«Ma peinture est une recherche de sens!»
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«Ma peinture est une recherche de sens!»
Les Acteurs de l’Immobilier Janos Urban «Ma peinture est une recherche de sens!» Il est l’un des grands artistes suisses contemporains. D’origine hongroise et réfugié à Lausanne après l’écrasement de la Révolution anticommuniste de 1956, Janos Urban poursuit à 75 ans, avec la même force créatrice, une œuvre profonde qui ne cesse d’interroger l’homme, la vie, la tragédie, l’espoir… «J’ai accroché, dans mon salon, ce tableau que j’ai fait l’année dernière. Il me représente avec ma sœur, pendant les bombardements américains sur notre village en Hongrie, en 1944. J’avais 10 ans et la guerre m’a beaucoup marqué: c’est le trésor où je puise mon inspiration, ma peinture. Sur ce dessin, le jaune et les couleurs expriment l’espoir, tandis que tout ce blanc, c’est les sous-sols blanchis des abris antiaériens, c’est le néant». 72 N U M É R O 2 0 D É C E M B R E 20 0 9 - F É V R I E R 2010 73 Les Acteurs de l’Immobilier «Je travaille à l’atelier tous les matins, de 10 heures jusqu’à midi. Deux heures, c’est déjà beaucoup! J’ai commencé un portrait: j’ai posé bien sûr le jaune, ma couleur préférée, et son complémentaire, le violet. J’ai aussi mis en place les structures verticales du dessin… Je continue demain». 74 N U M É R O L’ artiste est accueillant, généreux, heureux de recevoir. Un appartement tranquille et lumineux au centre de Lausanne, des tableaux sur tous les murs, des bibliothèques un peu partout… A 75 ans, Janos Urban a toujours le feu sacré, le même besoin de créer. «Je suis un homme joyeux, s’exclame-t-il, car je crois depuis toujours à la perfectibilité de l’homme». Né en 1934 à Szeged, dans le sud de la Hongrie, il a pourtant été rattrapé 2 0 Les Acteurs de l’Immobilier par la guerre à 10 ans avant de devoir fuir son pays à 22 ans, lors de l’écrasement dans le sang de la Révolution hongroise par ces chars soviétiques qui, comme disait Soljénitsyne, «connaissaient la vérité». Réfugié à Lausanne, Janos Urban acheve ses études à l’Ecole cantonale d’art, puis devient professeur. Des expositions dans le monde entier pendant des décennies, consacrées l’an dernier par une grande manifestation au musée Arlaud, à Lausanne, et par la publication d’une monographie remarquable dans la collection Vie Art Cité, aux éditions LEP. «Je suis né en 1934 et Hitler venait d’arriver au pouvoir, explique-t-il. La guerre m’a beaucoup marqué. Elle m’a posé des questions sur la vie auxquelles je réfléchis toujours. Je me rappelle un groupe de soldats allemands déchiquetés par l’obus d’un char russe, mais aussi la gentillesse de ces soldats russes avec lesquels j’ai partagé un bortsch. La guerre, c’est là que je puise ma peinture!». Inspiration tragique, mais peinture joyeuse! Car Janos Urban a beau être et demeurer hongrois, il ne s’abandonne pas à ce désespoir et ce sens de l’absurde que l’on prête volontiers aux Européens de l’Est. «Je crois dur comme fer à la perfectibilité de l’homme, précise-t-il. J’ai aussi beaucoup appris sur le psychisme et la psychologie humaine en lisant et en relisant les livres juifs, le Talmud, le Zohar. J’aime ce questionnement obstiné sur la finalité de la vie humaine». Sa couleur préférée aujourd’hui: le jaune. «C’est le soleil, c’est la lumière, je commence toujours par le jaune. J’aime aussi le rouge, qui dégage beaucoup de force, qui incarne l’espoir. C’est la couleur du karma! Par contre, je ne mets jamais de noir, je déteste le noir». Une peinture de la vie et de l’intériorité! n Un autoportrait au Musée des Offices à Florence Il est entré au musée, et dans n’importe lequel: le Musée des Offices à Florence! Depuis le mois de mai dernier, Janos Urban figure partie des artistes exposés en ce lieu prestigieux. Un autoportrait d’une rare puissance, qui baigne dans ses couleurs de prédilection, le jaune évidemment, le violet, le rouge… Le tableau avait été exposé l’an dernier au musée Arlaud, à Lausanne, lors de la grande exposition consacrée à l’artiste, avant d’être acquis par le musée florentin. «Le directeur des Offices a organisé une petite cérémonie le 25 mai dernier, explique Janos Urban. J’adore l’Italie et je souhaite être enterré à Rome, dans les catacombes. Mais ma femme, qui est artiste aussi, ne veut pas». François Valle Autoportrait, 120 cm x 90 cm, huile sur toile. D É C E M B R E 20 0 9 - F É V R I E R 2010 75