Elephant - Intranet | IUT de Troyes
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mardi 21 Octobre 2003 L'aboutissement d'un long processus de destruction LE MONDE | 21.10.03 | 15h01 C'est en ouvrant son poste de télévision que Gus van Sant a eu l'idée d'Elephant. Huit fusillades meurtrières se sont produites dans des lycées américains entre 1997 et 1999, mais c'est le massacre de Columbine (Colorado), le plus emblématique de cette triste série noire, qui a interpellé le cinéaste américain. Cette tuerie a déjà inspiré, en 2002, à Michael Moore Bowling for Columbine, un documentaire pesant et didactique. La Palme d'or 2003 du Festival de Cannes pèse d'un tout autre poids. Là où Bowling for Columbinen'offre que des réponses, Elephant ressemble à un sphinx. Le massacre de Columbine est replacé dans l'orbite du cinéma : un questionnement absolu, en regardant les faits dans leur brutalité souvent inexplicable, avec détachement et introspection, mystère et pondération. Il y a deux tragédies dans Elephant : la tuerie finale, connue de tous, et le drame qui commence bien avant la mise en marche du terrible mécanisme menant aux meurtres, par deux de leurs camarades, d'élèves de la Watt High School, immense école de Portland, ville où réside Gus van Sant. Une voiture avance en zigzag dans une avenue à moitié vide. Elle s'arrête péniblement. Le conducteur en sort pour remettre les clés à son fils, John. Le changement de siège est symbolique d'un père alcoolique qui vient de faillir à son devoir en laissant orphelin son enfant. QUAND LES PÈRES FUIENT L'horizon d'Elephant est défini par cette scène : une malédiction s'est, depuis longtemps déjà, abattue sur les élèves de la Watt High School, aboutissement d'un long processus de destruction plutôt que simple accident de l'histoire. Quand les pères fuient leurs responsabilités, les adolescents doivent abandonner une partie de leur enfance. Elephant est l'histoire de ce paradis perdu. John ne sait pas d'où il vient. Il ne sait pas non plus où il se dirige, une fois projeté dans les couloirs de son école. L'étrangeté du film provient d'un plan unique, répété à l'infini, comme un patineur qui accomplirait inlassablement sur la glace la même figure. John progresse au fil d'un travelling permanent, dans les corridors immenses de son école, semblables à ceux de l'hôtel Overlook du Shining de Stanley Kubrick, un hôtel Overlook qui serait peuplé de fantômes de premiers de la classe, de champions de football, de têtes de Turc, d'adolescentes boutonneuses, d'artistes manqués et de jeunes filles en quête du prince charmant. John est saisi de dos, et le spectateur le suit, telle une sangsue posée sur son épaule. La caméra de Gus van Sant est grippée, calée en boucle sur cette minute - l'arrivée de John, puis le ballet ordonné autour de sa personne - et s'autorise seulement à changer de point de vue. De John, on passera à Eli, d'Eli à Alex, et ainsi de suite jusqu'à ce que la catastrophe annoncée brise le ronronnement de la mise en scène. Les personnages changent, mais l'horizon reste identique. Il est celui d'une jeunesse qui avance au même rythme, possède une allure comparable, altière et princière, une aisance unique à se mouvoir dans les couloirs comme dans la vie. Et cette démarche, aussi séduisante soit-elle, masque une douleur et un mal de vivre que seul Gus van Sant semble en mesure de reconnaître. Il regarde avec une égale amertume tous ses personnages, empreints d'une langueur toute particulière, livrés à eux-mêmes, orphelins de l'intérieur au sens où l'on parle d'un exil intérieur. De ces mouvements filmés au ralenti naît un autre rapport à l'espace. Les couloirs de Watt High désignent une zone intermédiaire, un passage entre le Ciel et l'Enfer, entre la vie idéale que semblent partager ces collégiens et le cauchemar qui leur est promis. Elephant