fiducie et trust. - TICE
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Personnalité morale, patrimoine d’affectation, fiducie-sûreté en droit français et américain : (3-b) : L’affectation patrimoniale : fiducie et trust. • Un des éminents spécialistes du trust, D. J. Hayton, le définit comme « l’ange gardien de l’anglo-saxon ». • F. W. Maitland, historien du droit a pour sa part écrit que si on demandait aux anglais quelle était la plus grande des idées qu’ils aient donné au monde, il n’y aurait de meilleure réponse à cette question que le développement, au fil des siècles de l’idée de trust. • C’est dire si l’institution joue un rôle important dans les systèmes de Common Law. • Aux Etats-Unis, les dispositions relatives au trust ont fait l’objet, pour la première fois, d’une codification à l’échelon national (= fédéral), regroupant les principes communément adoptés par la Common Law en la matière, proposée par The National Conference of Commissioners on Uniform State Law. * C’est ainsi qu’en 2000, un code, intitulé Uniform Trust Code (connu sous l’acronyme UTC) a été proposé aux différents Etats américains qui ont ainsi été libres d’en adopter ou non les dispositions. * A ce jour, environ 25 Etats ont adopté (on pourrait dire transposer) en tout ou partie les dispositions contenues dans ce UTC. * Il convient toutefois de noter qu’en dépit de cet effort d’harmonisation, de nombreuses différences existent encore aujourd’hui dans les Etats. * On relèvera encore que depuis un siècle et demi, les juristes américains ont marqué une très nette préférence pour les dispositions applicables en la matière dans l’Etat du Massachussetts. (C’est l’équivalent du Delaware en droit des sociétés !). I. Définition du trust • Afin de bien comprendre le trust anglo-américain d’une manière générale, il convient préalablement de bien avoir à l’esprit que la conception de Common Law de la structure du droit de propriété est fondamentalement différente de la conception romano-germanique. • Rappel : droit civil : division du droit de propriété : usus, fructus, abusus = pleine propriété. • Dans les pays de Common Law se juxtaposent : * 1° La propriété juridique = legal ownership = le pouvoir d’administrer les biens et d’en disposer librement. * 2° La propriété économique = equitable ownership = le pouvoir exclusif de prétendre au profit et à l’usage des biens. • Définition : un mécanisme tripartite de droit anglo-américain appartenant à l’Equity, par opposition au Common Law1 et pour lequel il n’existe aucune définition légale. * Peut néanmoins se définir comme l’acte par lequel une personne (le settlor) transfère des biens à une autre personne (le trustee), opour qu’elle l’administre ou en dispose d’une manière déterminée, en faveur d’un ou plusieurs tiers (le ou les bénéficiaires). * Le settlor (ou bien encore grantor) = le ou les fond ateurs qui sont propriétaires des biens et qui décident de leur mise en trust. = constituant en droit français. * Le trustee = s’agissait initialement des personnes physiques mais aujourd’hui sont de plus en plus fréquemment des personnes morales qui ont précisément la création et l’administration de trust pour objet. → MAIS les biens mis sous trust n’entrent pas dans le patrimoine du trustee. Ils constituent une masse indépendante, seulement disponible au profit des bénéficiaires. * Le ou les bénéficiaire(s) = bien évidemment choisis par le settlor qui peuvent naturellement figurer au nombre de ces bénéficiaires. • Le trust aboutit ainsi à la séparation de la gestion et le contrôle des biens de la jouissance des profits qu’ils procurent. * Le trustee tient du settlor ce que l’on qualifie de « legal ownership », c'est-à-dire le pouvoir d’administrer les biens mis en trust et d’en disposer librement. * Le bénéficiaire, pour sa part, détient l’ « equitable ownership » , c'est-à-dire le pouvoir exclusif de pouvoir prétendre au profit et à l’usage des biens mis en trust. • On observera que si le trust est une opération juridique triangulaire, la Common Law l’envisage différemment, puisque la plupart des définitions jurisprudentielles ne mentionnent jamais le settlor/constituant. • Ce que le trust n’est pas : * Le trust n’est tout d’abord pas un contrat. Il résulte en effet d’un engagement unilatéral du constituant, qui transfère une partie de ses biens à un tiers, le trustee, ce dernier les utilisant au profit de bénéficiaires ou dans un but précis. Au contraire, le contrat nait d’un accord de volonté entre les parties par lequel chacune s’engage à fournir une contrepartie à la promesse de l’autre. Le contrat donne naissance à des droits personnels d’une partie envers l’autre, alors que le trust créé un droit réel, un droit de propriété équitable au profit du tiers. Par ailleurs, dans le contrat, l’objet est transféré du patrimoine de l’une des parties dans le patrimoine de l’autre partie alors que dans le trust, le bien transféré par le constituant n’entre pas dans le patrimoine personnel du trustee. * Le trust se distingue ensuite du prêt à usage et du