Comment négocier un accord d`entreprise sans délégué - Wk-rh

Transcription

Comment négocier un accord d`entreprise sans délégué - Wk-rh
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
Comment négocier
un accord d’entreprise
sans délégué syndical ?
NÉGOCIATION
COLLECTIVE
(2e partie)
Après avoir rappelé, dans le dernier
numéro, les règles actuellement
applicables en la matière, voici
ce qui va changer à compter
du 31 décembre 2009.
A
compter du 31 décembre
2009, la négociation collective sans délégué syndical
sera facilitée.
Il ne sera plus nécessaire qu’elle soit autorisée par une convention collective de
branche étendue.
Comme auparavant, la négociation avec des
élus ou des salariés mandatés ne sera possible que si aucun délégué syndical n’existe
dans le périmètre de l’accord.
Mais, sauf dispositions conventionnelles
étendues les y autorisant, seules les entreprises de moins de deux cents salariés pourront
le faire avec le comité d’entreprise, la délégation unique du personnel ou les délégués
du personnel. Les autres n’auront accès
qu’au mandatement, pour autant qu’elles
n’aient aucun élu (1).
Sous ces réserves, la loi du 20 août 2008
maintient la plupart des règles antérieures
en précisant certains points qui, jusqu’à pré-
sent, ne l’étaient pas (délai d’instruction
imparti aux commissions paritaires, moyens
alloués aux négociateurs, etc.).
Dispositions
communes à l’ensemble
des modalités
de négociation
Plus besoin de dispositions
conventionnelles étendues
A compter du 31 décembre 2009, les entreprises dépourvues de délégué syndical
pourront, sous réserve de remplir les conditions fixées par la loi, négocier un accord
collectif avec des élus ou un salarié mandaté,
sans qu’il ne soit besoin que la convention
collective de branche étendue, dont elle
relève, l’autorise.
Cependant, celles relevant de telles dispositions conventionnelles, négociées sous
l’empire de l’ancienne législation (2), resteront
tenues de les appliquer (3). Ces entreprises
ne pourront donc pas, à compter de cette
date, se prévaloir des nouvelles règles léga-
Par Sylvain Niel
Directeur du département
GRH FIDAL
14, bd du Général Leclerc
92527 Neuilly-sur-Seine Cedex
Tél. : 01 47 38 54 00
[email protected]
En collaboration
avec Alain Dupays
(1) Beaucoup d’entreprises sont dépourvues de délégués syndicaux alors qu’une représentation du personnel est élue. Cela risque d’être encore
plus fréquent avec les nouveaux critères de représentativité fondés sur l’audience électorale. (2) L’alinéa 1er de l’article 14 de la loi no 2008-789
du 20 août 2008 maintient en vigueur, jusqu’au 30 décembre 2009, les dispositions des anciens articles L. 2232-21 à L. 2232-29 dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi du 20 août 2008. Peu importe donc, nous l’avons vu, que cet accord de branche ait été conclu avant ou
après la loi du 20 août. (3) L. no 2008-789, 20 août 2008, art. 14, al. 5.
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
9
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
les aussi longtemps que les dispositions
de leur convention collective de branche portant sur ce point n’auront pas
été révisées ou abrogées. Si leur
convention n’autorise, par exemple,
que la négociation avec un salarié
mandaté ou exclusivement avec des
élus, elles ne pourront négocier un
accord avec les autres interlocuteurs
autorisés par le Code du travail, y compris avec un représentant de section
syndicale.
Seules 18 branches ont à ce jour négocié de tels accords (voir tableau).
Appréciation du défaut
d’implantation syndicale
L’absence de délégués syndicaux s’apprécie à la fois au niveau de l'entreprise
et de l'établissement.
En l’absence d’implantation syndicale au
niveau d’un établissement, alors qu’il
existe un délégué syndical désigné au
niveau de l’entreprise, il n’est pas possible de négocier, dans ce site, un accord
avec des élus ou un salarié mandaté. La
jurisprudence criminelle considère, dans
un tel cas, que la conclusion d'accords
entre l'employeur et des institutions
représentatives du personnel constitue
un délit, car elle porte atteinte au monopole de négociation que la loi confère
aux organisations syndicales (4).
En revanche, un délégué d’établissement
n’est en principe pas habilité à négocier
un accord d’entreprise. Il n’est donc pas
acquis qu’en présence d’un délégué
syndical d’établissement, dans une entreprise dépourvue de délégué syndical
central, il soit possible de négocier avec
le comité d’entreprise un accord collectif dont le périmètre dépasserait l’établissement où le syndicat est représenté.
Seule l’extension écrite du mandat syn-
Dispositions conventionnelles de branche autorisant la négociation sans délégué syndical
Branches
Animation
Audiovisuel (production)
Autoroutes
Biscotteries, biscuiteries, chocolateries, glaces, sorbets, crèmes
glacées, produits exotiques, alimentation diététique,
alimentations diverses (industries)
Oui
Oui
Boulangerie et pâtisserie industrielle
Charcuterie (industrie)
Combustibles (négoce et distribution)
Eaux embouteillées, boissons sans alcool et bières (fabrication)
Entreprises artistiques et culturelles
Exploitations frigorifiques
Fleurs, fruits et légumes (coopératives et SICA)
Géomètres-experts topographes
HLM (personnel des sociétés anonymes et des fondations)
Import-export
Industrie pharmaceutique
Lait (organisme de contrôle)
Produits du sol
Travail temporaire
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
(4) Cass. crim., 18 nov. 1997, no 96-80.002.
10
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
Interlocuteurs
Salariés
Elus
mandatés
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Comment négocier un accord d’entreprise sans délégué syndical ?
dical ou la démission du délégué syndical d’établissement permettraient de
résoudre cette difficulté.