porte son nom à bon escient. Ce film a une mémoire. Son dispositif doit tout à un autre Elephant, réalisé par Alan Clarke en 1989, produit par la BBC (le film de van Sant est financé par la chaîne américaine HBO), à propos de massacres commis en Irlande du Nord. Un seul plan suffit pour saisir la gémellité entre les deux films. Dès sa première séquence, l'Elephantd'Alan Clarke montre un homme de dos, avec un pardessus, qui entre dans une maison et déambule dans ses longs couloirs pour tuer ses occupants. La scène dure trente-neuf minutes. Un homme toujours de dos. Des victimes, toujours dans un corridor. Et des meurtres à répétition, dont la tonalité dramatique est désamorcée, avec le même résultat que le film de van Sant : un temps suspendu, un espace labyrinthique. L'Elephant de Gus van Sant se situe donc dans la lignée du remake plan par plan de Psychose, qu'il avait réalisé en 1999, avec l'emprunt à l'identique d'un autre dispositif. La démarche du cinéaste américain n'est pas innovante mais mimétique. UNE ATTENTE DÉSAMORCÉE Ce choix d'une transposition formelle pour dépeindre un fait divers donne des résultats impressionnants. Gus van Sant cherche (et trouve) une solution plastique à un fait divers, là où d'autres se seraient perdus dans des digressions philosophiques ou sociologiques. En montrant de dos son personnage avançant dans le couloir, en créant un ballet hypnotique et reproductible à satiété, en plaçant le spectateur au cœur d'un dispositif infernal par l'utilisation de la caméra subjective, en lui interdisant du coup tout recul sur les événements, le cinéaste désamorce l'attente du spectateur, qui est celle d'un besoin légitime d'explications. Toutes les questions relatives à cette tuerie - la vente libre des armes à feu, l'engouement pour les jeux vidéo, la fascination pour l'imagerie nazie, l'absence des parents, la cruauté du milieu scolaire, la tristesse de la vie en banlieue sont intelligemment esquissées. Puis aussitôt abandonnées pour renvoyer à un cercle plus important de responsabilités qui, à des degrés divers, inclut le spectateur, les victimes de la Watt High School, et leurs bourreaux. Samuel Blumenfeld Film américain, avec Alex Frost, Eric Deulen, John Robinson. (1 h 21.) • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 22.10.03 mardi 21 Octobre 2003 "Elephant", la réalité brute selon Gus van Sant LE MONDE | 21.10.03 | 15h01 • MIS A JOUR LE 21.10.03 | 17h42 Après Michael Moore, le réalisateur de "Gerry" revient sur le massacre d'élèves dans un collège de Columbine (Colorado) par deux des leurs. Dans un entretien au "Monde", il explique en quoi le cinéma, pour trouver "vérité" et "authenticité", doit adopter de nouveaux codes narratifs. Certains de vos films précédents, will hunting ou a la re- cherche de forresternotamment, ont une approche très classique des jeunes héros. elephant, au contraire, refuse en bloc la psychologie... Gerry et Elephant sont une tentative de subvertir l'utilisation habituelle des techniques cinématographiques. Dans mes films précédents, la psychologie du personnage principal est à chaque fois l'élément fondamental qui donne sa forme narrative au film. L'histoire découle de la façon dont la psychologie du héros affecte son entourage. C'est la grande invention de Shakespeare. Depuis qu'il existe, le cinéma emprunte au théâtre sa forme narrative. Si l'on se rend compte que le cinéma prend le théâtre comme modèle, on voit que cette façon shakespearienne de raconter une histoire est la plus courante. Je dis Shakespeare parce qu'il est emblématique de l'époque où le théâtre s'est réinventé. Depuis, chaque aspect de l'histoire dépend de la psychologie d'un personnage principal. Mon désir est de me détacher du modèle théâtral grâce à la caméra. Je cherche à me débarrasser de la façon traditionnelle de raconter des histoires. C'est