À l`assaut de la pointe électrique

Transcription

À l`assaut de la pointe électrique
Sigeif
la lettre d ’ information
du syndicat intercommunal
pour le gaz et l ’ électricité
en île - de - france
H O R S S É RIE - n o v e m b r e 2 0 1 0
Le système énergétique français
à la recherche de nouveaux équilibres
Journée d’information des élus d’Île-de-France
Lundi 15 novembre 2010
m a rc h é
d e
l ’ én e r g i e
Une nouvelle donne énergétique
Pour des acteurs qui ont connu le “temps du monopole”, l’ouverture et la mondialisation des marchés de l’énergie, la multiplication
des acteurs, l’accélération de l’évolution des techniques peuvent parfois donner le tournis ! Regards sur un monde mobile.
S o m m a i r e
Il y a seulement dix ans,
nous vivions dans un autre
monde énergétique.
L’ouverture des marchés,
en Europe, était encore
balbutiante. EDF et GDF
étaient des monopoles pu­
blics intégrés. La demande
des pays émergents ne fai­
Jean-Jacques Guillet
Président du Sigeif sait qu’é­merger ! Si les ins­
Député des Hauts-de-Seine truments du protocole de
Maire de Chaville Kyoto se mettaient en pla­
ce, l’interrogation sur la réalité du change­
ment climatique demeurait.
Il faut désormais s’habituer à un paysage
mobile, ménageant des surprises périodi­
ques, heureuses ou malheureuses.
L’illustration la plus éloquente en est certai­
nement l’apparition des gaz non conven­
tionnels. On en connaissait l’existence, mais
aussi les difficultés d’extraction. Aujourd’hui,
ils changent la donne : augmentation notable
de l’offre, baisse des prix spot, mais aussi es­
pérance d’une moindre dépendance des pays
clients à l’égard des fournisseurs.
Pages 2-3
Planète
> Catastrophes de l’année, le réchauffement
sur la sellette
> Sommet de Cancun, le pronostic est réservé
Pages 4-5
Consommation - Maîtrise de l’énergie
> Plus on est riche, plus on émet de CO2
> À l’assaut de la pointe électrique
Les nouveaux instruments
d’un mix énergétique diversifié
Cette nouvelle donne permet au marché ga­
zier de se constituer, conjointement avec le
développement du GNL, et de se distinguer
du marché pétrolier. Elle favorise un mix
énergétique plus diversifié, dans lequel les
énergies renouvelables prennent désormais
leur place. De son côté, le nucléaire retrouve
de belles couleurs et un attrait qui se mani­
feste dans le monde entier, y compris dans
les pays producteurs.
Dans une Europe inquiète de sa sécurité
énergétique, la nouvelle donne peut sembler
rassurante. En vérité, la mobilité du paysage,
la persistance des incertitudes, en particulier
sur la pertinence des politiques publiques,
alimentent une sourde angoisse chez nos
concitoyens.
Les polémiques qui se succèdent sur la fac­
turation, les prix, la pointe électrique, les
­réseaux, etc. contribuent à l’entretenir.
D’ailleurs, qui fait quoi ? La multiplicité des
acteurs, quand on a connu le monopole, est
quelque peu déboussolante.
Pages 6-7
Marché de l’énergie
> L’incroyable aventure du gaz
non conventionnel
Pages 8-9
Énergies renouvelables
> La France dans la bataille de l’éolien
> Photovoltaïque : douche froide
après la surchauffe
Pages 10-11
Nucléaire - Voitures électriques
> L’atome regagne du terrain
> La “voiture de demain” n’est pas
pour aujourd’hui
Page 12
Urbanisme
Éco-quartier, le laboratoire de la ville
en vert
Les élus, surtout au plan local, ont vocation
à la fois à expliquer et à intégrer la nouvelle
donne dans leurs propres politiques.
Marchés mondiaux
et politiques locales de l’énergie
L’existence de marchés mondiaux de l’éner­
gie ne dispense pas ainsi de la recherche de
solutions purement locales, qui ont évidem­
ment l’avantage de ne pas poser de problème
de transport.
Car l’une des principales questions qui se
posent aujourd’hui est bien celle des réseaux,
qu’illustre la problématique de la pointe
électrique. Au fond, le discours le plus facile­
ment reçu par nos concitoyens est celui de
l’efficacité énergétique et du “cinquième
combustible”. Il est clair, simple, compré­
hensible. Il est, de surcroît, l’expression d’une
vraie convergence entre tous les acteurs, et
doit, lui aussi, être porté par les élus.
C’est bien l’objet de cette journée d’infor­
mation de mettre en lumière ces conver­
gences, au-delà du foisonnement énergé­
tique actuel.
Pages 13-14-15
Activités du Syndicat
> Le Sigeif, premier syndicat
inter­communal d’énergie
> Priorité au cinquième combustible
> Au jeu de la concurrence,
le gaz est 45 % moins cher
Page 16 : en bref
> Énergie : les Français dépensent
2300 euros par an
> La ville décarbonée sort des sables
> L’aviation civile veut voler vert
> Éteignons pour sauver les oiseaux
> Les difficultés de la concurrence
> Suivez le “coach carbone”
> Courrier au médiateur de l’énergie
Sigeif
p l a n è t e
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Climat
Un plan climatique français
est en préparation
Catastrophes de l’année, le
réchauffement sur la sellette
Alors que l’année n’est pas encore terminée, 2010 entre déjà dans l’histoire
de la météorologie : sécheresses, inondations, records de chaleur renvoient aux sombres
perspectives sur les effets futurs du changement climatique.
Les climatologues dans leur ensemble refu­
sent de lier entre elles aussi directement les
catastrophes qui ont frappé la Russie, le Pa­
kistan, la Chine ou l’Europe de l’Est, ar­
guant du “manque de recul”. Mais tous les
jugent “cohérentes” avec les conclusions du
GIEC, le Groupe intergouvernemental
d’experts sur l’évolution du climat.
Records battus
chaque année
“Qu’il s’agisse de fréquence ou d’intensité, on
bat pratiquement chaque année des records, et
même plusieurs, parfois, en une semaine : en
Russie, le record absolu observé à Moscou, jamais
vu depuis le début des enregistrements météo
il y a cent trente ans (38,2 °C fin juillet) a été
battu dès le début août. Au Pakistan, les inon­
“Le soupçon est bien là…”
dations n’ont jamais connu une telle ampleur”,
“Ce sont des événements qui sont appelés à se relève Omar Baddour, chargé du suivi du
reproduire et à s’intensifier dans un climat per­ climat à l’Organisation météorologique
turbé par la pollution des gaz à effet de serre”, mondiale (OMM).
explique Jean-Pascal Van Ypersele, vice-­ “On se trouve bien, dans les deux cas, dans une
président du GIEC. “On ne peut pas jurer que situation sans précédent, assure-t-il, en nuan­
rien de tout cela ne se serait passé il y a deux çant : la succession d’extrêmes et l’accélération
cents ans, mais le soupçon est bien là ; même s’il des records sont conformes aux projections du
GIEC. Mais il faudra observer ces extrêmes sur
plusieurs années pour en tirer des conclusions en
Été 2010 : la Russie en feu.
termes de climat.”
D’autant que les inondations au Pakistan
pourraient être imputables au phénomène
La Niña, qui – à l’inverse d’El Niño, auquel
il succède généralement – est provoqué par
un refroidissement de la température en
surface de l’océan Pacifique central. D’ail­
leurs, pour le climatologue anglais Andrew
Watson, la chaleur inhabituelle de 2010 est
liée au Niño de l’année passée : “Nous savons
que, après lui, suit une année particulièrement
chaude, et c’est certainement ce qui s’est passé
cette année.”
Présomption
de culpabilité
ne s’agit que d’un soupçon. Les événements ex­
trêmes sont une des manières dont les change­
ments climatiques deviennent dramatiquement
perceptibles.”
Selon l’Agence américaine de l’océan et de
l’atmosphère (NOAA), la planète n’a jamais
eu aussi chaud. Or, selon le GIEC, dans un
climat qui se réchauffe, les périodes de sé­
cheresse et de vagues de chaleur devien­
dront plus intenses et plus longues.
2
Rattaché à l’université britannique d’East
Anglia, le professeur Watson se montre pru­
dent : “Je suis pratiquement sûr que l’augmen­
tation de la fréquence de ce type d’étés depuis les
vingt ou trente dernières années est liée au chan­
gement climatique. Mais vous ne pouvez pas
vous appuyer sur un seul événement ou sur un
seul été.”
Plus que le climat ou l’environnement,
“c’est l’intervention de l’homme qui crée la ca­
tastrophe”, estime le Vénézuélien Salvano
Briceno, qui dirige à Genève la stratégie in­
ternationale de réduction des catastrophes
de l’ONU : “Si le développement des bidonvil­
les est encore inévitable dans bien des pays, les
gouvernements peuvent guider les déshérités vers
des zones moins exposées.”
La France doit d’urgence se donner les
moyens de mesurer et de comprendre
l’impact du réchauffement. C’est la
conclusion de l’ébauche du plan natio­
nal d’adaptation au changement clima­
tique lancé par le Gouvernement.
Ce rapport de cent cinquante pages
contient les recommandations des ac­
teurs de tous horizons engagés dans la
concertation nationale qui s’achève ac­
tuellement, sur le modèle du Grenelle de
l’environnement.
“Seules l’amélioration des connaissan­
ces et leur diffusion permettront de faire
de cette question une priorité nationale,
en ces temps de crise économique”, ar­
gumente l’ancien député et sénateur
­réunionnais Paul Vergès, président de
l’Observatoire national sur les effets du
réchauffement climatique et coordina­
teur du rapport.
“La hausse des températures ne sera
pas partout une catastrophe ; ce sera
même pour certains une opportunité,
seulement on n’a pas une idée très pré­
cise des variations régionales du climat,
et il reste une grande incertitude concer­
nant l’augmentation du niveau de la mer”,
explique Jean Jouzel, glaciologue, mem­
bre du GIEC, un des présidents de la
concertation.