Information préalable
des syndicats
Lors du lancement de négociations avec
les élus ou un salarié mandaté, la Direction devra informer les organisations
syndicales représentatives de sa branche (5). Cette information n’était jusqu’à
présent imposée qu’en cas de négociation avec un salarié mandaté (6).
Alors que la loi visait auparavant les
syndicats qui étaient représentatifs au
niveau national, elle ne fait maintenant
référence qu’à ceux qui le sont au
niveau de la branche. Ce seront donc,
à terme, les syndicats implantés dans
l’ensemble de ce secteur d’activité qui
justifieront, à ce niveau et au premier
tour des élections, d’une audience
globale d’au moins 8 % (7).
Ces dispositions ne s’appliqueront
toutefois qu’en 2013, c’est-à-dire une
fois collectés les résultats du premier
cycle des élections professionnelles
organisées dans les entreprises. Jusqu’à
cette date, il faudra inviter les cinq syndicats bénéficiaires de l’ancienne présomption irréfragable de représentativité, à savoir : la GCT, la CFDT, FO, la
CFTC et la CGC.
Bien que les textes soient muets sur ce
point, il est vraisemblable qu’il faille
non seulement les informer de l’ouverture d’une négociation, mais également
de son objet. S’agissant d’une négociation envisagée avec un salarié mandaté,
ce courrier d’information pourra, le cas
échéant, inviter les syndicats à en
désigner un.
Cette information doit, selon nous, précéder les premières réunions consacrées à ce sujet.
Il est conseillé de l’adresser par mail ou
par courrier et dans tous les cas avec
accusé de réception.
Si l’entreprise applique volontairement une autre convention que celle
dont elle relève légalement, c’est aux
syndicats représentatifs de son secteur
d’activité, et non à ceux de la branche
à laquelle elle a décidé de se rattacher,
qu’il faudra adresser cette information.
Cette obligation d’information s’impose que l’entreprise soit ou non
adhérente à une fédération patronale
de la branche.
Elle doit, selon nous, être également
respectée en cas de négociation avec
des élus autorisée par des dispositions conventionnelles de branche
étendues négociées sous l’empire de
l’ancienne législation. Alors qu’auparavant cette information n’était pas imposée dans ce cas, il semble s’agir de
règles d’ordre public applicables indépendamment de ce que prévoit ou non
la convention collective de branche.
■
Pour un modèle de courrier,
voir page suivante.
Moyens mis
à la disposition
des négociateurs salariés
Chaque négociateur salarié, qu’il soit
élu titulaire ou spécialement mandaté
par une organisation syndicale, dispose
du temps nécessaire dans les limites
d'une durée qui, sauf circonstances
exceptionnelles, ne peut excéder dix
heures par mois (8).
Ces heures ne se confondent pas avec
les heures de délégation dont ils disposent, le cas échéant, en qualité de
représentant élu du personnel (9).
Ces heures semblent couvrir à la fois le
temps de préparation et celui dédié à la
négociation elle-même. Elles sont de
plein droit considérées comme temps de
travail et payées à l'échéance normale.
L'employeur qui entend contester l'utilisation faite des heures de délégation
doit saisir le juge judiciaire (10).
Déroulement
de la négociation
La négociation doit se dérouler dans le
respect des règles suivantes :
– indépendance des négociateurs visà-vis de l'employeur ;
– élaboration conjointe du projet d'accord par les négociateurs ;
– concertation avec les salariés ;
– faculté de prendre l'attache des organisations syndicales représentatives
de la branche ;
– par ailleurs, la direction doit, avant
d’entamer les négociations, fixer en
accord avec les négociateurs les
informations à leur remettre (11).
C’est un rappel qui semble sans véritable conséquence, mais dont on peut se
demander si un syndicat ne peut y puiser, plus tard, les raisons d’une action
judiciaire en nullité d’un accord conclu
par complaisance.
Selon la jurisprudence, une organisation
syndicale peut agir en nullité ■ ■ ■
(5) C. trav., art. L. 2232-21. (6) Ancien C. trav., art. L. 2232-25. (7) C. trav., art. L. 2122-6 (8) C. trav., art. L. 2232-23 et L. 2232-25. (9) C. trav., art. L. 2232-23. (10) C. trav., art. L. 2232-23.
(11) C. trav., art. L. 2232-27-1.
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
11
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
Modèle de courrier d’information à adresser aux organisations syndicales
< Expéditeur >
< Destinataire : Union Départementale de [ ] >
< Date >, < Lieu >
Lettre recommandée avec AR
Monsieur (ou Madame),
Conformément aux dispositions de l’article L. 2232-21 du Code du travail, nous vous informons
que nous envisageons d’ouvrir une négociation sur < > à compter du < > dans < notre entreprise, notre établissement de [ ] >.
VARIANTE 1
Nous ne disposons à ce jour dans celle-ci (ou celui-ci), d’aucun délégué syndical.
Nous envisageons donc d’engager cette négociation avec les représentants élus de notre < comité
d’entreprise ou comité d’établissement ; DUP >.
VARIANTE 2
Nous ne disposons à ce jour dans celle-ci (ou celui-ci), d’aucun délégué syndical.
Par ailleurs, nous n’y avons pas de < comité d’entreprise ou comité d’établissement ; DUP >
(éventuellement : les élections organisées à cet effet, le < >, s’étant soldées par un procès-verbal
de carence).
Nous envisageons donc d’engager cette négociation avec nos délégués du personnel.
VARIANTE 3
Nous ne disposons à ce jour, dans celle-ci (ou celui-ci), d’aucun délégué syndical.