la direction que prend votre cinéma depuis Gerry (2002, sortie en France le 3 mars). Comment est né ce désir d'expérimentation ? Tous mes films jusqu'à Gerry sont très traditionnels. Ils racontent une histoire grâce à des outils cinématographiques mis au point au cours de la première moitié du XXe siècle. Peut-être peut-on trouver des traces de ma recherche actuelle dans Mala Noche, mais c'était l'adaptation d'un roman. My Own Private Idaho (1991) était plus audacieux dans sa forme, mais en même temps le film s'inspire de Shakespeare, ce qui rejoint ce que je disais sur notre dette collective envers le théâtre ! J'ai eu une démarche moins classique avec Psychose (1998), qui est une expérience d'un autre genre : la refabrication du film de Hitchcock. Elephant s'inspire d'un film éponyme du réalisateur anglais Alan Clark. La façon dont vous avez utilisé ce film est-elle comparable à votre travail autour de Psychose ? Non, parce que le film britannique m'a servi seulement pour deux aspects : son titre et le fait qu'il traitait d'un sujet tabou. En Angleterre et en Irlande, il était impossible de parler de la violence en Irlande du Nord, tout comme aux Etats-Unis la violence scolaire est totalement passée sous silence. Les films qui m'ont vraiment inspiré sont Satan Tango, de Bela Tarr, et Jeanne Dielmans, de Chantal Akerman. Pourquoi vous être détourné du cinéma narratif traditionnel ? Désormais, je m'intéresse aux choses comme elles sont, directement, et pas à leur mode de représentation. J'ai cela en commun avec les cinéastes du Dogme. Dans leur manifeste, ils rejettent les films de genre ou d'époque, les accessoires... Je me souviens des repérages de Drugstore Cow-boy : on trouvait un décor parfait, on s'extasiait sur la couleur des murs... et puis le décorateur repeignait tout, mettait des rideaux différents. Ce recours systématique à l'artifice mène à une uniformisation des films. Depuis le début, ce qui m'attire le plus, ce qui me paraît le plus mystérieux, c'est souvent ce qui est déjà là... L'apparition du Dogme m'a aidé à y attacher de l'importance. Il y a une valeur dans ce qui n'est pas travaillé au départ. Il faut saisir le monde à l'état brut. Avec ses longs travellings à la steadycam, Elephant instaure un rapport au temps spécifique, ancré dans le présent. Cela participe-t-il de la redéfinition du cinéma que vous recherchez ? Absolument. L'instant est l'unité temporelle du film. Elephant parle du présent. Il ne se déroule pas il y a dix ans ou dans dix ans. Le film cherche à saisir quelque chose qui se produit vraiment aujourd'hui. Le cinéma existe avant tout pour enregistrer le réel. Les frères Lumière filmaient pour montrer le présent, garder une trace de leur époque. Un plan de rue indienne tourné au début du siècle par exemple a sa propre valeur, comme un tableau. Il montre une véritable rue indienne, à tel moment précis. Quand la fiction intervient, quand on cherche à raconter une histoire, une dimension d'inexactitude s'insinue. Une production hollywoodienne qui reconstitue une rue indienne où se déroule une action jouée par Greta Garbo, cela nous fait entrer dans une dimension imaginaire, fantasmatique. Pour moi, la valeur essentielle du cinéma, c'est qu'il permet d'utiliser le présent, de le capter, d'en faire la matière du film. Le cinéma permet de faire le portrait d'une réalité. J'essaie d'explorer ce que l'on peut en saisir. Par exemple, j'ai pris pour interprètes de simples lycéens, avec leurs propres vêtements, leur façon de parler. Cela me paraît plus exact que d'écrire des répliques, de trouver des costumes et d'engager des acteurs. Je cherche une vérité, une authenticité. Comment la dimension spatiale structure-t-elle le film ? Dans Elephant, je travaille à relier les lieux entre eux. On utilise un grand nombre d'endroits différents du lycée, ce qui donne