Inventer
une autre façon
de vivre
L’impact promet toutefois d’être considé­
rable, insiste le scientifique : “Le ré­
chauffement est inéluctable ; or, deux ou
trois degrés de plus, c’est vraiment un
climat très différent de ce que nous
connaissons. Des cultures agricoles vont
devoir se déplacer de plusieurs cen­
taines de kilomètres, il faudra inventer
une autre façon de vivre en ville, repen­
ser la production d’énergie, abandon­
ner certaines zones littorales...”
Que ce soit en matière de santé, de res­
sources en eau, de biodiversité, de ris­
ques naturels, le réchauffement va ag­
graver tous les problèmes et entraîner
des effets domino, préviennent les rap­
porteurs, dont les deux cent deux recom­
mandations fournissent un inventaire
fouillé des pistes à explorer. “Nous som­
mes au tout début d’un travail d’inven­
taire et d’expertise, nous apportons plus
de questions que de réponses”, estime
Paul Vergès.
Le plan du Gouvernement est attendu
pour 2011, sans qu’on sache encore, à
ce stade, s’il prendra la forme d’un grand
texte de loi, sorte de Grenelle 3.
Sigeif
p l a n è t e
> Négociation
Sommet de Cancun,
le pronostic est réservé
Après l’échec du sommet de Copenhague, en décembre dernier, arrivera-t-on
à un accord sur le climat au sommet de Cancun (Mexique), du 29 novembre
au 10 décembre prochains ? Rien n’est moins sûr. Décryptage.
Le temps presse. Dernière répétition avant
la grand-messe onusienne de Cancun, le
“pré-sommet” qui s’est tenu début octobre
à Tianjin (Chine) a rappelé aux délégués de
cent soixante dix-sept pays tout le chemin
> Ils ont dit
“
Les gravissimes inondations
au Pakistan et la canicule en
Russie nous ont crié qu’un avenir
de désastres climatiques n’est pas
l’avenir que nous souhaitons.
„
Christiana Figueres,
(Costa Rica) secrétaire exécutive
à la convention cadre des Nations unies
sur le changement climatique (CCNUCC).
qu’il leur reste à parcourir vers un accord
général sur le changement climatique, alors
que le protocole de Kyoto arrive en fin de
course (lire ci-contre).
Les modestes progrès obtenus dans les dis­
cussions de Tianjin ont été éclipsés par le
bras de fer continu entre la Chine et les
États-Unis, assombrissant les perspectives
d’un accord général à Cancun. À l’heure
­actuelle, à deux semaines de l’ouverture du
sommet mexicain, nul n’entrevoit com­
ment pourrait s’estomper cet antagonisme
qui avait fait capoter Copenhague.
Responsables de la moitié des émissions de
Chine : enfournement de la houille à la cuiller.
gaz à effet de serre (GES) de la planète, les
deux champions mondiaux de la pollution
n’ont eu de cesse de se rejeter la balle, cha­
que partie accusant l’autre de dérobade.
“Un cochon
devant son miroir”
En résumé, les États-Unis ont appelé la
Chine à accepter un contrôle accru des
émissions de sa pollution, ce que refuse
­Pékin. La Chine, obsédée par tout ce qui
pourrait constituer de près ou de très loin
un frein à son essor industriel, assure exer­
cer son propre contrôle, répondant aux
États-Unis“qu’il n’est pas juste de critiquer les
autres quand on ne fait rien” (allusion à l’échec
de Barack Obama à faire voter par le
Congrès sa loi sur le climat). En toute ama­
bilité, Su Wei, le principal négociateur
chinois, en est venu à comparer les ÉtatsUnis à un “cochon qui se regarde dans
le miroir”.
En marge de ces “chinoiseries”, devenues à
la longue monotones, quelques avancées
ont été accomplies. Il s’agit de dossiers,
dont le principe avait été acté à Copenha­
gue et qui pourraient devenir opération­
nels, comme le “Fonds vert”, un mécanis­
me pour le transfert de technologies ou
pour aider les pays les plus vulnérables à
“s’adapter” aux impacts du changement
climatique, ainsi que la lutte contre la défo­
restation.
Lots de consolation
pour sauver la face
Autant de lots de consolation qui pour­
raient permettre aux nations de sauver la
face, sous le soleil de Cancun, et éviteraient
après Copenhague de porter un nouveau
coup à la crédibilité du processus onusien.
L’année dernière, à Copenhague, le sommet
s’était conclu par un accord négocié à la
hâte, fixant l’objectif de limiter la hausse de
la température de la planète à 2 °C, mais
restant évasif sur les moyens d’y parvenir.
Cette hausse de 2 °C est considérée comme
le seuil au-delà duquel se produiront inévi­
tablement de graves désordres climatiques,
sécheresses extrêmes, inondations ou hausse
du niveau des mers.
L’avenir incertain
du protocole de Kyoto
Que faire du protocole de Kyoto, qui
engage les pays riches à réduire leurs
émissions de gaz à effet de serre de 5 %
d’ici à 2012, par rapport à 1990 ?
La première période d’engagement de
ce traité, signé en 1997, arrive à
échéance fin 2012.
Or, l’enlisement actuel de la négocia­
tion sur le climat permet difficilement
d’imaginer qu’un autre traité ou un
­renouvellement de Kyoto sera prêt au
1er janvier 2013. Il faut donc prévoir
une parade pour combler ce possible
vide juridique.
Celui-ci aurait une conséquence néfaste
sur le principal dispositif institué par
le protocole : le “mécanisme de déve­
loppement propre” (MDP), qui permet à
des entreprises des pays riches de finan­
cer des projets limitant les émissions de
gaz à effet de serre dans les pays en
développement, en échange de crédits
carbone qu’elles peuvent ensuite soit uti­
liser pour atteindre leurs propres objec­
tifs de réduction d’émissions, soit valori­
ser sur les marchés du carbone.
Les signataires du protocole – que les
États-Unis n’ont jamais signé –, repré­
sentant environ 20 % des émissions mon­
diales, sont pour l’essentiel l’Europe, le
Japon et la Russie.
Faits et chiffres
L’Inde pointe désormais à la
troisième place dans le peloton
des plus gros émetteurs mon­
diaux de gaz à effet de serre :
5 % des GES, derrière les ÉtatsUnis (22 %) et la Chine (23%).
3
Sigeif
c o ns o mm a t i o n
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Rapport Insee
Pourquoi la chasse au CO2
fait du sur-place
Plus on est riche,
plus on émet de CO2
L’Institut français de la statistique a souhaité donner suite au rapport Stiglitz
sur la mesure de la performance économique et du progrès social,
remis en septembre 2009 au président Sarkozy, en chiffrant l’empreinte carbone
du circuit économique hexagonal. Édifiant.
C’est un résultat plutôt positif : la France,
qui représente 1 % de la population mon­
diale et 3 % de la richesse mondiale, ne gé­
nère que 1,3 % des émissions de CO2 de
l’ensemble de la planète. En comparaison, la
Chine et les États-Unis sont à l’origine de
près de 45 % des émissions de gaz à effet de
serre dans le monde, tandis que l’Allemagne
et la Grande-Bretagne y contribuent res­
pectivement à hauteur de 2,6 et 1,7 %.
La particularité française tient au fait que
l’énergie électrique produite provient à
90 % de technologies non émettrices de
CO2 (nucléaire et hydroélectrique).
Chauffage et déplacements
les plus énergivores
Chez les ménages français, 34 % des émis­
sions de CO2 sont liés au logement et 31 %
aux transports, alors que ces deux postes re­
présentent respectivement 25 % et 14 % de
leur budget. “Ce résultat n’a rien de surpre­
nant puisque les ménages consacrent l’essentiel de
l’énergie qu’ils achètent directement à se chauffer
et à se déplacer”, note l’Insee (1).
À l’inverse, les dépenses de loisirs et culture
ajoutées à celles en hôtels, cafés et restau­
rants n’induisent que 9 % des émissions
alors qu’elles représentent 15 % du budget
total de consommation.
Mais, pour refléter plus exactement la res­
ponsabilité directe du consommateur, il
faut ajouter une estimation des émissions
Une tonne de dioxyde de
carbone (CO2) équivaut à :
>1
an de chauffage au gaz pour
un trois-pièces à Paris
>1
aller-retour Paris-New York
en avion
> La fabrication de 1,8 t de papier
>1
4 000 km d’une voiture de petite
cylindrée en ville
>8
500 km d’une voiture 4×4 en ville
>2
0 allers-retours Paris-Londres
en avion
Source : www.greenit.fr
4
Pas d’éclaircie sur le front du CO2.
Selon une étude du Commissariat géné­
ral au développement durable, qui dé­
pend du ministère de l’Écologie, les
émissions françaises de dioxyde de car­
bone sont restées stables depuis 1990,
malgré les avancées techniques et la
“chasse au gaspi”.
Entre 1990 et 2007 (date des dernières
données disponibles), le total des émis­
sions de CO2, liées au réchauffement
climatique, est ainsi passé de 438 mil­
lions de tonnes à 439 millions. Un piéti­
nement qui n’indique rien de bon.
Les émissions de CO2
en tonnes par personne en 2005
Cadres
8,1
Indépendants
7,3
Professions intermédiaires
Agriculteurs
5,8
Employés
5,7
Ouvriers
Encore un effort !...
6,9
5
Source : Insee.
de CO2 correspondant à ce qu’il a acheté
(nourriture, vêtements, biens de consom­
mation) et qui a été fabriqué non seule­
ment en France, mais aussi à l’étranger.
9 tonnes par an
et par personne en France
Des évaluations certes théoriques, mais pas
moins spectaculaires : les quantités de CO2
induites à l’étranger pour la fabrication des
produits que nous importons sont de 339
millions de tonnes, un montant supérieur
de 20 % aux émissions induites par l’activité
productive dans l’Hexagone (280 millions
de tonnes). Et celles liées à nos exportations
se montent à 205 millions de tonnes (95
millions sur notre territoire et 110 millions
émises à l’étranger, du fait du contenu en
importations de ces exportations).
