Lois et sexualité

Transcription

Lois et sexualité
Dossier
Adolescents et sexualité
Lois et sexualité
Christophe Guigné
L’intervenant en éducation à la sexualité doit connaître l’existence des principales lois
en lien avec la sexualité, tant pour répondre aux questions des adolescents que pour
apporter des informations qui peuvent être utiles au cours d’échanges avec les jeunes.
© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
Laws and sexuality. Sex education teachers must be aware of the main laws relating to
sexuality, in order to be able to answer teenagers’ questions as well as to be equipped
with information which can be useful during exchanges with young people.
© 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved
Mots clés
•
•
•
26
•
Image pornographique
Législation
Majorité sexuelle
Sexualité
Keywords
•
•
•
•
Age of sexual consent
Legislation
Pornographic image
Sexuality
Références
[1] Décret n° 2012-35 du 10
janvier 2012, www.legifrance.gouv.
fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFT
EXT000025135341&dateTexte=&c
ategorieLien=id
[2] Loi n° 2000-1209 du
13 décembre 2000, relative à la
contraception d’urgence, www.
legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?c
idTexte=JORFTEXT000000755450
&dateTexte=&categorieLien=id
[3] Loi n° 2001-588 du 4 juillet
2001, relative à l’interruption
volontaire de grossesse et à la
contraception, www.legifrance.
gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=J
ORFTEXT000000222631
[4] www.senat.fr/rap/l12-107-7/
l12-107-76.html
[5] Article 227-22 du nouveau
Code pénal, www.legifrance.gouv.
fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=
LEGITEXT000006070719&idArticl
e=LEGIARTI000006418085&dateT
exte=20130212
[6] Article 227-23 du nouveau
Code pénal, www.legifrance.gouv.
fr/affichCodeArticle.do?idArticle=
LEGIARTI000006418095&cidTexte
=LEGITEXT000006070719
[7] Articles 321-1 à 321-5 du
nouveau Code pénal. Section 1 :
Du recel, www.legifrance.gouv.fr/
affichCode.do?idArticle=LEGIART
I000006418234&idSectionTA=LE
GISCTA000006165338&cidTexte=
LEGITEXT000006070719&dateTex
te=20040621
T
outes les sociétés ont mis en place des lois
autour de la sexualité, ayant essentiellement pour objectif de veiller à préserver ce
qui était considéré comme les “bonnes mœurs”.
  La loi française pose le principe du libre exercice
de la sexualité, si elle a lieu entre adultes (au-delà de
15 ans), si les partenaires sont consentants et si elle
s’exerce en dehors du regard d’autrui.
  Lors des séances avec les jeunes, il est important de leur faire prendre conscience que la loi a
pour but de les protéger d’une sexualité non consentie et de leur permettre de connaître leurs droits
dans ce domaine. Mais il s’avère aussi nécessaire de
travailler avec eux sur la possibilité de devenir des
auteurs potentiels d’infraction et de réfléchir particulièrement à la notion de consentement.
La majorité sexuelle
L’expression de “majorité sexuelle” n’existe pas en
tant que telle dans la loi. Cette notion indique le
seuil en dessous duquel le consentement de l’enfant
ne sera pas pris en compte. Il a été fixé à l’âge de
15 ans en France depuis 1945. Cependant, la personne avec laquelle ont lieu ces relations sexuelles
ne doit ni exercer un ascendant ni avoir autorité sur
le mineur.
Dans le cas d’un crime ou d’un délit sexuel, si la
victime est mineure de 15 ans il s’agira d’une circonstance aggravante.
En ce qui concerne la sexualité entre deux mineurs
sexuels, la loi ne prévoit pas de sanction, sauf s’il
y a eu dans ces relations des contraintes ou des
violences.
L’accès à la contraception
Les infirmières scolaires, depuis le décret n° 2012-35 du
10 janvier 2012 [1], peuvent renouveler pour 6 mois une
ordonnance de contraception datant de moins d’un an.
© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
http://dx.doi.org/10.1016/j.revssu.2013.02.012
Accès à la contraception d’urgence
La loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 [2] autorise la délivrance, sans prescription médicale, des
médicaments ayant pour but la contraception d’urgence. Elle autorise la délivrance gratuite aux
mineures de cette pilule dans les pharmacies, qui
peut aussi être obtenue dans les services d’urgences
des hôpitaux. Elle permet aux infirmières scolaires
du second degré de l’administrer aux élèves majeures
ou mineures.