la sensation d'un espace global, de son architecture en somme. Dans n'importe quel film, le temps de trajet d'un lieu à l'autre est coupé. Pas pour des raisons proprement cinématographiques, mais à cause de codes théâtraux que le cinéma a intégrés. Au théâtre, évidemment, on ne peut pas montrer le trajet d'un lieu à l'autre. Il faut baisser le rideau pour un changement de décor. Le montage traditionnel au cinéma découle des coupures qu'impose le théâtre. On rapproche souvent le cinéma du roman, mais aucun roman n'est engoncé dans ce genre de contraintes. Le cinéma et le roman offrent une grande liberté dont le cinéma n'a pas encore pris la mesure. Qu'est-ce qui l'en empêche ? Le cinéma est encore dépendant de codes narratifs qui ont été inventés pour garantir sa réussite industrielle. Je le comparerais à l'automobile. Après tout, ce sont deux inventions de la révolution industrielle ! Les voitures sont des objets inadaptés au monde qui nous entoure, aux villes par exemple... mais on les utilise, pour des raisons économiques. Notre télévision et notre cinéma sont fabriqués et envoyés dans le monde exactement de la même façon que les voitures. Ils obéissent à une logique qui remonte à la révolution industrielle, qui est décalée par rapport à l'ère électronique. Plus nous avancerons vers l'électronique, plus les films devront prendre en compte l'interactivité, et adapter leur forme. On ne pourra plus présenter une histoire figée aux spectateurs. Propos recueillis par Florence Colombani • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 22.10.03 mercredi 22 octobre 2003 L'effet «Elephant» Par Gérard LEFORT Palme d'or à Cannes, le film de Gus Van Sant développe à partir d'un fait divers (la tuerie au lycée de Columbine) un dédale d'hypothèses empreint d'humanité. Première puissance d'Elephant : sa nationalité n'est pas un nationalisme. Il fait plutôt l'effet d'une plate-forme de forage au milieu d'un désert océanique, hors de toutes eaux territoriales. Sous le blindage d'une société singulière (les Etats-Unis), par-delà le microcosme d'une journée vaseuse dans un lycée quelconque, Gus Van Sant creuse jusqu'à atteindre des strates immémoriales. De ce magma matriciel, c'est de l'énergie fossile qui jaillit. Il ne s'agit pas d'arracher les racines du mal mais d'en faire la généalogie. Ce qui serait déjà beaucoup pour un seul film si sa façon n'était pas philosophique. Plutôt que théoriser ce que l'on sait déjà (le massacre du lycée de Columbine, fait divers qui, en 1999, bouleversa les Américains), Elephant entreprend de savoir comment, et jusqu'où, il est possible de filmer l'impensable. En l'espèce, un carnage sans raison fomenté par deux adolescents imperceptibles, qui plus est dans une école civilisée autorisant toutes sortes d'activités d'éveil, y compris celles qui consistent à glander ou à débattre de n'importe quoi. Ce qui ne veut pas dire que Gus Van Sant gare son Elephant sur le parking des poids lourds. Le film ne dit pas que ces jeunes assassins sont monstrueux. Mais il ne les disculpe pas pour autant du côté des saints innocents. L'héroïsation n'est pas son fort. L'hystérie non plus. Il n'est pas indifférent cependant, avec cette sorte de détachement savant qui transformerait le film en laboratoire et les personnages en rats. D'intimité. En quoi consiste la distance inventée par Van Sant ? Avant de nous arriver, comme on dit d'un accident qu'il nous arrive, Elephant est un film qui est arrivé à Van Sant lui-même et l'a plongé dans l'état afférent : stupeur et tremblement. Elephant est un film qui souffre de la souffrance qu'il porte. Ce qui ne l'empêche pas de batailler sur le sens et la morale de cette catastrophe. Parce qu'il est intelligent, il nous suppose perspicace et, de ce fait, ne néglige aucune explication. De sa boîte, tous les outils surgissent : la société dans