Parrainer un enfant, un geste d`amour Parrainer un enfant

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Parrainer un enfant, un geste d`amour Parrainer un enfant
Janvier
2 0 02
N r. 16 5
Association d’entraide pour le Sahel
Parrainer un enfant,
un geste d’amour
Dans cette édition
✦ Donner un avenir
à un enfant
✦ Les enfants des rues
✦ Action famine:
des vies sauvées
www.morija.org
Sommaire
Editorial:
Plus jamais
comme avant
«J
e n’arrive pas à y
croire, ça n’a pas
pu arriver. Pas à
eux, pas à nous!», a-t-on pu
entendre après les attentats
qui ont frappé New-York et
Washington le 11 septembre
dernier. Après l’horreur et
l’émotion, le déni s’est alors
fait une place de choix dans la
conscience collective d’une
société qui refuse de se
demander pourquoi on en est
arrivé là, de peur de devoir
repenser son fonctionnement
et les valeurs sur lesquelles elle
s'est fondée.
Pourtant, rien n’est et ne sera
jamais plus comme avant.
Les frontières entre un monde
où tout a été conçu pour nous
rendre riches – donc heureux
– et les nations moins bien
loties se sont amenuisées en
ce jour du 11 septembre.
La guerre, la misère, la terreur
se sont soudain faites
étrangement proches de nous.
Ce même jour, 30 000 enfants
sont morts de faim dans le
reste du monde. Une réalité
quotidienne qui désormais
nous frappe de plein fouet et
face à laquelle on n’a plus le
droit de se montrer insensible.
L’injuste écart entre eux et
Le parrainage d’enfants, un
soutien qui a fait ses preuves
(page 3)
Dans la rue
malgré eux (page 5)
nous paraît soudain bien
menu. 13 milliards de dollars
seraient nécessaires pour
rétablir la justice et répondre
aux besoins sanitaires et
nutritionnels de base de la
planète. Ce même montant
est également celui que l’on
dépense annuellement en
Amérique et en Europe pour
l’achat de parfums et de
cosmétiques. L’idée n’est pas
de se culpabiliser, mais de
commencer à réaliser la
formidable opportunité que
nous offre cette brutale réalité.
La justice peut être rétablie,
si chacun fait sa part, même
depuis ici, en partageant
un peu de ce «trop» qui fait
pencher la balance du
mauvais côté.
Morija propose d’agir dans
ce sens en parrainant un
enfant, afin qu’il puisse
regarder son avenir en face
et avec espérance. Rappelonsnous, en cette veille de fêtes
de fin d’année, que JésusChrist lui-même est venu
rétablir la justice entre Dieu
et nous, simplement par
amour. Osons en faire autant.
Les résultats
de l’action famine (page 6)
L’équipe de Morija
But: Aide aux plus déshérités d’Afrique, du
Sahel en particulier, sans distinction de race
ou de religion.
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A vous de voir! Merci
d’avance de votre générosité.
Le parrainage d’enfants,
un soutien qui a fait ses preuves
A
u-delà de délier les
cordons de sa bourse,
le parrainage implique une prise de conscience
du donateur, qui souvent a
réalisé combien la vie d’un
enfant du Sahel est compromise par la pauvreté, la
famine, le sida, les maladies
ou le décès de ses parents.
Un parrainage assure la
couverture des besoins
vitaux: nourriture,
vêtements, écolage, soins
médicaux.
Il faut savoir que cette prise
en charge sera plus coûteuse
si le pays est en guerre, et
bien sûr si l’enfant souffre de
problèmes de santé, de
handicap, ou s’il est un
orphelin abandonné qu’un
centre doit recueillir.
Le donateur peut fixer luimême le montant de son
parrainage, ou s’en remettre
à Morija. Le tableau ci-dessous vous donnera une idée
du coût effectif que nécessite
la prise en charge d’un petit
déshérité. Pour Morija, les
parrainages sont un soutien
financier régulier et indispensable, sans lequel la continuité de son action au Sahel
n’est pas garantie.