Par ailleurs, nous n’y avons ni comité < d’entreprise ou d’établissement >, ni DUP, ni délégués
du personnel (éventuellement : les élections organisées à cet effet, le < >, s’étant soldées par un
procès-verbal de carence).
Nous envisageons donc d’engager cette négociation avec un salarié mandaté par une organisation
syndicale.
Nous vous invitons donc à désigner une personne, choisie parmi les membres de notre personnel,
pour < négocier cet accord collectif ; participer à cette négociation >.
VARIANTE 4
Nous ne disposons à ce jour, dans celle-ci (ou celui-ci), d’aucun délégué syndical.
Par ailleurs, nous n’y avons ni comité < d’entreprise ou d’établissement >, ni DUP, ni délégués
du personnel (éventuellement : les élections organisées à cet effet, le < >, s’étant soldées par un
procès-verbal de carence).
Nous envisageons donc d’engager cette négociation avec Monsieur (ou Madame) < > qui a été
mandaté(e) par < >.
(Facultatif) Nous vous invitons également à mandater un salarié, choisi parmi les membres de notre
personnel, pour < négocier cet accord collectif ; participer à cette négociation >.
VARIANTE 5
Nous ne disposons à ce jour, dans celle-ci (ou celui-ci), d’aucun délégué syndical.
Bien que nous y ayons < des délégués du personnel ; une DUP ; un comité d’entreprise ou un
comité d’établissement] >, il ne nous est pas possible, compte tenu de < nos effectifs ; des termes
de notre convention collective de branche > d’engager cette négociation avec un salarié mandaté
par une organisation syndicale.
Nous envisageons donc d’engager cette négociation avec < nos représentants de section syndicale ;
avec Monsieur (ou Madame) [ ], en qualité de représentant(e) de la section syndicale [ ] >.
Veuillez agréer, Monsieur (ou Madame), < >.
< Signature >
12
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
Comment négocier un accord d’entreprise sans délégué syndical ?
totale ou partielle d'un accord collectif
contenant des clauses illicites au regard
des dispositions d'ordre public du Code
du travail (12). Or, les règles rappelées cidessus ne relèvent-elles pas de l’ordre
public social ?
Thèmes de négociation
autorisés
Les négociations avec les représentants
élus du personnel ou avec un salarié
mandaté peuvent porter aussi bien sur
un accord classique que sur un accord
dérogatoire.
Les thèmes ouverts à la négociation
sont tous ceux dont la mise en œuvre
est subordonnée par la loi à un accord
collectif. C’est par exemple la fixation
au niveau de l’entreprise du contingent
d’heures supplémentaires, d’une
modulation simplifiée ou encore la
mise en place de forfaits en jours.
Sont toutefois exclus de cette négociation les accords collectifs concernant les
modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise dans le
cadre d’une procédure de licenciement
pour motif économique (13).
Tous les autres sujets peuvent faire
l’objet de ces modalités exceptionnelles
de négociation, y compris ceux portant
sur un projet de compression d’effectif
et notamment la mise en place d’un plan
de départs volontaires, d’aides à la revitalisation ou encore les conditions d’un
reclassement au sein du groupe.
Plus délicate est la question de savoir
s’il est possible de négocier un accord
de méthode non dérogatoire. L’exclu-
sion légale vise a priori les accords de
méthode qui dérogent aux modalités
d’information et de consultation du
comité d’entreprise lors d’un licenciement collectif. Mais comment distinguer
l’accord qui affecte ce processus de
celui qui n’y déroge pas ? Par exemple,
un accord de méthode qui augmente le
nombre de réunions avec le comité
d’entreprise sans modifier les délais
légaux n’est-il pas dérogatoire ? Dans le
doute, il est prudent de s’abstenir.
Dépôt de l’accord
Quelles que soient les modalités de sa
négociation, l’accord, une fois signé et
validé (approbation de la commission
paritaire pour les accords conclus avec
des élus ou validation référendaire pour
des salariés mandatés), doit être déposé
auprès de la DDTEFP (14).
Ce dépôt conditionne son entrée en
vigueur (15).
Il doit être accompagné du procèsverbal d’approbation de la commission
paritaire, s’il s’agit d’un accord conclu
avec des élus (16), ou du procès-verbal
de carence aux élections professionnelles, s’il s’agit d’un accord conclu avec
un salarié mandaté (17).
Négociation
avec des élus
Conditions d’effectif
Sauf dispositions conventionnelles
contraires négociées au niveau de la
branche sous l’empire de l’ancienne
législation (18) et ayant fait l’objet d’extension, seules les entreprises de moins
de deux cents salariés dépourvues de
délégués syndicaux pourront négocier
un accord collectif avec leurs élus.
Ce seuil se calcule selon les règles
habituelles de décompte des effectifs (19).
Il s’apprécie au niveau de l’entreprise,
voire de l’UES, tous établissements ou
toutes sociétés confondus. Autrement dit, il ne sera pas possible de
négocier un accord collectif avec le CE
dans une usine n’ayant pas de délégué
syndical, si cet établissement fait partie d’une entreprise employant
200 salariés et plus.
Remarque
L’appréciation des effectifs s’arrête
au niveau de l’entreprise ou de l’UES.
Peu importe donc le nombre de salariés employés au niveau du groupe
auquel appartient l’entreprise.
Elus du personnel habilités
à négocier
Négociation réservée aux titulaires
Sauf dispositions conventionnelles
contraires négociées au niveau de la
branche sous l’empire de l’ancienne
législation (20) et ayant fait l’objet d’extension, seuls les élus titulaires seront
habilités à négocier des accords collectifs en l’absence de délégué syndical.
