Fiche 2 : La relation travail-croissance

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Fiche 2 : La relation travail-croissance
Fiche Cours
Nº : 25002
ECONOMIE
Série ES
LE TALENT C’EST D’AVOIR ENVIE
Fiche 2 : La relation travail-croissance
Plan de la fiche
I - Notions de base
II - Problèmes économiques et sociaux
III - Théories et auteurs
IV - Repères historiques
La production économique dépend de la combinaison de deux facteurs : le capital et le travail. Pour augmenter la croissance, il
convient en particulier d’organiser du mieux possible la relation du travail avec la machine, c’est-à-dire le capital.
I - Notions de base
La division du travail qualifie une organisation du travail consistant à décomposer en multiples tâches la fabrication d’un bien.
Elle s’oppose à la conception traditionnelle où la réalisation du produit est entièrement assurée de façon autonome par un seul
ouvrier.
L’augmentation de la production due à la division du travail entraîne pour l’entreprise une baisse du coût unitaire du produit, ce
que l’on appelle des économies d’échelle. Produire en plus grande quantité implique en effet :
• des rabais sur le prix des matières premières achetées aux fournisseurs ;
• une amélioration du savoir-faire du personnel qui réduit les pertes et les mises au rebut ;
• les frais fixes (loyer, électricité) sont divisés par une plus grande quantité de produits, ce qui abaisse leur coût de revient.
Le taylorisme définit la méthode de l’« Organisation scientifique du travail » créée par Taylor. Cette organisation repose sur cinq
critères :
• une séparation du travail entre les fonctions de conception et d’exécution ;
• une démarche rationnelle et scientifique pour organiser la production dans l’entreprise ;
• une parcellisation minutée des tâches et la façon de les réaliser ;
• un salaire en fonction du rendement de l’ouvrier ;
• un refus de la grève et d’une action syndicale dans l’entreprise mais le souhait de ne pas exploiter l’ouvrier et de lui assurer une
juste rémunération.
Le néotaylorisme caractérise le maintien global des principes de Taylor et de son organisation du travail dans la société actuelle.
On peut citer le travail minuté des femmes de chambre dans les grandes chaînes d’hôtels ou celui des hôtesses de caisse dans les
supermarchés.
Le fordisme, créé par Henry Ford (1863-1947), se caractérise, outre par le travail à la chaîne, par un système de production :
• réalisant un produit unique, standardisé et sans options, comme la célèbre voiture Ford T ;
• une volonté d’abaisser le prix de vente du produit tout en augmentant le salaire des ouvriers en les associant au partage des gains
de productivité de l’entreprise.
Le toyotisme, conçu par Taïchi Ohno, ingénieur chez Toyota, se définit comme une nouvelle méthode de production et
d’organisation du travail dans l’entreprise. Cette méthode repose sur deux principes :
• la demande du consommateur détermine la réalisation du produit ;
• le personnel doit être polyvalent, autonome et s’impliquer dans la réalisation d’un produit sans défaut.
Le « juste à temps » caractérise le toyotisme dans sa méthode de production. Une fois la commande du client enregistrée, il
convient de réaliser très vite le produit. Mais comme il n’y a volontairement pas de stocks en attente, les quantités nécessaires à la
production doivent être rapidement livrées. Cette politique est également qualifiée de « flux tendus ».
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Les cercles de qualité traduisent l’implication des salariés dans l’entreprise. Ils ont pour fonction de conduire les ouvriers à
proposer des perfectionnements dans le système de production au cours de réunions auxquelles ils participent volontairement,
parfois même en dehors de leurs heures de travail.
Enfin le management participatif désigne, au contraire du taylorisme, un mode de gestion de l’entreprise qui a pour objet de
faire prendre des initiatives et des responsabilités aux salariés dans le cadre de leur travail. Les cercles de qualité font partie de ce
type de management.
II - Problèmes économiques et sociaux
Le travail accélérateur de croissance
Adam Smith a décrit les avantages de la division du travail sur la productivité de l’entreprise grâce à :
• la spécialisation de l’ouvrier qui augmente son habileté et le rend plus performant ;
• le gain de temps obtenu car le travailleur n’a plus à se déplacer d’un post à l’autre ;
• l’utilisation plus nombreuse de machines que permet la division des tâches.
