailleurs très élevés. Le tableau
25
Revue Congolaise de Gestion N°14
suivant donne les tarifs de confection de quelques types
d’habits (à ceux-ci il faut ajouter le prix du tissu).
Tableau 7 : tarifs pratiqués par les ateliers moyen de gamme
de couture de Brazzaville
Produit
Montant (FCFA)
Robe complexe
10 000
Ensemble jupe-veste
35 000
Costume
40 000
Pantalon doublé
8 000
Contre veste
15 000
Source : notre enquête, Brazzaville, 2008
La friperie offre un bien meilleur rapport qualité-prix
que le neuf confectionné dans les ateliers locaux. Le prix
d’un pantalon y dépasse rarement 3000 FCFA et celui d’un
costume 10000 FCFA. La quasi-totalité des couturiers
spécialisés dans la couture hommes et mixte estiment qu’avec
l’arrivée des « solas », leur production de chemises et de
pantalons s’est complètement effondrée et que les habits pour
enfants ont complètement disparu de leurs ateliers.
Cependant les ateliers de couture dames ont moins souffert de
l’invasion des vêtements de seconde main. Les camisoles,
jupes en pagnes africains traditionnels portés par la plupart
des femmes et qui ne sont pas proposés par les fripiers font
encore l’objet d’une assez forte demande. La demande
augmente d’ailleurs avec l’arrivée massive de pagnes
africains imprimés en Asie. Il en est de même pour le créneau
tenu de cérémonie occupé surtout par des ateliers haut de
gamme. Malgré la pauvreté, les congolais dans leur grande
majorité se font encore confectionner des tenues neuves pour
des cérémonies telles que le mariage.
26
Revue Congolaise de Gestion N°14
- La conséquence de cette baisse de régime est une chute
des revenus des couturiers. De nombreuses micro-entreprises
réalisent désormais une bonne part de leur chiffre d’affaires
grâce aux retouches, mais surtout grâce à la confection
d’uniformes funéraires en pagnes africains et d’uniformes
scolaires. En effet, depuis quelques années, la confection
d’uniformes en pagnes africains destinées à identifier les
membres de la famille éprouvée lors des cérémonies
d’inhumation est devenue une pratique courante. En Afrique,
la famille est une institution multiple (le mariage est par
exemple une alliance non pas de deux personnes mais de
deux lignages, voire deux clans). En conséquence, le nombre
de personnes devant être habillés pour chaque décès se
chiffre en dizaines. Il convient toutefois de relever que les
prix pratiqués sur ce genre d’habits est assez bas (1000 à
2000 FCFA pour une chemise par exemple), ce qui ne permet
pas aux couturiers de couvrir pleinement le manque à gagner.
Avant l’arrivée de la friperie, un couturier travaillant seul
pouvait, avec une production moyenne journalière de deux
pantalons et deux chemises se créer un revenu mensuel de
200000 -250000 FCFA. Actuellement c’est à peine qu’il peut
atteindre 150000 FFCA. En plus, en ce qui concerne les
uniformes funéraires, ils doivent être livrés dans des délais
relativement courts, poussant ainsi les couturiers à blanchir
des nuits. Cela dénote d’une détérioration de la qualité de leur
travail. Les uniformes scolaires sont une autre issue de
secours pour les couturiers. Cependant leur confection est
saisonnière et n’intervient qu’en début d’année scolaire, en
septembre et octobre.
L’autre conséquence est la chute du nombre d’ateliers et
donc de l’emploi. Comme d’ailleurs la grande majorité des
petits métiers, la couture a connu une évolution rapide entre
1960 et le début des années 1980, en raison d’une croissance
rapide de la population urbaine, due à un important exode
27
Revue Congolaise de Gestion N°14
rural et une croissance démographique rapide. Alors que le
nombre de citadins augmentait au rythme de 6% par an,
l’accroissement des emplois offerts dans le secteur formel ou
secteur moderne était largement plus faible. Très vite, la
demande d’emplois est apparue supérieure à l’offre,
entrainant le développement du chômage. Cette situation a
conduit à l’émergence et à l’essor du secteur informel dont
une des principales activités était la couture. Selon les
données du recensement général de la population et de
l’Habitat (1984), elle employait 7535 personnes. La ville de
Brazzaville avec près du tiers de la population du Congo
comptait presque les 70% des ateliers de couture (Samba,
2003) et donc plus de 5000 emplois dans la couture.
Depuis le milieu des années 90, comme nous l’ont
déclaré les responsables de l’Agence Nationale de l’Artisanat
(ANA), de nombreux ateliers ont fermé leurs portes, frappés
par l’arrivée massive du prêt à porter d’occasion. Les anciens
couturiers se sont tournés vers d’autres activités.
Actuellement, en l’absence de toute statistique on pourrait,
sur la base d’une moyenne de 3 personnes par atelier
répertorié et 1,5 personnes dans les autres et estimer à 2400 le
nombre de personnes (maitre et apprentis) exerçant dans la
couture. Un segment a été particulièrement touché : le tailleur
de quartier qui confectionnait des pantalons, chemisettes, et
autres vêtements sur mesure. Il ya donc une chute
considérable de l’emploi et qui plus est un effritement de
l’intérêt des jeunes à se lancer dans la couture.
Une plus grande orientation féminine de l’activité. Alors
que le métier de couturier était traditionnellement exercé par
des hommes, on rencontre désormais dans la ville de plus en
plus de couturières. 32,5% des ateliers répertoriés par la
mairie sont dirigés par des femmes. On relève par ailleurs une
plus grande attractivité de l’activité auprès des jeunes filles
que de jeunes garçons. En raison de la demande encore forte
28
Revue Congolaise de Gestion N°14
des vêtements en pagnes africains pour dames, de nombreux
ateliers même dirigés par des hommes se spécialisent dans la
couture dame et mixtes.
Une présence de plus en plus importante de couturiers
étrangers et principalement ouest-africains, particulièrement
dans le troisième arrondissement, où réside une importante
communauté ouest-africaine. La mode venue de l’Afrique de
l’ouest (les grands boubous, broderies) est déjà entrée dans
les mœurs des congolais.
Le commerce des vêtements seconde main pourrait
avoir des conséquences sur les perspectives de
développement dans la mesure où les micro-entreprises de
couture comme l’ensemble des activités de production du
secteur informel ont un rôle largement reconnu dans le
développement de l’Afrique. Celui-ci Il représente en effet
une source de créativité, d'esprit d'entreprise et un terrain
fertile d'apparition d'une éthique du travail fondée sur une
forme nouvelle d'autonomie qui pourrait, en fin de compte,
constituer la base solide de développement durable3. Le
secteur informel est un lieu majeur de professionnalisation de
ses membres. Il reste encore aujourd’hui le seul lieu
d’acquisition de leur métier pour la très grande majorité des
auto-employés et des responsables des micro- et petites
entreprises (Walther, 2006).
6- CONCLUSION
La présente étude a permis d'identifier les principaux
effets de l’importation de vêtements de seconde main sur les
micro-entreprises de couture. La friperie, un des aspects les
plus visibles de la libéralisation est devenue, depuis le début
des années 1990 un véritable phénomène social au Congo
tout comme dans l’ensemble de l’Afrique subsaharienne. Il
3
Marchés Tropicaux, 14 Mars 1997.
29
Revue Congolaise de Gestion N°14
ressort des résultats de l’étude que la libéralisation de
l’économie représente des contraintes et des défis aux
populations travaillant dans les différents secteurs de
l’économie des pays africains et le textile en particulier.
Même s’il a permis aux populations de s’habiller à moindre
coût et de créer des emplois, le commerce de vêtements de
seconde main a des conséquences néfastes sur le secteur
informel, notamment sur ses activités de production dont le
rôle dans le développement de l’Afrique a été largement
reconnu.
Au Congo, comme on vient de le montrer, les
importations massives de friperie ont affecté le secteur de la
confection et mis au chômage des couturiers. Elles ont
entrainé un transfert d'emploi stable vers l'emploi informel,
une destruction d’une partie de la production locale et et son
remplacement par l'équivalent en emploi informel avec des
conditions de travail et un gain beaucoup moins bons.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1.
2.
3.
4.
5.
30
Adjovi, E. (2006),
L'Accord de Partenariat Economique et pauvrete au
Benin: une analyse à l'aide d'un MEGC selon le
principe de micro-simulation. 15th PEP Research
Network General Meeting, Addis Ababa: PEP.
Baden, S., & barber, C. (2005),
The impact of the second-hand clothing trade on
developing countries , Oxfam.
Bazenguissa-Ganga, R.
La sape. revue Internationale de l’imaginaire, Janvier
2005.
CNSEE. (2007).
Annuaire statistique du Congo 2005, Brazzaville:
CNSEE.
Dougherty, C. (2004, June 3),
Revue Congolaise de Gestion N°14
Trade Theory vs. Used Clothes in Africa. New York
Times
6.
Field, S.
(2004). Who Benefits From the Second-Hand Clothing
Trade?: The Case of Kenya .
7.
Fodouop, K. (2006),
Le marché de la friperie vestimentaire au Cameroun,
Paris: L'Harmattan.
8.
Gauthier, M.
(2006,. Le commerce du vêtement usagé à la frontière
du Mexique et des États-Unis: Un chapitre sensoriel
de la biographie des objets, Consulté en février 2009,
sur Erudit.org: http://id.erudit.org/iderudit/014930ar
9.
Gorelick, M. (2006),
Les dons de vetements d'occasion une pratique qui
n'est pas aussi simple qu'elle n'en a l'air, Récupéré sur
chronique, Édition en ligne :
http://www.un.org/french/pubs/chronique/2006/numer
o3/0306p33.htm
10 Gret (2005),
Impact des APE UE-Afrique de l’Ouest – Synthèse
bibliographique, Consulté en février 2009 sur
http://agritrade.cta.int/fr.
11. Hansen, K. (2004),
Helping or Hindering? Controversies around the
International
Second-hand
Clothing
trade,
Anthropologie today, 20, 4 , 3-9.
12. Hansen, K.
(2000), Salaula: The World of Secondhand Clothing
and Zambia, Chicago: University of Chicago Press.
13. Mangieri, T. (2006),
African Cloth, Export Production, and Secondhand
Clothing in Kenya, Consulté en Octobre 2008, sur
cggc.duke.edu:
www.cggc.duke.edu/pdfs/workshop/Kenya%20cloth
%20&%20clothing.pdf
31
Revue Congolaise de Gestion N°14
14. Mbandza, J.
(2004), Pauvreté et modèles de croissance en Afrique
subsaharienne: le cas du Congo-Brazzaville (19452000), Paris, Éditions Publibook.
15. Palmer, A., & Clark, H. (2005)
Old Clothes, New Looks : Second Hand Fashion,
Oxford New York: Berg.
16. Quintana, L., & Sanchez, I.
(2004), Question: les exportations de friperie nuisentelles aux pays du Tiers Monde? Consulté en octobre
2008,
sur
educ.dev.durable.
http://educ.dev.durable.free.fr/probltextil.htm
17.Razzouk, N., & Gourley, D.
(1982), Swap Meets: A Profile of Shoppers, 29.
Arizona Business , pp. 8-12.
18. Roux, D.
(2002,. motivations des acheteurs de biens
d’occasion : une approche qualitative, Cahier de
Recherche de l'Université Paris XII .
19.Samba, R. (2003),
Entrepreneuriat et innovation dans la couture: une étude
appliquée aux ateliers de la ville de Brazzaville au
moyen de l’analyse factorielle de correspondance,
Revue Congolaise de Gestion N°11/12.
20.Sherman, E., McCrohan, K., & Smith, J. (1985),
Informal Retailing; An Analysis of Products,
Attitudes, and Expectations, Advances in Consumer
Research, vol. 12, eds. E.C.
21.Stommen, C., & Hecquet, C.
(2008), La filiere des vetements de seconde main,
Consulté en octobre 2008, sur madeindignity.be:
http://www.madeindignity.be/Files/media/Site%20pri
ve/BIs/BI0801/13-Analyse-VSM-janvier-2008.pdf.
22. Touré, M. (2002 ),
L’impact de la mondialisation au niveau local,
Consultation nationale sur la dimension sociale de la
mondialisation. Dakar.
32
Revue Congolaise de Gestion N°14
23. Van Der Steen, D., & Danau, A. (2006),
L’Accord de Partenariat Economique (APE) entre
l’Afrique de l’Ouest et l’Union européenne. Quels
enjeux pour les exploitations paysannes et familiales?
Bruxelles : Collectif Stratégies Alimentaires asbl .
24. Walther, R. (2006),
La formation professionnelle en secteur informel Rapport sur l’enquête terrain au Sénégal juillet 2006,
Document de travail no 21, AFD , p. 30-32.
33
Revue Congolaise de Gestion N°14
34
Revue Congolaise de Gestion N°14
ANALYSE
DU MARKETING-MIX DU PRODUIT
« SOURCE EAU MAYO »
Claude LIPIKA
Diplômé de Master à l’E.S.G.A.E.
E-mail : [email protected]
RESUME
L
a SN PLASCO offre sur le marché de Brazzaville le
produit «Source Eau Mayo». Cette eau minérale est offerte
sur un marché concurrentiel qui impose à la SN PLASCO une
stratégie fondée sur la marketing-mix afin d’être plus
compétitive et de conserver son leadership. Ceci n’est
possible que si les faiblesses que présente son marketing-mix
sont corrigées. À cet égard, les problèmes se situent
fondamentalement au niveau de la publicité et du prix du
produit.
Mots clés : marketing-mix, eau minérale, produit, prix,
publicité, communication.
Abstract
The National Compagny (NC) PLASCO supplies the
Brazzaville market with “Source Eau Mayo”, mineral water.
This drinking water introduced in the competitive reval
market imposes PLASCO to set up a marketing-mix strategy
in order to keep the pace in the leadership. However, to make
35
Revue Congolaise de Gestion N°14
it possible, weaknesses of the current marketing-applied
needs to be improved and redirected. At this regard, the
obstacles are still remarkable at the level of advertising or
the publicity as well as the price of products.
Keys words: Marketing-mix, mineral water, product, price,
publicity-advertising, communication
1- INTRODUCTION
A
u début des années 2000, le marché des biens et des
services congolais, particulièrement, Brazzaville,
capitale du Congo, a connu l’émergence des entreprises
privées de conditionnement et vente d’eau embouteillée et
d’eau dite "purifiée".
Cette émergence s’explique par l’insatisfaction des
consommateurs par rapport à la mauvaise qualité et à la
distribution inefficace de l’eau produite par la Société
Nationale de Distribution d’Eau (S.N.D.E.) qui demeure en
situation de quasi-monopole sur le marché congolais de l’eau.
Parmi les nouvelles entreprises, on compte la Société
Nouvelle des Plastiques du Congo (en sigle SN PLASCO) qui
offre sur le marché national le produit "Source Mayo",
connu sous le nom de « Eau Mayo », première eau de source
embouteillée en Afrique Subsaharienne.
Pour sa production, « l’eau mayo » est captée à 200
mètres de profondeur à partir d’une nappe souterraine
profonde, de type captive, dont le toit se situe à 152 mètres de
profondeur avec un débit moyen de 40m3/ heure. Sur le plan
hydrogéologique, l’eau Mayo provient de la chaîne du
Mayombe qui traverse le bassin sédimentaire de PointeNoire, la capitale économique, localisée au sud-ouest du
Congo.
L’eau Mayo jouit d’une série de contrôles réguliers et
rigoureux, tant sur le plan physico-chimique que
36
Revue Congolaise de Gestion N°14
bactériologique. Ces contrôles sont effectués de façon
parallèle par deux laboratoires; le centre régional des Eaux de
Lille Institut Pasteur et le laboratoire de PLASCO. Les
analyses effectuées sur place sont confirmées par la Direction
Générale de l’Hygiène et de la Santé publique et elles sont
conformes aux normes exigées par l’Organisation Mondiale
de la Santé (O.M.S.) pour les eaux et boissons et elle justifie
de la norme de qualité ISO 9001 : 2000.
Bien que leader sur le marché des eaux embouteillées
et offrant un produit de qualité, la SN PLASCO est confrontée
à une concurrence grandissante sur le marché de Brazzaville
dont l’effectif de la population est d’environ 1,5 million
d’habitants. Parmi les concurrents on note la présence des
marques congolaises et étrangères suivantes constituant le
marché principal:
Eau Mayo, Cristal, Okiéssi ;
Evian, Volvic, Eau Perrier, Contrex, Hepar,
Taillefine, Canadian pur, Eau purifiée.
Face à l’intensité de la concurrence, la nécessité de
mettre en pratique une stratégie marketing s’est imposée à la
SN PLASCO. Cette stratégie est axée sur la valorisation de
son produit, la stabilisation de son prix, la redynamisation de
ses canaux de distribution et la promotion du produit par une
communication de masse avec un message adapté à la cible.
Il s’agit là de la pratique du marketing-mix qui est une
démarche permettant l’application cohérente des quatre
variables fondamentales (les 4 « P » de Jérôme Mc Carthy) :
Le produit (Product);
Le prix (Price);
La distribution (Place);
La communication (Promotion).
Au regard de l’engouement que suscite l’Eau Mayo sur
la marché domestique congolais, toutefois, concurrentiel
37
Revue Congolaise de Gestion N°14
dynamique, nous avons voulu analyser le marketing-mix du
produit Source Mayo à Brazzaville.
Dans ce cadre, la question suivante constitue la
problématique de notre étude : La consommation de l’eau
minérale Source Mayo à Brazzaville serait- elle due à une
application concrète du marketing mix ?
En d’autres, les ventes de l’Eau mayo se réalisent-elles
grâce à une mise en œuvre efficace du marketing mix ?
La question de l’émergence économique s’inscrivant
dans la stratégie de développement national du Congo repose
sur le développement des entreprises nationales compétitives.
Pour ce faire, au niveau des entreprises, les bonnes pratiques
de gestion ou de management doivent connaitre une
utilisation optimale garantissant l’efficacité des activités
stratégiques.
1- ASPECTS METHODOLOGIQUES DE L’ETUDE
2.1. Hypothèses et objectifs de l’étude
Par rapport à notre problématique, l’étude s’appuie
sur les hypothèses suivantes. Le marketing mix ne détermine
pas la consommation de l’eau minérale Source Mayo, car ses
messages publicitaires ne sont pas orientés vers le public
cible. Par ailleurs, la consommation de l’eau minérale Source
Mayo se fait grâce à sa notoriété : leader et plus ancienne sur
le marché, elle se consomme uniquement de génération en
génération.
L’objectif général de notre étude consiste à emmener
l’entreprise à améliorer la pratique de son marketing mix face
à une concurrence croissante.
De cet objectif général découle des objectifs
spécifiques qui visent à :
Montrer les faiblesses du marketing mix de la SN
PLASCO;
38
Revue Congolaise de Gestion N°14
Proposer les stratégies pour améliorer le marketing
mix de la SN PLASCO.