Il s’agit, par ordre de priorité, des
membres élus titulaires du comité d'entreprise ou de la délégation uni- ■ ■ ■
(12) TGI Paris, 28 sept. 1999, n o 99-7655, CGT et a. c/ SA Sagem. (13) C. trav., art. L. 1233-21. (14) C. trav., art. D. 2231-4. (15) C. trav., art. L. 2232-28.
(16) C. trav., art. L. 2232-28. (17) C. trav., art. D. 2231-7. (18) L’alinéa 1er de l’article 14 de la loi no 2008-789 du 20 août 2008 maintient en vigueur, jusqu’au 30 décembre 2009, les dispositions
des anciens articles L. 2232-21 à L. 2232-29 dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi du 20 août 2008. Or, cette ancienne législation ne réservait pas la négociation avec des élus aux
entreprises n’ayant pas un certain seuil d’effectif. (19) C. trav., art. L. 1111-2. (20) L’ancienne législation ne réservait pas la négociation aux élus titulaires.
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
13
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
que du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel titulaires (21).
Dans les entreprises multi-sites, la
négociation se fera avec le comité central d’entreprise.
Représentativité
des interlocuteurs
Sauf dispositions conventionnelles
contraires négociées au niveau de la
branche sous l’empire de l’ancienne
législation (22), les élus titulaires signataires de l’accord devront avoir recueilli
ensemble plus de 50 % des suffrages
exprimés lors des dernières élections
professionnelles (23). Dans le silence des
textes, doivent être pris en compte
aussi bien les résultats du premier tour
que ceux du second tour. En pratique,
il s’agira surtout d’élus au deuxième
tour, car, le premier tour étant réservé
aux organisations syndicales, il est fort
probable que celles-ci aient pu désigner
des délégués syndicaux.
Exemple :
Le comité d’entreprise comporte trois
membres titulaires : Marie, Jacques
et Jean.
Marie et Jean, seuls candidats au premier tour, ont été élus au cours de ce
scrutin. Ils étaient présentés par la
même organisation.
Marie a recueilli 95 % des voix (et
5 % de ratures). Pour la petite histoire, Marie, qui avait été désignée
déléguée syndicale, a démissionné de
son mandat suite à un grave désaccord avec son organisation. Personne
n’a voulu la remplacer.
Jean, 9 % (et 91 % de ratures).
Jacques a été élu au second tour avec
45 % des voix.
Pour être valable, l’accord d’établissement devrait être au moins signé
avec Marie, ou avec Jean et Jacques.
Peu importe le nombre de signataires
dès lors que les représentants titulaires
sont majoritaires en voix.
En ce qui concerne les accords conclus
avec le CE, il n’est donc pas nécessaire
qu’il soit signé par la majorité des
membres titulaires. A contrario, une
délibération du comité adoptant un
accord est insuffisante à le valider si elle
n’a pas été votée par les élus titulaires
majoritaires.
Ce n’est donc pas au comité d’entreprise, en tant qu’institution, qu’est
reconnue la capacité de négocier des
accords en l’absence de délégué syndical. C’est seulement à ces membres élus
titulaires, majoritaires en voix.
Toutefois, les négociations doivent,
selon nous, être engagées avec l’ensemble des élus de l’institution concernée,
suppléants y compris.
Validation de l’accord
par la Commission
paritaire de branche
Une fois signé par les élus titulaires au
comité d'entreprise ou les délégués du
personnel, l’accord devra, comme c’est
le cas aujourd’hui, être transmis, pour
approbation, à la Commission paritaire
de branche (24).
Celle-ci contrôle que l'accord collectif
n'enfreigne pas les dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles
applicables. En principe, les décisions
(21) C. trav., art. L. 2232-21 (22) L’ancienne législation n’exigeait pas que les élus signataires soient majoritaires.
(23) C. trav., art. L. 2232-22. (24) Voir la première partie de l’article, Les Cahiers du DRH no 148, nov. 2008, p. 35.
14
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
Comment négocier un accord d’entreprise sans délégué syndical ?
NÉGOCIATION AVEC LES ÉLUS EN L’ABSENCE DE DÉLÉGUÉ SYNDICAL
Autorisation donnée
par une convention collective
de branche étendue
Préséance
Règles applicables jusqu’au
30 décembre 2009
Règles applicables à compter
du 31 décembre 2009, à défaut
de dispositions conventionnelles (1)
Oui
(Ancien C. trav., art. L. 2232-21)
Non
(C. trav., art. L. 2232-21)
Priorité est donnée au CE et à la DUP sur les DP.
Ce n’est qu’à défaut de CE ou de DUP que la négociation avec des DP est possible
(Ancien C. trav., art. L. 2232-23)
(C. trav., art. L. 2232-23)
Moins de 200 salariés
(C. trav., art. L. 2232-21)
Condition d’effectif
Information préalable des syndicats
Aucune condition particulière,
sauf dispositions conventionnelles contraires
Qualité des élus signataires
Représentativité des élus
signataires de l’accord
Moyens alloués
aux négociateurs salariés
Thèmes de négociation autorisés
Validation de l’accord
Délai de saisine de la commission paritaire
pour valider l’accord
Délai d’instruction par
la commission paritaire de la demande
de validation de l’accord
Dépôt de l’accord
Fixées par la convention collective
de branche étendue
(Ancien C. trav., art. L. 2232-22)
Selon le cas, il est fait référence à la majorité des
élus, des élus titulaires ou des élus présents (sous
réserve d’un nombre minimum de titulaires)
Fixés, le cas échéant, par la convention
collective de branche étendue
L’attribution d’un crédit d’heures spécifique n’est
pas systématique
Information préalable des syndicats représentatifs
de la branche
(C. trav., art. L. 2232-21)
Les signataires de l’accord doivent être
des élus titulaires
(C. trav., art. L. 2232-22)
Les intéressés doivent avoir recueilli ensemble
plus de 50 % des suffrages exprimés
lors des dernières élections
(C. trav., art. L. 2232-22)
Chaque élu titulaire participant
à la négociation dispose du temps nécessaire dans
la limite de 10 heures par mois
Ces heures ne se confondent pas avec
leurs autres heures de délégation.