dépôt même s’ils présentent certains points communs. Dans les deux cas, un bien est transféré d’une personne vers une autre dans 1 Le terme « Common Law » s’oppose à l’ « Equity », c'est-à-dire le droit issu des décisions d’un groupe séparé de tribunaux qui se sont développés sous le contrôle du King’s Chancellor (et ainsi connu sous l’expression ème ème « Chancery Courts » ou « courts of equity ») et qui se sont développés de la fin du 14 siècle/début du 15 ème ème siècle (alors que les King’s courts étaient établis depuis le 11 siècle) jusqu’à la fin du 19 siècle. le cadre d’une relation fiduciaire. Ceci étant dit, le prêt est une institution de Common Law alors que le trust est une institution d’equity. De plus, le trustee est un propriétaire de biens à la différence de l’emprunteur (ou du dépositaire) qui n’a qu’un droit d’usage. Dans le trust, le constituant perd tout droit sur les biens transférés alors que le prêteur n’en transmet que l’usage. * Le trust diffère par ailleurs du mandat (ou de la représentation). Le trustee et le mandataire (ou le représentant ont l’obligation d’agir dans l’intérêt du bénéficiaire ou du mandant. Cependant, le trustee, contrairement au mandataire (ou au représentant), est propriétaire des biens mis en trust. Il est indépendant par rapport aux bénéficiaires et au constituant, il n’est tenu que par l’acte du trust, alors que le représentant agit sous le contrôle du représenté. De plus, le mandat prend fin avec le décès du mandant à la différence du trust dans lequel le trustee continu d’exercer ses fonctions après le décès du constituant. * Le trust n’est pas non plus une fiducie. Le contrat de fiducie permet au titulaire d’un droit, d’un bien ou d’un patrimoine (= le constituant) de transférer à une ou plusieurs personnes (= fiduciaires), la propriété de tout ou partie de ces droits, à charge pour elle(s) de les administrer ou d’en disposer au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires, conformément aux stipulations du contrat. Ce transfert s’opère dans un patrimoine d’affectation appelé « patrimoine fiduciaire » et est donc par définition distinct du patrimoine personnel du fiduciaire et de tout autre patrimoine du fiduciaire. → Points communs : création d’un patrimoine d’affectation dans les 2 cas. → Divergence : pas de contrat dans le trust ; le constituant disparait dès la création du trust. Le trust est donc très différent des institutions connues en droit français. Il apparait comme étant une institution sui generis aux yeux des juristes français. Cette spécificité tient à l’originalité de cette institution mais également à son appartenance à l’equity. Rappel : en effet, le trust n’appartient pas à la Common Law. Historiquement, celle-ci n’a jamais concerné la possession des terres puisque l’ensemble des terres était et est encore possédé par la Couronne. Dans le système féodal, le Roi accordait un domaine (estate) de terre à certains de ses sujets. En retour, ceux-ci concédaient eux-mêmes une part de leur terre à leurs propres sujets selon un bail spécifique. Ainsi, un homme pouvait avoir le droit diusus, de frutus et diabusus sur sa terre pour la durée de sa vie (the estate for life) ou pour la durée de sa lignée en fonction du nombre de descendants directs (the estate in fee tail) ou encore tant qu’il y avait des héritiers qui devenaient alors propriétaires (the estate in fee simple). Il s’agissait des trois estates de la Common Law. Ils ont été qualifiés de legal estates afin de les distinguer des equitable estates. II. Les obligations qui s’imposent au trustee • Devoir/obligation d’administrer les biens avec prudence. • Devoir/obligation de loyauté = éviter les conflits d’intérêt. • Devoir/obligation de tenir un registre et de rendre des comptes/d’informer les bénéficiaires du trust. III. Les raisons présidant à la création d’un trust A. A l’origine • Les croisades : les nobles chevaliers anglais qui partaient en Terre Sainte confiaient leur domaine à un homme en qui ils avaient toute confiance (confiance se disant « trust » dans la langue anglaise) afin que celui-ci, dénommé le trustee, administre le domaine selon les instructions qui lui avaient été préalablement données. * Ce trustee avait notamment pour mission : → de vendre les récoltes → de recueillir les fermages → d’acheter et vendre des biens → d’assurer une rente à l’épouse du chevalier → d’organiser et d’administrer la transmission héréditaire en évitant le morcellement des biens B. Aujourd’hui : notamment : • Gestion d’actifs/patrimoine sur plusieurs générations • Stratégie fiscale : éviter les lourds impôts qu’imposent les lois fiscales fédérales aux grandes fortunes * En 2009, toute personne détenant une ou plusieurs propriétés dont la valeur est supérieure à 3,5 millions de dollars se verra appliquer un taux de 45% à la fraction supérieure à cette somme. • Œuvres caritatives • Transmission de fonds à la génération suivante lorsque le patrimoine à transmettre est très important et que l’ensemble des donations autorisées par la loi ont été faites.