1.2.
CONCEPT
ET TYPOLOGIE DES MARCHES
Généralement, le marché est un lieu de rencontre entre
l’offre et la demande d’un produit. Mais, Au sens du
marketing, un marché est un groupe de consommateurs qui
possèdent des caractéristiques communes en termes de
besoins, de désirs et qui constituent donc les acheteurs actuels
ou potentiels, présents ou futurs d’un produit spécifiques.
Dans ce cadre, selon Albertini T. (2005), le marché est formé
par :
des clients actuels de l’entreprise constituant le
marché de l’entreprise ;
des clients actuels des entreprises concurrentes par
rapport auxquels il convient de mener des actions marketing
pour « arracher » ces clients de la concurrence ;
des non-consommateurs relatifs ou clients potentiel :
ce sont des consommateurs qui n’achètent pas le produit
actuellement mais qui sont susceptibles de le faire plus tard.
Ils constituent une cible des efforts marketing.
Des non-consommateurs absolus : ces derniers
n’achètent pas et n’achèteront jamais le produit de
l’entreprise considérée, pour des raisons d’ordre physique,
économique ou philosophique.
Ces aspects conceptuels théoriques et classiques nous
permettent de distinguer le concept de marché défini du point
de vue des produits à partir duquel on perçoit de façon nette
le lien entre marché et concurrence. De ce point de vue, on
identifie cinq types de marchés : 1) le marché principal
constitué d’un ensemble des produits semblables au produit
étudié et directement concurrent ; 2) le marché générique
composé d’un ensemble des produits semblables et
directement concurrents au produit du marché ( Exemple : le
39
Revue Congolaise de Gestion N°14
produit « transport » est le marché générique du marché
principal du chemin de fer) ; 3) le marché environnant qui est
un marché comprenant l’ensemble des produits différents du
marché principal mais répondant aux mêmes besoins et
satisfactions que ceux du marché principal et qui inclut les
produits de substitution ; 4) le marché support qui concerne
l’ensemble des produits dont la présence est nécessaire à la
consommation du produit étudié ; 5) le marché
complémentaire : il concerne l’ensemble des produits
auxquels recourt le marché principal.
1.3.
Concept de marketing-mix
« Le marketing-mix est le choix, le dosage et la
combinaison des moyens avec lesquels l’entreprise souhaite
agir sur le marché» (Chirouze, Y. 2007). Parfois traduit par
« plan de marchéage » ou « politique de marchéage »), il
désigne l'ensemble cohérent de décisions relatives aux
politiques de produit, de prix, de distribution et de
communication des produits d'une entreprise ou d'une
marque. Il est désigné par l’expression « les quatre P » qui
sont les composantes du marketing-mix et qui ont été
introduites dans la « science marketing », en 1960, par
Jérôme McCarthy (Chirouze Y., 2007). Il s'agit du (de la):
produit (Product) ;
prix (Price) ;
distribution (Place) ;
communication (Promotion).
À cela s’ajoute la force de vente qui est considérée
actuellement comme un essentiel du marketing mix. Selon
Zeyl A. (1986), la force de vente est formée essentiellement
des personnes qui contribuent dans la construction de l’offre
jusqu’au client final ou au client intermédiaire. Ils
fonctionnent aussi comme des agents de communication en
assurant le contact direct d’homme à homme.
40
Revue Congolaise de Gestion N°14
D’autres éléments intègrent le marketing, tel le
cinquième P, le Packaging (« emballage »). Toutefois il ne
concerne que les produits physiques, excluant les services qui
représentent désormais une grande part dans les échanges
commerciaux, mais qui ne nécessitent évidemment pas des
emballages.
De plus en plus, la légitimité du modèle des 4P tend à
être remise en cause, en ce qui concerne les services pour
lesquels le modèle présente des insuffisances. Le nouveau
modèle des 7P en vigueur (Berry, 1985 ; Eiglier et Langeard,
1987) tient compte des spécificités de la "servuction"
(création d'un service) qui sont l'intangibilité, mais aussi
l'hétérogénéité et le caractère périssable de ceux-ci. Ainsi, en
plus des quatre catégories habituelles (Product, Price, Place et
Promotion), le nouveau modèle intègre les variables
suivantes :
Process : il est caractérisé par l'interaction qui existe
entre l’entreprise et le client (ex: accueil, conseil, horaires
d'ouverture etc.) ;
People : il désigne les capacités de la force de vente
(ex: présentation, formation, etc.).
Physical evidence ou « Physical support » (support
physique) : ce sont les composantes matérielles du magasin
(ex: vitrine, organisation des rayons etc.), du service (ex:
Rapport Annuel pour un expert-comptable; relevé de compte,
carnet de chèque, ou carte bancaire pour une banque), ou
identifiant le personnel, qui fait partie intégrante de la
production pour un service (ex: uniforme ou tenue du
personnel).
Dans le cadre de cette étude, l’ancien modèle du
marketing mix, les 4P (Product, Price, Place, Promotion) a
été pris comme référence. L’échantillon de convenance
(Kotler, Ph. ; Dubois B., 2009) utilisé dans le but de cerner
les problèmes qui caractérisent le markéting-mix de la SN
41
Revue Congolaise de Gestion N°14
PLASCO. Le caractère essentiellement qualitatif de l’enquête,
sous-tendant l’étude, correspond à aux objectifs fixé.
2.
PRESENTATION BREVE
DE LA
SN PLASCO
ET DE SON MARKETING-MIX
La Société Nouvelle des Plastiques du Congo est une
société anonyme à caractère industriel et commercial. Elle
exerce son activité dans le domaine du conditionnement
d’eau dans des bouteilles et des sachets. Le capital de la
société, 500 millions de FCFA se répartit entre la part
minoritaire de l’Etat congolais (10%) et celle de Société
PLASCO (90%).
3.1. La politique de produit
i). Le nom du produit
Les éléments pris en compte dans la politique de
produit sont le nom du produit et le conditionnement et
l’emballage.
L’eau minérale offerte sur le marché porte le nom de
"Source Mayo" ; le terme mayo vient du nom "Mayombe",
zone forestière du sud du Congo. Toutefois, elle est plus
connue sous le nom Eau Mayo.
ii). Le conditionnement et l’emballage :
L’eau mayo est conditionnée dans différentes
dimensions à savoir :
Le sachet de 0,5l : commercialisé niveau de la
ville de Pointe-Noire, la capitale économique ;
La bouteille de 0,33l : créée, à l’origine, en
réponse à la demande de la Compagnie Aérienne Air France
KLM. Aujourd’hui, la bouteille de 0,33l s’avère adaptée aussi
pour les enfants qui vont à la maternelle ;
La bouteille de 0,6l : créée pour les conférences ;
42
Revue Congolaise de Gestion N°14
La bouteille de 1 ,5l : elle constitue la première
quantité existante depuis la conception du produit ; elle
adaptée pour la consommation individuelle
La bombonne de 6l : créée en réponse à la
concurrence générée par l’arrivée sur la marchée du
concurrent CRISTAL qui a lancé, sur le marché les bidons de
5 et 10L, fortement appréciés par les consommateurs.
La fontaine de 19l : créée pour les entreprises,
mais elle intéresse aussi les ménages.
Le conditionnement des « produits Mayo » (à
l’exception des sachets) comprend, depuis les années 2006,
des bouchons rouges, des étiquettes de couleur cyan rouge
bleu, et, l’eau embouteillée se présente très limpide par la
transparence de la bouteille.
Par ailleurs, il existe deux types d’emballage des
bouteilles d’eau mayo qui le différencie des produits
concurrents et qui facilite son transport : 1) les packs
constitués essentiellement d’un sachet très résistant
comprenant huit (8) bouteilles pour les 0,33l et les 0,6l et 6
bouteilles pour les 1,5l ; et 2) le carton qui existe
uniquement pour les 1,5 litre, il est constitué de 12 bouteilles
de 1,5 litre.
iii). Les caractéristiques physico-chimiques
L’eau Mayo provient d’une couche sableuse, couverte
et protégée par plusieurs couches imperméables d’argiles.
L’eau Mayo est une eau de couleur limpide, inodore
et un PH (20) de 7,60 (neutre). Elle est composée de
chlorures, Sulfates, Phosphates, Calcium, Magnésium.
iv). Qualité du produit
De par son origine géologique, l’eau Mayo est captée
à grande profondeur sur le site de l’usine de Pointe-Noire
dans une nappe souterraine, semi-artésienne, s’écoulant de la
43
Revue Congolaise de Gestion N°14
chaîne du Mayombe vers la mer en direction du Sud-ouest.
Cette nappe profonde est protégée par trois couches
principales imperméables d’argile, alternées avec des couches
siliceuses qui lui assurent une filtration naturelle de grande
qualité. Elle est une eau de source faiblement minéralisée,
aussi elle se diffuse rapidement dans l’organisme en
favorisant l’élimination des excès d’acide urique et des
cristaux générateurs des calculs de reins. Elle est une eau
légère, pure et sans nitrates. Elle est recommandée pour les
utilisations domestiques de boissons nécessitant l’eau. L’eau
Mayo est régulièrement contrôlée et de manière rigoureuse
tant sur le plan physico-chimique que bactériologique. Ces
contrôles sont effectués en parallèle par deux laboratoires ; le
Centre Régional des Eaux de Lille Institut Pasteur (analyse
trimestrielle) et le laboratoire PLASCO (analyse journalière).
Les analyses effectuées sur place sont confirmées par la
Direction Générale de l’Hygiène et de la Santé Publique.
2.2.
La politique des prix
Le tableau ci-dessous présente les différents
conditionnements du Produit "Source Mayo" avec les prix
respectifs.
Tableau 1: Prix de l’eau Mayo selon le type d’emballage
Descriptif
La bouteille de 0233 litre
Le pack de 8 bouteilles de 0,33 litre
La bouteille de 0,6 litre
Le pack de 8 bouteilles de 0,6 litre
La bouteille de 1,5 litre
Le pack de 6 bouteilles de 1,5 litre
Carton de 12 bouteilles de 1,5 litre
Le bidon de 6 litre
La fontaine de 19 litre
Prix (FCFA°
200
1800
250
200
400
2350
4600
1500
4500 (avec vidange)
150000 (sans vidange)
Source : données d’étude
44
Revue Congolaise de Gestion N°14
La formation des prix des produits de la SN PLASCO
prend en compte les facteurs classiques les coûts de
production, le besoins de rentabilité, la qualité du produit,
l’image du produit et le public ciblé. Du point de vue de la
concurrence locale, les prix de vente de l’eau mayo sont
sensiblement élevés en fonction des points de vente. Par
rapport au challenger dans le secteur de l’eau minérale, eau
Cristal, cette différence est très nette. En effet, les bidons de 5
litres de Cristal coutent 1000 FCFA tandis que ceux de l’eau
Mayo de 6 litres coutent 1500frs ; les bouteilles de 1,5 litre de
l’eau Mayo coute 500 FCFA, celle de Cristal, 400 FCFA.
2.3.
La politique de distribution
L’eau Mayo est un produit vendu en Afrique centrale,
particulièrement en Angola et en République démocratique
du Congo, après la république du Congo. Dans ce cadre, la
SN PLASCO applique une stratégie de distribution exclusive
et sélective, à partir de ses cinq (5) distributeurs exclusifs
(pou lesquels nous n’avons pas pu obtenir des informations),
des semi-grossistes.
La SN PLASCO utilise deux types de canal de
distribution. On note le canal direct ou très court, en
distribuant directement l’eau auprès des consommateurs
finaux que sont les entreprises. Ainsi, le SN PLASCO assure
la livraison de l’eau directement à Air France KLM.
La SN PLASCO utilise le canal court en distribuant
l’eau auprès des semi-grossistes qui, par définition, revendent
aux détaillants et les détaillants aux consommateurs finaux.
Elle possède des points de ventes (dépôts) qui offrent le
produit aux détaillants.
2.4.
Communication la SN PLASCO
La SN PLASCO applique la communication hors
média et la communication média pour la promotion et la
45
Revue Congolaise de Gestion N°14
vente. La communication hors média repose sur les éléments
suivants :
Le slogan : « Mayo, ma famille » ;
Le sponsoring : la SN PLASCO sponsorise beaucoup
d’activités entre autres : l’élection Miss Congo, et les
activités sportives organisées au niveau de Brazzaville,
Le mécénat : la SN PLASCO a réfectionné trois
écoles dans la ville, elle a fait des dons de blouses et des
bouteilles d’eau mayo au service pédiatrique dans les
hôpitaux;
Les peintures murales : des alimentations et des
magasins sont peints en logo de l’eau Mayo.
Les portes documents : ils sont distribuer auprès des
clients, des portes documents contenant des informations sur
la présentation de l’eau mayo, la composition de l’eau mayo,
ses caractéristiques physico-chimiques, sont distribués aux
clients ;
Les véhicules : tous les véhicules de distribution de la
SN PLASCO sont peints en logo de l’eau mayo. Par contre, la
communication média de la SN PLASCO, qui a un site
internet, se fait par les publicités diffusées par les chaines de
radios et de télévisions locales, les panneaux publicitaires.
Les exemples de messages publicitaires diffusés se
présentent de la manière suivante :
o
Un Monsieur rentre à la maison après une longue
journée de travail reçu par sa femme qui lui offre de l’eau
mayo et à la seconde suivante, il est rempli d’énergie et met
sa tenue de sport pour jouer seul au stade.
o
Un couple roulant en voiture, mais qui tombe en panne.
Un homme passant dans sa voiture prend la femme à bord.
Furieux l’infortuné consomme l’eau mayo puis, démarre la
voiture qui en roulant se transforme en robot et bloque le
passage au ravisseur, la femme étonnée entre de nouveau
dans le véhicule;
46
Revue Congolaise de Gestion N°14
o
Un enfant à la plage qui joue avec une bouteille d’eau
mayo à ces cotés. Un avion se transforme en robot et vient
prendre de l’eau auprès de l’enfant, il en consomme puis s’en
va ;
o
La norme de qualité ISO 9001 :2000 : des bouteilles se
trouvent dans une salle et des phrases apparaissent sur l’écran
concernant le processus de fabrication, le conditionnement,
Puis c’est le cachet ISO qui apparaît sur l’écran et les
bouteilles dansent pour célébrer cet événement.
3.
ANALYSE DES RESULTATS
4.1. Produit et prix
Graphique 1 : Consommateurs absolus
Consommateurs absolus
9%
6%
43%
Source mayo
Cristal
Canadian pur
SNDE
42%
Ce graphique présente les individus qui ne
consomment qu’une marque de produit. Sur un effectif total
de 100%, nous avons 43% des consommateurs de l’eau
Mayo, 42% des consommateurs de Cristal, 6% des
consommateurs de Canadian pur et 9% des consommateurs
d’eau de la SNDE.
Il existe une clientèle fidèle à l’eau Mayo. Toutefois,
certains clients des consommateurs mixtes : 13 dénombrés
47
Revue Congolaise de Gestion N°14
pour Source Mayo et Cristal et 5 pour Source Mayo et
Cristal.
3.2. Le nature de produit Eau Mayo consommé et les
prix des produits
Parmi les types de produits d’eau Mayo qu’offre, la bouteille
de 1,5 litre est plus consommée (soit 49% de l’échantillon).
En ce qui concerne le prix, les opinions des
consommateurs ne reflètent pas l’unanimité, comme le révèle
les informations suivantes :
Graphique 2 : Appréciation du prix
Appréciation du prix par les consommateurs
6%
Trop cher
Moins cher
Autres (abordables)
41%
53%
Indécis
0%
En ce qui concerne les prix pratiqués par la SN
PLASCO, 53% des consommateurs pensent qu’ils sont trop
élevés par rapport à ceux de Cristal ; par contre 41% pensent
que les prix sont abordables.
48
Revue Congolaise de Gestion N°14
Graphique 3 : Relation qualité/prix
Appréciation de la relation qualité/prix par les consommateurs
28
30
25
20
18
effectif
15
10
5
5
0
oui
non
indécis
S’agissant de la relation qualité/prix, 18 individus
pensent que les prix de l’eau mayo reflètent la qualité du
produit, tandis que 28 individus ont une opinion contraire. Il
s’agit là des positions classiques des consommateurs face à
un produit offert sur le marché.
3.3.
Communication
Sur 51 enquêtés, 70,59% ont déjà suivi les publicités
de l’eau mayo, 11,76% ne l’ont pas suivi et 9 soit 17,54%
sont restés indécis.
Parmi les 36 enquêtés, 6 pensent que la publicité de
l’eau mayo est nulle, 6 estiment qu’elle est insuffisante, 8 la
jugent passable, 10 la trouvent moyenne, 4 pensent qu’elle est
assez-bien et 2 bien.
À propos des messages publicitaires de l’eau mayo, les
opinions se présentent de la manière suivante :
pour certains, l’eau mayo est énergétique, elle est une
eau de qualité, elle est à consommer après un effort physique
soit 30%;
49
Revue Congolaise de Gestion N°14
pour d’autres, les publicités ne font passer rien de
bon, le message n’est pas compris et les mises en scènes sont
nulles 60% ;
10% des enquêtés sont restés indécis.
Graphique 4 : Relation produit/publicité
Appréciation de la relation image du produit/publicité
0%
33%
oui
non
indécis
67%
Pour ce qui est la relation entre l’image du produit et
des publicités faites pour le produit, 67% des enquêtés
pensent que les publicités de l’eau mayo ne reflètent pas
l’image qu’ils ont du produit. Elles ne cadrent pas avec le
produit et qu’il y a aucun lien entre le produit et les publicités
faites pour le produit. 33% des enquêtés sont restés indécis.
Concernant les affiches publicitaires, 29 enquêtés les ont
déjà vues, 9 ne les ont pas remarquées et 12 sont restés
indécis. Parmi les 29 enquêtés les ayant remarquées, 3
pensent qu’elles sont insuffisantes, 5 jugent qu’elles sont
passables, 7 trouvent qu’elles sont moyennes, 12 les trouvent
assez bien et 2 pensent qu’elles sont bien.
S’agissant de la visibilité de l’eau mayo sur le marché
brazzavillois, 5 individus soit trouvent que l’eau mayo est
peu visible, 19 pensent qu’elle est moyennement visible, 19
pensent qu’elle est très visible et 6 sont restés indécis.
50
Revue Congolaise de Gestion N°14
4.
PROBLEMES MAJEURS
ET
SUGGESTIONS
4.1. Problèmes
Le marketing-mix de la société SN PLASCO examiné
à travers les 4-P est caractérisé par plusieurs problèmes.
Malgré les actions menées en matière de publicité, la
norme ISO des vertus du produit n’est pas suffisamment
valorisée en tant que facteur clé de succès de l’entreprise par
rapport à d’autres concurrents dont la qualité du produit n’est
pas certifiée.
