d`optimisation de

Transcription

d`optimisation de
Stratégie du dirigeant
R É M U N É R AT I O N
Les leviers
d’optimisation de
la rémunération
Lorsque l’on évoque l’optimisation de la rémunération, trois contraintes doivent
être prises en comptes : le coût global de la rémunération pour l’entreprise que
l’on cherchera à minimiser ; le net disponible pour le dirigeant que l’on
cherchera à maximiser ; les couvertures sociales (retraite, prévoyance, mutuelle)
que l’on cherchera à maximiser. On peut qualifier ces trois contraintes de
« triptyque de la rémunération ».
es possibilités d’optimisation de la rémunération dépendent du choix de statut du
dirigeant. En fonction de celui-ci, le dirigeant devra faire des choix sur son mode de
rémunération et envisager de mettre en place
diverses formes de rétribution « privilégiée ». À
chaque étape et choix d’optimisation, il faudra
veiller au « triptyque de la rémunération ».
L
Le statut du dirigeant
12
Pour rappel, il existe donc deux formes de statut
social pour un dirigeant d’entreprise : Travailleurs
Non Salariés (TNS) et salarié. Les gérants majori-
taires1 de SARL ou d’EURL ont le statut social de
TNS. Les gérants minoritaires de SARL ou le président, directeur général, etc. de SA, SAS ou SASU
ont le statut de salariés2. Le dirigeant salarié
dispose de la même couverture qu’un salarié, sauf
pour l'assurance chômage pour laquelle le diri1.
Le caractère majoritaire est obtenu lorsque le gérant détient plus de 50 %
des parts de la SARL. Les parts retenues pour le calcul de la majorité sont
les parts détenues par le foyer fiscal du gérant ou, en présence de plusieurs
gérants, de l’ensemble des parts des gérants. Ainsi, dans une SARL détenue
à 40 % par son gérant, 40 % par son conjoint et 20 % à d’autres associés,
le gérant sera majoritaire. Par ailleurs, dans une SARL ayant
2 gérants : A et B dont A détient 90 % des parts et B détient 10 % des
parts : les 2 gérants A et B auront le statut de TNS.
Novembre - Décembre 2012 - Janvier 2013|
n°78
Stratégie du dirigeant
R É M U N É R AT I O N
Retraite et cotisations sociales
Des comparaisons indispensables pour le choix de son statut
Droit annuel acquis auprès des retraites
complémentaires obligatoires pour une
rémunération brute de 100.000 €
Régime complémentaire
Arrco Agirc NRCO Total :
Salarié Comparaison des cotisations TNS et salarié
* En l’absence de couverture complémentaire ou conventionnelle
RSI
Rémunération brute
Cotisations sociales patronnales
Cotisations TNS
Coût total entreprise
Cotisations sociales salariales
Rémunération nette
Rapport rémunération nette/coût entreprise
180 €
852 €
468 €
1 032 €
468 €
Ces estimations sont théoriques dans la mesure où les niveaux
des retraites peuvent être amenés à baisser et les conditions de
retraite durcies.
38 %
32,5 %
18 %
Salarié*
TNS (RSI)
100 000 €
38 000 €
100 000 €
138 000 €
18 000 €
82 000 €
59 %
32 500 €
132 500 €
0€
100 000 €
75 %
Compte tenu de l’avenir incertain sur les régimes de retraite obligatoires, la solution TNS semble, à ce jour,
présenter le meilleur rapport qualité/prix (couverture/cotisation).
Compte tenu de cotisations obligatoires faibles, il permet de souscrire des couvertures facultatives
complémentaires, sur-mesure et adaptées, dès la création de son entreprise ou plus tard. A contrario, le dirigeant
qui ne pourrait pas souscrire de couvertures facultatives complémentaires, compte tenu de son état de santé,
devrait se tourner en priorité vers le statut de salarié.
du dirigeant
geant salarié ne cotise pas et n’a donc aucun droit.
En matière de couverture sociale, on peut relever
néanmoins des différences notables entre les
deux statuts.