Accès à l’interruption volontaire
de grossesse
La loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001, relative à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et à la contraception [3], autorise l’IVG jusqu’à la 12e semaine de
grossesse. Elle énonce que si la mineure désire garder
le secret et ne pas prévenir ses parents, il suffit qu’elle
soit accompagnée dans sa démarche par une personne majeure de son choix. Un entretien préalable
est obligatoire. L’Assemblée nationale a adopté le 26
octobre 2012, dans le cadre de la loi de financement
de la Sécurité sociale qui entre en vigueur en 2013,
deux nouvelles mesures : le remboursement à 100 %
des IVG par l’Assurance maladie pour toutes les
femmes, ainsi que la gratuité de tous les moyens
contraceptifs pour les jeunes filles de 15 à 18 ans [4].
La paternité aujourd’hui
L’homme peut se trouver en situation de paternité
sans l’avoir désirée, voire en l’ayant clairement refusée. À l’inverse le père biologique peut être privé de
tout lien relationnel avec un enfant dont il aurait
souhaité assumer la paternité. Un homme peut être
installé de fait dans le statut de “père’’ si la femme
avec laquelle il a eu une relation sexuelle passagère,
ou avec laquelle il a partagé une période de sa vie,
choisit de garder un enfant contre sa décision. La
La revue de santé scolaire & universitaire ● Mars-Avril 2013 ● n° 20
Adolescents et sexualité
réforme de la filiation, entrée en vigueur le
1er juillet 2006, permet d'établir, à la demande de la
mère, la paternité durant les 10 ans suivant la naissance de l’enfant et offre à ce dernier la possibilité
de cette recherche de paternité pendant les 10 ans
suivant sa majorité.
Les mineurs et les images
pornographiques
Corruption d’un mineur
L’article 227-22 du nouveau Code pénal (modifié
par la loi de mars 2007) [5] punit le fait de favoriser,
ou de tenter de favoriser, la corruption d’un mineur.
La corruption des mineurs concerne surtout l’organisation de réunions comportant des exhibitions
ou relations sexuelles auxquelles le mineur assiste
ou participe, ou bien la projection ou le visionnement d’images à caractère pornographique. Il y a
circonstance aggravante si le mineur est âgé de
moins de 15 ans ou lorsque le mineur a été mis en
contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation,
pour la diffusion de messages à destination d’un
public non déterminé, d’un réseau de communications électroniques. Ceci est aussi valable si les faits
sont commis dans les établissements d’enseignement ou d’éducation, ou dans les locaux de l’administration, ainsi que lors des entrées ou sorties des
élèves ou du public (ou dans un temps très voisin
de celles-ci, aux abords de ces établissements).
Lois sur les violences sexuelles
Références
Le viol
L’article 222-23 du nouveau Code pénal [8], en
vigueur depuis 1993, donne comme définition du
viol : « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque
nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par
violence, contrainte, menace ou surprise ». Cela signifie que la fellation ou la sodomie, la pénétration des
doigts ou d’un objet dans un vagin peuvent être
considérés comme des viols. Le viol est un crime qui
relève de la cour d’assises. Depuis la loi n° 2004-204
du 9 mars 2004 [9], les victimes de viol, qui étaient
mineures au moment des faits, pourront porter
plainte jusqu’à 20 ans à compter de leur majorité,
c’est-à-dire jusqu’à 38 ans. Les victimes majeures ont
10 ans à compter de la date des faits pour porter
plainte.
Les agressions sexuelles
Les agressions sexuelles sont les atteintes sexuelles commises avec violence, contrainte, menace ou surprise, sans
acte de pénétration sexuelle d’après l’article 222-27 du
nouveau Code pénal [10]. Il s’agit de délits.
Depuis la loi de mars 2004 [9], les victimes d’agression sexuelle, qui étaient mineures au moment des
faits, pourront porter plainte jusqu’à 10 ans à
compter de leur majorité, c’est-à-dire jusqu’à 28 ans
(et même jusqu’à 38 ans en cas de circonstances
aggravantes). Les victimes majeures ont 3 ans à
compter de la date des faits pour porter plainte.