Sur le marché, les prix de vente varient
considérablement au niveau de ses distributeurs et des semigrossistes; ce qui constitue un facteur de dissuasion au niveau
des consommateurs non informés sur les différents prix du
produit.
Les circuits de distribution ne sont pas efficaces du
fait des longues distances qui existent entre l’entreprise et les
détaillants.
4.2.
Suggestions
Afin de corriger les faiblesses de la société au niveau
de son marketing-mix, les actions correctives méritent d’être
mises en œuvre.
i). Politique de produit
La SN PLASCO devrait mettre l’accent sur le produit
en valorisant ces qualités et vertus de façon continue, de
présenter les avantages de la consommation de l’eau mayo
plutôt qu’une autre marque par le biais de l’expérience de
l’entreprise dans le domaine et de la norme ISO du produit.
ii).Politique de prix
L’entreprise ne doit pas se contenter de vendre le
produit aux distributeurs; elle doit veiller à ce que les
distributeurs respectent les prix recommandés car une
51
Revue Congolaise de Gestion N°14
mauvaise politique de prix des distributeurs a un impact
considérable sur l’image de l’entreprise et de son produit.
Pour ce faire, elle devrait effectuer des descentes de suivi
auprès des distributeurs pour veiller au respect des prix de
vente pour une éventuelle stabilisation.
À ce stade du cycle de vie du produit, phase de
maturité caractérisée par la faible croissance du chiffre
d’affaires, et face à une concurrence sur le marché
domestique, l’action sur la variable prix nécessite une
attention particulière.
iii). Politique de distribution
Afin de satisfaire au mieux ses clients privilégiés, les
entreprises et les supers marchés, livrent directement le
produit à ces derniers. Certes, l’utilisation de plusieurs
canaux de distribution présente bien des avantages tels que la
réduction des coûts de stockage et les risques commerciaux
(une lenteur dans l’écoulement de la marchandise peut
affecter les échéances des fournisseurs), il n’en reste pas
moins qu’elle a aussi des effets négatifs tels que l’absence
et/ou l’insuffisance des services après vente, le prélèvement
d’une marge trop élevée pour les services rendus,
l’intervention des grossistes éloigne les détaillants des
producteurs.
iv). Politique de communication
Malgré son partenariat dans des différents
événements, la communication de l’eau Mayo reste peu
incitative. Certains slogans manquent de pertinence.
Le contenu du slogan de l’eau mayo devrait être
orienté vers l’apport de l’eau mayo dans l’organisme et de
l’expérience de l’entreprise dans le secteur. À cet effet, la
proposition de slogan suivante peut être expérimentée :
52
Revue Congolaise de Gestion N°14
«L’eau Mayo : une source de pureté pour votre
corps».
des peintures murales qui sont une initiative à
encourager et peuvent favoriser la visibilité du produit dans la
ville. L’entreprise devrait cibler des points stratégiques tels
que l’avenue de la paix qui est une avenue principale de la
ville, l’avenue des 3 martyrs, l’avenue de l’OUA.
elle devrait multiplier les diffusions médiatiques, des
actions sociales, promotions, jeux concours effectués au
niveau national.
la publicité non seulement qu’elle suscite l’achat,
mais elle doit aussi rassurer le consommateur après l’achat.
Les publicités de l’eau mayo n’assurent aucune de ces deux
fonctions, car les résultats de notre enquête montrent que
l’eau mayo se consomme par sa notoriété sur le marché.
Le message que devrait faire passer l’entreprise pour le
produit doit être centré sur le bien être. Les consommateurs
pourraient avoir à l’esprit que :
« Boire de l’eau mayo chaque jour, c’est boire une
eau pure et naturellement minéralisée qui entretient la
jeunesse de votre corps».
En outre, l’entreprise doit concevoir ses publicités sur
l’historique de l’entreprise avec toutes les évolutions
apportées sur le produit et les technologies de production. On
aurait, non seulement, des publicités qui montrent
l’importance d’une eau pure, mais, en aussi, l’importance de
l’eau Mayo dans la vie quotidienne, et cela, pour tous les
générations.
Pour les sportifs, au lieu de mettre en scène une
personne seule au stade, l’entreprise peut mettre en scène une
équipe qui s’entraine et qui consomme l’eau mayo pour avoir
plus d’énergie et être les meilleurs.
Par ailleurs, au-delà des consommateurs nationaux,
l’entreprise peut cibler une autre catégorie de consommateurs
53
Revue Congolaise de Gestion N°14
particuliers, notamment, les étrangers résidents au Congo, en
mettant en exergue la norme ISO du produit dans les
publicités. Cette action aurait un impact important du fait que
la norme ISO signifie que l’eau mayo, non seulement, elle
respecte les normes de l’OMS et du ministère de l’Hygiène et
de la Santé publique, mais, elle répond, aussi, aux normes
internationales de qualité pour les eaux embouteillées au
même titre que les eaux minérales importées telles que Evian,
Volvic.
*
* *
Pour ce qui est de la publicité présentant un robot
prenant l’eau à un enfant pour la consommer, l’entreprise
pouvait mettre en scène deux enfants qui se disputent une
bouteille d’eau mayo, et un robot intervenant pour leur offrir,
chacun, une bouteille d’eau Mayo.
L’entreprise devrait aussi intégrer les personnages
célèbres, les artistes dans les publicités Pour le site Internet
qui n’est pas mis à jour, nous avons comme message
d’accueil « L’eau c’est la vie » qui est connu de tous. La
société pouvait la remplacer par le slogan de l’eau Mayo.
Pour rendre plus effectif le site, l’entreprise devrait :
actualiser le site, fournir des informations nécessaires sur le
produit, les prix, les points de vente et les actions
commerciales mises en œuvre (dons, sponsoring, jeux
concours, tombolas, etc., documenter les archives du site,
apporter un peu plus d’informations sur l’historique de la
société, et, fournir des informations sur la part de marché du
produit, les tendances du marché.
La SN PLASCO devrait, avant toute conception
publicitaire ou promotion, mener une étude de marché pour
connaître au mieux les attentes des consommateurs, en vue de
satisfaire au maximum leurs besoins et désirs. Elle pourrait
54
Revue Congolaise de Gestion N°14
aussi consulter une agence de publicité pour une bonne
conception publicitaire.
5- CONCLUSION
Les entreprises congolaises sont considérées dans une
qui nécessiterait, par rapport à la concurrence étrangère, un
protectionnisme éducateur selon l’économiste allemand F.
List. En politique commerciale de libre-échange, toutes les
entreprises s’inscrivent dans la logique de recherche de la
compétitivité à travers la maîtrise des bonnes pratiques en
management et, particulièrement, la bonne gestion des
facteurs clés de succès.
Pour la SN PLASCO offrant le produit «Source Mayo»,
ces exigences passent par la bonne gestion du marketing mix.
L’analyse de cet outil nous a permis de constater certaines
faiblesses au niveau de ces composantes, notamment au
niveau de la communication et/ou de la publicité. Les
suggestions proposées pourront permettre à l’entreprise de
conserver sa position concurrentielle.
Reste que, d’un point de vue de l’essentiel pour cette
étude, l’absence des statistiques sur les populations des
consommateurs constitue une carence ayant empêché une
analyse plus poussée, relative aux études quantitatives.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1.
Berry (1985), Eiglier et Langeard
(1987), Résumé sur le marketing mix,
http:// www.cultureco.com.
2- Boulocher, V. ; Flambard, S., et Sabine J.,
(2006, Septembre), Analyse d’un marché, 2ème édition,
Vuibert
3-Drucker, P.
(1999°, L’avenir du Management, Village Mondial,
Paris,
55
Revue Congolaise de Gestion N°14
4-Drucker, P., (1970),
Bien connaitre votre affaire et réussir, Les Editions
d’Organisation et Editions Eyrolles.
5-Lovelock
(1996), Résumé sur le marketing mix, http://
www.cultureco.com.
6-Albertini T.
(2003), Dictionnaire de marketing, Paris, Vuibert,
page 100-101
7-Chirouze, Y.
(1991), Le marketing, tome 1, Chotard et Associés,
8-Chirouze Y., (2007),
Le marketing : études et stratégies, Ellipses Edition
Marketing, 2ème édition
56
Revue Congolaise de Gestion N°14
L’IMPACT
DE LA STRATEGIE SUR LE CONTENU
DES TABLEAUX DE BORD :
CAS DES ENTREPRISES AU MAROC
Azzouz ELHAMMA
Professeur agrégé en gestion financière et comptable
Docteur en contrôle de gestion, UFR : EDG, FSJES Rabat-Agdal
E-mail : [email protected]
RESUME
Durant ces dernières décennies, les systèmes de mesure de
la performance, notamment les tableaux de bord, ont fait
l’objet de plusieurs travaux de recherche dans les pays
développés. Or ce type de recherches reste encore trop limité
dans plusieurs pays en développement comme le Maroc par
exemple.
Cet article examine les indicateurs intégrés dans les
tableaux de bord de 62 entreprises installées au Maroc et leur
influence par la stratégie. Les résultats de cette recherche
montrent que les tableaux de bord tendent à devenir plus
« équilibrés » et se rapprochent du balanced scorecard
lorsque la stratégie s’oriente vers la prospection.
Mots clés : Tableaux de bord – Prospectrices – Analystes –
Défenderesses – Stratégie – Balanced scorecard.
57
Revue Congolaise de Gestion N°14
Abstract
During
the last decades, the performance measurement
systems are studied by a several researches in the developed
countries. This type of researches is still absent in several
developing countries such as Morocco for example.
In this context and from the results of an empirical
research, this article examines the performance measurement
systems of the 62 Moroccan firms. The principal results of
this research show that the prospective strategy is identified
as factor which tends to foster a more balanced approach.
Key words: “Tableaux de bord” – Prospectors – Analysts –
Defenders – Strategy - Balanced scorecard.
1-INTRODUCTION
O
n assiste actuellement à ce qui est souvent appelé
« crise » de contrôle de gestion (Bouquin, 1996). Cette
crise touche notamment ses outils classiques dont les
tableaux de bord centrés exclusivement sur le suivi des
résultats financiers. Pour cette raison, le modèle du balanced
scorecard (BSC) a vu le jour. Ce modèle intègre en plus des
indicateurs financiers, des indicateurs non-financiers.
Or, ces tableaux de bord dits « équilibrés » ou
« différenciés » ne sont pas adoptés par toutes les entreprises.
Plusieurs recherches ont démontré, dans le cadre de la théorie
de la contingence, que le contenu des tableaux de bord
dépend de plusieurs facteurs organisationnels comme la
stratégie par exemple. Dans ce contexte, la question suivante
s’impose: la stratégie a-t-elle un impact significatif sur le
caractère plus ou moins équilibrés des tableaux de bord des
entreprises au Maroc? Nous allons essayer de répondre à
cette question dans le cadre de la théorie de la contingence.
58
Revue Congolaise de Gestion N°14
L’objectif de ce travail de recherche est double. Il
consiste, en premier lieu, à identifier le contenu des tableaux
de bord utilisés par les entreprises au Maroc pour évaluer leur
« équilibrage » et, en deuxième lieu, à déterminer l’impact de
la stratégie sur le contenu des tableaux de bord.
Une définition des tableaux de bord et leur équilibrage
et un essai d’explication de la diversité relative aux tableaux
de bord par le facteur stratégie et une présentation de nos
choix méthodologiques sont nécessaires pour mener l’analyse
statistique et de présenter les principaux résultats obtenus.
2. CADRE CONCEPTUEL ET FORMULATION
L’HYPOTHESE
DE
Avant d’analyser l’impact de la stratégie sur le
contenu des tableaux de bord (1.2), il nous paraît essentiel de
définir notre champ d’analyse qui réside notamment dans le
concept des tableaux de bord (1.1).
2.1. Les tableaux de bord et leur équilibrage
Selon Bouquin (2001, pp. 397-398), le tableau de
bord se définit comme un instrument d’action composé d’un
« ensemble d’indicateurs peu nombreux (cinq à dix) [sont
intégrés] pour permettre aux gestionnaires de prendre
connaissance de l’état et de l’évolution des systèmes qu’ils
pilotent et d’identifier les tendances qui les influenceront sur
un horizon cohérent avec la nature de leurs fonctions ».
Plusieurs chercheurs insistent sur l’importance des tableaux
de bord dits « équilibrés ». Des indicateurs de qualité, des
mesures sociales, des indicateurs orientés clients et des
indicateurs orientés processus doivent être également retenus
pour compléter les mesures financières. Ces indicateurs non
financiers permettent d’assurer la réactivité organisationnelle
59
Revue Congolaise de Gestion N°14
(Chiapello et Delmond, 1994) et contribuent à la
transversalité (De Montgolfier, 1994).
Pour ces raisons, plusieurs types de tableaux de bord
ont vu le jour. Le BSC est certainement le système de mesure
de la performance le plus connu sur le plan international
(Bourguignon et al. 2002). Il a été développé par Kaplan et
Norton (1992) aux Etats-Unis au début des années 1990. Il
intègre en plus des indicateurs financiers, des indicateurs
non-financiers qui sont regroupés autour de quatre axes :
l’axe financier (mesurant le niveau et l’évolution des
performances financières de l’entreprise) ; l’axe « client »
(qui regroupe les indicateurs qui permettent d’évaluer ce qui
génère une satisfaction présente ou future du client) ; l’axe
« processus internes » (il s’agit de s’interroger sur la façon
dont la gestion des opérations et des processus peut
contribuer à fournir un avantage concurrentiel à
l’entreprise) et l’axe « innovation & apprentissage
organisationnel » (qui concerne essentiellement la façon dont
on gère les moyens humains et les savoirs en vue d’atteindre
les objectifs stratégiques définis précédemment).
Dans le cadre de la théorie de la contingence,
l’adoption des tableaux de bord dits « équilibrés » et qui se
rapprochent du BSC dépend de quelques facteurs
organisationnels et environnementaux et qui sont
essentiellement la taille, la stratégie, la décentralisation
organisationnelle, l’environnement externe, etc. (Chapman,
1997). Dans cette recherche, nous allons étudier l’impact de
la stratégie sur la différenciation des indicateurs intégrés dans
les tableaux de bord.
2.2. Impact de la stratégie sur le contenu des tableaux de
bord
La relation entre la stratégie adoptée par une
entreprise et son système de mesure de la performance a fait
60
Revue Congolaise de Gestion N°14
l’objet de plusieurs travaux de recherche. Govindarajan et
Gupta (1985), Simons (1987), Govindarajan (1988) et
Govindarajan et Fisher (1990) ont démontré que la stratégie
joue un rôle primordial dans l’élaboration des systèmes de
contrôle de gestion. Nanni et al. (1992) ont affirmé que les
firmes devaient accroître le degré de corrélation entre leurs
stratégies et les indicateurs de performance pris en compte
dans la construction des systèmes de mesure de performance,
mais la question qui se pose est la suivante : quels tableaux
de bord pour quelle stratégie ?
Les travaux de recherche qui ont essayé de répondre à
cette question n’ont pas donné des résultats convergents.
Cauvin et Bescos (2004) n’ont pas validé l’hypothèse selon
laquelle les entreprises poursuivant une stratégie de
différenciation utilisent plus d’indicateurs non financiers que
les entreprises développant une stratégie de domination par
les coûts. Par contre, Miles et Snow (1978) ont démontré que
les entreprises prospectrices adaptent leur système de
mesures de performance à leur stratégie, elles optent
généralement pour des indicateurs non financiers dans leurs
systèmes de mesure de la performance. Par contre, les
entreprises défenderesses seraient beaucoup plus attirées par
les mesures de performance financières.
Dans le même sens, Shank, Govindarajan et Spiegel
(1989) ont mis en évidence que les entreprises adoptant une
stratégie de domination par les coûts utilisent des indicateurs
plus financiers. Par ailleurs, les entreprises poursuivant une
stratégie de différenciation adoptent plus des indicateurs non
financiers. Abernethy et Lillis (1995) obtiennent des résultats
qui vont dans le même sens que les études précédentes. Selon
ces auteurs, les entreprises adoptant une stratégie qui se
rapproche d’une stratégie de prospection adoptent moins
d’indicateurs financiers au profit d’indicateurs de nature plus
61
Revue Congolaise de Gestion N°14
qualitative ou non financière. Ces résultats sont confirmés par
Pereira et al. (1997).
Gosselin et Dubé (2002), à la suite d’une étude
portant sur un échantillon de 101 entreprises manufacturières
canadiennes, ont trouvé, quant à eux, une corrélation
significative négative entre le type de stratégie défenderesse
et les mesures de performance non financières. Par contre, les
entreprises poursuivant une stratégie de type « prospecteur »
adoptent de plus en plus de mesures de performance non
financières que les entreprises de type « défenseur ».
Cette littérature nous conduit donc à formuler l’hypothèse
suivante :
*
* *
Hypothèse de la recherche :
Les tableaux de bord sont d’autant plus équilibrés et se
rapprochent du BSC que la stratégie des entreprises s’oriente
vers la prospection
3. METHODOLOGIE
DE LA
RECHERCHE
Le cadre méthodologique nous permettra de présenter les
caractéristiques de l’échantillon (2.1) et les variables de
l’étude (2.2).
3.1. Collecte des données et caractéristiques de
l’échantillon
Afin de mener notre étude, un questionnaire a été
construit et adressé à des entreprises installées au Maroc.
Après une relance téléphonique et contacts physiques,
soixante-seize (76) questionnaires ont été reçus, pour un taux
de réponse brut de 18%. De ce nombre, 14 questionnaires ont
été éliminés pour diverses raisons, notamment les
62
Revue Congolaise de Gestion N°14
questionnaires incomplets, illisibles, ou des entreprises non
adoptant un contrôle de gestion, etc. Le taux de réponse final
a été de 15%. Les questionnaires ont été remplis par 18
directeurs financiers (29%), 23 contrôleurs de gestion (37%),
17 comptables (27%) et 4 autres types de responsables (6%).
Deux principaux paramètres ont été utilisés pour
décrire les caractéristiques des entreprises ayant constitué
notre échantillon d’étude : secteur d’activité et effectifs des
employés. Le tableau 1 ci-dessous présente le résumé des
données sur ces deux paramètres.
Tableau 1: Caractéristiques de l’échantillon
Secteur d’activité
Nombre
%
Industrie
48
77,42
BTP
06
9,68
Services
Commerce
Total
06
02
62
9,68
3,22
100
Effectif du personnel
Nombre
%
Moins de
30
48,39
200
Plus de
32
51,61
200
Total
62
100
Notre échantillon se compose de 48 entreprises
industrielles (77%), 6 entreprises du BTP (10%), 6
entreprises des services (10%) et 2 entreprises commerciales
(3%). Concernant la taille, 48% de cet échantillon est
constitué des PME et 52% des entreprises de grande taille.