Elles sont de plein droit
comptabilisées et rémunérées
comme du temps de travail
(C. trav., art. L. 2232-23)
Généralement tous les thèmes
sont autorisés
Tous les thèmes sont autorisés
à l’exception des modalités d’information et de
consultation du comité d’entreprise dans le cadre
d’un licenciement économique visées à l’article
L. 1233-21 du Code du travail
(C. trav., art. L. 2232-21)
Validation impérative par la commission paritaire
prévue à cet effet par la convention collective
de branche étendue
(Ancien C. trav., art. L. 2232-23)
Validation par la commission paritaire de branche.
A défaut de décision de la commission dans le délai
d’instruction imparti, l’accord est réputé validé
(C. trav., art. L. 2232-22)
Aucun délai
La convention collective de branche
étendue peut en avoir fixé un
Fixé par la convention collective
de branche étendue.
A défaut, aucun délai.
(Ancien C. trav., art. L. 2232-23)
Aucun délai
La convention collective de branche,
peut en avoir fixé un
Fixés par la convention collective
de branche étendue
(Ancien C. trav., art. L. 2232-22)
4 mois maximum
(C. trav., art. L. 2232-21)
L’accord doit être déposé auprès de la DDTEFP.
Ce dépôt conditionne son entrée en vigueur.
(C. trav., art. L. 2232-28 ; C. trav., art. D. 2231-4)
Le dépôt doit être accompagné du procès-verbal d’approbation de la commission paritaire
(Ancien C. trav., art. L. 2232-24 ; C. trav., art. L. 2232-28)
(1) Les entreprises relevant de dispositions conventionnelles étendues négociées au niveau de leur branche et qui autorisent la conclusion d’accords collectifs avec les élus resteront tenues d’appliquer ces dispositions au-delà du 30 décembre 2009, et ce quel que soit leur effectif (L. no 2008-789, 20 août 2008, art. 14, al. 5).
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
15
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
A quelle branche doit-on
adresser l’accord ?
d’un service partagé, et qui relèvent plus de
La validation est soumise à l’approbation
celles des autres sociétés du groupe (1). La
de la branche. L'acquiescement sera dépourvu
Cour de cassation a notamment jugé qu'un
d’effet s’il est rendu par une commission pa-
GIE, qui assurait le transport d'une société de
ritaire dont l’entreprise ne relève pas.
la métallurgie, relevait de la convention col-
Cas hypothétique ? Pas vraiment au regard
lective nationale des transports et non de la
du nombre d’entreprises qui appliquent des
convention collective correspondant à l'acti-
conventions collectives dont elles ne relè-
vité de cette société (2).
vent pas ou ne relèvent plus.
Il en va ainsi des holdings ou des GIE qui
louent leurs services aux filiales dans le cadre
sont prises à la majorité des présents et,
en cas de ballottage, la demande de validation de l’accord est rejetée.
La commission devra se prononcer, au
plus tard, dans les quatre mois suivants.
A défaut de réponse défavorable dans
ce délai, l’accord sera « réputé avoir été
validé ». Il est donc fortement conseillé
de saisir cette commission par lettre
recommandée avec accusé de réception, en y joignant l’accord.
Il est conseillé de rappeler dans l’accord
que sa validité est conditionnée par
l’approbation de la Commission paritaire de branche.
Cela influe donc sur sa date d’application. On peut fixer celle-ci en faisant
référence à un délai décompté à partir
de l’approbation explicite ou implicite
de la commission :
« Le présent accord entrera en vigueur
à compter du premier jour du mois suivant sa validation implicite ou explicite par la Commission paritaire de
branche. »
la Convention collective du Syntec que de
(1) CC des bureaux d’études techniques, cabinet d’ingénieurs-conseils, sociétés de conseil (Syntec).
(2) Cass. soc., 15 mars 2006, no 04-42.066.
On peut aussi la fixer au-delà du
délai de quatre mois imparti à la commission pour rendre sa décision.
Négociation avec
un salarié mandaté
Entreprises concernées
Sauf dispositions conventionnelles
contraires négociées au niveau de la
branche sous l’empire de l’ancienne
législation (25) et ayant fait l’objet d’extension, la négociation avec un salarié
mandaté par un syndicat sera, à compter du 31 décembre 2009, une alternative offerte à toutes les entreprises qui
n’ont ni élu, ni syndicat, et ce quel que
soit leur effectif.
L’absence d’élu est appréciée, comme le
défaut d’implantation syndicale, au
niveau de l’entreprise et non par site.
Comme aujourd’hui, le défaut d’instance
représentative du personnel devra être
attesté par un procès-verbal de carence
établi lors des dernières élections.
(25) L’alinéa 1er de l’article 14 de la loi no 2008-789 du 20 août 2008 maintient en vigueur, jusqu’au 30 décembre 2009, les dispositions des anciens articles L. 2232-21 à L. 2232-29 dans leur rédaction antérieure à la publication de la loi du 20 août 2008.
Or, cette ancienne législation réservait la négociation avec des salariés mandatés ou des élus aux entreprises relevant d’un accord
de branche étendu l’autorisant, lesquels pouvait exclure le recours au mandatement.
16
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
Comment négocier un accord d’entreprise sans délégué syndical ?