Au total, si chaque Français émet directe­
ment 6,4 t de CO2 sur le territoire, du fait
de l’activité économique, notre demande
Côté chauffage domestique, les Français
font un peu mieux, puisque les émissions
ont baissé de 5 %. Mais, là encore, la
recherche du confort et la croissance de
la population annulent, en partie, les ef­
forts des ménages qui ont pu acquérir
des chaudières économiques.
Quant aux activités de production – res­
ponsables de 70 % des émissions –
elles ont réduit de 10 % leurs émissions.
Bonne nouvelle, mais pas vraiment :
elles ont augmenté de 25 % dans les ser­
vices, du fait des transports, notamment.
Bilan : une stagnation globale dans les
entreprises et les administrations.
Des résultats qui menacent les objectifs
que la France s’était fixés en ratifiant le
protocole de Kyoto : réduire de 20 % les
émissions de gaz à effet de serre d’ici à
2020, par rapport à 1990. Une raison
de plus pour ne pas baisser les bras.
finale représente en réalité l’émission de 9 t
par an et par habitant (60 % dans l’Hexa­
gone et 40 % à l’étranger).
Les célibataires
gaspillent davantage
Par ailleurs, les chiffres de l’Insee indiquent
que les ménages aisés émettent pas loin de
trois fois plus que les plus modestes. “Les
20 % des ménages les plus aisés induisent, via
leurs achats, 29 % des émissions de CO2, alors
que les plus modestes n’en induisent que 11 %”,
affirme l’étude.
Les émissions varient également selon la
taille des familles, compte tenu des écono­
mies d’échelle au sein d’un ménage : an­
nuellement, un couple avec trois enfants ou
plus se contente de 4,1 t par personne, alors
qu’une personne célibataire “dévore” 8,6 t
de CO2 à elle toute seule.
(1) Rapport 2010 de l’Insee sur l’économie fran­
çaise. Les statistiques portent sur l’année 2005.
m a î t r i s e
d e
Sigeif
l ’ én e r g i e
> Pics de consommation
À l’assaut
de la pointe électrique
Orienter les clients
vers les heures creuses
Qu’est-ce qui survient, la plupart du temps vers 19 heures, en période de grand froid,
déstabilise notre système électrique, coûte cher à notre balance commerciale et multiplie
nos émissions de gaz à effet de serre ?
Il s’agit évidemment des pics de consom­
mation d’électricité également dénommés
“pointe électrique”. Depuis une dizaine
d’années, la France bat des records en la
matière. Le dernier en date remonte au
mercredi 7 janvier 2009, à 19 heures :
92 500 MW, alors que la demande se situe
en moyenne entre 50 000 et 70 000 MW.
Le chauffage électrique,
premier coupable
La pointe de consommation se produit le
plus souvent au cœur de l’hiver. Accusé
­numéro un : le chauffage électrique, princi­
pal ou d’appoint, une spécificité bien fran­
çaise. Généralement observée autour de
19 heures, la pointe résulte de l’allumage
quasi simultané des installations électriques
domestiques : éclairage, télévision, cuisi­
nière, ordinateur...
Les capacités de production et le réseau
sont alors soumis à rude épreuve ; les cen­
trales nucléaires et les barrages hydroélec­
triques ne suffisent plus. EDF doit mettre
en route ses centrales thermiques, fortes
émettrices de CO2. La France doit égale­
ment, et au prix fort, acheter de l’électricité
à l’étranger (en Allemagne principalement).
Alors, comment mieux gérer la pointe ?
À cette question répond un rapport parle­
mentaire cosigné par le député Serge Poi­
gnant et le sénateur Bruno Sido.
“Près de 90 % de l’électricité produite en France
sont décarbonés grâce au nucléaire et à l’hydrau­
lique”, rappellent les rapporteurs. Mais,
comme la pointe est appelée à croître, les
émissions de CO2 et les importations sui­
vent le mouvement. De ce fait, depuis 1990,
la part des énergies fossiles dans la produc­
tion d’électricité française a augmenté de
près de 25 %.
Il faut savoir qu’en période hivernale, le
système électrique a besoin de 2100 MW
supplémentaires par baisse d’un degré.
Trois leviers essentiels et distincts de traite­
ment de la pointe doivent permettre d’atta­
quer efficacement le problème, indique le
rapport : la réduction globale du niveau de
consommation, le lissage de la courbe de
charge par le pilotage de la demande, le dé­
veloppement de capacités permettant de
répondre à la pointe résiduelle.
Consommation française d’électricité, depuis 1960 (en TWh)
1960
45,9 millions d’habitants. Consommation moyenne
par habitant et par an :
434,6
1425 kWh
362,9
449,5
444,9
445,7
458,6
382,4
322,9
276,8
230
+ 701 %
2008
166,7
129,8
62,1 millions d’habitants
Consommation moyenne par habitant et par an :
94
7381 kWh
65,4
1960
1965
1970
1975
1980
1985
1990
1995
1997
2003
2005
En cinquante ans, la consommation moyenne annuelle par habitant a progressé de 518 %.
Pour l’Île-de-France, qui représente 18,5 % de la population nationale
et 25 % de la consommation, la progression est de 529 %.
2006
2007
2008
Source : SOeS (Meeddat).
Parmi leurs vingt-deux propositions, les
deux parlementaires suggèrent notamment
de lancer “un programme d’aide à la réno­
vation de l’éclairage public” et de favoriser
le développement de dispositifs permettant
d’éteindre à distance les chauffages élec­
triques et les climatiseurs.
Par ailleurs, ils prônent entre autres “d’orien­
ter les clients vers les offres heures pleines/
heures creuses, qui doivent leur permettre
d’améliorer leur mode de consommation”.
Une de leurs propositions est déjà l’objet
d’un article du projet de loi Nome (Nou­
velle organisation du marché de l’électrici­
té), en cours d’examen devant le Parlement.
Elle consiste à inciter les fournisseurs
d’électricité à investir dans des moyens de
production ou d’effacement de la demande
(lire ci-contre).
Efficacité
de l’effacement diffus
Outre la mise en place d’une tarification
incitative visant à favoriser la consom­
mation hors période de pointe, le dispo­
sitif dit d’effacement fait déjà ses preu­
ves. Mode d’emploi.
Le gestionnaire de réseau (RTE)demande
à des industriels de “s’effacer” lors des
périodes de pointe. Un contrat d’efface­
ment de jour de pointe a été mis en
place en 1994 avec des entreprises de
la sidérurgie, de l’automobile, de la
chimie... Celles-ci bénéficient d’un tarif
très réduit auprès d’EDF, à condition de
s’effacer vingt-deux jours par an, entre
novembre et mars, en période de pointe.
Compteurs intelligents :
prolongation du test
Le déploiement annoncé des compteurs
intelligents devrait faciliter l’effacement
diffus. ERDF prévoyait de tester Linky, un
compteur communicant, à Lyon (deux
cent mille clients équipés) et en Indre-etLoire (cent mille) jusqu’à la fin 2010,
avant la mise en place de trente-trois mil­
lions de ces compteurs en 2016. Mais
la FNCCR s’est alarmée de ce calen­
drier, jugeant “prématuré de généraliser
le dispositif“. De même, la CRE avait
préconisé une prolongation de l’expéri­
mentation pour “l’évaluation du système
en période de froid”. En conséquence,
la phase de test de ces compteurs élec­
triques sera finalement prolongée, au
moins jusqu’au 31 mars 2011.
5
m a rc h é
d e
Sigeif
l ’ én e r g i e
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Révolution
L’incroyable aventure
du gaz non conventionnel
cient les achats et les livraisons à court
terme), et compte tenu de la surproduction,
les cours sont passés de 13 dollars le million
de BTU (British Thermal Unit, unité de
référence) en 2008 à 4 dollars aujourd’hui.
Plus aucune installation de liquéfaction
existante des pays producteurs ne tourne à
plein régime, des projets de nouvelles in­
frastructures sont tombés en rade.
C’est l’événement majeur du moment dans le monde de l’énergie : le gaz non
conventionnel (plus précisément, le gaz de schiste), dont les immenses réserves sont
exploitées aux États-Unis depuis quatre ans, révolutionne les équilibres énergétiques
de la planète. Récit.
Des petits trous, encore des petits trous...
Air connu. Des petits trous pas chers, de
surcroît. En l’occurrence, il s’agit là des fo­
rages gaziers que les derniers chercheurs
d’or bleu en date ont entrepris sur le terri­
toire américain, en 2006. Plus de cinquante
mille puits creusés selon de nouvelles
techno­logies. Bonne pioche. Les prospec­
teurs les plus optimistes pouvaient-ils envi­
sager que, trois ans plus tard, les États-Unis,
grâce au gaz de schiste – shale gas en anglais –,
auraient produit davantage de gaz, toutes
origines confondues, que la Russie ?
Effet domino sur le gaz russe,
le GNL et le nucléaire
Pouvaient-ils imaginer qu’en un temps re­
cord leurs exploits remettraient en question
les données mondiales de l’énergie ?
> Ils ont dit
“
Première conséquence significative de l’es­
sor exponentiel de ce gaz venu d’ailleurs :
la grimace de Gazprom. Le géant russe pré­
voyait il y a encore cinq ans de fournir 20 %
du marché nord-américain en gaz naturel
liquéfié (GNL) jusqu’en 2020. En rendant
les Américains quasi autosuffisants en gaz
naturel, la percée fulgurante du gaz non
conventionnel (GNC) anéantit ces espoirs.
Le raz de marée aussi soudain qu’inattendu
du gaz de schiste frappe également de plein
fouet le marché du gaz naturel liquéfié
(GNL), objet d’énormes investissements ces
dernières années.