3.2. Variables de l’étude
3.2.1. Variable dépendante (équilibrage des tableaux de
bord : EQTB)
Pour opérationnaliser la variable relative à
l’équilibrage des tableaux de bord, nous avons choisi les
indicateurs proposés par Kaplan et Norton (1992). Dans leur
63
Revue Congolaise de Gestion N°14
définition donnée au tableau de bord, ils présentent quatre
axes stratégiques sur lesquels les indicateurs de performance
devraient reposer :
 les résultats financiers (FNCE) ;
 la satisfaction des clients (CLNT) ;
 les processus internes (PRIN) ; et
 l’apprentissage organisationnel et innovation (APOI).
Dans le questionnaire, il a été demandé aux répondants
d’indiquer, à l’aide d’une échelle sémantique différentielle à
cinq points allant de «1 : un degré d’intégration très faible » à
« 5 : un degré d’intégration très élevé », dans quelle mesure
les principaux tableaux de bord de l’entreprise intègrent les
indicateurs des quatre catégories mentionnées ci-dessus
(plusieurs exemples d’indicateurs sont proposés). Plus le
score global (sur 20 points) est élevé, plus le tableau de bord
est « équilibré » et vice versa.
3.2.2. Variable indépendante (la stratégie : STRA)
Dans le cadre des recherches contingentes en
stratégie/contrôle, trois types d’opérationnalisation de la
stratégie sont généralement utilisés : par le positionnement,
par la mission ou par la typologie de Miles et Snow (1978).
Dans cette recherche, nous allons retenir la dernière typologie
qui est reconnue par les chercheurs dans le domaine de la
stratégie (Gosselin et Dubé, 2002). Cette typologie distingue
entre 4 comportements stratégiques :
 « les prospecteurs » : ce sont des entreprises qui
luttent par l’innovation ;
 « les défenseurs » : ce sont des entreprises
championnes dans leurs secteurs et qui veillent à
maintenir leur domaine d’excellence par le biais des
coûts bas ;
64
Revue Congolaise de Gestion N°14
 « les analystes » : qui sont un hybride des deux
précédents ;
 et « les réacteurs » : ce sont des entreprises qui n’ont
pas une vision stratégique claire. Ce comportement
est généralement voué à l’échec.
Sept items sont constitués pour l’identification des
comportements stratégiques des entreprises étudiées. Chaque
item est composé de deux stratégies opposées (défenderesses
vs. Prospectrice). Ces items sont les suivants :
Tableau 2 : Items relatifs à l’identification de la stratégie
poursuivie
Stratégies défenderesses ……… Stratégies prospectrices
L’entreprise met
l’accent sur la
standardisation
des produits afin
de réaliser des
effets d’échelles
et
d’expériences.
La croissance
est réalisée
essentiellement
par extension
des produits
actuels aux
clients actuels
Dans
l’entreprise, on
a le souci de la
protection d’une
ligne de
0.....1…..2….3.....4...5
0....1…..2….3.....4..5
L’entreprise met
l’accent sur la
différenciation des
produits afin de
satisfaire une plus
large clientèle.
La croissance est
réalisée
essentiellement par
développement de
nouveaux produits
à de nouveaux
clients
Dans l’entreprise,
on a le souci de
repérer et de
satisfaire de
nouveaux clients
65
Revue Congolaise de Gestion N°14
produits stables
dans le cadre de
marchés
clairement
définis.
Dans
l’entreprise, la
préoccupation
principale est de
maintenir
les
produits
ou
services actuels
Dans
l’entreprise, la
préférence est
marquée pour
les
investissements
non risqués et
les retours sur
investissement
modérés
La
stratégie
consiste
à
attendre et faire
en fonction de la
concurrence.
L’entreprise est
rarement
la
première
à
introduire
de
nouveaux
processus
de
production.
0..1…..2….3.....4...5
0..1…..2….3.....4…...5
0….1…..2….3.....4...5
0...1…..2….3.....4...5
0.....1…..2….3.....4...5
avec de nouveaux
produits.
Dans l’entreprise,
la préoccupation
principale est le
développement de
nouveaux produits
ou services.
Dans l’entreprise,
la préférence est
marquée pour les
investissements
risqués
et
les
retours
sur
investissement
élevés.
La
stratégie
consiste à avoir
l’initiative
de
l’action.
L’entreprise
est
souvent la première
à introduire de
nouveaux
processus
de
production.
Source : Mouline J.P. (2000)
Le répondant était amené à identifier sur une échelle
de Lickert à six points (allant de 0 à 5) le chiffre
correspondant le plus fidèlement à l’orientation stratégique de
66
Revue Congolaise de Gestion N°14
l’entreprise. Plus le résultat global est élevé, plus le caractère
proactif de l’organisation est proéminent et vice versa.
4. RESULTATS
ET
DISCUSSIONS
Dans cette troisième section, nous allons présenter
tout d’abord les résultats relatifs à la nature des indicateurs
intégrés dans les tableaux de bord des entreprises étudiées
(3.1). Les résultats obtenus seront, ensuite, expliqués par le
facteur stratégie (3.2).
4.1. Nature des indicateurs intégrés dans les tableaux de
bord
Le tableau 3 ci-après résume les résultats relatifs aux
indicateurs intégrés dans les tableaux de bord utilisés par les
entreprises étudiées.
Tableau 3 : Nature des indicateurs intégrés dans les
tableaux de bord adoptés par les entreprises étudiées
Types
d’indicateurs
Finance
Satisfaction
des clients
Processus
internes
Apprentissage
organisationnel
Intégration
très faible
Intégration
faible
Intégration
moyenne
Intégration
forte
Intégrati
on très
forte
00
(00%)
00
(00%)
08
(13%)
23
(37%)
09
(15%)
24
(39%)
27
(44%)
23
(37%)
13
(21%)
25
(40%)
25
(40%)
14
(23%)
22
(35%)
10
(16%)
02
(3%)
02
(3%)
18
(29%)
03
(5%)
00
(00%)
00
(00%)
67
Revue Congolaise de Gestion N°14
Figure 1 : Degré d’intégration des indicateurs financiers
La majorité des entreprises étudiées adoptent des
tableaux de bord intégrant des indicateurs financiers (chiffre
d’affaires, résultats, cash-flows, etc.) (Figure 1). Plus de 64%
des entreprises intègrent « fortement » ou « très fortement »
ces indicateurs dans leurs tableaux de bord.
Figure 2 : Degré d’intégration des indicateurs relatifs aux
« clients »
68
Revue Congolaise de Gestion N°14
La proportion des entreprises qui adoptent des
indicateurs relatifs aux clients est faible (Figure 2). Plus de
79% des entreprises ont déclaré qu’elles n’intègrent que
moyennement ou faiblement ces indicateurs dans leurs
tableaux de bord.
Figure 3 : Degré d’intégration des indicateurs relatifs aux
« processus internes »
Les indicateurs mesurant la performance relative aux
processus internes sont faiblement intégrés dans les tableaux
de bord des entreprises étudiées (Figure 3). En effet, 57% des
entreprises n’intègrent que faiblement ou très faiblement cette
catégorie d’indicateurs dans leurs systèmes de mesure de la
performance.
69
Revue Congolaise de Gestion N°14
Figure 4 : Degré d’intégration des indicateurs relatifs à
« l’innovation & l’apprentissage organisationnel ».
Les indicateurs relatifs à l’innovation et à
l’apprentissage sont presque absents dans les tableaux de
bord des entreprises étudiées (Figure 4). 74% des entreprises
ont déclaré que cette catégorie d’indicateurs n’est intégrée
que faiblement ou très faiblement dans leurs systèmes de
mesure de la performance.
D’une manière générale, le contenu des tableaux de
bord diffère d’une entreprise à une autre. Cette diversité doit
être expliquée par les caractéristiques organisationnelles de
l’entreprise dont la stratégie poursuivie.
4.2. Impact de la stratégie sur le contenu des tableaux de
bord
Pour identifier les comportements stratégiques des
entreprises étudiées, nous avons utilisé l’analyse
classificatoire. Elle permet de regrouper les pratiques
70
Revue Congolaise de Gestion N°14
similaires. Elle nécessite de choisir un algorithme de
classification, c’est-à-dire de savoir la procédure adéquate
pour regrouper convenablement des objets distincts dans des
classes. Dans cette recherche, notre partition a été réalisée par
classification hiérarchique. Le critère d’agrégation
l’algorithme de Ward dont le but est de minimiser la variance
interne de chaque classe et maximiser la variance entre
classes a été utilisé.
Par le biais de cette analyse classificatoire, nous avons
identifié trois groupes de comportements stratégiques
(tableau 4).
Tableau 4: Comportements stratégiques des entreprises
enquêtées
Comportement stratégique
Prospectrices
Analystes
Défenderesses
Ensemble
%
16,1
30,6
53,2
100
Figure 5 : Comportements stratégiques des entreprises
étudiées
71
Revue Congolaise de Gestion N°14
Notre échantillon de l’étude se compose de 16,1% des
prospectrices, 30,6% des analystes et 53,2% des
défenderesses. Le tableau ci-après résume les résultats des
moyennes relatives à la variable EQTB pour les entreprises en
fonction de leurs comportements stratégiques.
Tableau 5: Moyennes relatives à l’EQTB en fonction de la
stratégie poursuivie
Moyennes
relatives à
l’EQTB
Prospectrices
Analystes
Défenderesses
11,30
12,32
10,00
Toutes les entreprises
10,92
Figure 6 : L’équilibrage moyen des tableaux de bord en
fonction de la stratégie poursuivie
L’équilibrage moyen des tableaux de bord utilisés par
les entreprises prospectrices et analystes (respectivement 11,3
et 12,32) et plus élevé que celui observé dans les entreprises
défenderesses (10). Ces résultats soutiennent la validation de
l’hypothèse de la recherche.
72
Revue Congolaise de Gestion N°14
Pour tester statistiquement l’hypothèse de la
recherche, une régression linéaire sera utilisée. Nous l’avons
choisie pour sa simplicité et sa large utilisation par les
chercheurs en sciences de gestion. Le tableau 6 ci-dessous
résume les résultats de cette régression linéaire de l’EQTB en
fonction de la STRA.
Tableau 6: Résultats de la régression linéaire de l’EQTB
en fonction de la STRA
Variable
indépendante
(stratégie)
β
t-statistic
Variables dépendantes
FNCE CLNT PRIN APOI EQTB
0.201
0,243
0,288
0,209
0,289
1,592 ns 1,943 1,328* 1,659 2,337*
ns
**
R2
0.041
0,059
0,083
0,044
0,083
F-value
2,533 ns 3,777 5,421* 2,754 5,464*
ns
**
* Significatif au seuil de 5% ** Significatif au seuil de 10% ns
Non significatif
La stratégie a un impact positif et significatif sur deux
types d’indicateurs : les indicateurs des « clients » et des
« processus internes », alors qu’elle a des effets non
significatifs sur les indicateurs financiers et ceux relatifs à
l’apprentissage organisationnel & innovation. Généralement,
l’EQTB et la STRA sont positivement et significativement
corrélés (β=0,289 ; p<5%). La stratégie explique 8,3%
(R2=0,083) de la variance enregistrée par l’EQTB.
Globalement, le modèle identifié est significatif au seuil de
5% (F=5,464).
Ces résultats nous permettent de conclure que
l’hypothèse de la recherche (les tableaux de bord sont
73
Revue Congolaise de Gestion N°14
d’autant plus équilibrés et se rapprochent du BSC que la
stratégie des entreprises s’oriente vers la prospection) est
validée. Ce résultat, conforme à ceux de Shank, Govindarajan
et Spiegel (1989) et de Gosselin et Dubé (2002), peut
s’expliquer par le souci des entreprises prospectrices à faire
suivre leurs clients et faire face à l’incertitude
environnementale dans laquelle elles évoluent par le biais des
indicateurs qualitatifs et non financiers.
5. CONCLUSION
Cette recherche, réalisée auprès d’un échantillon de
62 entreprises installées au Maroc, montre que, comme cela
avait été envisagé au début de la recherche, au regard des
travaux portant sur la contingence du contrôle de gestion,
l’équilibrage des tableaux de bord est corrélé positivement à
la stratégie poursuivie par l’entreprises : « les tableaux de
bord sont d’autant plus équilibrés et se rapprochent du BSC
que la stratégie des entreprises s’oriente vers la prospection ».
Les résultats obtenus doivent être interprétés avec
prudence au vu des limites de notre recherche. Deux grandes
limites d’ordre méthodologiques doivent être soulignées : la
taille modeste de l’échantillon et le recours à une approche
perceptuelle pour collecter les données. À cet égard, on peut
avoir un décalage important entre les discours et les pratiques
effectives.
Nous avons démontré ci-dessus que l’équilibrage des
tableaux de bord est corrélé à la stratégie. Toutefois, il
convient de signaler que d’autres facteurs peuvent participer
également à la différenciation des pratiques de pilotage des
entreprises comme la taille, l’incertitude environnementale, le
style de décision, la culture du dirigent, etc. La question
suivante se posera donc : dans quelle mesure ces facteurs de
contingence peuvent-ils avoir un impact significatif sur les
systèmes de mesure de la performance ?
74
Revue Congolaise de Gestion N°14
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1.
Abernethy M. A. et Lillis A.M.
(1995), The impact of manufacturing flexibility on
management control system design, Accounting,
Organizations and Society, Vol. 20, n° 4, pp. 241-258.
2 .Bouquin H. (1996),
Pourquoi le contrôle de gestion existe-t-il encore ?,
Gestion, Vol.21, n°3, septembre.
3. Bouquin H. (2001),
Le contrôle de gestion, Presses Universitaires de
France, Paris, 5ème éd.
4
Bourguignon A.,
Malleret V. et Norreklital H.
(2002), L’irréductible dimension culturelle des
instruments de gestion : l’exemple du tableau de bord
et du balanced scorecard, Comptabilité-ContrôleAudit/ Numéro spécial, mai, pp. 7-32.
5.
Cauvin E. et Bescos P-L.
(2004), L’évaluation des performances dans les
entreprises françaises : une étude empirique, Actes du
25ème Congrès de l’Association Francophone de
Comptabilité, Orléans, 12-14 mai.
6.
Chapman C.S.
(1997), Reflections on a contingent view of
accounting, Accounting, Organizations and Society,
Vol. 22, pp. 189- 205.
7.
Chiapello E. et Delmond M.H.
(1994), Les tableaux de bord de gestion, outils
d'introduction du changement, Revue Française de
Gestion, janvier-février, pp. 49-58.
8.
De Montgolfier C.
(1994), Structure et interactions des données pour le
contrôle de gestion, Thèse de Doctorat en Sciences de
Gestion, Université de Montpellier II.
9.
Germain C. (2004),
La contingence des systèmes de mesure de la
performance : les résultats d’une recherche empirique
75
Revue Congolaise de Gestion N°14
10.
11.
12.
13.
14.
15.
16.
17.
76
sur le secteur des PME, Revue Finance Contrôle
Stratégie, Vol.7, mars, pp.33-52.
Gosselin M. et Dubé T.
(2002), Influence de la stratégie sur l’adoption des
mesures de performance en vigueur dans le système
de comptabilité de gestion, 23ème congrès de l’AFC,
Toulouse, 16 et 17 mai.
Govindarajan V.
(1988), A contingency approach to strategy
implementation at the business-unit level: integrating
administrative mechanisms with strategy, Academy of
Management Journal, 31, pp.828-853.
Govindarajan V. et Fisher J.
(1990), Strategy, control systems, and resource
sharing: effects on business-unit performance,
Academy of Management Journal, Vol. 33, n° 2, pp.
259-285.
Govindarajan V. et Gupta A.K.
(1985), Linking control systems to business unit
strategy: impact on performance, Accounting,
Organization and Society, Vol. 10, n° 1, January, pp.
51-66.
Kaplan R.S. et Norton D.P.
(1992), The balanced scorecard, measures that drive
performance, Harvard Business Review, juanuaryfebruary, pp. 71-79.
Miles R.E. et Snow C.C. (1978),
Organizational Strategy, Structure and Process,
McGraw Hill, New York.
Mouline J.P.
(2000), La PME familiale française et son orientation
stratégique: une étude exploratoire, Cahier de
recherche n° 2000-01, GREFIGE, Université Nancy 2;
Nanni A., Dixon R. et Vollmann T.E.
(1992), Integrated performance measurement:
management accounting to support the new
Revue Congolaise de Gestion N°14
18.
19.
20.
manufacturing realities, Journal of Management
Accounting Research, Vol. 4, pp. 1-19.
Perera S., Harrison G. et Poole M.
(1997), Customer-focused manufacturing strategy and
the use of operations-based non-financial performance
measures: a research note, Accounting, Organizations
and Society, Vol. 22, n° 6, pp. 557-572.
Shank J.K., Govindarajan V. et Spiegel E
(1989), Strategic Cost Analysis: a Case Study, Irwin.
Simons R. (1987),
Accounting control systems and business strategy: an
empirical analysis, Accounting, Organization and
Society, Vol. 12, n° 4, pp. 357-374.
77
Revue Congolaise de Gestion N°14
78
Revue Congolaise de Gestion N°14
L’IMPACT
DU MICRO-CREDIT SUR LA
CROISSANCE ORGANIQUE DES TRES PETITES
ENTREPRISES CAMEROUNAISES
Alain TAKOUDJOU NIMPA
Enseignant-chercheur à la Faculté des Sciences
Economiques et de Gestion de l’Université de Dschang
BP. 110 Dschang – Cameroun
E-mail [email protected]
Léopold DJOUTSA WAMBA
Enseignant-chercheur à la Faculté des Sciences
Economiques et de Gestion de l’Université de Dschang
BP. 110 Dschang – Cameroun
E-mail: [email protected]
RESUME
Le présent travail est une contribution à la mesure de
l’impact des micro-financements sur la croissance organique
des TPE camerounaises. Dans ce cadre, il a été question non
seulement de mobiliser un corpus théorique sur les facteurs
explicatifs de la croissance des entreprises; mais aussi
d’identifier à travers une étude statistique, les facteurs qui
s’apparentent à la réalité des TPE camerounaises.
Sur le plan empirique, en mobilisant la méthode des
groupes appariés, les tests d’association et de comparaison,
sur un échantillon de 258 TPE camerounaises; nous avons
obtenus les résultats suivants : dans un premier temps on a pu
établir, sur une période de douze mois, que l’impact du
79
Revue Congolaise de Gestion N°14
micro-crédit sur la croissance des TPE bénéficiaires est non
significatif. Dans un second temps l’étude comparative
montre qu’il existe une différence de niveau de croissance
(chiffre d’affaires, marge bénéficiaire, niveau de production
ou des achats, nombre d’actifs, nombre d’employés) entre les
micro-entreprises bénéficiaires de crédit et les non
bénéficiaires ; les bénéficiaires de crédit ayant une
propension plus forte à la croissance que les non
bénéficiaires. Toutefois, cette différence est non
significative ; et par conséquent, ne pourrait s’expliquer par
l’accès au crédit.