NÉGOCIATION AVEC UN SALARIÉ MANDATÉ EN L’ABSENCE DE DÉLÉGUÉ SYNDICAL
Autorisation donnée
par une convention collective
de branche étendue
Condition d’effectif
Information préalable des syndicats
Conditions requises
pour être mandaté
Moyens alloués
aux négociateurs salariés
Règles applicables jusqu’au
30 décembre 2009
Règles applicables à compter
du 31 décembre 2009, à défaut
de dispositions conventionnelles (1)
Oui
(Ancien C. trav., art. L. 2232-21)
Non
(C. trav., art. L. 2232-24)
Aucune, sauf dispositions conventionnelles contraires
Aucune, sauf dispositions conventionnelles
contraires
Information préalable des syndicats représentatifs
de la branche
(C. trav., art. L. 2232-24)
Le salarié mandaté ne doit pas, en raison des pouvoirs qu'il détient, être assimilé à l'employeur.
Il ne doit pas non plus être son conjoint, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, son concubin,
son ascendant, son descendant, son frère, sa sœur ou son allié au même degré.
(C. trav., art. L. 2232-26)
Fixés, le cas échéant, par la convention collective de
branche étendue.
Les salariés mandatés disposent du temps
nécessaire pour négocier dans la limite de
10 heures par mois.
L’attribution d’un crédit d’heures spécifique n’est
pas systématique
Ces heures sont de plein droit comptabilisées
et rémunérées comme du temps de travail.
(C. trav., art. L. 2232-25)
Protection des salariés mandatés
Thèmes de négociation autorisés
Le salarié mandaté bénéficie de la même protection
que les autres représentants du personnel
(C. trav., art. L. 2411-1 ; C. trav., art. L. 2411-4)
Fixés par la convention collective
de branche étendue
(Ancien C. trav., art. L. 2232-22)
Généralement tous les thèmes
sont autorisés
Tous les thèmes sont autorisés,
à l’exception des modalités d’information et de
consultation du comité d’entreprise dans le cadre
d’un licenciement économique visées à
l’article L. 1233-21 du Code du travail
(C. trav., art. L. 2232-24)
Validation de l’accord
Validation impérative par référendum
(C. trav., art. L. 2232-27)
Délai de l’organisation
du référendum
Fixation des modalités de la consultation référendaire
dans les 15 jours suivant la signature de l’accord.
Aucun délai n’est imposé pour la date du référendum.
Les salariés doivent être informés 15 jours avant la date prévue.
(C. trav., art. D. 2232-2 à D. 2232-9)
L’accord doit être déposé auprès de la DDEFP.
Dépôt de l’accord
Il doit être accompagné du procès-verbal de carence aux élections professionnelles.
Ce dépôt conditionne son entrée en vigueur.
(C. trav., art. L. 2232-28 ; C. trav., art. D. 2231-4 et D. 2231-7)
(1) Les entreprises relevant de dispositions conventionnelles étendues, négociées au niveau de leur branche et qui autorisent la conclusion d’accords collectifs avec les élus, resteront tenues d’appliquer ces dispositions au-delà du 30 décembre 2009, et ce quel que soit leur effectif (L. no 2008-789, 20 août 2008, art. 14, al. 5).
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
17
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
Syndicats habilités
à mandater
Comme aujourd’hui, le ou les salariés
devront être expressément mandatés
par une ou plusieurs organisations
syndicales représentatives. Celles-ci
devront l’être dans la branche professionnelle dont relève l’entreprise.
Cette représentativité sectorielle ne
pourra pas être vérifiée avant 2013
(voir supra). Jusqu’à cette date, les
salariés ne pourront donc être mandatés que par l’un des cinq syndicats
présumés représentatifs au niveau
national ou par les syndicats reconnus
représentatifs dans la branche.
A noter qu’une même organisation
syndicale ne pourra mandater qu'un
seul salarié (26).
Sur le contenu du mandat, voir
première partie de cet article (27).
■
Condition à remplir
pour être mandaté
Comme aujourd’hui, le mandaté ne
peut être un collaborateur qui, en raison
des pouvoirs qu'il détient, est assimilé à
l'employeur. Il ne doit pas non plus lui
être apparenté : il ne doit être ni son
conjoint, son partenaire lié par un pacte
civil de solidarité, son concubin, son
ascendant, son descendant, son frère, sa
sœur ou son allié au même degré (28).
Protection du salarié
mandaté
Le salarié mandaté bénéficie de la
même protection que les autres représentants du personnel (29). L’employeur
ne peut rompre son contrat de travail
qu’après avoir obtenu l’autorisation de
l’inspection du travail.
Cette autorisation est également requise
dès que l'employeur a connaissance de
l'imminence de sa désignation, et durant
les douze mois suivant la date à laquelle
son mandat a pris fin (30). Lorsqu’aucun
accord n'a été signé le délai de protection
court à compter de la date de la fin des
négociations, matérialisée par un procèsverbal de désaccord.
Validation référendaire
de l’accord
Comme aujourd’hui, l'accord signé
avec un salarié mandaté devra être
approuvé par la majorité des suffrages
exprimés par les salariés consultés par
référendum (31). A défaut, l’accord est
réputé non écrit. Cette validation référendaire est vitale. A défaut, l’accord
n’est pas valable. C’est donc comme si
aucun n’accord n’avait été conclu.
Sous réserve de modifications ultérieures
fixées par décret, l’organisation du référendum sera soumise aux mêmes règles
qu’auparavant (32). Il est conseillé de faire
une présentation explicite du contenu de
l’accord aux salariés. Plaquette, notice et
réunion d’information sont, selon nous,
indispensables pour que le projet d’accord
signé ait des chances d’obtenir l’adhésion
de la majorité des salariés.
Négociation avec
le représentant de
la section syndicale
Le représentant de la section syndicale
peut, sur mandatement d’un syndicat
(26) C. trav., art. L. 2232-24. (27) Voir première partie de cet article, Les Cahiers du DRH no 148, nov. 2008, p. 35.