Devant la large part de marché qui se ferme,
les grands pays exportateurs vers les ÉtatsUnis, comme le Qatar ou l’Australie, dé­
routent leurs méthaniers vers l’Europe,
contribuant à la dégringolade des prix sur
le marché spot. Sur ce marché (où se négo­
Il faut se garder des illusions
faciles. Même si les progrès
technologiques font potentiellement baisser les coûts, il faut bien
garder à l’esprit que les prix
de l’énergie sont tendanciellement
à la hausse et que les gaz
non conventionnels n’échapperont
pas à cette tendance.
„
Pierre Gadonneix,
président d’honneur d’EDF, président
du Conseil mondial de l’énergie (CME)
Le chamboulement des flux du gaz com­
promet également l’avenir des gazoducs, le
projet Nabucco en particulier, soutenu par
l’Union européenne, 3300 km entre l’Asie
Les différents types de gisements gaziers
Gaz de charbon (grisou)
Se trouve en quantité dans les
mines de charbon déjà exploitées.
Forage à plus de 2500 m
On injecte à haute pression un
mélange d’eau, de sable et de
produits chimiques pour fracturer la
roche et récupérer le gaz de schiste.
Na
pp
hr
ep
Gaz conventionnel
Se trouve dans des
poches importantes.
éat
iqu
e
Pétrole
Grès
Gaz conventionnel associé
Il est séparé du pétrole
lors de l’extraction.
Schiste
Gaz de schiste
Le schiste, une roche qui
présente un aspect feuilleté,
contient parfois du méthane
dans ses fissures.
Gaz de réservoir ultracompact
(tight gas) Difficile à exploiter,
car le gaz est emprisonné dans des roches
où la pression est très forte.
En rouge : Gaz non conventionnel.
Source : U.S. Energy Information Administration.
6
m a rc h é
d e
Sigeif
l ’ én e r g i e
> Révolution
centrale et la Turquie sans passer par la Rus­
sie. Même le nucléaire subit l’effet domino.
Alors que le gaz américain devient telle­
ment bon marché (et deux fois moins
émetteur de CO2 que le charbon) pour ali­
menter des centrales électriques, l’adminis­
tration Obama s’interroge sur la pertinence
des quatre réacteurs EPR qu’envisageait de
construire EDF avec son partenaire améri­
cain Constellation Energy (lire page 10).
derricks qui poussent comme des champi­
gnons, de l’Ohio à la Pennsylvanie, en pas­
sant par le Kentucky, la Virginie, le Colora­
do et, bien sûr, le Texas...
L’année dernière, seulement, revenant de
leurs quatre années de myopie et flairant
comme une odeur d’eldorado, les grandes
compagnies volent au secours de la victoire,
investissant à tout va dans le GNC. Shell, la
dernière en date, met sur la table, fin mai
2010, 4,7 milliards de dollars (3,8 milliards
d’euros), payables entièrement en numérai­
re, pour racheter les gisements d’une plus
modeste compagnie qui a fait fortune en
Pennsylvanie. Six mois plus tôt, ExxonMo­
bil avait frappé très fort en s’offrant le pro­
ducteur indépendant texan XTO pour la
somme fabuleuse de 41 milliards de dollars,
tandis que Total, plus modestement, injec­
tait 2,25 milliards dans un partenariat avec
l’Américain Chesapeake.
Au moins un siècle
de réserves américaines
“L’avenir de l’humanité !”
des seconds couteaux du secteur : compa­
gnies pétrolières locales, mais aussi des cen­
taines d’acteurs indépendants, fermiers du
Midwest d’autant mieux stimulés que, selon
le régime minier américain, le propriétaire
du sol l’est également du sous-sol et de ses
richesses éventuelles.
Des majors qui volent
au secours de la victoire
Tandis que les pionniers entament leurs
trous, les majors (Shell, BP, Exxon Mobil…)
ont la tête ailleurs, obnubilés par leurs in­
vestissements dans la course à l’off shore et
aux projets planétaires de GNL. Si bien que
les colosses ne prêtent aucune attention aux
Total explore à Montélimar
Une “révolution” des GNC est-elle possible
ailleurs qu’aux États-Unis ? Oui, mais...
Il est notoire que les potentialités du gaz
de schiste sont importantes dans quelques
bassins sédimentaires du monde (Europe,
Canada, Australie, Chine, Inde, Indonésie,
Kazakhstan...).
En Europe, il reste à démontrer que leur
extraction, qui exige de très grandes
quantités d’eau additionnée de produits
chimiques, se réalise de façon économique
et durable, en accord avec des populations
beaucoup plus denses qu’aux États-Unis.
En France, dans le Sud-Est, la société Total
a obtenu en mars dernier un permis
d’exploration dans la région de Montélimar
(4327 km2 entre Montpellier et Valence).
Les premières études sont en cours,
mais le directeur général du septième
pétrolier mondial, Christophe de Margerie,
“Il n’est pas exagéré de dire qu’une révolution
dans l’offre en gaz naturel est en cours” décla­
rait en septembre dernier le Pdg de Shell
devant le Congrès mondial de l’énergie à
Montréal, assurant que, “au rythme actuel de
production des gisements, le monde a des réserves
suffisantes pour les deux cent cinquante prochai­
nes années”. Et Peter Voser d’ajouter : “Le
gaz de schiste est l’avenir de l’humanité !” Le
big boss du géant anglo-néerlandais, qui ne
passe pas pour un exalté, prédit que, dans
quelques décennies, avec l’extinction du
pétrole, le gaz fera rouler les voitures et vo­
ler les avions. Nous n’en sommes pas là...
Mais, au train où vont les forages, il va nous
falloir certainement recomposer le bouquet
énergétique de notre futur.
Les trois types de gaz non conventionnel
présents en France
ne se hasarde pas à des pronostics trop
ambitieux : “Montélimar a plus de chances
de rester célèbre pour son nougat que pour
ses hydrocarbures.”
Trois types
de gaz non conventionnel
Le gaz non conventionnel est ainsi nommé
parce qu’il ne provient pas de rochesréservoirs classiques. Les trois principaux
types de GNC sont le gaz de schiste
(shale gas), environ 49 % des réserves
totales connues à ce jour dans le monde,
le gaz de charbon (grisou), le gaz de
réservoirs sableux compacts (tight gas),
qui totalisent respectivement 28 % et 23 %
des réserves.
Source : Bloomberg
À en croire les experts du secteur, grâce au
gaz de schiste tombé du ciel, si l’on peut
dire, les États-Unis disposent désormais
d’un siècle de réserves, voire deux. Même si
d’autres surprises ne surviennent pas d’ici
là, le GNC pourrait, en 2020, représenter
64 % de leur production de gaz naturel
(contre 42 % en 2007 et 1 % en 2000).
À vrai dire, ce gaz, de même composition
que celui de nos gazinières (méthane), est
connu de longue date. Emprisonné depuis
des millions d’années dans des zones sédi­
mentaires, il s’incruste dans une multitude
de microcavités comparables aux alvéoles
d’une éponge. Il exige des méthodes d’ex­
traction spécifiques, celles-ci ayant été
jusqu’alors jugées trop coûteuses pour être
rentables.
Mais la hausse du prix du gaz (tant que ce­
lui-ci était complètement aligné sur le pé­
trole) et les progrès tout récents made in
USA en matière de forage horizontal et de
fracturation hydraulique des roches, fracking
en anglais, ont changé la donne.
Dans un premier temps, ces innovations
– c’est sans doute l’aspect le plus extraordi­
naire de l’aventure – sont mises à profit par
Gaz de schiste
Gaz des mines
de charbon
Gaz de réservoir
compact
7
E N E R GIE S
Sigeif
R E N O U V ELA B LE S
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Grand projet
La France se lance dans
la bataille de l’éolien en mer
Déterminé à rattraper le retard de la France dans le domaine de l’éolien marin,
le Gouvernement lance un appel d’offres massif visant à construire six cents éoliennes
d’ici à 2020 au large des côtes françaises. Compte rendu.
Si les projets du Gouvernement voient le
jour à partir de 2015, six cents éoliennes
d’une capacité de 3000 MW, l’équivalent
d’un puissant réacteur nucléaire EPR nou­
velle génération, seront alors “plantées” dans
la mer. L’objectif est, à l’horizon 2020,
d’installer 6000 MW, pour un investisse­
ment de 15 à 20 milliards d’euros. En atten­
dant, le Gouvernement devait confirmer
fin octobre le lancement des appels d’offres
annoncés en mai. Ils portent sur un investis­
sement de 10 milliards d’euros (3,5 millions
d’euros par MW) pour la construction de
parcs d’éoliennes dans la Manche, l’Atlan­
tique et aussi la Méditerranée.
Devenir un leader
des énergies marines
L’enjeu pour la France est double : respecter
les engagements du Grenelle de l’Environ­
nement et du paquet “énergie-climat”
(23 % d’énergies renouvelables en 2020),
mais aussi conquérir une position de leader
dans la future industrie des énergies ma­
rines et permettre la création de milliers
d’emplois pérennes sur le sol national, no­
tamment dans les zones portuaires.
Il n’y a encore aucune éolienne au large
des côtes françaises, alors que le RoyaumeUni et le Danemark ont respectivement
43 % et 31 % de la capacité installée en Eu­
rope. L’avenir du seul projet en cours, mené
par l’Allemand Enertrag au large de Veu­
lettes-sur-Mer (Seine-Maritime), est sus­
pendu au recours en justice déposé par des
riverains.
Des PME de pointe
pour rattraper le temps perdu
Mais la France devrait pouvoir rattraper le
temps perdu dans la bataille de l’éolien.
Certes, elle ne dispose pas d’ensembliers
aussi puissants que les champions du mon­
de, l’Américain General Electric, l’Alle­
mand Siemens, l’Espagnol Gamesa ou le
Danois Vestas. Cependant, une filière fran­
çaise peut se construire sur la base de PME
et bénéficier de l’ancrage hexagonal d’in­
dustries performantes (aéronautique, métal­
lurgie, chantiers navals...).