Alors que les régimes sont alignés pour la couverture maladie/santé, la couverture prévoyance du
salarié (décès, incapacité, invalidité) est légèrement supérieure à celle d’un TNS3. Si la convention collective de l’entreprise, qui s’impose au
dirigeant salarié, prévoit des couvertures complémentaires, le dirigeant salarié est dans ce cas
largement mieux couvert que le TNS. Enfin pour
la couverture retraite, le régime de base des
Le statut de salarié est un statut au sens de la réglementation sociale
(couverture et cotisations sociales). Au sens de la réglementation du travail,
le dirigeant (peu importe son statut) n’est pas considéré comme salarié
ayant un lien de subordination.
3.
On notera que le TNS artisan ou commerçant affilié au RSI dispose tout
de même de revenus de remplacement en cas d’invalidité ou d’incapacité
proches de ceux d’un salarié. Le TNS profession libérale affilié à la CIPAV
ne bénéficie pas de ces revenus de remplacement mais peut disposer de
couvertures, en cas de décès, significatives.
4.
Valable pour les TNS artisans ou commerçants affiliés au RSI.
2.
n°78 |Novembre - Décembre 2012 - Janvier 2013
PAR
Thomas RONE
> Associé Responsable
du département
Gestion de Patrimoine
chez Exco Cap Expert
salariés et celui des TNS4 sont alignés. Quant au
régime complémentaire, le dirigeant salarié dispose
d’une retraite complémentaire (régime Arrco et
Agirc) très supérieure à celui d’un TNS. Pour
conclure, les cotisations sociales obligatoires pour
le dirigeant salarié sont très supérieures aux cotisations du dirigeant TNS (cf. tableau ci-dessous).
Le choix entre rémunération et
dividende
Si le dirigeant est associé ou actionnaire de l’entreprise qu’il dirige, sa rémunération est complétée
par les dividendes qu’il perçoit.
Dans les entreprises où le ou les dirigeants détiennent la totalité ou la quasi-totalité du capital, le
dirigeant aura intérêt à optimiser, au moment de
la clôture de son bilan, le couple rémunération
dividende5.
5.
Dans une société où le/les dirigeant(s) ne détiennent pas la quasi-totalité
des parts ou action, une telle optimisation n’est pas possible puisqu’il ne
dispose pas de la liberté de fixer sa rémunération et ne dispose pas de
l’intégralité du dividende que la société versera.
13
Stratégie du dirigeant
R É M U N É R AT I O N
Comparaison entre
dividende et rémunération
Dividende
Rémunération
Coût pour
l'entreprise
Le dividende subit l'IS + une
contribution additionnelle de 3 % *
(loi de finances rectificative 2012)
Coût pour
le dirigeant
Le dividende subit l’impôt sur le
La rémunération est imposable à
revenu au taux forfaitaire de 21 %
l’impôt sur le revenu à la tranche
ou au taux marginal après divers
marginale du barème progressif
abattements. (la prochaine loi de
finances risque d’augmenter
la fiscalité du dividende)
Le dividende subit les prélèvements
sociaux au taux de 15,5 %
Couverture
sociale
dirigeant
Le dividende ne permet de
bénéficier d’aucune couverture
sociale
La rémunération permet d’octroyer
une couverture sociale au dirigeant
Présentation
des comptes
La distribution d’un dividende
n’affecte pas le résultat de
l’entreprise (solution à privilégier
pour une entreprise devant
justifier de résultats : recherche
de financement)
Le versement d’une rémunération
diminue le résultat de l’entreprise
*
La rémunération subit les
cotisations sociales.
La rémunération et les cotisations
sociales sont déductibles du
résultat soumis à l’IS
Les PME au sens européen sont exonérées de cette taxation de 3 % (entreprise de moins de 250 salariés et dont le total bilan
est < 250 M€)
Si le dirigeant est TNS, il aura intérêt à opter pour
le versement d’une prime. Malgré le supplément
d’impôt sur le revenu et de cotisation TNS engendré,
la prime reste plus intéressante que le dividende
en présence d’un IS au taux de 33,33 %. La prime
versée génèrera des droits à retraite supplémentaire. À noter qu’en cas de durcissement de la fiscalité du dividende, le choix d’une rémunération
plutôt qu’une prime sera conforté. A contrario, si
le dirigeant est salarié, il aura intérêt à opter pour
le dividende. Toutefois, un durcissement de la
fiscalité du dividende pourrait remettre en cause
cette affirmation (cf. Illustration chiffrée p. 16).