(28) C. trav., art. L. 2232-26. (29) C. trav., art. L. 2411-1 et L. 2411-4. (30) C. trav., art. L. 2411-4. (31) Les Cahiers du DRH
no 148, nov. 2008, p. 35. (32) Les Cahiers du DRH no 148, nov. 2008, p. 35.
18
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
Comment négocier un accord d’entreprise sans délégué syndical ?
affilié à une organisation syndicale
représentative au niveau national et
interprofessionnel, négocier et conclure
un accord d'entreprise ou d’établissement (33).
Remarques
Si le syndicat ayant désigné le représentant n’est toujours pas reconnu représentatif à l’issue des prochaines élections, ce dernier ne peut être mandaté
pour négocier avant les six mois précédant la date des élections suivantes (34).
Cette possibilité est réservée aux
entreprises qui ne peuvent pas bénéficier de l’une des dispositions prévoyant la négociation d’accord collectif avec les représentants élus du
personnel ou un salarié mandaté dans
l’une des configurations décrites précédemment (35).
La négociation avec un représentant de
section syndicale est subordonnée à :
– une carence de candidature au premier tour des élections professionnelles, n’ayant pas permis la désignation
d’un délégué syndical au sein de l'entreprise ou de l'établissement ;
– à l’absence de délégué syndical dans
l’entreprise.
Jusqu’au 31 décembre 2009, cette
négociation avec un représentant de
section syndicale est possible dans les
entreprises dépourvues de délégué
syndical et non couvertes par un
accord prévoyant une négociation
dérogatoire avec des élus ou des salariés mandatés. En effet, en l'absence
de disposition légale sur un éventuel
différé d’application de cette mesure,
la négociation avec un représentant de
la section syndicale (RSS) est possible
depuis la date d’entrée en vigueur de
la loi du 20 août, soit depuis le
22 août 2008.
A compter du 31 décembre 2009, le
champ d’application de cette négociation dérogatoire avec un RSS sera
beaucoup plus restreint. Seules les
entreprises de plus de deux cents salariés, dépourvues de délégué syndical,
disposant de représentants élus du
personnel pourront négocier des
accords d’entreprise ou d’établissement avec le ou les représentants de
section syndicale, mandatés à cet effet
par un syndicat affilié à une organisation syndicale représentative au niveau
national et interprofessionnel.
L'accord collectif signé doit être
approuvé à la majorité des suffrages
exprimés par les salariés consultés par
référendum (36). Cette consultation
est organisée dans les mêmes conditions que pour les accords conclus
avec des salariés mandatés (37). Faute
d'approbation du personnel, l'accord
est réputé non écrit.
Les exclus de la
négociation collective
Toutes les entreprises dépourvues de
délégué syndical ne peuvent pas nécessairement négocier avec des élus, un
salarié mandaté ou un représentant de
section syndicale.
Il en va ainsi des entreprises de plus
de 200 salariés et plus, qui sont
expressément exclues de ces modalités de négociations, si elles ont des
réprésentants du personnel, et s’il
n’a pas eu carence de candidature au
premier tour des élections professionnelles.
Sont aussi évincées les entreprises où un
délégué syndical a été désigné sans
qu’il soit possible de mesurer son
audience. L’entreprise ne peut conclure
aucun accord avec ce délégué, faute de
pouvoir justifier qu’il a obtenu au
moins 30 % des suffrages exprimés. Or,
en présence d’un délégué syndical désigné par une organisation bénéficiaire de
la présomption de représentativité,
impossible d’accéder aux modalités
dérogatoires de négociation.
Le défaut de résultat électoral quantifiable peut notamment résulter de
l’absence de liste syndicale au premier
tour ou de l’absence de comptabilisation des suffrages par liste si le quorum
n’est pas atteint.
Dans cette configuration, il faut attendre les prochaines élections, à intervenir d’ici le 20 août 2012, pour mesurer l’audience syndicale du et des
délégués syndicaux et, à défaut de syndicat représentatif, accéder aux dispositifs subsidiaires de négociation.
Sont également exclues les entreprises
où les scores obtenus par les représentants du personnel titulaires sont
inférieurs à la moitié des suffrages
exprimés. C’est une hypothèse envisageable, si certains élus quittent
leurs fonctions ou l’entreprise, sans
être dans la configuration d’un renouvellement partiel de l’institu- ■ ■ ■
(33) C. trav., art. L. 2143-23. (34) C. trav., art. L. 2143-23. (35) L. no 2008-789, 20 août 2008, art. 6, III. (36) C. trav., art. L. 2232-34. (37) Voir première partie de cet article, Les Cahiers du DRH
no 148, nov. 2008, p. 35.
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
19
FICHES CONSEIL DE SYLVAIN NIEL
tion. C’est le cas si le nombre de
départs est inférieur à la moitié des
titulaires du comité d'entreprise. Les
élus titulaires restants peuvent alors
très bien ne pas représenter la moitié
des suffrages exprimés, condition de
validité d’un accord collectif négocié
avec des élus. L’entreprise n’a alors
pas d’alternative pour valider l’accord.
Elle ne peut pas recourir à un salarié
mandaté dans la mesure où elle n’a
pas de procès-verbal de carence au
titre de ses élections professionnelles.
Enfin, certaines entreprises dotées
d’une représentation du personnel
ne relèvent d’aucune convention collective nationale. Dans ce cas, aucune
branche ne peut légitimement approuver les accords qu’elles concluent
avec des élus. Faute d’approbation par
une Commission paritaire, l’accord
n’est pas juridiquement valable.
Est-il obligatoire
de négocier ?