Donner aux projets
la meilleure acceptabilité
En 2009, le Syndicat des énergies renouve­
lables a identifié plus de cent quarante en­
treprises dans dix-huit secteurs connexes à
l’éolien (composants, maintenance, ingé­
nieries civile et électrique, transport et
chantiers…).
Selon une étude de Capgemini Consulting,
“l’ensemble du spectre des composants
pourrait être couvert par les entreprises
françaises dans un délai de douze à trentesix mois”. Les appels d’offres s’adressent
à des opérateurs industriels. À ce titre, les
candidats devront exposer leur projet :
contribution au développement de l’indus­
trie dans l’éolien en mer, mobilisation du
tissu industriel et des infrastructures locales,
créations d’emplois… Leur ciblage des ap­
pels dans des zones définies après concerta­
tion permettra à la fois de conduire un dé­
veloppement ordonné, évitant notamment
la précipitation ou le mitage, et de donner
aux projets la meilleure acceptabilité.
Les villes côtières sont intéressées par cet
essor de l’éolien, surtout quand elles doi­
vent opérer de douloureuses reconversions
industrielles, comme Le Havre, Nantes,
Saint-Nazaire ou Bordeaux. Bon vent !
Attention
aux oiseaux !
Comment concilier exploitation de l’éo­
lien et protection de la biodiversité ? Tel
était l’objet du séminaire organisé par
la Ligue pour la protection des oiseaux
(LPO), les 15, 16 et 17 septembre der­
nier, en partenariat avec l’Ademe et le
ministère de l’Écologie.
Les impacts des parcs éoliens sur la
faune sont de trois types : mortalité di­
recte, dérangement et perte d’habitat.
Afin de préserver les chauves-souris et
oiseaux migrateurs nocturnes, une tech­
nique consiste à ralentir les turbines pen­
dant la nuit, au moment où la vitesse du
vent est la plus basse.
En Écosse, les chercheurs de l’université
d’Aberdeen ont démontré que des ra­
dars peuvent détourner les chauves-sou­
ris des pales des éoliennes.
Éviter les sources lumineuses
Les investissements dans les énergies
renouvelables en 2009
En dollars
Investissement total,
Espagne
Royaume-Uni
Canada
États-Unis
Allemagne
Italie
Brésil
France
Chine
par habitant
225,8
182,0
97,0
60,3
52,2
43,3
38,5
27,5
25,8
en milliards de dollars
10,4
11,2
3,3
18,6
4,3
2,6
7,4
1,8
34,6
2,0
2,3
Inde
Source : PEW Institute.
8
En France, le guide de l’étude d’impact
sur l’environnement des parcs éoliens
détaille quelques mesures pour réduire
ou compenser les impacts d’un projet
éolien sur l’avifaune.
Parmi ces mesures : éviter de commen­
cer un chantier lors de périodes de re­
production des espèces locales. Pour
compenser la perte d’habitat, il peut
être créé un habitat de substitution avec,
par exemple, la reconstitution d’un ré­
seau de haies.
Également à éviter : l’éclairage des mâts
des éoliennes (hors balisage lumineux
obligatoire) pour avertir les oiseaux. En
effet, les sources lumineuses ont tendan­
ce à attirer les oiseaux, surtout par temps
de brume et de brouillard.
én e r g i e s
Sigeif
r e n o uv e l a b l e s
> Solaire
L’Allemagne aussi éclipse
le solaire
Photovoltaïque : douche
froide après la surchauffe
La décision de diminuer encore les tarifs d’achat de l’électricité solaire ainsi que de réduire
de moitié l’aide fiscale aux particuliers devrait calmer l’emballement du photovoltaïque,
trop beau pour être rentable. Explication.
Les objectifs du Grenelle pour l’année 2020
– 5400 MW de panneaux photovoltaïques
installés – pourraient être atteints dès 2013.
Le tarif de rachat du courant par EDF – le
meilleur du monde avec ses 58 centimes par
kilowattheure pour les particuliers –, les
Dans le quartier Vauban, à Fribourg (Allemagne).
les consommateurs d’électricité, dont les
ménages, qui paient la note au travers de
la contribution au service public de l’élec­
tricité (CSPE).
Une filière tout à fait en “surchauffe”,
puisque les engagements de rachat sur les
vingt prochaines années “pourraient at­
teindre plusieurs dizaines de milliards d’eu­
ros”, et qu’un ménage se chauffant à l’élec­
tricité “pourrait payer jusqu’à 200 euros de
plus par an”.
La plus chère
des énergies renouvelables
aides fiscales et la baisse du coût des cellules
au silicium se sont conjugués pour donner
un prodigieux essor au solaire français qui
partait de zéro. Au point que la puissance
installée devrait, selon le ministère de l’Éco­
logie, atteindre 850 MW à la fin de 2010.
Difficile de faire mieux. Peut-on pour au­
tant pavoiser ?
Effets d’aubaine
et péril financier
Que le photovoltaïque français galope plus
vite que la lumière apparaît carrément
comme “un péril financier”. Dixit le rap­
port de l’Inspection générale des finances
(IGF), sur lequel le Gouvernement s’appuie
pour amputer les tarifs de rachat par EDF
du courant produit par les panneaux so­
laires. Un rapport, plutôt sévère, qui jette un
froid, sans toutefois remettre en cause cette
source d’énergie “à fort potentiel”, dénonce
les “effets d’aubaine spéculatifs” profitables
à certains professionnels, mais coûteux pour
Les chiffres sont éloquents : le coût de pro­
duction d’un parc solaire (hors bâti) avoi­
sine 200 euros/MWh pour un tarif de ra­
chat de 314 euros, et celui d’une installation
sur des bâtiments (toits de parkings, hangars,
entrepôts...) de 400 euros/MWh est rache­
té 580 euros.
Outre ces avantages d’avant la baisse de
12 % du 1er septembre, la diminution de
moitié environ du prix des cellules stimule
encore davantage l’engouement pour “la
plus coûteuse des sources d’électricité re­
nouvelables”. Laquelle “ne représentera en
2020 qu’une part faible du parc énergé­
tique français”, soit 0,4 % des 23 % de
l’énergie d’origine verte projetée par le
Grenelle de l’environnement.
Autre ombre au tableau évoquée par le rap­
port piloté par Jean-Michel Charpin : l’in­
dustrie française, encore trop balbutiante,
“n’est pas en mesure de tirer bénéfice d’une
forte demande intérieure, qui profite aux
industriels étrangers”, ce qui conduit à “un
déficit de la balance commerciale” (800
millions d’euros en 2009). Le rapport pré­
conise une “mobilisation des grands acteurs
français de l’énergie” (EDF, Total, GDF
Suez...) et des industries connexes, qui
conjugueraient leurs efforts pour mettre sur
pied une filière nationale de fabrication.
Il recommande également des objectifs
d’installation plus “crédibles” (500 MW par
an) et compatibles avec une capacité de
production de panneaux made in France de
seulement 300 MW actuellement.
“Ne pas en faire trop aujourd’hui, conclut le
rapport, permet de faire davantage demain, avec
des technologies moins onéreuses, plus efficaces et
plus propres.”
Réduction drastique du soutien de l’Alle­
magne à sa production photovoltaïque
pour éviter la surchauffe du premier mar­
ché mondial de panneaux solaires, au
grand dam des industriels du secteur.
En 2009, les installations ont atteint
3000 MW à travers le pays, soit dix fois
plus que la puissance totale installée en
France.
À long terme, le manque de soleil outreRhin (30 % de moins qu’en France) fait
peser un coût quasi prohibitif sur la pro­
duction photovoltaïque. De fait, le gou­
vernement a choisi de miser davantage
sur l’éolien, la biomasse et l’hydroélec­
tricité. Ainsi, les prix garantis ont baissé
de 16 % pour les nouveaux panneaux
installés sur les toits, et de 11 à 15 %
pour ceux installés au sol. L’aide a même
été supprimée pour les panneaux ancrés
sur des surfaces cultivables, afin d’éviter
que les agriculteurs ne “sèment du sili­
cium” à la place du blé.
Retard industriel français
À elle seule, la Chine fabrique près de
30 % des panneaux solaires vendus
dans le monde, suivie par le Japon
(22 %) et l’Allemagne (20 %).
Quasi absente de la production indus­
trielle (la première entreprise française
est au dix-septième rang mondial), la
France essaye de rattraper son retard :
le Commissariat à l’énergie atomique
(CEA) “et aux énergies alternatives”,
selon sa nouvelle dénomination, pré­
pare les panneaux solaires de demain,
qui absorberaient mieux la lumière et
porteraient de 16 à 30 % leur taux de
conversion en énergie.
Consommation électrique
(en Mtep)
2009
Objectif 2020
Éolien
Hydroélectricité
5
5,3
5,8
0,7
Biomasse
Photovoltaïque
1,4
0,4
0,02 0,4
9
Sigeif
nuc l é a i r e
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Le retour
L’atome regagne
de plus en plus de terrain
Le nucléaire amorce son grand retour partout, ou presque, à travers le monde.
Après avoir suscité un rejet de la part de beaucoup d’opinions publiques,
notamment depuis Tchernobyl (1986), il apparaît désormais, dans un nombre croissant
de pays, comme l’énergie propre et abordable de l’avenir. Tour d’horizon.
Pour accompagner cette vague de construc­
tions, l’imagination devra être au pouvoir,
les financements au rendez-vous. Au prin­
temps dernier, Bill Gates, l’homme le plus
riche du monde, proposait un programme
de centrales “de poche” fonctionnant au
moins pendant soixante ans.
Parmi d’autres pistes, des chercheurs bri­
tanniques suggèrent des réacteurs porta­
tifs, restituables en fin de vie au fa­bricant,
qui les recyclerait, évitant ainsi au pays
acheteur le problème de la gestion des
­déchets.
Au niveau mondial, l’atome fournit de
l’ordre de 2 % de l’énergie finale et moins
de 14 % de l’électricité, rappelle l’Agence
internationale de l’énergie atomique (AIEA).
