Y`a-t-il une vie avant la mort ?

Transcription

Y`a-t-il une vie avant la mort ?
Je cherchais un beau titre pour ce recueil de nouvelles dont l’axe de réflexion générale tourne
autour du thème du sens de la vie. J’ai toujours du mal avec les titres ! Je veux à chaque fois une
expression qui résumerait le sens profond de mes pensées ou une formule définitive qui reflète bien
mes idées sous-jacentes. Généralement je finis par trouver une expression, parfois brillante, du moins
une solution s’impose à moi par delà toutes mes cogitations stériles. Là, pour une fois, j’avais trouvé
sans peine un titre accrocheur, un brin provocateur, lourd de sous-entendus, qui claque comme un sujet
du bac philo. Je l’avais déjà inscrit en haut de ma page, comme gravé sur le fronton d’une tour, à
l’adresse de mes innombrables lecteurs :
Y’a-t-il une vie avant la mort ?
J’aimais bien cette forme interrogative qui laisse ouvertes les portes du doute, titille le bons
sens et provoque le questionnement, sans toutefois garantir une réponse valide.
Las ! Par acquis de conscience je tape cette question magnifique sur un moteur de recherche
pour m’assurer de la paternité de ma création. Et patatras ! Quelqu’un a déjà utilisé mon remarquable
aphorisme ! Au voleur, à l’assassin, on m’a volé mon titre ! Ce philosophe ( ? ) a utilisé le plus vil des
stratagèmes, le plus bas des coups bas : pour s’accaparer la paternité de mon invention, et pour m’en
déposséder définitivement aux yeux du monde, il a édité son livre avant moi !!! Du plagiat par
anticipation : la hantise de tout écrivain sérieux et appliqué, l’arme absolue, imparable, qui auréole en
plus l’hypocrite d’une belle couronne d’innocence ! Quel scandale ! Et quelle déception… Pour la
peine, je ne lirai jamais son texte !
Et vous non plus j’espère ! Rendez-moi justice ! Lisez plutôt ce qui va suivre ! Le titre est
certes moins évocateur, son souffle poétique peut-être un peu moins puissant mais qu’importe le
flacon… Laissez-moi vous emporter dans les méandres tortueux de l’âme, dans les soubresauts
existentiels de vos pensées les plus secrètes, laissez-vous guider vers les abîmes qui structurent votre
cerveau profond, plongez dans les limbes éthérés qui déchirent vos délires les plus fous, venez
défricher les névroses qui encombrent votre moi le plus intime !
Etre ou ne pas être ? A quoi sers-je ? Pourquoi suis-je moi ?
N’est-ce point là un programme formidable ?
Si, comme moi, vous vous demandez quelle est votre place dans ce monde, si vous cherchez à
découvrir des indices pour éclairer votre lanterne quant à l’utilité de votre rôle ici-bas, si vous souffrez
d’être simplement un numéro ou un anonyme dans la foule et que votre quête reste vaine… bienvenue
au club !
J’ignore si ce modeste livret vous sera d’un quelconque secours dans votre cheminement
personnel, s’il apportera de l’eau à votre moulin. Ou pas… J’espère simplement que le partage de cette
expérience pourra vous apporter un peu de sérénité. Savoir que vous n’êtes plus seul dans ce tourment
n’allègera pas votre fardeau, mais au moins vous aurez eu le plaisir de découvrir… des nouvelles de
moi !
Brave Toutou !
Épuisé ! Je suis épuisé ! Pourtant je n’ai parcouru qu’une courte distance, à peine quelques
centaines de mètres. Mes pieds collent à la chaussée, comme si le goudron avait fondu sous l’effet de
la chaleur ou comme si je portais des semelles de plomb.
Au début j’ai trouvé ce phénomène curieux, rigolo même. Cette sensation me rappelait mes
promenades d’antan dans la neige jusqu’au genou. Je me suis vite accommodé de cette impression,
j’avais simplement ralenti mon pas et continué ma promenade le long de cette petite route tranquille.
Par chance personne n’avait pu me voir me déplacer de cette étrange démarche chaloupée.
Mais à présent je cours, du moins si on peut appeler courir la vitesse à laquelle je me déplace.
De fait je cours très lentement. A cause de cette sale propriété d’adhérence, je cours même de plus en
plus lentement. Et le monstre qui marche derrière moi en sifflotant, pour bien me rappeler sa présence
dans l’obscurité, me rattrape inexorablement !
La pauvre mouche engluée que je suis va se faire attraper par l’araignée.
*****
Quel cauchemar ! Je crois que j’ai crié. Tous ces efforts m’ont épuisé, je suis en nage. Fébrile,
j’ouvre dans le noir le tiroir de la table de nuit, en extrait une plaquette brillante, fait craquer la
pellicule d’aluminium. La pastille circulaire tombe dans la paume de ma main puis glisse dans le verre
d’eau ...

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