Une entreprise dépourvue de délégué
syndical, ce qui est le cas de la majorité des sociétés, a-t-elle intérêt négocier des accords collectifs ?
Faute de délégué syndical, l’entreprise
échappe aux négociations obligatoires,
qu’il s’agisse de salaire, d’égalité, de
GPEC, de temps de travail, d’emploi
d’handicapés, d’épargne salariale ou de
séniorité.
La disparition du préalable que constitue l’accord de branche étendu ne permet pas, selon nous, à une convention
collective de branche d’imposer des
thèmes de négociation, y compris en
passant par les modalités dérogatoires
qu’elle autorise.
20
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
Quoi qu'il en soit, la désignation
d’un salarié mandaté ou la négociation
menée avec des représentants élus du
personnel ou un représentant de section syndicale ne suffit pas à assujettir l’entreprise à la négociation obligatoire.
Pour autant, la négociation d’accord
d’entreprise ou d’établissement n’est-elle
pas opportune ?
La priorité donnée par la loi à l’accord
d’entreprise sur la convention de branche, notamment en matière d’organisation du temps de travail, va transformer
progressivement le dialogue social. Les
entreprises dépourvues de délégué syndical ou celles dont le délégué va perdre
sa représentativité ont intérêt à anticiper
cette évolution.
Comment anticiper ?
La négociation d’accords d’entreprise et
d’établissement en l’absence de délégué
syndical va se développer à partir du
31 décembre 2009.
Toutefois, dans cette perspective plusieurs paramètres sont à étudier de près
tant au niveau de l’entreprise qu’au
niveau de la branche.
Il faut tout d’abord examiner les élections professionnelles organisées
dans l’entreprise.
• Y a-t-il eu carence de candidats au
premier tour des élections ?
• Y a-t-il eu un procès-verbal de
carence des élections ?
• Quand sont prévues les prochaines
élections professionnelles ?
• A-t-on conservé les résultats par
candidats des dernières élections ?
• Combien de sièges titulaires sont-ils
vacants ?
Comment négocier un accord d’entreprise sans délégué syndical ?
• Le découpage électoral coïncide-t-il
avec celui de la négociation collective ?
• Les opérations électorales sont-elles
sécurisées ?
• Comment est réalisé le décompte des
suffrages ?
• En cas de quorum non atteint, les suffrages sont-ils décomptés candidat
par candidat ?
• Quelle est la probabilité d’une liste
syndicale au premier tour ?
Plusieurs cabinets spécialisés, dont
FIDAL, proposent une assistance spécifique afin de sécuriser les opérations électorales.
Il faut ensuite procéder à quelques vérifications concernant la branche :
• Quelle est l’activité principale de
l’entreprise ou de chacun de ses établissements ?
• La convention collective appliquée
correspond-elle à celle à laquelle est
assujettie l’entreprise ?
• Fait-elle partie des 18 branches prévoyant la négociation collective avec
les élus ou un salarié mandaté dans
le cadre de la loi du 4 mai 2004 ?
• Comment fonctionne la commission paritaire de branche (rythme des
réunions, représentation patronale,
composition de la commission, présidence…) ?
• A-t-elle déjà rendu des décisions
sur des accords conclus avec des
élus ?
• Quelle est la qualité du dialogue
entre patronat et syndicats de salariés
au sein de commission paritaire de
branche ?
• L’entreprise est-elle adhérente à l’un
des syndicats patronaux représentés
au sein de la Commission paritaire
de branche ?
Est-il oportun
de négocier ?
Dernière interrogation, et non des
moindres : la négociation collective
présente-t-elle un intérêt pour l’entreprise ? En d’autres termes, quels sont
les sujets utiles à négocier ?
Or, les thèmes ne manquent pas. Pour
s’en convaincre voici trois cas dans lesquels la négociation d’un accord est
assortie d’un enjeu financier réel :
➣ La négociation sur la mise en
œuvre d’actions en faveur du
maintien dans l’emploi des salariés âgés.
Les entreprises sont invitées à
conclure, avant 2010, des accords
comprenant des objectifs chiffrés ou
au moins arrêter un plan d’action
pour les seniors.
A défaut d’accord ou de plan,
elles seront soumises à une pénalité égale à 1 % des rémunérations versées. Un rescrit est envisagé afin de valider la teneur du
« plan senior », qu’il devrait être
plus aisé à obtenir si un accord
collectif est signé.
➣ La réforme du temps de travail.
La négociation d’un accord collectif
est incontournable si l’entreprise
veut, en période de récession, simplifier sa modulation, réduire le
coût des heures supplémentaires ou
sécuriser les forfaits en jours dans la
perspective d’une optimisation de
ses coûts salariaux.
➣ La participation obligatoire à la
revitalisation d’un bassin d’emploi en cas de licenciement économique important.
Dans ce cas, l’accord collectif se
substitue à la convention obligatoirement passée avec le représentant
de l’Etat pour un coût moindre au
financement de la revitalisation du
bassin d’emploi (38).
❒
Dans les entreprises sans délégué syndical, si la négociation collective est
favorisée, elle n’est pas pour autant
simplifiée pour pouvoir s’y développer
sans difficulté.
Par souci de simplification, les dirigeants ne vont-ils pas se cantonner au
respect des accords de branche ? Le
développement de la négociation collective dans les PME dépendrait alors
uniquement de la carence des branches
en la matière.
Autant dire que les fédérations patronales ont tout intérêt à être réactives
pour préserver leur branche comme
unique source du droit conventionnel.
La complexité du texte de loi n’est-elle
pas destinée à satisfaire ce dessein ? ◆
(38) C. trav., art. L. 1233-85.
Les Cahiers du DRH - nº 149 - Décembre 2008
21