Pornographie mettant en scène
un mineur
Les atteintes sexuelles
Le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d’enregistrer
ou de transmettre l’image ou la représentation d’un
mineur, lorsque cette image ou cette représentation revêt un caractère pornographique, est puni.
De même, le fait d’offrir, de rendre disponible ou
de diffuser une telle image ou représentation, par
quelque moyen que ce soit, de l’importer ou de
l’exporter, de la faire importer ou de la faire exporter, est puni des mêmes peines : article 227-23 du
nouveau Code pénal [6]. Enfin, consulter habituellement un service de communication au public en
ligne, mettant à disposition une telle image ou
représentation, ou détenir une telle image ou
représentation par quelque moyen que ce soit est
également puni.
Définies par l’article 227-25 du nouveau Code
pénal [11], les atteintes sexuelles sont « les attouchements sexuels commis par un majeur sur un mineur
de quinze ans sans violence, contrainte, menace ni
surprise ». Dans tous les cas de violences sexuelles,
peuvent être retenues les mêmes circonstances
aggravantes : une victime âgée de moins de 15 ans,
un auteur ayant un ascendant sur la victime ou
autorité sur elle, des actes réalisés par plusieurs
personnes. Enfin, depuis la loi n° 2006-399 du
4 avril 2006 [12], la circonstance aggravante est
constituée lorsque les faits sont commis par un
conjoint (marié, concubin ou partenaire) ou un
ancien conjoint (défini de la même façon que
précédemment).
Recel d’images pornographiques lié
aux mineurs
Conclusion
Le recel d’images à caractère pornographique de
mineurs est puni par les articles 321-1 à 321-5 du
nouveau Code pénal (loi modifiée en 2000) [7].
Pour parler de sexualité avec les adolescents, il n’est pas
indispensable de connaître tous les détails de ces lois.
Il est cependant utile de rappeler la protection qu’elles
offrent aux mineurs et les limites qu’elles posent.
La revue de santé scolaire & universitaire ● Mars-Avril 2013 ● n° 20
Dossier
•
[8] Article 222-23 du nouveau
Code pénal, www.legifrance.gouv.
fr/affichCodeArticle.do?idArticle=
LEGIARTI000006417678&cidTexte
=LEGITEXT000006070719
[9] Loi n° 2004-204 du 9 mars
2004, portant adaptation de
la justice aux évolutions de la
criminalité, www.legifrance.gouv.
fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFT
EXT000000249995.
[10] Article 222-27 du nouveau
Code pénal, www.legifrance.gouv.
fr/affichCodeArticle.do?idArticle=
LEGIARTI000006417689&cidTexte
=LEGITEXT000006070719
[11] Article 227-25 du nouveau
Code pénal, www.legifrance.gouv.
fr/affichCodeArticle.do?idArticle=
LEGIARTI000006418101&cidTexte
=LEGITEXT000006070719
[12] Loi n° 2006-399 du 4 avril
2006, renforçant la prévention et
la répression des violences au sein
du couple ou commises contre les
mineurs, www.legifrance.gouv.fr/
affichTexte.do?cidTexte=JORFTEX
T000000422042&dateTexte=&cate
gorieLien=id
Pour en savoir plus
• Barillon J, Bensussan P. Le
nouveau code de la sexualité. Paris:
Odile Jacob; 2007.
• Collectif. Actes du colloque.
Éducation à la sexualité. Rôle
des professionnels dans les
institutions. Lyon: CRAES-CRIPS /
Rectorat de Lyon / Rectorat
de Grenoble. Janvier 2002,
http://education-sante-ra.org/
publications/2002/sexco.pdf
• Communal L, Guigné C, Rozier C.
Éducation à la sexualité au collège
et au lycée. Grenoble: CRDP; 2010.
• Pierrat E. Le sexe et la loi. Paris:
La Musardine; 2008.
Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir
de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
L'auteur
Christophe Guigné
Médecin de santé publique,
sexologue, conseiller
technique santé des élèves de
l’Éducation nationale,
DSDEN 74,
Cité administrative,
7 rue Dupanloup,
74040 Annecy cedex, France
[email protected]
27