Ces résultats nous permettent de constater que ce n’est
pas nécessairement l’accès au crédit qui impulse la croissance
de la TPE camerounaises. Ces résultats nous mettent
également sur la piste des variables réelles (aptitudes
managériales et entrepreneuriales du dirigeant, etc.) qui
seraient des facteurs explicatifs de la croissance de cette
catégorie d’entreprise.
Mots clés : Micro crédit-croissance organique-Très petite
entreprise.
Abstract
This paper contributes to measure of the impact
noticed in micro financing on the organic growth of the very
small Cameroonian enterprises. In this context, it has been
not only a matter of mobilizing a theoretical corpus on the
understanding of explanatory factors of growth into the
enterprises; but also, it identifies through a statistical study,
the factors that are attached to the reality of Cameroonian
VSE.
The fact is that, by mobilizing the method of pairing
groups, the test of association and of comparison, on a
sample of 258 Cameroonian VSE; we obtained the following
80
Revue Congolaise de Gestion N°14
results: firstly, we established, within a period of twelve
months, that the impact of micro credit on the growth of
beneficiary VSE is insignificant. Secondly, the comparative
study shows that it exists a difference on the level of growth
(turnover, profit margin, production level or purchases,
active number, staff number) between the micro enterprises
beneficiaries of credit and non beneficiaries; the
beneficiaries of credit are likely to have a large amount of
growth rather than the non beneficiaries. However, this
difference is less significant; and consequently, can’t account
for credit access. Then; we noticed that having access to
credit does not necessarily guarantee the rise of growth of
Cameroonian VSE. These results involve us with the real
variables (management skills and entrepreneurial talent of
the manager, etc.) that would be the explanatory factors of
growth in this category of enterprise.
Keys words: Micro credit-organic growth-very small
enterprise
1.
L
INTRODUCTION
’inaccessibilité financière est d’autant plus un handicap
qu’elle touche les très petites entreprises (TPE) qui
représentent une importante source par le biais des emplois
générés et donc la contribution à la réduction de la pauvreté.
Ces entreprises font face à de fortes difficultés structurelles
qui contraignent leur développement dont le manque d’accès
aux financements.
Pendant longtemps, les systèmes bancaires en Afrique
ont dû faire face à des risques élevés et des coûts de
transaction importants lorsqu’il s’agissait de financer les
petites entreprises. Ces contraintes ont largement contribué à
restreindre l’accès des petites entreprises aux circuits
financiers formels. Les banques d’Afrique n’avaient en effet
81
Revue Congolaise de Gestion N°14
nul besoin de développer leurs activités de crédit aux petites
entreprises, car elles dégageaient suffisamment de bénéfices
en prêtant sans risques et à moindre frais aux grandes
entreprises ou en investissant dans les titres de dette publique
très rémunérateurs. Par la suite, Le système bancaire
classique connaît, dans la plupart des pays d’Afrique et même
au Cameroun, de graves crises (Wamba, 2001 ; 2002). Les
multiples programmes de restructurations du système
bancaire mis en place à la fin du siècle dernier n’ont pas pu
résoudre le problème de certaines banques.
Cette carence du système financier classique a
contribué à favoriser l’émergence de la microfinance; qui est
venu élargir les modes de financements des petites
entreprises. Si à l’origine des micro-crédits, on trouve des
mécanismes plutôt informels à l’image des tontines, les trois
dernières décennies ont vu l’émergence d’institutions plus
organisées comme la Grameen Bank ou Prodem Bancosol
qui sont plus adaptées aux besoins de ces unités tant par
rapport aux montants proposés que par la rapidité des
procédures d’octroi de crédit. Le concept de micro finance a
longtemps été associé à celui de la pauvreté. L’efficacité du
micro-crédit dans la lutte contre la pauvreté n’est plus à
démontrer ; le problème désormais posé est celui du
financement de la croissance des très petites entreprises. Dès
lors, nous sommes en droit de nous poser la question
suivante :
Quelle est la contribution des microfinancements à la
croissance interne de très petites entreprises ?En
d’autres termes, En quoi la situation des micro
entreprises bénéficiaires des micro financements estelle différente, en moyenne, de ce qu’elle aurait été si
ces micro financements n’avaient pas existé ?
82
Revue Congolaise de Gestion N°14
Cette problématique n’est pas nouvelle, mais, elle reste
importante dans le contexte économique camerounais où
beaucoup de micro-entrepreneurs présentent l’absence de
crédit comme l’un des problèmes majeurs à la croissance de
leur activité.
En rapport avec la question de recherche, l’objectif
poursuivi par ce travail est celui de cerner l’incidence du
micro crédit sur la croissance des très petites entreprises.
Pour atteindre cet objectif, nous allons d’abord présenter les
conclusions des débats sur la contribution du micro-crédit à la
croissance des TPE (II). Ensuite, nous nous pencherons sur
les aspects méthodologiques de ce travail (III). Et enfin, nous
présenterons les résultats obtenus et leurs implications (IV).
2. CADRE CONCEPTUEL, OBJECTIFS
HYPOTHESES DE TRAVAIL
ET
2.1. Accès au micro-crédit : point central des débats
actuels sur la croissance des TPE
Il s’agira en premier lieu de monter l’importance socioéconomique des TPE, dans un second lieu d’évaluer la
croissance de ces entreprises et en troisième lieu présenter les
conclusions des études d’impact du crédit sur la croissance
des entreprises.
i) Importance socio-économique de la TPE et rôle du
micro-crédit
Au cours des dernières années, les organisations
nationales et internationales, aussi bien dans les pays
développés que dans ceux en développement, ont mis un
accent sur le rôle vital de la micro-entreprise dans le
développement économique. D’après un rapport de L’OCDE,
« un secteur de la TPE prospère et opérant dans une
économie en expansion constituerait un élément clé dans la
83
Revue Congolaise de Gestion N°14
stratégie de développement futur. Il peut générer de l’emploi,
de la production et des revenus et créer des liens qui
soutiennent et accentuent les progrès de développement dans
le secteur rural de la plus grande entreprise et du commerce
extérieur ».
Dans les pays du sud, la TPE peut être assimilée à un
point de liaison entre les systèmes de production traditionnel
et moderne, entre le secteur formel et informel et entre les
zones rurales et urbaines. La micro-entreprise contribue à la
diversification de l’économie locale d’une région, produit les
biens de consommation à des coûts relativement plus bas,
alimente des marchés locaux, régionaux et nationaux et
procure souvent des recettes en devises très recherchées. Elle
participe aussi au développement des compétences
techniques et de gestion d’individus qui sont souvent en
marge de la société. En somme, la TPE ajoute de la valeur à
l’économie et assure une contribution significative à la
croissance économique d’une région ou d’un pays.
Evoluant pour la plupart dans l’informel, les très
petites entreprises se caractérise par les micros activités de
biens et de services ; elles offrent particulièrement l’avantage
d’être le dénominateur commun entre les pays en
développement (Bekolo, 2003). En effet, les effets
d’entraînement sur le reste de la production, d’utilisation des
ressources productives locales sont réels ; avec les moyennes
entreprises, elles constituent au sens de Wamba (2001), un
élément fondamental à la stratégie de développement
économique et social.
Lorsqu'on parle de très petite entreprise, il faut tôt ou
tard déterminer avec précision ce qu'on entend par ce terme.
La plupart des gens ne se rendent pas compte de l'étendue du
secteur de la très petite entreprise et n'en distinguent qu'une
partie seulement ; ce qui finalement prête à confusion. Pour
reprendre Hugon (2003), les micro et petites unités peuvent
84
Revue Congolaise de Gestion N°14
être définies comme des unités à petite échelle où le salariat
est absent (ou limité), où le capital avancé est faible, mais où
il y a néanmoins circulation monétaire et production de biens
et services onéreux. Les règles dominantes ne sont pas
salariales mais coutumières, hiérarchiques et affectives. La
relation de proximité est spatiale (activités à petite échelle
dans un rayon limité), temporelle (horizon court des agents
permettant la réversibilité) et sociale (confiance, réputation,
crédibilité des relations personnalisées).
L’importance socio-économique des TPE ne doit pas
occulter les problèmes auxquels elles sont confrontées (on
peut citer entre autres, la fiscalité, l’accès aux marchés, et
surtout l’accès au financement).
Après la libéralisation du secteur financier par l’État
en 1990, on assiste à une prolifération des institutions de
micro finance qui constitue un début de solution du problème
de financement des TPE.
Le but essentiel de ces institutions de microcrédit est
de servir les pauvres, en apportant des ressources financières
à ceux qui en ont le plus besoin. Elles concentrent leurs
efforts sur les individus travaillant pour leur propre compte
qui ont besoin d'épargne et de services de crédit pour faire
fructifier leurs activités économiques.
La micro finance au Cameroun et dans de nombreux
pays d'Afrique au sud du Sahara est une importante activité
économique. En effet, la crise bancaire et les politiques
d'ajustement structurel des années 1980 ont contribué à la
baisse des investissements publics dans ces pays. Les pays en
voie de développement s'appuient aujourd'hui sur les micro et
petites entreprises du secteur privé pour une véritable relance
économique (Dirat, 2002). Face aux difficultés de
financement que rencontrent ces unités de production, la
micro finance est présentée comme une solution idoine. Elle
offre des services et des produits aux populations évoluant
85
Revue Congolaise de Gestion N°14
pour l'essentiel en marge du système bancaire classique.
Grand nombre de ces personnes étant des pauvres, la micro
finance est ainsi devenue un mécanisme privilégié pour la
lutte contre la pauvreté et de promotion des petites
entreprises. Plusieurs expériences montrent que la micro
finance peut aider les pauvres à augmenter leurs revenus, à
créer des entreprises viables, etc. En leur facilitant l'accès à
des services financiers, la micro finance joue un rôle
important dans la lutte contre les nombreuses dimensions de
la pauvreté (Mosley, 1998, Kevane, 2001, Morduch, 2003).
Par exemple, les revenus générés par une activité financée
par la micro finance permettent non seulement à cette activité
de se développer, mais ils contribuent également au revenu
du ménage, et par là même à la sécurité alimentaire, à
l'éducation des enfants, à la prise en charge des soins de santé
etc. Ainsi, la micro finance pallie l'un des problèmes
économiques les plus importants dans les pays pauvres, à
savoir celui du coût élevé et de l'accès difficile au crédit pour
une grande majorité des populations. Lors d'une enquête
réalisée par la COBAC en 2001, il ressortait que la micro
finance dans la sous région d’Afrique centrale mobilise 26,5
milliards d'épargne et accorde 13,7 milliards de crédit
(Wampfler, 2001).
2.2. Evaluation de la croissance des TPE
Afin de mesurer la croissance d’une TPE, il serait
avant tout nécessaire d’apporter une définition au concept de
croissance organique.
i)
Essai de définition du concept de croissance
organique
La croissance organique est un terme économique qui
désigne la croissance interne à l’entreprise (acquisition de
compétence et augmentation du chiffre d’affaires), qu’elle a
86
Revue Congolaise de Gestion N°14
acquise par ses propres moyens. La croissance organique
s’oppose à la croissance par acquisition ou croissance externe
(alliances, accords de coopération, fusion, fusion-absorption,
etc.). Elle résulte de l’adjonction de moyens de production,
de recherche, de distribution, créés grâce aux ressources
humaines, financières et techniques de l’entreprise.
La croissance interne ou organique, se dit d’une
entreprise qui grossit grâce au développement de la société :
nouveaux produits ou activités, nouveaux marchés, etc. Elle
est conséquente généralement à une forte demande des
produits de l’entreprise, à une volonté de protéger l’identité
de l’entreprise n évitant le rachat d’autres entreprises, volonté
du dirigeant de conserver le pouvoir, etc.
Plusieurs auteurs se sont penchés sur la définition de la
croissance interne.
Penrose (1959) définissait la croissance d´une firme
comme «essentiellement un processus évolutionniste basé sur
un accroissement cumulatif de connaissances collectives».
Selon Starbuck (1965), la croissance n’est pas un phénomène
spontané ni aléatoire, mais bien la conséquence d’une
décision, par exemple, la décision d’embaucher et/ou de ne
pas licencier, la décision d’accroître le niveau de production
en réponse à un accroissement de la demande ou encore la
décision de stimuler la demande. Il souligne que la croissance
peut être un objectif en soi. Il ressort que la croissance est le
résultat d’une véritable décision de gestion dont
l’entrepreneur propriétaire en porte la responsabilité
(Verstraete et Saporta, 2006), ce qui se traduit par une
impulsion interne de la croissance. Pour Janssen (2004), la
croissance est le résultat d’un accroissement de la demande
pour les produits ou les services de la firme. Dans un premier
temps, cela aurait pour effet d’augmenter les ventes et dans
un second temps, cela permettrait à la firme d’investir dans
des facteurs de production supplémentaires afin de s’adapter
87
Revue Congolaise de Gestion N°14
à un nouveau niveau de demande. Ainsi, il serait possible de
distinguer et d’identifier l’existence de facteurs externes
affectant la croissance.
La croissance est aussi considérée comme « une étape
de transformation en regard de la taille et/ou des activités
d'une entreprise» (Haire, 1959 cité par Gasse et Carrier,
1992). Pour Verstraete et Saporta (2006), la croissance est
assimilée à «la maîtrise simultanée des deux dimensions
paradoxales : développement et contrôle». En somme, la
croissance serait définie sur la base d’une multitude de
critères internes et externes à l’organisation. En effet, la
croissance est perçue comme un processus multidimensionnel
et complexe (Weinzimmer, 1993), également caractérisée
comme un phénomène discontinu et ponctué par des crises et
des métamorphoses (Torres, 1998). Pour d’autres auteurs, la
croissance est «un phénomène multidimensionnel intégrant
des influences liées au(x) dirigeant(s), à l’entreprise, à sa
stratégie et à l’environnement» (Guyot et al, 2006). Gasse
(1996) considère que «la croissance demeure une question de
vision, de potentiel et de circonstances ».
Dans une perspective voisine, Churchill et Lewis
(1983) considèrent la croissance comme faisant partie de
l'évolution naturelle d'une entreprise. «Les auteurs divisent la
croissance en cinq stades : existence, survie, réussite, envol et
maturité des ressources. À chaque stade correspond un
ensemble distinct de facteurs essentiels à la survie et à la
réussite de l'entreprise. Les seuils de croissance peuvent
correspondre aux obstacles rencontrés au cours du passage
d'un stade à l'autre» (Papadaki et Chami, 2002). Masuch
(1985) décrit aussi la croissance de l’organisation comme une
succession de phase de créativité et de maintenance. Dans la
même logique, Gasse et Carrier (1992) considèrent
l’organisation comme un individu : un organisme en
métamorphose dont le cycle de vie dépend en grande partie
88
Revue Congolaise de Gestion N°14
de l’énergie et de l’esprit que lui insufflent ses propriétaires
et dirigeants. Cette idée est appuyée par les propos de
Sammut (1996) qui souligne que la croissance de la firme
dépend de «la conscience stratégique du dirigeant et de
l'ensemble des composantes internes et externes de
l'organisation. En effet, la croissance est le résultat combiné
de différents phénomènes issus de l'environnement, des
caractéristiques financières, organisationnelles, productives,
et personnelles qui composent la petite entreprise.
Enfin de compte nous retiendrons dans le cadre de ce
travail, que la croissance s’assimile au concept « d’entreprise
patrimoine » (De Montmorillon, 1997), qui correspond
généralement à la petite entreprise, où la croissance de
l’entreprise s’apparente à celle du patrimoine possédé par
l’entrepreneur.
ii)
Mesure de la croissance d’une TPE : difficultés et
enjeux
L’exercice de conceptualisation de la croissance ne
pose généralement pas de problème dans les grandes
entreprises, car on dispose là de données suffisamment
étayées et disponibles pour calculer le taux de rentabilité, la
valeur ajoutée, l’excédent d’exploitation ou le résultat de
l’entreprise ; bref des indicateurs permettant d’apprécier
l’évolution de la structure financière de l’entreprise. Cette
conceptualisation devient difficile lorsqu’il s’agit de très
petites entreprises, du fait même des caractéristique de celleci (informalité généralisée, absence de comptabilité, gestion
approximation, etc.).
Plusieurs auteurs se sont penchés sont la
conceptualisation de la croissance des entreprises. Plus
récemment, Janssen (2004) s’est penché sur les critères de
conceptualisation de la croissance dans la littérature sur les
déterminants de la croissance. Il présente une synthèse des
89
Revue Congolaise de Gestion N°14
principales recherches sur les déterminants de la croissance,
lesquelles recherches seraient limitées aux analyses de
causalité et rattachées principalement aux disciplines de
l’économie et des sciences de la gestion. Il en conclut que les
deux critères les plus largement utilisés pour appréhender la
croissance d’une entreprise sont l’emploi, le plus pertinent du
point de vue sociétal, et les ventes, le plus pertinent au regard
du dirigeant (Janssen, op cité). L’un et l’autre de ces concepts
offrirait une perspective d’exploration particulière mais pas
nécessairement complémentaire, ni n’impliquerait les mêmes
déterminants. En effet, en cette ère d’implantation des
nouvelles technologies, une augmentation des ventes pourrait
très bien s’effectuer sans nécessairement impliquer une
augmentation de la main-d’œuvre et à contrario, une
augmentation des emplois pour une entreprise de ventes au
détail, par exemple, pourrait très bien ne pas être suivie d’une
augmentation immédiate du chiffre d’affaires.
De nombreuses autres études tendent toutefois à
démonter que ces différents critères de mesure de la
croissance seraient corrélés entre eux, ce qui plaiderait pour
une certaine interchangeabilité et éviterait aux auteurs de
devoir justifier la raison de leur choix. Plusieurs études
récentes concluent à une corrélation entre la croissance de
l’emploi et celle des ventes (Chrisman et McMullan, 2000;
Wiklund, 1999; Delmar, 1997). Une étude belge portant sur
les déterminants financiers de la croissance mesurée sur base
de l’actif, des fonds propres, de la valeur ajoutée, des ventes
et de l’emploi des entreprises, montre également qu’il existe
une importante corrélation de ces variables entre elles
(Manigart, 1996). De même, Morrison et Roth (1992)
constatent d’importantes corrélations entre le R.O.I., le
R.O.A. et la croissance des ventes. Dans une étude portant
sur les performances de 146 firmes du secteur manufacturier
américain, mesurées en termes d’exportations, de profit, de
90
Revue Congolaise de Gestion N°14
valeur ajoutée, d’emploi, de développement de produits et de
procédés, McPherson (1992) aboutit à la conclusion que ces
différentes mesures sont significativement corrélées entre
elles, à l’exception toutefois du taux annuel de croissance de
l’emploi. Tendanciellement, ces mesures semblent donc
appréhender le même concept de taille et sont comparables
d’un point de vue empirique. Précédemment, Child (1973)
avait déjà observé des corrélations importantes entre les
différentes mesures de la taille d’une organisation, tels que
les actifs, l’emploi ou le chiffre d’affaires. Cela pourrait
également signifier que le délai entre la croissance des ventes
et celle de l’emploi est peu important ou qu’une amélioration
de la productivité ou le recours à la sous-traitance n’ont
qu’un effet négligeable sur la croissance (Delmar, 1997).