Il n’y a pas de parrainage
nominatif à Morija. Ce choix
s’explique par deux aspects:
premièrement, le suivi par
correspondance et nouvelles
d’un enfant requiert beaucoup de moyens administratifs et financiers; deuxième-
La vie d’un enfant au Sahel est si compromise
Estimation des coûts mensuels
nécessaires pour sauver un enfant
Scolarisation d’un enfant
Séjour et suivi d’un enfant au CREN
Soutien et scolarisation d’un enfant
Soutien et soins d’un enfant handicapé
Soutien d’une école de brousse
(100 enfants)
Formation d’un apprenti cordonnier
Formation d’un apprenti
menuisier–ébéniste
CHF
CHF
CHF
CHF
20.–
30.–
50.–
100.–
€ 13.–
€ 20.–
€ 33.–
€ 66.–
CHF 125.– € 83.–
CHF 200.– € 133.–
CHF 330.– € 220.–
ment, il s’agit d’éviter les
discriminations dans les
centres sur place, entre ceux
qui auraient la chance d’être
parrainés et d’autres laissés à
leur sort.
Un parrainage, c’est véritablement s’impliquer en faveur
du sauvetage d’un enfant qui,
sans cet appui, serait voué à
une rapide déchéance,
ou à mendier dans la rue
(voir articles p. 5).
Les résultats de cette action
sont vraiment réjouissants:
des enfants voués à la mort
«ressuscitent» et deviennent
de beaux jeunes hommes,
comme Boureima, dont les
photos en page 4 parlent
mieux que les mots.
Parrainer un enfant, c’est lui donner
un avenir
Parrainer un enfant,
c’est véritablement
s’impliquer en faveur de
son sauvetage
3
La lettre de Boureima
Boureima à son arrivée au CREN
de Ouagadougou
4
Lorsque Boureima est arrivé
au CREN (Centre de récupération et d’éducation
nutritionnelle) de Ouagadougou au Burkina Faso, il
avait 4 ans et ne pesait que
6,5 kg, soit le poids normal
d’un bébé de 5 mois. Il était
mourant, affamé, les yeux
hermétiquement clos – par
avitaminose – et incapable de
se tenir debout. Il mourait
non seulement de faim, mais
aussi de soif.
Comment a-t-il pu en arriver
là? Cinq mois auparavant,
Boureima avait contracté la
rougeole, et n’avait pu
totalement récupérer. N’ayant
plus d’appétit et plus de
forces, son état s’aggravait
rapidement. Pour sa mère,
l’état de ce garçon était
désespéré ; de plus, elle avait
un bébé de deux mois qui
réclamait toute son attention.
Cependant, comme Boureima
était le seul fils de la famille,
ses parents se décidèrent à
l’emmener au centre. Là, il
prit 3 kg en 10 jours, reçut
un traitement pour ses yeux,
des antibiotiques et des
vitamines. Ses parents
reprirent courage. Et voici la
lettre que Boureima a tenu à
adresser à Morija, quatorze
ans plus tard:
«Je viens par ces quelques
mots vous dire un très grand
merci pour tout ce que vous
avez fait pour moi. Oui, ce
petit atteint de grave malnutrition que vous avez bien
voulu secourir, qui a échappé
à la mort grâce à vos bons
soins, c’est moi! Je vous
renouvelle toute ma reconnaissance. Je me porte bien et
vous souhaite de même.
Papa, maman et tous mes
frères se joignent à moi pour
vous dire merci, merci
d’œuvrer pour la survie
A sa sortie du CREN, Boureima accompagné de sa mère
des enfants: j’ai dix-huit ans
aujourd’hui, et si j’ai pu les
compter, c’est grâce à vous
tous.»
Ce petit qui a échappé à
la mort grâce à vos bons
soins, c’est moi!
Boureima aujourd’hui
Dans la rue malgré eux
Groupe d’élèves coraniques avec leur sébille
D
Il y a parfois des rafles,
et ces enfants sont jetés
en prison
ans les villes, beaucoup d’enfants mangent, dorment et
reçoivent leur éducation dans
la rue. Si certains d’entre eux
l’arpentent sous la couverture
d’élève coranique – récitant
des bribes du Coran dans un
arabe peu convaincant – la
plupart y sont forcés par leur
situation: leur foyer parental
a éclaté suite à un divorce,
une répudiation ou un décès;
leur famille est trop pauvre
ou trop nombreuse; leurs
parents les ont abandonnés
ou sont morts; ne trouvant ni
sécurité ni nourriture affective dans leur famille, ils ont
quitté leur village en espérant
trouver du travail en ville. Le
sida a encore accentué ce
phénomène. Paradoxalement,
même si la plupart sont des
enfants de pauvres, on y rencontre également quelques
enfants de riches.