Les rémunérations différées et/ou
défiscalisées
14
• L’épargne retraite : Le dirigeant d’entreprise a
la possibilité de mettre en place une épargne
retraite à son profit au sein de l’entreprise.
Le dirigeant TNS disposera du cadre fiscal
« Madelin » : la cotisation retraite « Madelin »
peut être payée par l’entreprise. Seul le dirigeant
profite discrétionnairement de cet avantage et
cette cotisation est déductible du bénéfice de
l’entreprise. Cet avantage en nature, contrairement à la rémunération, ne subit pas l’impôt sur
le revenu6 mais subit toutefois les cotisations TNS.
6.
Sous réserve de respecter les limites fiscales de 10 % de la rémunération
+ 15 % de la rémunération excédant 1 plafond de la sécurité sociale.
L’avantage n’est donc que fiscal. Les cotisations
versées sur ces contrats sont placées auprès
de l’assureur gestionnaire du contrat, elles sont
bloquées jusqu’à la retraite et sont liquidées, au
jour de la retraite, sous forme de rente viagère.
Le dirigeant salarié ne bénéficie pas du cadre fiscal
« Madelin ». Toutefois, on rappellera qu’il dispose
d’une meilleure retraite obligatoire que le TNS
(retraite Arrco et Agirc). Il peut également mettre
en place des contrats collectifs7, qui doivent s’appliquer à l’ensemble du personnel ou à un collège de
l’entreprise. Le collège « Cadre »8 peut permettre au
dirigeant de limiter cet avantage à lui seul et ses plus
proches collaborateurs. Cet avantage en nature est
déductible des résultats de l’entreprise et ne subit
pas l’impôt sur le revenu, dans la limite de 5 % de
la rémunération du bénéficiaire9. Il est exonéré de
cotisations sociales sauf la CSG CRDS de 8 % à la
charge du salarié bénéficiaire et sauf forfait social
de 20 % à la charge de l’entreprise. Comme pour
les contrats « Madelin », les sommes sont bloquées
jusqu’à la retraite et liquidées sous forme de rente
viagère. Le dirigeant salarié peut également mettre
en place une retraite chapeau, dont le cadre fiscal
a été et continue d’être fortement durci.
• L’épargne salariale : Le dirigeant peut également
déployer dans son entreprise une épargne salariale
(intéressement, abondement sur PEE ou Perco).
Cette épargne bénéficie, dans des conditions identiques, à l’ensemble du personnel de l’entreprise.
Tant pour le dirigeant TNS que le dirigeant salarié,
l’épargne salariale est déductible des résultats de
l’entreprise, exonérée d’impôt sur le revenu, dans
certaines limites, et, si les sommes sont bloquées
sur un plan d’épargne entreprise, exonérée de
cotisations sociales, sauf CSG CRDS de 8 % à la
charge du salarié bénéficiaire et sauf forfait social
de 20 % à la charge de l’entreprise. À la différence
de l’épargne retraite, les sommes issues de l’épargne
salariale sont disponibles immédiatement (mais
soumises à impôt sur le revenu) puis sous forme de
capital après un délai de blocage de 5 ans sur le
PEE10 (ou jusqu’à la retraite sur le Perco11).
• Les locaux de l’entreprise : Dans le cadre de
la constitution de son patrimoine, le dirigeant de
l’entreprise a souvent intérêt à acquérir personnellement, ou au travers d’une SCI, les locaux de
l’entreprise.

Article 83 du CGI.
Depuis la loi du 03/01/2012, le collège « Cadres dirigeants » a été
remis en cause.
9.
À noter que cette limite est très inférieure à celle du dirigeant TNS.
10.
À noter qu’il existe de nombreux cas de déblocage anticipé tel le
mariage, l’acquisition d’une résidence principale, le départ de
l’entreprise, etc.
11.
Plan d’épargne pour la retraite collectif.
7.
8.
Novembre - Décembre 2012 - Janvier 2013|
n°78
Stratégie du dirigeant
R É M U N É R AT I O N
 Contrairement à une rémunération, les loyers
encaissés par le dirigeant ne subissent pas les
mêmes charges fiscales et sociales. En effet, seul
le revenu foncier12 subit les prélèvements sociaux
au taux de 15,5 % et l’impôt sur le revenu. En
outre, de nombreux montages permettent
d’optimiser l’acquisition par le dirigeant de
l’immobilier d’entreprise.