Certains auteurs, plus isolés, estiment cependant que les
variables affectant la croissance de l’emploi ne sont pas
identiques à celles qui influencent la croissance des ventes
(Weinzimmer et al, 1998).
En fin de compte la difficulté de la mesure de la
croissance des TPE, trouve des éléments de réponses dans le
concept d’entreprise patrimoine (De Montmorillon, 1997).
On a pu retenir le niveau de production, des ventes, de la
marge bénéficiaire, du nombre d’actifs et du nombre
d’employés, pour conceptualiser la croissance des TPE.
2.3. Micro-crédit et croissance des TPE
Les théories qui tentent d’expliquer la croissance des
petites entreprises n’intègrent pas souvent de variables
financières ; d’autres par contre tiennent compte de cette
variable sans oublier que l’entrepreneur peut tout simplement
choisir de ne pas croître du moins pas au-delà d’une certaine
taille. En effet, la théorie des compétences introduit par
Penrose (1959) et reprise par Lucas (1978), considère que
l’entreprise, c’est l’entrepreneur. Selon ces auteurs, le sens
91
Revue Congolaise de Gestion N°14
des affaires de l’entrepreneur est le premier facteur de la
croissance. En outre, le modèle du cycle de vie de l’entreprise
fondé sur l’apprentissage (Jovanovic, 1982), la théorie de la
contingence de Mintzberg (1982) ou encore le modèle des
métamorphoses de Churchill et Lewis (1983), ne mettent pas
un accent sur la variable financière qu’est le crédit.
Cependant, sur le plan empirique, plusieurs auteurs se
sont penchés sur l’étude de l’impact du crédit sur la
croissance des entreprises. Si les études empiriques sont quasi
unanimes pour reconnaître l’importance des micro-crédits
dans la lutte contre la pauvreté, celles-ci ne permettent
cependant pas de conclure sur l’impact des micro-crédits sur
la croissance des TPE.
Certaines études avancent que les micro-crédits ont un
impact positif important sur la croissance des petites
entreprises (Bitemo et Dzaka, 2009; Naveen, 2008; Gubert et
Robaud; Ndjanyou, 1999; Pissarides, 1999; Mccormic et
Kinyanjui, 1997; Balenghien, 1995). D’autres études trouvent
plutôt que l’impact des micro-crédits sur la croissance des
petites entreprises est plutôt limité (Aryeetey, 1998; Buckley,
1997). L’une des raisons qui expliquerait cette dernière
situation serait la très faible taille des prêts accordés et des
délais de remboursement très courts.
Enfin, d’autres études comme celle de Montalieu
(2002) montrent que les micro-crédits n’auraient pas d'effet
sur le développement des TPE. La croissance et le
développement de ces dernières seraient influencés par des
caractéristiques réelles (caractéristiques liées au management
du dirigeant, à sa personne et à son entreprise) plutôt que
financières. Pour Montalieu, la non disponibilité du crédit
aurait seulement un effet indirect sur la croissance des microentreprises à travers la taille initiale qui, elle, serait liée à
l'accès au crédit.
92
Revue Congolaise de Gestion N°14
Compte tenu du contexte camerounais et suite aux
résultats des ces différentes études, nous pouvons déduire les
hypothèses suivantes :
- Hypothèse 1 : les micro-crédits ont un impact
significatif sur la croissance des TPE ;
- Hypothèse 2 : les TPE bénéficiaires de crédit
affichent une croissance significativement supérieure
à celle des TPE non bénéficiaires.
*
* *
3.
ASPECTS METHODOLOGIQUES
DE
L’ETUDE
3.1. Echantillonnage et collecte des données
La population cible est constituée des TPE
camerounaises, localisées dans les villes principales
(Yaoundé, Douala et Bafoussam) et certaines villes
secondaires (Dschang, Bertoua…). L’échantillonnage est
choisi de façon aléatoire dans chaque ville.
Un questionnaire à orientation hypothético déductive
et en rapport avec les objectifs de l’étude a été conçu, puis
administré par nos propres soins, sur la période de mars à mai
2010 aux différents petits entrepreneurs de l’échantillon. Sur
300 questionnaires distribués, 258 ont été jugés exploitables
au regard des objectifs poursuivi par notre étude, ce qui
correspond à un taux de récupération de 86%. Le rejet de
certains questionnaires est dû aux informations manquantes,
mais pourtant utiles à notre travail.
Sur la base des 258 questionnaires exploitables, nous
avons constitué deux sous échantillons : un groupe
expérimental constitué de 136 TPE ayant obtenu un crédit sur
la période de l’étude et un groupe témoin de 122 TPE n’ayant
pas obtenu de crédit sur la même période. Cette méthode
93
Revue Congolaise de Gestion N°14
d’appariement nous permet d’éviter que les sous échantillons
constitués soient hétérogènes.
3.2. Modèle théorique de l’étude et mesure des
variables
i). Modèle théorique de l’étude
L’objectif visé dans ce travail est celui de mesurer
l’impact du micro-crédit sur la croissance des TPE. Nous
avons ainsi, la croissance comme fonction variable
dépendante de notre modèle. Et ce modèle peut se présenter
comme suit :
n
CROISSANCE  b0   b jY j  u .
j 1
Avec Yj, les variables explicatives; b0, le terme
constant; bj, les coefficients de régression et u, le terme
d’erreur. La forme empirique complète du modèle est alors :
CROISSANCE  b0  b1 ACCRED  b2TAILCRED  u
ii). Mesure des variables
Comme énoncé plus haut, trois variables sont
étudiées à partir des indicateurs spécifiques : CROISSANCE,
désigne la croissance des TPE. Nous avons appréhendé ce
concept de croissance à travers cinq indicateurs tels que le
niveau de la production/achats (NIVPROD), niveau du chiffre
d’affaires (CAFFA), marge bénéficiaire (MARGB), nombre
de biens ou d’actifs (NOMBCTA), nombre d’employés
(NOMEMP). La mesure de ces différents indicateurs a été
rendu possible grâce à leur variabilité en fonction de l’année
précédente. À cet effet, chaque indicateur prenait les
modalités suivantes : a baissé, est resté stable et a augmenté.
94
Revue Congolaise de Gestion N°14
ACCRED, désigne l’accès au crédit. C’est une
variable dichotomique, prenant la valeur 1, si la TPE a reçu le
crédit et 0 sinon.
TAILCRED désigne la taille du crédit. C’est une
variable nominale prenant la valeur 1 si le crédit obtenu est
moins de 250 milles, 2 s’il est compris entre 250 à 500
milles, 3 s’il et compris entre 500 à 1 million et 4 s’il est plus
d’un million.
3.3. Méthode de traitement et analyse des données
Du point de vue méthodologique sur le plan
statistique, nous avons dans un premier temps, effectué une
étude d’association afin d’analyser dans quelle mesure les
variables censées représenter les hypothèses formulées ont
une influence sur la croissance des TPE (test de corrélation
de Pearson ou de Spearman). Ensuite, nous avons cherché à
vérifier si cet impact est différent suivant les sous
échantillons (test de Mann-Whitney ou de Krustal-Wallis).la
structure des données, nous permet d’utiliser le test du rang
de Mann-Whitney et Wilcoxon qui s'applique au cas d'un
groupe qui aurait subi un traitement en le comparant à celui
qui n'en a pas subi, ou qui a subi un traitement différent. Ce
test est une adaptation à la comparaison de deux moyennes,
pour deux échantillons appariés. Il calcule les différences
(positives et négatives), le traduit en rang, puis compare la
distribution de la somme des rangs pour les deux
échantillons, et estime la différence observée. Ces tests ont
été effectues sur le logiciel SPSS (Statistic Package for Social
Size).
4. RESULTATS
DE
L’ETUDE
L’étude a permis d’identifier les caractéristiques
générales et socio-démographiques des TPE ainsi que
l’influence des micro-crédits sur la croissance. L’analyse
95
Revue Congolaise de Gestion N°14
statistique a mis en exergue la distinction de la croissance en
fonction de l’accès aux micro-crédits.
4.1. Caractéristiques générales et socio-démographiques
des TPE
La répartition des très petites entreprises selon le
chiffre d’affaires montre la tendance suivante : de façon
générale plus le chiffre d’affaires augmente, moins
l’entrepreneur a recours au crédit. La majorité des
entrepreneurs ayant recours au crédit est celle dont le chiffre
d’affaires est moins d’un million de frs CFA soit
pratiquement 60%. Ceci peut s’expliquer par le fait qu’en
début d’activité, les très petites entreprises ont plus recours
dans près de 60% des cas au financement informel (prêt
familial, tontine, usuriers). Le sexe est un critère essentiel
d’offre de crédit par les IMF; en effet, les résultats obtenus
montrent que 68% de bénéficiaires de crédit sont des
hommes, contre 32% de femmes. Ce résultat est quelque peu
contraire à ce qui s’observe dans la plupart des IMF ailleurs
dans le monde. Car, les micro-crédits sont destinés plus aux
activités comme le petit commerce de détail, la restauration,
etc.- activités la plupart du temps exercées par les femmes.
On note trois secteurs traditionnels qui occupent en général la
plus grande partie de la population active (commerce général
et de détail, petites industries et services). Les barrières à
l’entrée, aussi bien financières qu’en termes de capital
humain, sont souvent assez faibles. Toutefois il y a rien de
commun entre une micro entreprise de préparation
alimentaire qui vend des beignets au coin d’une rue et une
petite usine qui fabrique des jus de fruits et possédant un
capital productif important.
Le niveau d’études et le type de local utilisé sont
également des déterminants d’accès au crédit.
96
Revue Congolaise de Gestion N°14
La variable la plus facile à mesurer pour caractériser
le niveau de compétence de l’entrepreneur est son niveau
scolaire. Certes, elle le caractérise imparfaitement. Les
qualités entrepreneuriales se mesurent autrement (goût au
risque, inventivité etc.). Nous ne conservons des capacités
que les compétences que reflète le niveau scolaire :
connaissances comptables et capacités d’analyse, par
exemple. Il ressort en effet des résultats des enquêtes que
40,4% des individus ont un niveau secondaire 2ème cycle. Ils
sont suivis des entrepreneurs qui ont un niveau secondaire 1er
cycle. Les entrepreneurs qui ont un niveau primaire ou pas de
niveau représentent 8,1%. Le niveau d’étude varie en
fonction des secteurs d’activité. Dans le secteur des services,
il n’est pas étonnant de constater que les entrepreneurs ont
dans 51% des cas un niveau d’étude secondaire 2nd cycle ; ou
encore que dans le secteur de l’agro alimentaire, 35% des
entrepreneurs ont un niveau d’étude supérieur. Dans le
secteur du commerce de détail, ils sont en revanche beaucoup
moins éduqués en moyenne (47%).
Le fait de disposer d’un local permet d’avoir le crédit.
Les résultats montrent que parmi les petites entreprises ayant
obtenu le crédit, 85,3% déclarent avoir un local fixe. Par
contre, l’accès au crédit est difficile pour les ambulants
(0,7%) et les personnes qui travaillent à domicile (11%).
Dans l’ensemble, les TPE aussi bien du « groupe
expérimental » que du « groupe témoin » se caractérisent par
une grande stabilité des conditions d’activité ; ainsi, plus de
80% d’entre elles disposent d’un local spécifique pour leur
activité (atelier, boutique, etc.).Les très petites entreprises
enquêtées sont assez jeunes. Les trois-quarts ont moins de 10
ans d’âge.
Compte tenu de la difficulté à évaluer correctement
l’impact sur la croissance, l’étude d’impact inclut une série
de questions destinée à analyser les pratiques de gestion, les
97
Revue Congolaise de Gestion N°14
changements et les améliorations dans l’entreprise
susceptibles de générer un accroissement des bénéfices et de
la productivité. On a pu constater que les entreprises du
groupe témoin sont plus susceptibles de tenir une
comptabilité (la proportion dans les deux groupes reste assez
faible 17 % et 11%), de séparer l’argent de l’entreprise des
fonds du propriétaire et leur site plus protégé contre les
intempéries que les entreprises du groupe expérimental. Par
contre, on observe le phénomène inverse lorsqu’il s’agit de
calcul du bénéfice en tenant comptes des dépenses et recettes,
de la délégation des tâches et dans une moindre mesure de la
rémunération de l’entrepreneur dirigeant pour les services
rendus à l’entreprise. Il faut toutefois noter que plus de 60%
des micro-entrepreneurs enquêtés ne reçoivent pas de salaire
pour le travail qu’il exerce dans son entreprise. Très peu
d’entreprises tiennent une comptabilité (moins de 20%).
Selon les résultats, la proportion des TPE ayant apportée un
changement (ajout de nouveaux produits, amélioration de la
qualité ou de l’attrait du produit, vente sur de nouveaux
marchés) est plus grand chez le groupe témoin que chez le
groupe expérimental. Le crédit semble en effet être à
l’origine des changements observés dans le groupe
expérimental ; cependant, ces changements sont observés
dans beaucoup plus d’entreprises du groupe témoin qui
pourtant n’ont pas bénéficiés de financement sur les 12
derniers mois. Ceci renvoi à l’importance des capacités de
gestion donc doivent faire montre de plus en plus les petites
entrepreneurs.
4.2. Influence des micro-crédits sur la croissance des TPE
Pour appréhender le concept de micro-crédit nous
avons utilisé les variables accès au crédit (ACCRED) et taille
du crédit (TAILCRED). Le test d’association entre ces
variables et les différents indicateurs de croissance, présenté
98
Revue Congolaise de Gestion N°14
dans le tableau ci-dessous montre que le micro-crédit n’a
aucune incidence significative sur la croissance de
l’entreprise, quel que soit l’indicateur de croissance retenu.
Tableau n°1 : Influence du micro-crédit sur la croissance
de la TPE
Variables
ACCRED
Indicateurs de croissance
NIVPR
O
CAFFA
MARGB
NOMBC
TA
NOMEM
P
Cor. de
Pearson
-0,084
-0,026
-0,007
-0,044
-0,111
Sig.
(bilatérale)
0,179
0,678
0,915
0,487
0,075
N
TAILCRED
258
258
258
257
258
Cor. de
Pearson
0,046
0,040
-0,062
0,059
0,162*
Sig.
(bilatérale)
0,592
0,644
0,472
0,496
0,059
136
136
136
135
136
N
* Significatif au seuil de 10%
Ce résultat ne nous permet pas de valider l’hypothèse
1 selon laquelle : le micro-crédit a un impact significatif sur
la croissance des TPE. Ce résultat rejoint ceux d’Aryeetey
(1998), Buckley (1997) et Montalieu (2002).
*
* *
4.3. Distinction de la croissance en fonction de l’accès au
crédit
Les résultats du test de comparaison du niveau de
croissance entre les TPE bénéficiaires de crédit et celles
n’ayant pas bénéficié de crédit, sont présentés dans le tableau
ci-dessous.
99
Revue Congolaise de Gestion N°14
Tableau n°2 : Comparaison du niveau de croissance en
fonction de l’accès au crédit (Test de différence de
moyenne de Mann-Withney)
A obtenu du crédit
Variables
NIBPRO
N’a pas obtenu le
crédit
N
Rang
moyen
N
Rang
moyen
135
135,21
123
123,23
Stat. Z
Sig.
différence
des
moyens
-1,374
0,164
CAFFA
135
130,80
123
128,07
-0,312
0,755
MARGB
135
129,41
123
129,60
-0,021
0,983
NOMBCTA
135
131,54
123
126,23
-0,640
0,522
NOMEMP
135
134,98
123
122,38
-1,793
0,073*
* Significatif au seuil de 10%
À la lecture de ce tableau, on remarque que la
différence du niveau de croissance réalisé par les TPE
bénéficiaires de crédit et celles n’ayant pas bénéficié, est non
significative au seuil de 10% pour les variables telles que le
niveau de production, le chiffre d’affaires, la marge
bénéficiaire et le nombre d’actif. Par contre, elle est
significative au seuil de 10% pour la variable « nombre
d’employé ». Toutefois, sur la seule base de la variable
« nombre d »employé », on ne peut valider l’hypothèse 2
selon laquelle les TPE bénéficiaires de crédit affichent une
croissance significativement supérieure à celle des TPE non
bénéficiaires. Ce résultat confirme les prédictions de
Montalieu (2002), selon lesquelles ce ne sont pas les
variables financières (micro-crédit) qui expliquent la
croissance des entreprises, mais plutôt les variables réelles
telles que les caractéristiques managériales et personnelles de
l’entrepreneur ou celles de son entreprise.
100
Revue Congolaise de Gestion N°14
5. CONCLUSION
Les questions relatives à la formation d’un tissu de
micro-entreprises pérennes restent préoccupantes dans un
contexte comme celui du Cameroun, où cette catégorie
d’entreprises occupe une place non négligeable. Ces
préoccupations sont porteuses d’enjeux. De nombreuses
entreprises se créent chaque année mais elles ne bénéficient
pas des mêmes appuis et par conséquent ne connaissent pas
toutes la même trajectoire.
Le présent travail s’est proposé à cet effet, de tenter
de cerner l’impact du micro-crédit sur la croissance des TPE
camerounaises pendant la période allant de mars 2010 à mars
2011. Pour atteindre cet objectif, notre démarche a consisté
d’une part à mesurer l’impact du micro-crédit sur la
croissance des TPE bénéficiaires et d’autre part de comparer
l’évolution de la croissance des TPE bénéficiaires et non
bénéficiaires de crédit sur la même période.
Les résultats montrent que : d’une part, l’impact du
micro-crédit sur la croissance des TPE, bien que positif est
non significatif (H1 non confirmé). D’autre part, il n’existe
pas de différence significative de croissance entre les TPE
bénéficiaires de crédit et les TPE non bénéficiaires (H2 non
confirmé).
Nous pouvons dire à la suite de Montalieu (2002), que
ce ne sont pas nécessairement le développement des EMF et
institutions financières qui vont dynamiser la croissance des
petites entreprises. Selon cet auteur, ce sont les variables
réelles qui déterminent la croissance des entreprises
(caractéristiques managériales et personnelles du dirigeant et
caractéristiques de l’entreprise).