F.W. Taylor va compléter les avantages de la division en y ajoutant une Organisation scientifique du travail (OST).Celle-ci repose
sur trois principes :
• une division verticale du travail. D’un côté des ingénieurs qui organisent et minutent la façon dont le personnel doit travailler,
ce que l’on appelle « the one best way ». De l’autre côté, des ouvriers n’ayant plus qu’à exécuter, sans initiative aucune, les gestes
à réaliser ;
• une division horizontale du travail. La production du bien est décomposée en multiples petites opérations qui peuvent être
réalisées par un personnel sans qualifications particulières. Le sociologue Georges Friedmann qualifiera ce découpage de « travail
en miettes » ;
• un salaire au rendement. Pour augmenter la production, le salarié n’est payé qu’en fonction du nombre de pièces réalisées.
Enfin, Henry Ford va ajouter à la division et à l’organisation du travail trois nouveaux principes :
• il invente le travail à la chaîne. L’ouvrier est placé à un poste fixe et le tapis roulant lui impose la cadence de travail souhaitée ;
• il développe la standardisation du produit. Sa célèbre voiture, la Ford T, est vendue sans aucune option de moteurs ou de couleurs,
ce qui permet d’augmenter les économies d’échelle ;
• il pratique une politique de hauts salaires, le «five dollars day ». Il rémunère l’ouvrier cinq dollars par jour alors que la rémunération
à l’époque n’est que de deux dollars et demi.
Ce dernier principe est considéré comme étant à l’origine de la production et de la consommation de masse. En augmentant
les salaires, Ford a pour objectif de faire acheter ses voitures par ses salariés. Cela va augmenter ses ventes et sa production et
donc générer de nouvelles économies d’échelle. Avec des prix plus bas une nouvelle catégorie d’acheteurs va donc se manifester,
entraînant plus de ventes et plus de profits.
Les bases de ce système, appelé le « modèle fordiste », seront à l’origine du développement de la société de consommation illustrée
par les Trente Glorieuses.
Le travail, un frein à la croissance : la crise du taylorisme et du fordisme
Les premières critiques sur l’organisation scientifique du travail remontent aux années trente aux Etats-Unis. Elles sont formulées
par Elton Mayo, considéré comme le fondateur de l’école des relations humaines. Il observe en effet que la productivité de
l’entreprise passe aussi par une amélioration de l’intérêt porté aux salariés et par un bon climat psychologique régnant dans
l’entreprise.
Mais c’est principalement vers la fin des années soixante que l’on assiste à une remise en cause du taylorisme :
• les ouvriers sont de moins en moins motivés par un travail monotone, sans responsabilités et sans promotion véritable ;
• cela entraîne un développement de l’absentéisme, du turnover, ou rotation accélérée du personnel dans l’entreprise, et des actions
revendicatrices ;
• le principe de l’autorité hiérarchique, propre au système tayloriste, est de plus en plus contesté ;
• enfin, la production d’un produit standardisé n’emporte plus l’adhésion du consommateur. Celui-ci veut à présent des produits
individualisés et de qualité.
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Ces différentes raisons conduisent à renchérir le coût de revient du produit et à diminuer la productivité et les profits de
l’entreprise. C’est l’amorce d’un ralentissement de la croissance.
La recherche d’une nouvelle relation du couple capital-travail
Face à l’essoufflement du système productif, un premier essai s’organise pour enrichir et reconstituer les liens entre le travail
et l’entreprise. On développe la décentralisation et ce que l’on appelle la DPO (Direction par objectifs), qui permet de laisser
plus d’autonomie aux salariés. Ces derniers travaillent, après concertation, à réaliser des objectifs partagés par les membres du
groupe.
Mais c’est l’apparition du toyotisme qui renouvelle dans les années soixante-dix la relation capital-travail. Taïchi Ohno élabore les
nouveaux principes de production pour l’entreprise et une nouvelle organisation du travail pour les salariés. Au système tayloriste
et fordiste maximisant la production en attendant la vente, il oppose le principe selon lequel c’est la vente qui doit déterminer la
production des biens. Cela permet d’éviter des frais de stockage et de s’adapter parfaitement à la demande. On a pu dire que si
Taylor vendait ce qui était produit, Ohno produit ce qui a été vendu.
Cette conception conduit à devoir réaliser un produit très vite et sans défaut. Pour cela l’entreprise organise une production à
« flux tendus » ou « juste à temps ». Elle commande, par un système de fiches appelées « Kanbans » et remontant en amont, au
dernier moment, les produits semi-finis juste nécessaires à la quantité à produire. L’ensemble du système de production s’articule
autour de la loi des cinq zéros : zéro panne, zéro papier, zéro stock, zéro délai et zéro défaut.