Une différence significative provient du fait que
la rémunération du dirigeant est disponible alors
que le loyer est souvent utilisé pour le remboursement du crédit immobilier. Le loyer n’est donc
pas disponible. Il s'agit donc davantage d’une
optimisation de la constitution du patrimoine et
d’une charge pour l’entreprise, que d’une optimisation de la rémunération.
• Le véhicule du dirigeant : il peut être acquis
de deux façons.
Soit par l’entreprise, qui acquiert le véhicule et
prend à sa charge l’ensemble des frais. La TVTS
est due en fonction du type de véhicule (date
d’acquisition, puissance fiscale ou émission C02)
12.
Le revenu foncier correspond aux loyers encaissés, minorés des intérêts
d’emprunt et charges déductibles.
et la mise à disposition personnelle du véhicule
de l’entreprise constitue alors un avantage en
nature qui est soumis à cotisation sociale (TNS
ou salarié) et à l’impôt sur le revenu pour le
dirigeant.
Soit à titre personnel par le dirigeant, qui acquiert
personnellement le véhicule et prend à sa charge
l’ensemble des frais. Les kilomètres qu’il effectue
avec son véhicule pour le compte de l’entreprise
sont remboursés sous forme de remboursement de
frais (généralement sur la base du barème fiscal).
Les remboursements effectués par l’entreprise au
profit du dirigeant ne sont pas soumis à l’impôt sur
le revenu pour ce dernier. Le montant de la TVTS
est calculé selon le même barème qu’en cas d’acquisition par l’entreprise. La taxe est due à hauteur
de 25 %, 50 %, 75 % ou 100 % du montant ainsi
calculé selon que le nombre de kilomètres remboursés par la société est compris respectivement
entre 15 001 et 25 000, 35 000, 45 000 ou est
supérieur à 45 000. Le montant à verser fait
ensuite l'objet d'un abattement de 15 000 €.
Compte tenu de cet abattement, nombreuses TPE
et PME dont les voitures sont acquises personnellement par le dirigeant, ne sont pas soumises à
TVTS.
Le choix entre acquisition personnelle et acquisition par la société dépend de nombreux
facteurs : émission de CO2 du véhicule, nombre
de kilomètres parcourus par an (professionnel
et personnel), prix du véhicule, fiscalité du dirigeant, etc. Une simulation des impacts de
chaque mode d’acquisition permet de retenir la
solution la plus favorable.
L’optimisation de la rémunération est un art
complexe qui nécessite de simuler de nombreuses
variantes : coût pour l’entreprise, net disponible
et net différé pour le dirigeant, droit à retraite et
prévoyance induit, etc.
Il est nécessaire de chiffrer globalement l’ensemble des conséquences, et surtout celles
touchant à la couverture sociale (droit à retraite,
prévoyance) qui sont difficilement chiffrables et
souvent omises. ■
Dividende
Illustration chiffrée
16
Au moment de la clôture de son bilan,
le résultat provisoire d’une PME s’élève
à 100 000 euros. Le dirigeant, qui
détient 100 % de son entreprise, souhaite laisser 40 000 euros en réserve et
se verser le solde de 60 000 euros. Le
dirigeant hésite entre le versement
d’une prime ou d’un dividende.
Somme consacrée au versement
Impôt société
Contribution additionnelle de 3 %
Cotisation TNS
Cotisation Sociales (Patronnales)
Cotisation Sociales (Salariale)
CSG CRDS et Prél. Sociaux
Net perçu avant impôt
Impôt sur le revenu
Net perçu après impôts
60 000 €
– 19 998 €
0€
26 %
38 %
18 %
15,5 %
30 %
Prime
(le dirigeant est TNS RSI)
60 000 €
Prime
(le dirigeant est salarié)
60 000 €
– 15 600 €
– 22 800 €
– 10 800 €
– 6 200 €
33 802 €
– 5 169 €
44 400 €
– 11 988 €
26 400 €
– 7 128 €
28 632 €
32 412 €
19 272 €
Novembre - Décembre 2012 - Janvier 2013|
n°78

Documents pareils