La journée, ces enfants circulent, bousculent, mendiant
ou exerçant de petits métiers
: cireur, vendeur de journaux,
de mouchoirs en papier,
d’arachides, de chewinggums,
etc. Le soir, ils se regoupent
pour dormir, certains à même
le sol, d’autres sur des bouts
de carton dont ils se recouvrent lorsqu’il fait froid.
De petits délinquants tirent
de maigres revenus sur
le dos des plus petits. On ne
descend pas dans la rue par
gaieté de cœur, mais par
contrainte. Un de ces jeunes
m’a confié: «Je préfère
mendier plutôt que voler!»
L’Etat, tout en essayant
d’interdire la mendicité, n’a
pas les moyens de prendre en
charge ces enfants. Il y a
parfois des rafles, et certains
sont jetés en prison pour un
temps ou placés de force dans
des centres où ils doivent
travailler et apprendre. Alors,
pendant un certain temps, on
voit moins de gamins dans
les rues et les carrefours.
Le besoin de structure et
d’encadrement est énorme.
Seul un petit nombre d’enfants des rues est pris en
charge. Une équipe de la SIL
(Société Internationale de
Linguistique), par exemple,
envoie à l’école ceux qui sont
capables d’y aller, organise
des ateliers et des activités
pour lutter contre le désœuvrement. Chaque année,
une vingtaine d’entre eux
sont inscrits dans un camp
chrétien, et certains trouvent
un nouveau sens à leur vie
Guétaouendé Sawadogo
et Janine Kappeler.
Halassan, un enfant de la rue d’Ouagadougou
Halassan a dix-sept ans, mais
on ne lui en donnerait que
quatorze. Il traîne dans les
rues du marché, tous les
jours, du matin au soir,
depuis plusieurs années.
Il connaît toute le monde et
tout le monde le connaît.
Il vend des sacs en plastique
aux acheteurs fortunés et
porte la marchandise jusqu’à
leur voiture. Il se fait assez
d’argent pour manger et cela
lui suffit.
Halassan
Halassan a un père, une
mère, une famille, mais
l’école ne lui a pas convenu :
il faut dire que les classes
peuvent atteindre 120 élèves
et qu’elles sont souvent
dirigées par des maîtres qui
ont appris sur le tas, après six
ans d’école primaire…
Tous les soirs, Halassan
rentre dormir à la maison.
Il semble content de son sort,
mais qu’adviendra-t-il
de lui plus tard?
Janine Kappeler
5
Les résultats
de l’action famine
Rapport de situation d’urgence «Famine»
Le produit de l’action s’élève à CHF 124 559.–/€ 36 666.–
Aide d’urgence:
Centres de récupération nutritionnelle:
CHF 55 000.–/€ 36 666.–
CHF 69 559.–/€ 46 373.–
Bénéficiaires de l’aide
d’urgence 6477 personnes
Orphelins, personnes âgées, handicapés,
lépreux, prisonniers (540)
20%
8%
Nécessiteux enfants hospitalisés (4657)
Familles nécessiteuses avec un orphelin
à charge (1280)
72%
Céréales distribuées (mil, sorgho, maïs, riz): 93 000 kg
Au SMI d’Abéché (Tchad)
L’aide est donnée en priorité aux grands-mères
(PMI Koumra)
Au PMI de Koumra (Tchad)
Le PMI s’est engagé depuis onze ans à être
un appui pour les orphelins de mère.
La majorité d’entre eux viennent de
milieux fort démunis. L’aide en céréales
est donnée en priorité aux grands-mères
obligées de rester à la PMI, car ce sont
elles généralement qui ont la charge des
orphelins.
Il y a également des mamans venues pour
leur enfant, car elles n’ont aucun appui
de leur village. Le mari ayant généralement deux femmes et plusieurs enfants
à charge, sa deuxième femme et son nourrisson malade passent après les autres.
Notre équipe tchadienne a créé une petite
caisse: chacun y met selon ses possibilités.
J’ai été très touchée par leur propre main
tendue pour les leurs.
Lydie Legrand
2001 a été une dure année pour la population de l’Ouaddaï. Morija a pu apporter
une aide conséquente de CFA 9 000 000.–
(CHF 22 500.–/€ 15 000.–) pour acheter du
mil pour les démunis.