Parallèlement, le toyotisme s’oppose au taylorisme qui a fait perdre à l’ouvrier son savoir-faire pour le réduire à un simple geste
élémentaire de production. A l’inverse, Ohno redonne au salarié un rôle polyvalent d’intervention rapide sur n’importe quel
poste de travail. Il doit être capable de déceler les pannes de la machine, contrôler la qualité du produit réalisé et s’impliquer dans
l’entreprise par un management participatif.
III - Théories et auteurs
Adam Smith est le premier à énoncer l’intérêt de la décomposition des tâches dans son ouvrage célèbre paru en 1776 : Recherches
sur la nature et les causes de la richesse des nations. Partant de l’exemple célèbre d’une manufacture d’épingles, il démontre que si
un seul ouvrier réalise toutes les opérations, il n’obtiendra qu’une vingtaine d’épingles à la fin de la journée. En revanche, si ce
travail est divisé et décomposé en plusieurs postes, le résultat sera que chaque ouvrier aura produit en une journée environ 4 800
épingles. Il énonce alors que la division du travail, « aussi loin qu’elle peut y être portée, donne lieu à un accroissement proportionnel dans
la puissance productive du travail. »
Cette division du travail a pour origine, selon lui, la nature humaine qui pousse l’individu à produire plus qu’il ne lui est nécessaire
afin d’échanger ce surplus contre le surplus de travail d’un autre : « c’est cette […] disposition à trafiquer qui a dans l’origine donné
lieu à la division du travail. » Ainsi, au-delà de la manufacture, c’est toute la société qui, par l’échange des produits, permet d’atteindre
« cette opulence générale qui se répand jusque dans les dernières classes du peuple. »
A la fin du XIXe siècle, Karl Marx dénonce, dans l’ensemble de son œuvre, les conséquences de la division du travail dans le
système capitaliste. L’ouvrier est aliéné par un travail répétitif et sans responsabilité d’ensemble. Sans qualification particulière, il
devient vite remplaçable par un autre, ce qui le conduit à accepter un salaire de plus en plus faible. Pour compenser cette baisse de
salaire, il doit travailler encore plus, ce qui accentue son exploitation par la classe bourgeoise capitaliste.
Par ailleurs, Marx reprend la théorie de la valeur travail développée par Ricardo. Il considère que c’est la quantité de travail
nécessaire à la réalisation d’un bien qui doit déterminer sa valeur sur le marché.
IV - Repères historiques
C’est en 1911 que Frédéric Winslow Taylor (1856-1915) publie La Direction scientifique des entreprises, ouvrage exposant les
principes de l’organisation scientifique du travail. Il s’oppose au système de l’ouvrier qualifié réalisant son ouvrage dans le temps
qu’il estime nécessaire et cherche à supprimer toute flânerie ou « fallacy » du personnel dans l’entreprise.
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Henri Ford (1863-1947) est à l’origine du développement de la société de consommation de masse. Il explique ainsi sa volonté de
doubler le salaire des ouvriers : « si nous répandons beaucoup d’argent, cet argent est dépensé. Il enrichit les négociants et les détaillants,
les fabricants et les travailleurs de tous ordres et cette prospérité se traduit par un accroissement de la demande pour nos automobiles. »
Taylor et Ford, en décomposant la production en gestes simples, ont permis l’intégration de la grande vague d’immigrés
inexpérimentés dans la société américaine au début du XXe siècle.
Elton Mayo (1880-1949), considéré comme le fondateur de l’école des « relations humaines », démontra par des enquêtes
célèbres dans les ateliers de la Western Electric, durant l’entre-deux-guerres, que la productivité ne dépendait pas seulement de
l’organisation scientifique du travail. Elle dépendait aussi des sentiments, des relations entre les salariés et d’une adroite psychologie
du commandement.
Abraham Maslow, en 1954, soulignera que le personnel n’est pas motivé seulement par le salaire comme le pensait Taylor. Il
établira une « pyramide » hiérarchisée des motivations au travail du salarié : besoins matériels, puis de sécurité, d’acceptation par
les autres, d’estime et enfin d’accomplissement de soi.
Le sociologue Michel Crozier schématisera ainsi l’évolution de la place du travailleur dans l’entreprise :
• une main selon Taylor ;
• une main et un cœur selon Mayo ;
• une main, un cœur et un cerveau selon Maslow et la conception actuelle.
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