Par conséquent, il serait souhaitable que les mesures
d’appui aux très petites entreprises mettent plus d’accent sur
le renforcement des capacités managériales de ces
entrepreneurs; le crédit à lui seul ne suffit pas. L’État semble
101
Revue Congolaise de Gestion N°14
avoir déjà compris cet état des choses, avec des programmes
tels que le PACD/PME (Programme d’Aide à la Croissance
et au Développement des Petites et Moyennes Entreprises),
les Cga (Centres de gestion agréés). Les banques quant à
elles, multiplient également des partenariats avec les
institutions de microfinance pour renforcer leur potentiel en
matière de fonds prêtables. Les TPE pour leur part doivent
également parcourir une partie du chemin. Elles doivent
s’inscrire dans une logique d’entrepreneuriat pour celles qui
souhaitent croître, car, ne l’oublions pas, ce n’est pas la
vocation de toutes le TPE de croître. Elles se doivent, du fait
d’une faible dotation en actifs pouvant servir de sûretés
réelles favorisant le bénéfice d’un emprunt, d’implanter les
bases d’une gestion saine et par ricochet de produire une
information comptable de qualité, meilleur gage pour
soutenir leur dossier de demande de crédit.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1.
2.
3.
102
ARYEETEY E. (1998).
“Informal finance for private sector development in
Africa”, Economic research papers, n°41, Banque
Africaine de Développement.
BALENGHIEN.
(1995). « L’analyse des facteurs de blocage de la
croissance des petites entreprises au Maroc : du bilan
aux perspectives », dans B. HAUDEVILLE et M
LELART (dir.), Entreprises et dynamiques de
croissance, Serviced, Tunis, P. 59-74.
BEKOLO C.
(2003). « Une évaluation de l’approche contractuelle
par les dirigeants dans le cadre de l’émergence de
PME camerounaises de classe mondiale », Revue des
Sciences de Gestion, Direction et Gestion, n°200Stratégie, P. 33-48.
Revue Congolaise de Gestion N°14
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
BUCKLY G.
(1997). « Microfinance in Africa: is it either the
problem or the solution? », World Development, Vol.
25, n°7, P. 1081-1093.
CHILD J.
(1972),«Organizational structure, environment and
performance: the role of strategic choice », Sociology,
6, p 1-22.
CHURCHILL N. C. et LEWIS V. L.
(1983). Growing concerns: The five stages of small
business growth. Harvard Business Review, 3, p 3050.
EVANS D.
(1987). « Tests of alternative theories of firm
growth », The Journal of Political Economy, Vol. 95,
n°4, P. 657-674.
ISSA BARRO
(2004). « Micro finance et financement des PME et
TPE », BIM, août, 56p.
JANSSEN F.
(2000). « Les déterminants de la croissance des
PME », Reflets et Perspectives de la vie économique,
tome 39, n°4, P. 33-46.
JOVANOVIC B.
(1982). « Selection and evolution of industry »,
Econometrica, Vol. 50, n°3, P. 649-670.
KALA J R. et WAMBA H.
(2006). « ERBACE : un modèle d’évaluation du
risque de défaillance de micro finance organisés en
réseau » African review of Money Finance and
Banking, p 123- 146.
KIHLSTROM R. et LAFFONT J J.
(1979). « A general Equilibrium Entrepreneurial
theory of Firm Formation based on risk aversion »,
Journal of Political Economy, n°59, P.719-748.
LEVRATTO N.
(1990), « Le financement des PME par les banques :
103
Revue Congolaise de Gestion N°14
14.
15.
16.
17.
18.
19.
20.
21.
22.
104
contraintes des firmes et limites de la coopération. »,
Revue Internationale PME vol. 3, n°2, P.193 -213.
LUCAS ROBERT E.
(1978), « On the size Distribution of business firms »,
Bell Journal of Econmics, n° 9, P. 508-523.
MARCHESNAY M.
(2003), « La petite entreprise : sortir de l’ignorance »,
Revue française de gestion, 2003/3, n° 144, P 107 118.
MCCORMICK D. et KINYANJUI M.
(1997), « Growth and barriers to growth among
Nairobi’s small and medium-sizeg garmant
producers », World Development, Vol. 25, n°7, P
1095-1110.
MCPHERSON M.
(1994), “Growth of micro and small enterprises in
southern Africa”, Journal of development Economics,
Vol. 48, P. 253-277.
MEAD D. et LIEDHOLM C.
(1998), “The dynamics of micro and small enterprise
in development countries”, World Development, Vol.
26, n°1, P. 61-74.
MINTZBERG H.
(1979), The structuring of organizations: a synthesis
of the research, Englewood Cliffs (NJ), Prentice Hall.
MINTZBERG H. ; AHLSTRAND B. et LATPEL J.
(1999), Safari en pays stratégie, L’exploration des
grands courants de la pensée stratégique, Paris,
Village Mondial.
MONTALIEU T.
(2002). « Les institutions de micro crédit: entre
promesses et doutes, quelles pratiques bancaires pour
quels effets? », Mondes en Développement, Tome 30,
32p.
NDJANYOU L.
(1999). « Perception et gestion des influences du
macro environnement sur la défaillance des PME
Revue Congolaise de Gestion N°14
23.
24.
camerounaises », Revue Congolaise de Gestion, n°1,
P. 107-140.
PISSARIDES F.
(1999). « Is lack of funds the main obstacle to
growth? EBED’S experience with small and mediumsizeg businesses in central and eastern Europe »,
Journal of Business Venturing, Vol. 14, P. 519-539.
STARBUCK W.H.
(1976), «Organizations and their environments », dans
Dunnette, M.D. (dir.) (1976), Handbook of industrial
and organizational psychology, Chicago, Rand
McNally, 1069- 1123.
25- WAMBA H
(2001), « L’impact de l’asymétrie d’information dans
l’optimisation de la valeur de l’entreprise : exemple de
la PME camerounaise », SCSE, Montréal, Mai, 15 p.
105
Revue Congolaise de Gestion N°14
106
Revue Congolaise de Gestion N°14
LA
PROBLEMATIQUE DE L’EMERGENCE
ECONOMIQUE DES PAYS EN VOIE DE
DEVELOPPEMENT
Marcel MBALOULA
École Supérieure de Gestion et d’Administration des Entreprises
Brazzaville, République du Congo
Email : [email protected]
RESUME
L’émergence économique du Brésil, de la Russie, de
l’Inde et de la Chine, constituant le groupe appelé les BRIC, a
incité d’autres pays africains à se fixer comme objectifs
stratégiques, être pays émergents. Quoique le concept de
« pays émergent » ne corresponde à aucune définition
économique, il reste qu’il est devenu une préoccupation
politique tant pour les spécialistes en économie de
développement que pour les hommes politiques. Cette
intention stratégique, pour ces derniers, semble oublier que
l’émergence économique est différente du développement du
pays. L’article se propose de clarifier les sens des deux
concepts afin de mieux s’inscrire dans une logique de
stratégie de développement visant l’amélioration des
conditions de vie des ménages. Les succès mitigés présentés
part les pays émergents nous éclairent sur la fragilité du
concept d’émergence économique par rapport aux enjeux du
développement humain.
107
Revue Congolaise de Gestion N°14
Mots clefs Pays émergent, émergence
développement, développement humain.
économique,
Abstract
The emerging economies of Brasilia, Russia, India
and china which stands for BRIC, led other African countries
to set up strategic objectives to be emerging countries.
Although the concept of “emerging country “does not
correspond to a given economic definition, it remains a
political concern for both specialists of the economic
development and for the political leaders. This strategic
intention, for the latter, seems to put aside the fact that the
economic emergence is entirely different from the
development of the country. This paper highlights the
connotations of the two concepts in order to adjust and trace
the development strategic logic aiming at improving the
conditions of living of household. The debatable success
introduced by emerging countries demonstrates the weakness
side of concept economic emergence in comparison to the
issues of human development.
Keys words: Emerging countries, economic emergence,
human development.
1. INTRODUCTION
L
a question des pays émergents ou des économies
émergentes dans le monde est devenue l’un des thèmes
les plus débattus par les chercheurs, comme l’indique le
nombre de dossiers (cf. Problèmes économiques,
). Son
importance se justifie pour indiquer des exemples en matière
de performance économique réalisée par, de plus en plus, des
pays en voie de développement.
108
Revue Congolaise de Gestion N°14
Son exploitation, au niveau de l’élaboration et/ou la
mise en œuvre des politiques économiques, tend à évacuer la
problématique de la lutte contre la pauvreté et/ ou celle de
développement, au point de constater une forme de confusion
(ou de fusion) sémantique au niveau des concepts :
émergence économique et développement économique. À
égard, du point de vue politique, les pays en voie de
développement (PVD), impliqués dans le processus de
réduction de la pauvreté, se trouvent devant des objectifs
diversifiés qui, toutefois, sont sous tendus par des rationalités
différentes susceptibles de compromettre l’efficacité des
politiques de développement des pays.
Ainsi, la nécessité de clarifier les rationalités et les
sens des concepts d’émergence et de développement
économiques s’impose. L’exercice ainsi défini permet de
« remettre les pendules à l’heure», c’est-à-dire, en recentrant
les problématiques réelles relatives à la question de
l’émergence économique, d’une part, et du développement,
d’autre part.
Il s’agit là, d’une analyse de représentations et de
discours (Raymond-Alain Thiétard, rt. Coll., 1999) dont
l’approche méthodologique repose fondamentalement sur la
recherche documentaire et dont les variables à analyser sont
de nature quantitative et qualitative. L’analyse de la situation
socio économique des pays dits émergents, offre une synthèse
qui, à la lumière du concept de développement, nous permet
d’atteindre l’objectif de clarification sémantique des deux
concepts précités et contribuer à éviter des dérapages quant à
la définition des politiques de développement des pays.
109
Revue Congolaise de Gestion N°14
2. ORIGINE
ET CONSECRATION DU
DE « PAYS EMERGENT »
CONCEPT
2.1. Origine du concept de pays émergent
Selon l’encyclopédie Wikipédia, le concept de pays
émergents est né dans les années 1980 avec le développement
des marchés boursiers dans les « pays en développement ».
Le premier à utiliser le terme « émergent » est Antoine van
Agtmael, économiste néerlandais à la Société financière
internationale en 1981 pour parler de pays en développement
offrant des opportunités pour les investisseurs.
De là, on a considéré, généralement, que les pays
émergents sont les « pays en développement » qui ne font pas
partie des "pays les moins avancés" et parfois. Mais, cette
définition est réduite à celle de "nouveaux pays
industrialisés". Ce qui lui confère une dose d’ambiguïté
sémantique qui a été levée progressivement au fil de
l’histoire, sans, toutefois, aboutir à un consensus.
2.2.
Consécration des pays émergents : les BRIC
La notion de pays émergent trouve sa consécration en
2001, lorsque la banque d’affaires Goldman Sachs constate
l’important potentiel, en matière de croissance économique
de quatre pays, le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine (BRIC)
anciennement considérés comme des puissances pauvres. En
effet, 1) le Brésil est une ancienne dictature de l’Amérique
latine ; 2) la Russie et la Chine sont issues du bloc
communiste ; et 3) l’Inde est un ex-pays non aligné.
Mais, le Brésil est devenu un géant agricole, un des
leaders des bio carburants, la Chine, un géant manufacturier
et l’Inde un géant dans les nouvelles technologies de
l’information et de la communication. Le caractère émergent
de ces quatre pays apparait à travers la bonne intégration dans
l’économie mondiale en exportant plus de biens et en ayant
110
Revue Congolaise de Gestion N°14
une balance commerciale positive. Dès 2004, selon le rapport
de Goldman Sachs, les BRIC appartiennent aux 15 premiers
PIB (La Chine : 6ème position l’Inde : 10ème position, le
Brésil : 14ème position, la Russie : 15ème position).
Les caractéristiques de ces pays émergents sont : une
imposante population, des capacités technologies qui
impulsent une mutation profonde, la taille gigantesque de
réservoir de main d’œuvre, la richesse des sous-sols,
particulièrement pour la Russie.
3- EVOLUTION DU CONCEPT
« PAYS EMERGENT »
DE
La diversité des études sur les pays émergents révèle
combien le contenu de ce concept a fondamentalement
évolué, excluant rigoureusement tout consensus.
Le Centre D’Etudes Prospectives et d’Informations
Internationales (CEPII, 1996) définit le concept de pays
émergent à partir de trois critères suivants :

un niveau de richesse (revenu moyen par tête en 1996
inférieur de 70% au niveau moyen des pays de l’OCDE) ;

une
participation
croissante
aux
échanges
internationaux de produits manufacturés (croissance des
exportations de produits manufacturés supérieure de 2% par
an à la croissance des échanges mondiaux) ;

une attraction exercée sur les flux internationaux de
capitaux (rôle des places financières).
Au-delà du produit intérieur brut PIB), le CPII
considère deux autres indicateurs qui se réfèrent à la place
des pays dans les relations internationales. L’émergence
économique s’inscrit dans une logique d’ouverture
économique vers l’extérieur dans le cadre du libre-échange
qui caractérise les échanges internationaux sous l’égide de la
rationalité de la vision classique de l’économie internationale.
111
Revue Congolaise de Gestion N°14
En 2008, une étude, intitulée ‘’Après les BRICS, les
prochaines 13’’ (Fontagné A. et coll. 2008), fait remarquer
que les économies brésilienne, russe, indienne et chinoise
sont désormais considérés comme des puissances mondiales.
Elles constituent ensemble d’environ 2,78 milliards
d’individus et représentent 13% du PIB mondial et 47% du
PIB des pays en voies de développement. Sur la base de trois
nouveaux critères (taux de croissance de 7 à 8%, cadre
macroéconomique plus discipliné donc plus résistant, et,
environnement institutionnel de qualité), l’étude prend en
compte des nouveaux pays qui sont classés parmi les pays
émergents, faisant ainsi évoluer le sigle de BRIC. De
nouvelles configurations sont mises en exergue : les BRICS
(avec l’introduction de l’Afrique du Sud), les BRICM (avec le
Mexique), les BRICK (avec la Corée du Sud), et les
BRICSAM (avec l’Afrique du Sud, l’Argentine, et le
Mexique).
Pour Philippe Hugon (2010), professeur émérite,
chercheur à l’Institut des Relations Internationales et
Stratégiques (IRIS), faisant la synthèse des réflexions
récentes sur les économies émergentes dans la revue
géopolitique consacrée à l’histoire des mondialisations,
propose les critères suivants pour être pays émergent.
1- Le taux de croissance économique
2- La taille de la population
3- La diversification de la production
4- L’importance des exportations et des
importations (taux d’ouverture)
5- Integration au monde financier international
6- Le rôle stratégique de l’État pour le
développement
7- Les investissements dans la Recherche et le
Développement
8- La capacité de protéger le territoire.
112
Revue Congolaise de Gestion N°14
L’émergence du pays renvoie à une vision fortement
systémique qui prend en compte des critères économiques,
politiques et stratégiques, s’inscrivant dans une dynamique
nationale et internationale. L’émergence du pays vise, par
ailleurs l’objectif, de « puissance économique » dans un
environnement mondial turbulent. La redéfinition du rôle de
l’État constitue une réhabilitation de l’interventionnisme de
l’État en tant que acteur stratégique capable de « booster » la
dynamique du développement.
En définitive, la définition de l’émergence économique
renferme une dose de subjectivité liée au choix des critères de
classification qui présente des pays émergents selon le FMI,
Standards & Poors, l’IRIS, le CEPII, etc. (E. Brière, 2009).
Toutefois, l’émergence observée par ces institutions est
nettement différente de celle qu’à connue la triade (Kenichi
Ohmae, 1985).
4- EMERGENCE DE L’ECONOMIE
DEVELOPPEMENT DU PAYS
ET LE
L’histoire économique est jalonnée de concepts qui
qualifient le niveau ou le statut des pays. On a ainsi des pays
développés et des pays sous-développés, des pays à revenu
intermédiaire, des pays pauvres et des pays riches, des pays
industrialisés et des pays non industrialisés, etc. Chaque
qualification exprime ainsi des caractéristiques ou des
objectifs spécifiques et distinctifs que peuvent se fixer des
pays. Le concept de pays émergent correspondant en d’autres
termes à économie émergente s’inscrit dans cette logique.
Mais, à l’aune de la définition du développement
présentée ci-dessus, il apparait de façon nette que
l’émergence d’une économie (Hugon Ph., 2010) est différente
du développent d’un pays, qui, lui, fait allusion au
113
Revue Congolaise de Gestion N°14
développement économique, socio-culturel et technologique
impliquant une réduction de la pauvreté.
En effet, le développement implique le changement
économique et social. Cette vision est aussi précise chez
l’économiste François Perroux qui le définit comme
étant « la combinaison des changements sociaux et mentaux
d'une population qui la rendent apte à faire croître
cumulativement et durablement, son produit réel global »
(Perroux F., 1991). Autrement dit, le développement, c'est
l'ensemble des changements sociaux et culturels qui rendent
possible la croissance économique. Ce qui nous renvoie à
« L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme » du
sociologue allemand Max Weber (1966), et nous éloigne de
l’économisme qui consiste à réduire le développement à la
croissance économique. Comme l’indique bien le Prix Nobel
l’économiste suédois Gunnar Myrdal (1978), la croissance
économiste ne tient pas compte de la répartition du revenu et
de l’interrelation entre production et répartition qui est
susceptible de générer le développement.
Le changement social est définit comme "étant toute
transformation observable dans le temps, qui affecte d'une
manière qui ne soit pas provisoire ou éphémère, la structure
ou le fonctionnement de l'organisation sociale d'une
collectivité donnée et modifie le cours de son histoire" (G.
Roger, 1986).
À cet égard, il convient d’admettre que l’émergence
économique est différente du développement. Mieux, la
question de l’émergence diffère de celle d’une stratégie de
développement et que :
« L’émergence ne tient lieu ni de nouvelle théorie du
changement et du développement » (Piveteau A. et al.
2010).
Il devient, ainsi, compréhensible pourquoi certains
analystes qualifient la dynamique systémique des BRICS, en
114
Revue Congolaise de Gestion N°14
matière de développement, comme une dynamique molle,
car, les systèmes socio-économiques, et technologiques
nationaux de ces pays présentent beaucoup de faiblesses qui,
à moyen ou long terme, peuvent affecter l’émergence de ces
économies. En effet, par exemples, la Russie a encore besoin
de la technologie occidentale pour mettre en valeur ses
nouveaux gisements. La Chine n’a pas de système national
d’innovation moderne et hautement performant, maïs plutôt
un système traversé par la contrefaçon sur fond de pauvreté
ambiante, particulièrement, dans les zones rurales.
Par ailleurs, dans l’ensemble, les BRICS (Brésil,
Russie, Inde, Chine, South Africa) sont handicapés par une
série de faiblesses, notamment, un cadre juridique peu
propice à l’amélioration du climat des affaires, un système
éducatif insuffisant ou inadéquat, des infrastructures
lacunaires, l’écart scientifique et technique qui sépare les
pays développés des pays émergents reste considérable, le
Brésil et la Russie sont très dépendants du cours des matières
premières, la corruption et les inégalités hypothèquent
l’avenir russe, l’Inde et la Chine sont des pays dont l’unité est
problématique du fait qu’ ils ont un modèle multiculturel
fragile voire conflictuel.