C’est en Europe occidentale que la nucléa­
risation est la plus importante. Les réacteurs
y fournissent, en moyenne, 27 % des élec­
trons, contre 18 % pour l’Amérique du
Nord et l’Europe orientale, 10 % en Ex­
trême-Orient, un peu plus de 2 % en Amé­
rique latine et en Afrique, et 1 % au MoyenOrient et en Asie du Sud.
8
La France possède le deuxième parc en
7
nombre de réacteurs (cinquante-huit unités
6
de production réparties sur dix-neuf sites),
5
4
4
4
derrière les États-Unis, et produit près de
3
80 % de son électricité à partir du nucléaire. 2 2 2
2
2
Elle pourrait devoir en construire une di­
1
1
1
1
zaine d’ici à 2030, afin, principalement, de 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1990 1991 1992 1993 1996
renouveler son parc vieillissant.
Nombre de mises en chantier de réacteurs nucléaires en France, entre 1977 et 1999
Cinq cents réacteurs chinois
à l’horizon 2100
Actuellement, quatre cent trente-huit réac­
teurs sont opérationnels dans trente et un
pays et quarante-quatre unités sont en
construction. Afin de diversifier son mix, le
Brésil, par exemple, qui poursuivait deux
programmes en 2008, prévoit d’en accueillir
plus de quarante en 2060 et trois cent trente
en 2100. La Chine idem : de huit centrales
en 2008, elle prévoit d’en abriter plus de
cinq cents à la fin du siècle.
Deux pays industrialisés illustrent bien le
grand retournement qui est en route.
D’abord, l’Italie : ce pays est le seul du G8
à ne posséder aucune centrale nucléaire en
activité, ses quatre unités ayant été stop­
pées dans le sillage de Tchernobyl. Le
­gouvernement Berlusconi prévoit d’en
construire huit avant 2030. Au RoyaumeUni, en août dernier, le Gouvernement a
révélé que le pays ouvrirait en 2018 sa
­première centrale nucléaire depuis des
­décennies.
Si la planète veut vraiment réduire ses émis­
sions de CO2 de moitié d’ici à 2050, expli­
que un rapport de l’Agence internationale
de l’énergie (AIE), le nucléaire mondial de­
vra produire 1200 GWh en 2050. En clair,
le rythme de construction des centrales de­
vrait avoir doublé en 2020 pour atteindre
vingt nouveaux chantiers par an. Si cet ef­
fort est réalisé, 24 % de l’électricité mon­
diale serait nucléaire en 2050.
2
1
1997 1999
Source : EDF.
L’Allemagne prolonge la vie
de ses centrales
Par ailleurs, les pays déjà tournés vers l’ato­
me vont devoir prolonger la vie de leurs
centrales. L’Allemagne vient d’annoncer le
prolongement des siennes : entre douze et
quatorze ans, selon les modèles. La France,
dont les centrales sont conçues pour une
durée de vie de quarante ans, est confrontée
au même problème.
Pour les pays qui décideraient de se lancer
dans le nucléaire, les mêmes chercheurs
proposent des centrales embarquées sur des
navires ancrés au large des côtes, qui ali­
menteraient les villes avoisinantes en cou­
rant électrique. Pourquoi pas ?
Les tribulations de l’EPR aux États-Unis
10
Sans compter des opinions publiques qui ne sont pas forcément
favorables, les grands projets nucléaires se heurtent souvent à
des obstacles importants, en raison du dépassement des coûts,
des retards dans le calendrier et de la suppression du soutien
politique et de l’aide financière. Et aussi de conjoncture et de
désaccord entre les protagonistes.
C’est le cas notamment du tout récent divorce d’EDF d’avec son
partenaire américain Constellation Energy, qui a mis fin à un
projet colossal : la construction d’une flotte de quatre réacteurs
nucléaires EPR, à quelque 5 milliards d’euros l’unité. Constella­
tion a fait état de “problèmes”, lesquels, en fait, seraient liés à
la crise économique et à l’abondance surprise du gaz non
conventionnel, qui ont considérablement amoindri la compétiti­
vité du nucléaire américain par rapport aux autres sources
d’énergie (lire page 6).
EDF, qui se dit “consternée”, avait racheté, à la fin 2008, pour
4,5 milliards de dollars (3,2 milliards d’euros) la moitié des
­activités nucléaires de Constellation.
v o i t ur e
é l e c t r i qu e
> Après le Mondial de l’auto 2010
La “voiture de demain”
n’est pas pour aujourd’hui
On en parle depuis des mois, sinon des années. Et même des décennies...
Pour la première fois, au Mondial de l’automobile 2010, le grand public a pu passer
commande de voitures électriques fabriquées en série. Mais le succès n’était pas
vraiment au rendez-vous. Explication.
Pour la première fois, le salon de la Porte de
Versailles a fait la part belle – comme l’en­
semble des médias – aux véhicules “décar­
bonés” français et étrangers, en leur dédiant
l’espace de tout un vaste hall.
Force est de constater pourtant que, au soir
de la fermeture, le 17 octobre, à l’exception
de Renault, qui se félicitait d’avoir totalisé
trois mille pré-réservations pour ses Fluence,
Twizy et Kangoo (utilitaire) électriques li­
vrables en 2011, les exposants n’ont pas trop
claironné leurs résultats.
en conditions réelles). Les infrastructures de
recharge ou d’échange de batterie sont
quasiment inexistantes. Enfin, le terme “vé­
hicule décarboné” est loin d’être évident,
même pour un pays disposant d’un impor­
tant parc nucléaire. En effet, s’il n’émet pas
de CO2 en fonctionnement, le véhicule
électrique fait appel, pour ses recharges, à
une chaîne de production d’énergie qui,
elle, en émet. Selon l’Ademe, le véhicule
électrique français affiche en moyenne
120 g de CO2 par kilomètre, soit davantage
que certains véhicules GNV ou hybrides.
Le plan de déploiement
des infrastructures de recharge
(en milliers d’unités)
Conducteurs hantés
par la panne sèche
2015
De plus, l’usage énergivore du chauffage
l’hiver ou de la climatisation l’été réduit
d’au moins un tiers l’autonomie du véhi­
cule. Si le moteur électrique est plus simple,
il faudra toutefois attendre les premiers re­
tours d’expérience pour en juger.
Par ailleurs, les constructeurs peinent à s’ac­
corder sur des standards. Renault et PSA
ont ainsi choisi des options techniques dif­
férentes pour leur système de recharge ra­
pide, le premier en courant alternatif, le se­
cond en courant continu. Soit l’un devra
s’aligner sur le standard de l’autre, soit il
faudra installer deux prises sur les futures
bornes.
900
60
15
2020
4000
340
60
Prise domicile travail
Voirie charge normale
Voirie charge rapide
2025
150
9000
750
Source : La Tribune.
Prix dissuasif et manque
d’infrastructures
Il est vrai que, contrairement aux attentes, la
foule (1 263 467 visiteurs) s’est relativement
peu précipitée, d’après les observateurs, vers
les stands des électriques, contredisant en
cela un sondage publié la veille de l’ouver­
ture, selon lequel près de sept Français sur
dix se déclarent prêts à acheter une voiture
électrique si elle n’est pas plus chère qu’une
voiture classique.
Malgré la prime gouvernementale de 5000
euros, ces voitures sont encore loin d’être à
la portée de tous. Un exemple : la Peugeot
iOn vendue 30 000 euros, bonus déduit,
vaut le prix d’un... monospace compact
3008 HDi version luxe.
Le prix dissuasif n’est pas le moindre défaut
de l’électrique. Les modèles proposés n’ont
qu’une autonomie limitée (100 à 160 km
Sigeif
Douze villes de France
à l’heure électrique
Le Gouvernement a signé, avec douze
villes “pilotes” et les constructeurs PSA et
Renault, une charte afin de s’engager
ensemble sur le déploiement d’infra­
structures de recharge des véhicules élec­
triques et hybrides accessibles au public.
Bordeaux, Grenoble, Rennes, Nice, An­
goulême, la communauté d’aggloméra­
tion d’Aix-en-Provence, Orléans, Paris,
Rouen, Strasbourg, Le Havre et le grand
Nancy seront les premières à se doter
de prises dès la fin de cette année.
De leur côté, Renault et PSA s’engagent
à être en mesure de commercialiser
soixante mille véhicules électriques en
France d’ici 2011-2012, en ciblant no­
tamment les agglomérations qui déve­
loppent un réseau suffisant d’infrastruc­
tures de recharge.
La Poste : un groupement de
commandes de 50 000 véhicules
Faut-il pour autant condamner la voiture
électrique ? Certainement pas. Mais plutôt
considérer ce dernier Mondial de l’auto­
mobile comme l’étape, parmi d’autres, d’un
long chemin parsemé d’embûches.
Au final, l’électrique convient bien au­
jourd’hui aux flottes d’entreprises ou de
collectivités pour certains usages particu­
liers. Le circuit emprunté par ces véhicules
est connu, ce qui résout à la fois les ques­
tions d’autonomie et d’infrastructures dé­
diées à la recharge des batteries.
En France, la réponse la plus signifiante est
le groupement de commandes de 50 000
véhicules lancé par La Poste. Il rassemble de
grandes entreprises (Air France, EDF,
France Télécom Orange, GDF Suez, SNCF,
Vinci…), avec l’objectif d’arriver à une ré­
duction des prix pour amorcer le marché
du véhicule électrique.
11
Sigeif
urb a n i sm e
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Ville durable
Tour du monde,
du Brésil au Danemark
Éco-quartier, le laboratoire
de la ville en vert
Actuellement, en France, plus de deux cents projets se réclament d’une démarche
“éco-quartier”, un nouveau cadre de vie urbain qui fait de plus en plus d’adeptes.
Mais c’est quoi, au juste, un éco-quartier ?
Les toits du quartier de Bedzed, au sud de Londres.
Les initiatives européennes d’éco-quar­
tiers portent sur des structures de taille
limitée. Le plus connu d’entre eux est
probablement le quartier Vauban à Fri­
bourg, en Allemagne.