son rôle coutumier de sorcière fautive et, à son bras, telle la reine de la nuit, la psychanalyse. Avant de tuer, les deux garçons s'embrassent sur la bouche et s'enlacent sous la douche. C'était donc ça ! Mais que reste-t-il quand, ayant épuisé tous les marteaux pour enfoncer les mêmes clous, il n'y a plus que ça, justement ? Il reste la boîte, vide d'outils signifiants mais toujours aussi pleine de sens ténébreux. Un éléphant, c'est vrai, ça trompe énormément. Voilà ce que le film découvre en se débarrassant de ses amulettes : qu'il n'y a ni au-delà (vérité ultime), ni en deçà (trésor sémantique enfoui), rien que du plein, de l'intimité. Elephant est un film qui, sans cesse, se rapporte à lui-même dans sa manière archéologique de procéder : se faufiler dans des couloirs, visiter tous les recoins, même les plus organiques. Découvrir sur le sol d'autres empreintes que les siennes et, sur les parois du film, dans le faisceau de la caméra, des fresques abstraites, des hiéroglyphes. Autant de signes qui, d'ordinaire, nous arrêtent et nous plantent, et qui mettent le film en mouvement. Revenir sur ses pas, tourner en rond. Réaliser, infatigable, qu'au fond de chaque impasse le mur sonne creux. On perce. De l'autre côté, une nouvelle pièce, déserte. Et ainsi de suite jusqu'au massacre terminal, le cimetière, un tombeau, vide lui aussi. Gus Van Sant filme ce vagabondage comme on drague, au pied du désir, dans son affolement même. Un jeune homme bien dans sa peau de photographe amateur, une jeune fille mal dans sa graisse, un blondinet content de sa frange. Parfois, ils ont un prénom, inscrit au tableau noir (John, Elias, Michèle, Alex, Eric...), et semblent gagner ainsi leurs galons de personnages. Pourtant, la typologie du film n'est pas celle des psychologies mais des signes extérieurs d'humanité : le photographe est gentil, Blondinet est bon fils, les assassins se tiennent bien à table et Michèle est belle puisque Van Sant a la délicatesse de filmer cette grosse fille comme si elle était Marilyn Monroe. Le cinéma de Van Sant se permet ce que la vie autorise : s'intéresser au commun des mortels, scruter et aimer leurs singularités (un bracelet en fourchette recourbée au poignet d'Elias, un bouton d'acné sur la joue d'Alex, le tee-shirt jaune de John), changer de désir à tout bout de plan, à la moindre intersection. Au risque de se perdre lorsqu'au bord du cadre d'autres occasions surgissent : sur un banc, à la volée, un homme découragé. Elephant n'est pourtant pas une filature. Pour preuve cet instant littéralement fantastique où l'un des deux tueurs, censément traqué par le film, se masse soudain la nuque comme si le moustique de la caméra venait de le piquer. De fait, synchrone avec cet agacement, la caméra s'écrase et laisse la silhouette du jeune homme s'évaporer dans le flou. Des géographies. Ce qui est sidérant dans ces exercices de contemplation, c'est que les mouvements de l'image sont ceux de la pensée : sur ces histoires emmêlées, les géométries s'entrecroisent (un cercle en dents de scie) et toute sorte de géographies se superposent. Vu d'avion, le plan du film est un plat de spaghettis, mais, le nez dans l'assiette, c'est du vomi. Cette multiplication des points de vue indique non seulement que, sur une pareille «affaire», il n'y a pas de point de vue dominant, mais que chaque point de vue ouvre sur son contraire contrariant : la folie sur la raison, le crime sur la loi. Mais le sens ? Accident de la circulation sur la terre, carambolage de nuages dans le ciel. Coup de feu au réfectoire, coup de tonnerre dans l'azur. C'est le même univers. Un univers en écho dont le criminel comme la victime, suspendant un instant leur déambulation fantomatique, semblent parfois humer la rumeur. Un monde où il peut arriver qu'un éléphant, subjuguant les lois de la pesanteur, se mette à voler.