5. CONCLUSION
Les économies émergentes révèlent d’une expérience
dans le cadre du processus du développement économique ;
mais cette expérience ne constitue pas une fin, mais une
étape. Il s’agit d’un phénomène de prise de conscience pour
les pays en développement qui sont appelés à progresser sur
le sentier de la croissance économique ou de la recherche de
la puissance économique dans le cadre de l’économie
mondiale. Surtout que les économies émergentes de la fin du
20ème siècle s’inscrivent dans la continuité des expériences
capitalistes classiques, que ce soit l’Angleterre ou
115
Revue Congolaise de Gestion N°14
l’Allemagne du 19ème siècle, ou encore le Japon un peu plus
tard. » (Sgard J., 2001).
Pour les pays en voie de développement, il y a lieu de
ne pas oublier les objectifs de réduction de la pauvreté et des
inégalités sociales, et particulièrement, la réalisation du
développement humain correspondant à la satisfaction des
besoins fondamentaux des populations, l’éducation et la
santé.
D’un point de vue analytique, il apparait de façon
nette que les économies émergentes présentent une réalité
hétérodoxe, car difficile à classer de façon unanime. Par
ailleurs, le nombre de critères utilisés, par exemple, dans la
classification de l’IRIS, complexifient l’identification des
pays émergents, contrairement aux critères du CEPII.
Néanmoins, la montée en puissance économique des
pays émergents leur confèrent un rôle accru dans la fixation
des priorités mondiales et dans la prise des décisions dans le
cadre de la gouvernance mondiale. D’un point de vue de la
mondialisation également, les pays émergents impriment une
dynamique économique nouvelle réduisant le pouvoir de la
Triade (USA, Europe et Japon) au profit d’autres zones
économiques.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1.
2.
3.
116
Ayhan Kose M. et Prasad E.,
(2010, Décembre), « Les pays émergents à l’âge
adulte », FMI, Finances & développement,
Fontagné A. et coll.,
(2008, Mars), « Après les BRIC, les Prochains 13 »,
Problèmes économiques, La documentation française,
n° 2945,
Hugon Ph.,
(2010, Juillet), « Crise de mondialisation : La place de
second monde émergent et du tiers monde », in Revue
de Géopolitique, n° 110,
Revue Congolaise de Gestion N°14
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
Piveteau A. et Rougier E.,
(2010), « Emergence : l’économie du développement
interpellée », Revue de la régulation, numéro n°7, pp :
1-17
B. Héloise,
(2010),
« Pays
émergents :
Au
loin,
les
multinationales du Sud s’activent », in Dossier : pays
émergents : vers un nouvel équilibre mondial »,
Problèmes économiques, La documentation française,
n° 2993,
Duval G.
(2009), « Faut-il avoir peur des pays émergents ? », in
Alternatives internationales Hors série n°6, L’Etat de
la mondialisation, 2009 ;
Degans A.,
(2008,
Septembre),
Brics :
les
nouveaux
conquistadores
de
l’économie
mondiale,
Géopolitique.over-blog.fr, 4 septembre 2008
Myrdal G.
(1978), Procès de la croissance, PUF
Perroux F.
(1991), L’économie du XXème siècle, PUF
Ohmae, Kenichi,
(1985), La triade. Emergence d’une stratégie
mondiale de l’entreprise, Flammarion
Reverchon A. et de Tricornot A.,
(2010, Avril), « Pays émergents : après la Chine,
l’Inde et le Brésil, à qui le tour ? », in Dossier : pays
émergents : vers un nouvel équilibre mondial »,
Problèmes économiques, La documentation française,
n° 2993,
Roger G.,
(1986), Introduction à la sociologie générale, tome 3,
Le changement social, Le Seuil, 1986.
Sgard J.,
(2001), Qu’est-ce qu’une économie émergente, et estce encore dangereux ?, CEPII
117
Revue Congolaise de Gestion N°14
14.
118
Weber M.,
(1966), L’éthique protestante
capitalisme, Flammarion
et
l’esprit
du
Revue Congolaise de Gestion N°14
NOTE
SUR LE PROBLEME DE FINANCEMENT
DES PROJETS AU CONGO
Dianhy DIAZONZAMA
Brazzaville, République du Congo
Chargé de cours à l’E.S.G.A.E.
Email : [email protected]
1- POSITION
L
DU PROBLEME
e financement des projets au Congo est devenu un
leitmotiv depuis l’atteinte du point d’achèvement par le
Congo dans le cadre de l’initiative PPTE. Les banques sont
en sur liquidité et les entreprises sont dans la situation de
besoins de financement.
Dans le contexte d’être « pays émergent » nécessitant
des entreprises compétitives et aptes à s’insérer sur le marché
mondial, la question de manque de financement des projets
constitue un obstacle majeur pour les Petites et Moyennes
Entreprises (PME) congolaises n’ayant jamais réalisé les
économies d’échelle.
Comment se présente le problème de manque
financement des projets au Congo ? Quels sont les
déterminants ?
Cette note présente la synthèse des arguments avancés
sur cette question à l’aune des bonnes pratiques de gestion
financière qui semblent révéler les grosses faiblesses dont
souffrent les PME congolaises. Elle présente les problèmes,
les solutions et les perspectives.
119
Revue Congolaise de Gestion N°14
2- PROBLEMES
DE FINANCEMENT DE PROJETS
i). La gestion inefficace des dirigeants d’entreprises
Les dirigeants des entreprises de la place font en
général preuve d’une mauvaise gestion des ressources
générées par les activités de par l’importance des charges
qu’ils supportent. Même quand cette gestion semble
s’améliorer, il se pose le problème de la politique de
dividendes au sein de ces entreprises.
L’expression « politique de dividende » désigne
traditionnellement l’ensemble des règles de conduite dont une
firme s’est dotée en matière d’allocation de son profit net
entre la distribution des dividendes aux actionnaires et la
rétention ou la mise en réserve (Simon Y. et Joffre P., 1997).
Au niveau des entreprises congolaises, en général, et
au niveau de la société BAB en particulier, la politique
d’allocation de profit net tend à privilégier la distribution des
dividendes aux actionnaires au détriment de la mise en
réserve.
À ce titre, l’autofinancement dont disposent les
entreprises congolaises peut être considéré comme un
autofinancement comptable et constitué des amortissements,
c’est-à-dire des charges calculées ou non décaissables, faisant
l’objet d’une réintégration, car l’objectif est de permettre, par
principe, le renouvellement des biens amortis. En
conséquence, comme la société BAB, les entreprises
congolaises disposent des faibles niveaux d’autofinancement
considéré comme la principale source interne de financement
des projets. Ce qui nécessite un recours au financement
externe, notamment à l’emprunt bancaire.
Cette alternative reste difficile à mettre en œuvre en
raison de l’incapacité des cadres dirigeants des entreprises
congolaises, en général, de fournir un Business plan
indispensable aux partenaires financiers. À cet égard, nous
120
Revue Congolaise de Gestion N°14
assistons à la « non-bancabilité » des projets constituant un
facteur de blocage dans le financement des projets.
ii). La frilosité des institutions financières
L’offre des crédits dans l’environnement financier des
entreprises congolaises révèle une frilosité de la part des
sociétés financières. Celle ci est due au fait que pour les
institutions financières et les banques en particulier, les
entrepreneurs congolais, ne présentent, dans leur majorité que
des projets non bancables, c’est-à-dire, ne présentant pas les
garanties de rentabilité et de sécurité. En d’autres termes, les
projets des entrepreneurs comportent nécessairement des
risques.
Deux facteurs expliquent cette situation. En premier
lieu, les entrepreneurs ne sont pas en mesure de présenter un
Business Plan à même de décrire clairement le projet, de
montrer la capacité à pouvoir le réaliser et surtout de passer
en revue sa faisabilité.
En conséquence, dans l’environnement des affaires au
Congo, les idées de projets sont présentées à la place des
plans d’affaires susceptibles comportant une étude de
faisabilité fiable et pertinente.
En second lieu, le système « entreprises et banques »
fonctionne sur la base de l’asymétrie d’information. En effet,
il existe un décalage quant à la connaissance du projet et des
conditions d’octroi des crédits entre l’entrepreneur–
emprunteur- les banques–prêteurs-. L’inexistence d’un
marché de l’information justifie ce décalage générant deux
types de risques : l’anti-sélection ou risque d’avant et le
risque moral ou risque d’après (Hirshleifer J. ; Glazer A. et
Hirshleifer D., 2009).
121
Revue Congolaise de Gestion N°14
3- SOLUTIONS
ET PERSPECTIVES
3.1. Solutions pour le financement de projets
Des résultats obtenus, il ressort que le financement
efficace des projets nécessite une amélioration de la gestion
d’une entreprise et de la situation financière et de
planification des sources de financement selon la nature et
l’importance des projets.
i).Pour l’amélioration de la gestion et de la situation
financière
L’obligation est faite, en matière de gestion
financière, de s’approprier des bonnes pratiques classiques
qui déterminent l’efficacité de l’entreprise moderne. À cet
égard, les entreprises congolaises doivent systématiser les
diagnostics financiers tout au long du cycle de vie du projet,
de préférence chaque trimestre, afin d’anticiper ou de
prévenir les risques de dérapage au niveau de la gestion des
ressources financières. Ce qui a permis à Levasseur (1992) de
faire remarquer :
« …on peut supposer légitimement qu’un dirigeant
d’entreprise préfère plus de bénéfices à moins qu’il
ait une préférence pour des résultats réguliers plutôt
qu’irréguliers aussi valorise t-il au mieux une
politique qui conduit son entreprise à dégager les
résultats élevés et stables ».
Pour y parvenir, au niveau opérationnel, les entreprises
doivent procéder à la mise en œuvre des indicateurs
financiers. Ils contribuent à la professionnalisation des
activités financières de l’entreprise. Il y a lieu de noter que
les indicateurs financiers sont des outils privilégiés et très
utilisés dans la gestion des ressources financières d’une
entreprise et améliorent le processus de la prise de décision.
Ils constituent donc un instrument de diagnostic et un outil
d’aide à la prise de décision par les différents responsables, y
122
Revue Congolaise de Gestion N°14
compris les décisions de choix de source de financement pour
un projet à entreprendre. Leur analyse dans le temps permet à
une entreprise d’avoir des repères de travail et d’évaluer leur
performance.
Ensuite, ils vont favoriser la transparence et renforcer la
confiance des parties prenantes de l’entreprise et constituent
un gage de transparence pour les fournisseurs, les banques,
les autorités de surveillance et les divers autres partenaires.
Par ailleurs, la production d’indicateurs à des
périodicités rapprochées (trimestriel de préférence) permettra,
surtout au responsable, d’avoir une vue d’ensemble de
l’entreprise et d’apporter des ajustements possibles dans la
gestion des projets.
Enfin, Ils vont constituer, une base de référencement
pour l’accès au financement. Les indicateurs de performance
financière peuvent être utilisés comme outil de négociation
pour mobiliser des ressources auprès des institutions
financières.
ii). Pour l’amélioration de la planification des modes de
financement
Tout d’abord, la redéfinition de la politique de
distribution de dividendes s’impose. Cette politique exige la
prise en compte des périodes liées aux différentes phases du
cycle de vie du projet. Dans ce cadre, la distribution
dividendes supplémentaires aux apporteurs des capitaux n’est
déterminée que par la réalisation du cash-flow permettant de
financer les activités.
Ensuite, les entreprises doivent distinguer leurs
sources « autofinancement » dans deux options, l’option
comptable et l’option financière ou de trésorerie.
La première option concerne généralement les projets
de rationalisation ou de productivité car l’autofinancement
comporte les amortissements et les bénéfices réservés. Il y a
123
Revue Congolaise de Gestion N°14
lieu de noter que, d’une part, les amortissements permettent
le remplacement ou le renouvellement pur et simple des
machines, et, d’autre part, dans une optique de réduction de
coûts de production et/ou de commercialisation, les bénéfices
réservés vont renforcer les amortissements pour atteindre ce
but.
Dans une option financière ou de trésorerie, pour les
projets d’innovation et d’expansion, l’autofinancement
comporte les valeurs disponibles, et, éventuellement, les
placements des trésoreries et la valeur récupérable des
désinvestissements. Signalons, toutefois, que pour ces types
de projets de grande envergure, l’autofinancement ne suffira
pas au regard des inconvénients que pose la mauvaise
utilisation de cette source. Ce qui nécessite un recours au
financement externe. L’obligation pour les entreprises de
produire un Business Plan devient une condition sine qua
none susceptible de mieux exploiter les opportunités offertes
par les banques en surliquidité
3.2. Perspectives de financement de projets
Les perspectives, en matière de financement des
projets dans un environnement national ouvert s’inscrivent
dans un contexte de mondialisation économique et de
développement des outils financiers modernes. Trois
orientations s’offrent aux entreprises pour le financement des
projets.
D’abord, pour les projets d’expansion, l’augmentation
du capital financier constitue la décision stratégique pour
renforcer du financement interne qui ne doit plus être
considéré comme un acquis dans la gestion à moyen et long
terme des projets.
Par ailleurs, il serait de bon augure pour les
entreprises d’exploiter le financement par crédit-bail. Ce
système de location avec une option d’achat à terme permet à
124
Revue Congolaise de Gestion N°14
l’entreprise de disposer des moyens de production sans
immobiliser de capitaux.
En outre, il est important également que les
entreprises congolaises saisissent l’opportunité des
innovations que le marché financier (avec l’avènement de la
Bourse des Valeurs de l’Afrique Centrale), les banques et les
professionnels de l’argent offrent pour les entreprises.
Certaines de ces innovations se présentent sous la forme des
produits offerts aux entreprises pour la gestion de leurs
dettes. La disponibilité des intermédiaires financiers dont la
mission est de proposer des financements les mieux adaptés à
chaque nature des besoins constitue une garantie pour la mise
en œuvre de cette source de financement.
4- CONCLUSION
En guise de conclusion, on peut estimer que cette
brève note est un début de réponse au problème du
financement, problème récurrent constituant un obstacle
majeur pour les entreprises congolaises.
La question de l’information sur des différents modes
de financement existants pour réaliser un projet se pose. Par
ailleurs, cette note a proposé des esquisses de solutions par
rapport au constat selon lequel les cadres dirigeants des
entreprises congolaises font souvent preuve d’une mauvaise
gestion financière de façon générale et d’une incapacité à
pouvoir présenter un Business plan permettant de lever les
fonds auprès des institutions financières.
L’analyse sur le financement des projets a permis de
cerner les facteurs sources de cette mauvaise gestion et de
cette incapacité à pouvoir présenter un Business plan assorti
d’une bonne étude de faisabilité.
Les perspectives présentées dans ce travail sont des
opportunités pour les entreprises modernes dans un
environnement mondial et concurrentiel.
125
Revue Congolaise de Gestion N°14
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
126
Baum W.C
(1987), Qu’est ce qu’un projet ? Le cycle des projets,
Paris, Ed. Economica.
BODIE Z. et MERTON R.,
(2007), Finance, 2ème édition, Paris, Ed. Nouveaux
Horizons,
Begg D. ; Fischer St. et Dornbusch R.
(1996), Micro-économie, 2ème édition, Dunod, Paris
Hirshleifer J. ; Glazer A. et Hirshleifer D.
(2009), Micro-économie : théories et applications,
Traduction de la 7ème édition anglaise Editions de
Boeck Université
Ittinger J.P.
(1985), Analyse économique des projets agricoles,
Paris, Ed. Economica.
Levasseur M. et Quintard A.
(1992), Finance d’entreprise, 2ème édition, Paris, Ed.
Economica ; Pages 463-464.
Olekalo, R.,
(2010), Le profil des dirigeants des entreprises de
services à Brazzaville, Mémoire de master,
Management des PME, ESGAE
Simon Y. et Joffre P.
(1997), Encyclopédie de gestion, 2ème édition, Paris,
Ed. Economica ; Page 2303.
Revue Congolaise de Gestion N°14
COMITE
DE REDACTION
Marcel MBALOULA, Rédacteur en chef ; [email protected]
(Chargé de Cours à l’E.S.G.A.E.) ; G.W. TCHAMBA ; D.
BASSOKA ; R.M. OCKANA ; J. T. OUNOUNOU ; B. MOUEGNI
MILENZI ; R. SAMBA ; J. P. NGALEBAYE ; A. MOULEMVO ; J.J. KIMO ; C. BIKODI ; C. KOUDISSA-NTELO.
SECRETARIAT DE LA REVUE
Grâce NKOUZOU ; Blin NKOUKA
Courriel : [email protected]
ONT CONTRIBUE À CE NUMERO :
André MOULEMVO UMNG – Brazzaville, Congo
Claude LIPIKA Diplômé de Master, E.S.G.A.E.
Azzouz ELHAMMA Professeur agrégé en gestion
financière et comptable, Rabat –
Maroc
Alain Enseignant chercheur, faculté des
TAKOUDJOU NIMPA sciences économiques et de
gestion – Université de Dschang,
Cameroun
Léopold Enseignant chercheur, faculté des
DJOUTSA WAMBA sciences économiques et de
gestion – Université de Dschang,
Cameroun
Dianhy DIANZONZAMA Chargé de cours à l’E.S.G.A.E.
Abonnement : 2 numéros par an. Congo : 30$ par an – frais de
port compris. Autres pays : 50$ par an.
Chèque bancaire ou postal libellé à l’ordre de E.S.G.A.E.
Compte n° 11670-1001 LCB – Brazzaville. Mandat lettre à l’ordre
de l’E.S.G.A.E.
127
Revue Congolaise de Gestion N°14
128
Revue Congolaise de Gestion N°14
----------------------------------------------------------------------
BULLETIN D’ABONNEMENT
À remplir et à retourner à l’adresse ci-dessous :
E.S.G.A.E.
B.P. 2339
Brazzaville
République du Congo
Nom : …………………………………………………………
Prénom : ……………………………………………………...
Organisme : …………………………………………………..
Adresse : ……………………………………………………...
………………………………………………………………...
Courriel : ……………………………………………………..
Je désire souscrire un abonnement annuel à la revue,
ci-joint :
 : Un mandat de …………………………………………….
 : Un chèque de …………………………………………….
Date : …………………………………………………………
Signature
129
Revue Congolaise de Gestion N°14
NOTES
130
Revue Congolaise de Gestion N°14
NOTES
131
Revue Congolaise de Gestion N°14
Ouvrage réalisé par le Groupe ICES à Essonnes (91100)
France
Achevé d’imprimer en France (91100-Essonne)
ISBN : 2-910153-66-5
132