Avec environ deux mille logements et
cinq mille habitants, il remplit à la fois
un objectif architectural (bâtiments haute
qualité environnementale, maisons à
énergie positive) et paysager (priorité
aux espaces publics, limitation du trafic
automobile…). Il se distingue également
par sa forte participation citoyenne.
Le quartier BedZed (Beddington zero
energie fossil development), au sud de
Londres, ne compte que quatre-vingts
logements et 2500 m2 de bureaux, ré­
partis sur 1,7 ha. Il est devenu une réfé­
rence en matière de consommation
d’énergie : celle-ci a été réduite de 80 %
et celle de l’eau de 50 %.
Une idée qui a fait son chemin
En 2050, les deux tiers de la population
mondiale vivront dans des villes, estime un
rapport prospectif de l’ONU sur l’urbanisa­
tion. Alors qu’aucune grande métropole ne
remplit aujourd’hui parfaitement les critères
de développement durable et d’urbanisme
écologique, cette perspective a conduit des
architectes-urbanistes à forger le concept de
ville durable ou d’éco-quartier.
Efficacité énergétique
et végétalisation
Qu’il soit une extension urbaine ou une
transformation de quartiers existants, l’écoquartier appartient à la ville dans laquelle
il s’installe. Son volet environnemental se
résume à la préservation des ressources et
du sol, et à la limitation des impacts sur le
milieu.
Sont donc mises en œuvre prioritairement
les solutions pour favoriser : l’efficacité
énergétique (habitat passif, récupération de
chaleur sur les effluents), le recours aux
énergies renouvelables (panneau photovol­
taïque, chauffe-eau solaire, mini-éolienne
urbaine, géothermie...), la gestion de l’eau
(récupération des eaux pluviales, phytoépuration, équipements économes en eau
potable), la gestion des déchets (tri, recy­
clage), les modes de transport doux et la
­limitation des déplacements automobiles,
la préservation de la biodiversité (forte vé­
gétalisation des espaces et des bâtiments,
12
préservation des espèces locales), l’écoconstruction avec des matériaux verts (bois),
la densité (lutte contre l’étalement urbain)
et la mixité des fonctions urbaines (lutte
contre la mobilité subie).
Huit projets en cours
en Île-de-France
Parmi les quelque 11,6 millions de Franci­
liens, combien savent qu’un éco-quartier
est peut-être en gestation à deux pas de
chez eux ? L’État, les collectivités et les
aménageurs ont en effet officialisé, en mars
2009, le lancement des huit premiers
contrats-cadres d’éco-quartiers d’Île-deFrance. Si certains travaux ont déjà débuté,
l’essentiel sera entamé dans les trois pro­
chaines années.
Labels “basse consommation”
pour les bâtiments
Trois projets se situent en Seine-et-Marne :
les éco-quartiers Sycomore à Bussy-SaintGeorges, Foch-Roosevelt à Meaux et
Montévrain. Deux se trouvent dans les Yve­
lines : Boucle de Chanteloup, Hautes-Ga­
rennes à Mantes-la-Jolie/Rosny-sur-Seine.
Deux autres en Seine-Saint-Denis : L’ÎleSaint-Denis et Docks de Saint-Ouen, et un
autre encore, celui de Louvres/Puiseux, dans
le Val-d’Oise. L’éco-quartier des Docks de
Saint-Ouen, d’une superficie de 100 ha,
D’autres éco-quartiers existent en Eu­
rope, principalement en Scandinavie
(Stockholm et Malmö en Suède, Copen­
hague au Danemark).
L’idée d’éco-quartier n’est pas neuve.
Curitiba, capitale de l’État de Parana
(Brésil), est, depuis 1964, un ancêtre du
genre. Auroville, près de Pondichéry, en
Inde, construite en 1971 dans un esprit
très “hippie”, accueille plus de mille ha­
bitants aujourd’hui. Plus récemment, la
Chine a entrepris la construction, à
Dongtan, près de Shanghaï, d’une ville
de cinquante mille habitants, autosuffi­
sante en énergie.
comprend quatre mille logements (dont
40 % sociaux) tandis que celui de Louvres/
Puiseux en offrira trois mille cinq cents.
De son côté, l’éco-quartier fluvial de L’ÎleSaint-Denis (mille logements) accueillera
des bâtiments répondant à différentes
normes de performance énergétique, dont
les labels ’’basse consommation’’ BBC 2005
et Passivhaus.
À Montévrain, un parc de 21 ha sera créé
au sein d’un futur éco-quartier de 153 ha,
lequel occupera près d’un tiers du territoire
de la commune. Un parc de 12 ha est éga­
lement prévu aux Docks de Saint-Ouen,
tout comme au Sycomore, à Bussy-SaintGeorges (trois mille logements, dont 30 %
sociaux). Le projet de la Boucle à Chante­
loup (trois mille logements) s’inscrit sur
le territoire de quatre communes : Trielsur-Seine, Chanteloup-les-Vignes, Andrésy
et Carrières-sous-Poissy. Il prévoit la créa­
tion d’un transport en commun reliant
l’éco-quartier aux gares de Poissy et de
­Verneuil-sur-Seine.
a c t i v i t és
d u
Sigeif
s y n d i c a t
> Missions et services
Le Sigeif, premier syndicat
intercommunal d’énergie
Le Sigeif est né à l’aube du xxe siècle, avec l’objectif principal d’assurer
la distribution du gaz d’éclairage dans la banlieue parisienne. Porteur, dès
l’origine, d’une véritable dynamique intercommunale, le Sigeif est aujourd’hui
la première autorité concédante de France pour le gaz et la troisième pour
l’électricité.
Les cent quatre-vingt-une communes qui le composent, dont soixante adhèrent
également à la compétence électricité, sont depuis toujours propriétaires des
réseaux de distribution.
En leur nom, le Sigeif accomplit ainsi un rôle “historique” : le contrôle de
l’acheminement de l’énergie. Ses agents assermentés veillent à ce que les deux
concessionnaires du Syndicat, EDF/ERDF et GrDF, exécutent irréprochablement
les missions de service public qui leur ont été dévolues aux termes des traités
de concession. Il est le garant de la qualité de l’énergie et de la valeur physique
et comptable du patrimoine concédé. Parallèlement, en faisant effectuer
annuellement deux enquêtes d’opinion, il mesure le degré de satisfaction
des clients-usagers du gaz et de l’électricité.
Le Sigeif exerce également la maîtrise d’ouvrage de l’enfouissement des lignes
aériennes. Nécessité d’ordre esthétique et environnemental, ces travaux
relèvent aussi d’une exigence de sécurité du réseau, en cas de tempêtes,
par exemple.
À la faveur des transformations qu’a connues le paysage énergétique français,
il s’acquitte d’une nouvelle mission, plus “politique”, notamment axée sur
la maîtrise de la demande de l’énergie (MDE). Dans ce domaine, la démarche
proposée aux communes privilégie l’efficacité énergétique sur le patrimoine,
la formation et l’information du personnel communal ainsi que l’aide aux
communes pour la sensibilisation du citoyen-consommateur.
Enfin, le Sigeif accompagne les collectivités franciliennes dans le processus
d’ouverture des marchés de l’énergie à la concurrence, en coordonnant
un groupement de commandes d’achat de gaz naturel (voir page 15).