Sur le marché régulier, le prix d’un sac de
mil de 80 kg pouvait grimper jusqu’à CFA
41 000.– (CHF 102.50/€ 68.33). Un tel sac
nourrit une famille de 5 à 7 personnes
pendant un mois, mais le revenu mensuel
est d’environ CFA 40 000.- (CHF 100.–/
€ 66.60).
Nous avons pu acheter environ 320 sacs
entre CFA 25 000.– et 36 000.–, et nourrir
ainsi 160 familles. En septembre, et malgré
des pluies qui laissaient présager de bonnes
récoltes, le prix du mil était encore le
double de celui d’une année normale.
Doris Lotz
En attendant la distribution à Abéché
Au CREN de
Ouagadougou
(Burkina Faso)
Cette année, le besoin en
céréales s’est fait ressentir
plus que les années précédentes. Nous avons eu une
rupture pendant deux mois,
et pendant une période, nous
avons été dans l’obligation de
diminuer les quantités distribuées afin de pouvoir tenir
plus longtemps. Nous limitons notre aide aux enfants
ayant séjourné au CREN, et
cela pendant douze mois
après leur sortie. Nous avons
en moyenne 145 enfants par
mois. Que la famille soit
nombreuse ou petite, les
vivres sont destinés à nourrir
seulement l’enfant anciennement malnutri: 5 kg de mil
par enfant et par mois.
Souvent nous recevons
des personnes envoyées par
l’action sociale pour une
aide humanitaire, mais
malheureusement nous
ne disposons pas de
suffisamment de céréales
pour en faire profiter des
gens qui n’ont pas été
internés au CREN.
La famine dans notre
région a été plus grave
que le gouvernement
ne le prévoyait.
La récolte sera probablement meilleure en 2001.
La région sud-ouest
a eu une bonne pluviométrie,
mais beaucoup d’autres
manquaient encore de pluie
à fin septembre.
Au CSO de Kaya (Burkina Faso)
Distribution de vivres au CSO de Kaya
Prévoyant la famine, le CSO
a pu acheter des sacs de mil
lorsque les prix étaient encore raisonnables, puis des
sacs supplémentaires en considérant l’ampleur du problème. L’aide a couvert plus
de 27 000 rations d’homme.
La souffrance des gens a été
dure et longue. Chaque jour,
nous avons vécu les mêmes
scénarios et les mêmes misè-
res, car certaines personnes
ne viennent demander de
l’aide que lorsqu’elles sont
vraiment au bout du rouleau.
C’est grâce à vous que nous
pouvons faire quelque chose,
essuyer les larmes, réconforter, aider ceux qui sont dans
la peine. Toute cette nourriture donnée a sauvé des vies.
Guétaouendé Sawadogo
Au CREN de Nobéré
(Burkina Faso)
Bien que notre province
du Zoundwéogo bénéficie
généralement de bonnes
récoltes, l’année 2001
a été difficile, et l’aide des
organismes a été nécessaire.
Morija a mis à disposition
du CREN une somme
qui a permis de soutenir
569 enfants malnutris.
L’état des cultures à fin
septembre laissait présager
de bonnes récoles dans notre
province.
Yvonne Zouetaba
Un enfant malnutri
Gédéon Kaboré
7
J’avais faim, et vous
m’avez donné à manger
J’avais soif, et vous
m’avez donné à boire
J’étais étranger,
et vous m’avez recueilli
J’étais nu,
et vous m’avez vêtu
J’étais malade,
et vous m’avez soigné
Matthieu 25, 35
De tout cœur, merci!
«J
e voudrais avec
reconnaissance
vous remercier
pour tout le travail fait dans
notre pays du Tchad et partout au Sahel. Grâce à votre
association, beaucoup de vies
ont été sauvées de la mort. Je
reconnais avoir, moi aussi,
bénéficié de vos dons, car j’ai
été un cas… pour dire tout
court, un orphelin de mère.
Comment ne pas vous
remercier?
Aujourd’hui, je fais des études
en électronique au Nigeria
et je suis très content. Ici,
la vie devient de plus en plus
difficile, mais je sais que je
pourrai m’en sortir. Ainsi, me
joignant à tous les orphelins
de Koumra, de N’Djaména et
les femmes des PMI et CREN,
je voudrais simplement vous
dire un GRAND MERCI.»
Frédéric Madjambaye
En leur nom à tous, nous vous souhaitons
un JOYEUX NOËL et UNE BONNE ANNÉE!
L’équipe de Morija