SAINT MARTIN
DU TERTRE
BELLOY
EN FRANCE
MONTSOULT
VILLIERS
ADAM
PUISEUX
EN
FRANCE
ATTAINVILLE
BAILLET
EN FRANCE
BÉTHEMONT
LA FORÊT
CHAUVRY
Le territoire du Syndicat en quelques chiffres
VILLAINES
SOUS BOIS
FONTENAY
EN PARISIS
BOUFFÉMONT
LOUVRES
MOISSELLES
DOMONT
MONTLIGNON
181 communes
pour la concession gaz*
MARGENCY
ERMONT
> 5 256 348 habitants
> 1 284 077 clients
> 30 632,5 GWh acheminés
> 9 287 km de canalisations,
dont près de 53 % en polyéthylène
SAINT BRICE
SOUS FORÊT
SOISY
MONTMORENCY
EAUBONNE SOUS
MONTMORENCY
GROSLAY
ARGENTEUIL
GENNEVILLIERS
SAINT
DENIS
VILLENEUVE
LA GARENNE
60 communes
pour la concession électricité*
CROISSY
SUR SEINE
LA CELLE
SAINT CLOUD
LA COURNEUVE
FONTENAY
LE
FLEURY
SAINT
CYR
L’ÉCOLE
LE CHESNAY
SAINT
OUEN
AUBERVILLIERS
BOBIGNY
NOISY
LE SEC
ROMAINVILLE
LE PRÉ ST-GERVAIS
SURESNES
BOULOGNE
BILLANCOURT
SÈVRES
VIROFLAY CHAVILLE
VERSAILLES
MALAKOFF
CHARENTON
LE PONT
GENTILLY
MONTROUGE
ARCUEIL
MEUDON
IVRY
LE
KREMLIN SUR SEINE
BICÊTRE
FONTENAY
SOUS BOIS
LE
PERREUX
SUR
MARNE
NOGENT
SUR MARNE
BRY SUR
MARNE
NOISY
LE GRAND
LE PLESSIS
ROBINSON
FONTENAY
AUX ROSES
SCEAUX
CACHAN
VILLEJUIF
CHEVILLY
LARUE
FRESNES
SAINT MAUR
DES FOSSÉS
VITRY
SUR SEINE
CRÉTEIL
BOURG
L’HAŸ LES
LA
REINE ROSES
CHÂTENAY
MALABRY
CHOISY
LE ROI
BONNEUIL
SUR
MARNE
THIAIS
ANTONY
VERRIÈRES
LE BUISSON
JOINVILLE
SAINT MAURICE LE PONT
ALFORTVILLE MAISONS
ALFORT
CHÂTILLON
BAGNEUX
CLAMART
JOUY EN JOSAS
VAIRES
SUR MARNE
NEUILLY
PLAISANCE
VANVES
ISSY LES
MOULINEAUX
VÉLIZY
VILLACOUBLAY
CHELLES
GAGNY
ROSNY
SOUS
BOIS
SAINT VINCENNES
MANDÉ
MONTFERMEIL
VILLEMOMBLE
MONTREUIL
MARNES
LA COQUETTE
VILLE
D’AVRAY
LES
PAVILLONS
SOUS
BOIS
LE
RAINCY
BAGNOLET
SAINT
CLOUD
COURTRY
LIVRY GARGAN
BONDY
PANTIN
GARCHES
VAUCRESSON
VILLEPARISIS
VAUJOURS
SEVRAN
LES LILAS
RUEIL
MALMAISON
VILLEPINTE
AULNAY
SOUS
BOIS
DRANCY
ASNIÈRES
SUR SEINE
BOIS
COLOMBES
LA GARENNE
CLICHY LA
COLOMBES
GARENNE
COURBEVOIE
LEVALLOIS
PERRET
NEUILLY
SUR
PUTEAUX SEINE
NANTERRE
LE
VÉSINET
MITRY MORY
LE
BOURGET
COLOMBES
CARRIÈRES
SUR SEINE
TREMBLAY
EN FRANCE
DEUIL
GARGES
MONTMAGNY
LA
LÈS
BARRE
BONNEUIL
GONESSE
PIERREFITTE
EN FRANCE
SUR SEINE
ÉPINAY SUR
VILLESTAINS
SEINE
TANEUSE
L’ÎLE SAINT
DUGNY
LE BLANC
DENIS
MESNIL
MAISONS
LAFFITTE
MONTESSON
GONESSE
ARNOUVILLE
SARCELLES
ROISSY
EN FRANCE
LE THILLAY
VILLIERS LE BEL
ENGHIEN
SAINT
LES
GRATIEN BAINS
SANNOIS
CHATOU
> 1 354 812 habitants
> 612 605 clients
> 6 688,7 GWh acheminés
> 8 172 km de réseaux HTA et BT,
dont 99,5 % en souterrain
pour la HTA
et 70,5 % pour la BT
GOUSSAINVILLE
PISCOP
ANDILLY
LIMEIL
BRÉVANNES
RUNGIS
BOISSY
SAINT
LÉGER
ORLY
IGNY
MASSY
MAROLLES
EN BRIE
WISSOUS
SERVON
CHAMPLAN
ORSAY
MANDRES
LES ROSES
MORANGIS
PÉRIGNY
SUR YERRES
VILLEBON SUR YVETTE
SAULX
LES CHARTREUX
* Les communes de Rocquencourt (Yvelines)
et de Brou-sur-Chantereine (Seine-et-Marne)
ont récemment rejoint le Sigeif pour les deux compétences.
Leur adhésion ne sera effective qu’au début 2011.
CHILLY
MAZARIN
LONGJUMEAU
ÉPINAY
SOUS
SÉNART
BOUSSY
SAINT
ANTOINE
BALLAINVILLIERS
NOZAY
MARCOUSSIS
13
d u
R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
> Maîtrise de l’énergie
Les certificats d’économies
d’énergie, c’est parti !
Priorité au cinquième
combustible
Maîtriser les consommations d’énergie en évaluant leur gisement et en agissant
sur les comportements : c’est le sens des actions menées par le Sigeif au profit
de ses communes adhérentes.
Le sujet est de taille en termes d’environne­
ment et de budget, puisque le poste énergie
d’une commune représente en moyenne
10 % de son budget de fonctionnement
hors masse salariale, soit environ 36 €/habi­
tant. (1) Le premier poste consommateur
n’est pas l’éclairage public, comme on le
pense souvent, mais les bâtiments (75 %),
devant l’éclairage (18%) et les carburants
véhicules (7 %). En la matière, une des mis­
sions du Sigeif est d’accompagner ses com­
munes ­adhérentes dans la mise en place
d’une politique énergétique locale.
Une mission de plus en plus exigeante, qui
a conduit récemment le service énergie et
environnement du Syndicat à s’enrichir de
deux nouveaux collaborateurs.
Une ressource au même titre
que les autres
Le Sigeif propose une méthode fondée sur
le concept du cinquième combustible (2), qui
consiste à considérer la sobriété et l’effica­
cité énergétiques (3) comme un combustible
à part entière.
La consommation
d’énergie
des logements
(en kWh/m2/an)
Moyenne en 1973
Moyenne en 2007
Norme BBC rénovation
Norme BBC neuf
357
203
80
50
Source : Cerem.
Au niveau mondial, le bouquet de produc­
tion énergétique se diversifie, des énergies
fossiles aux énergies renouvelables.
Au sein de ce bouquet, considérer les gise­
ments d’économie d’énergie comme une
ressource au même titre que les autres de­
vient primordial : la filière du cinquième
combustible soutient largement la compa­
raison avec les filières classiques en termes
de coût, de potentiel d’activité économique
et d’emploi, d’acceptabilité sociale, mais
également de simplicité et de pérennité.
Par ailleurs, sans remettre en cause l’intérêt
des énergies renouvelables au côté de l’effi­
cacité énergétique, il faut évidemment s’in­
téresser aux différentes filières de ces EnR
au vu de leur contribution respective aux
objectifs pour 2020 et de leur efficience
(coût de la tonne de CO2 évitée).
Un gisement
quasi inépuisable
Les gisements de cinquième combustible
sont partout : sur nos lieux de vie et de tra­
vail, dans nos gestes au quotidien. Nul be­
soin d’aller explorer à l’autre bout de la
planète.
La plus efficace et la moins chère des tech­
nologies de forage du cinquième combus­
tible est tout simplement, et depuis tou­
jours, l’isolation de nos logements : isoler
ses combles revient à installer un derrick de
production, qui va puiser régulièrement le
gisement de cinquième combustible dont
les “réserves” sont pratiquement inépui­
sables.
La filière du cinquième combustible repré­
sente un potentiel d’environ six cent mille
emplois en France : ce sont les artisans du
bâtiment, les industries (isolation, chau­
dières performantes, etc.), autant d’emplois
qui ne sont pas délocalisables. Voilà pour­
quoi et comment le Sigeif accorde en la
matière une priorité absolue au cinquième
combustible.
(1) Enquête annuelle de 2005 de l’Ademe/Sofres.
(2) Les quatre autres principaux combustibles étant
le pétrole, le gaz, le charbon et l’uranium.
(3) Sobriété énergétique : ne pas consommer d’é­
nergie lorsque c’est inutile, sans pour autant renon­
cer au confort.
Efficacité énergétique : augmenter le rendement à
un moindre coût énergétique.
14
Sigeif
s y n d i c a t
Le dispositif des certificats d’économies
d’énergie (CEE) repose sur une obliga­
tion de réalisation d’économies d’éner­
gie imposée par les pouvoirs publics
aux vendeurs d’énergie. Afin de s’en ac­
quitter, les vendeurs d’énergie peuvent
soit amener leurs clients à réaliser des
économies, soit acheter des CEE auprès
d’autres acteurs.
Première expérience
Le Sigeif a souhaité tester le dépôt en
propre de CEE avec onze communes
bénéficiant actuellement de l’accom­
pagnement, selon la démarche du cin­
quième combustible.
Deux dossiers, pour une valeur totale de
5 GWh viennent d’être envoyés à la Di­
rection régionale et interdépartementale
de l’environnement et de l’énergie d’Îlede-France (DRIEE). Ils concernent les
communes de Longjumeau et Saint-Gra­
tien, respectivement pour les opérations
suivantes : mise en place de deux chau­
dières à condensation, remplacement de
luminaires et installation d’un système de
télégestion de l’éclairage public.
Cette première expérience permet au
Syndicat de se confronter au dispositif
opérationnel du montage de dossiers de
certificats d’économies d’énergie.
Pour la deuxième période du dispositif
(2011-2013), le Sigeif envisage un ac­
compagnement pour la valorisation des
CEE visant les cent quatre-vingt-trois
communes adhérentes. Cet accompagnement sera présenté lors du prochain co­
mité d’administration, début 2011.
Répartition des CEE
0,2 %
6%
4%
7%
Bâtiment résidentiel
Bâtiment tertiaire
Industrie
Réseaux
Transports
82,8 %
Source : DGEC.
a c t i v i t és
La fin de la première période (2006-2009) est l’occasion de dresser
un bilan. L’économie ainsi engendrée serait équivalente à 80 % de la
production annuelle d’un réacteur nucléaire de 1450 MW.
Pour la seconde période (2011-2013), le dispositif sera nettement
étendu (économies à réaliser, acteurs impliqués, actions éligibles...).
a c t i v i t és
d u
Sigeif
s y n d i c a t
> Appel d’offres 2010-2012
Au jeu de la concurrence,
le gaz est 45 % moins cher
Deux ans après son premier appel d’offres 2008-2010 pour l’achat de gaz, le groupement
de commandes du Sigeif était loin de penser que le résultat de la consultation pour
la période 2010-2012 allait dépasser toutes les espérances. Récit.
L’enjeu était d’envergure : l’achat d’un mil­
liard de kilowattheures, l’équivalent de la
cargaison d’un méthanier et un montant
estimé à 100 millions d’euros sur les deux
années du marché. Sept fournisseurs étaient
sur les rangs : Altergaz, Direct Énergie, EDF,
Gas Natural (Espagne), GDF Suez, Poweo,
Tegaz (groupe Total). Trois d’entre eux ont
été retenus : EDF, Poweo et Tegaz. Ils se
répartissent les quatre lots en compétition
représentant au total quelque 1300 sites de
232 collectivités locales et établissements
publics d’Île-de-France : 108 communes,
2 conseils généraux (Hauts-de-Seine et
Val-de-Marne), 12 offices publics d’HLM,
10 centres communaux d’action sociale
(CCAS), 5 lycées, 80 collèges, 8 hôpitaux
et 7 structures intercommunales.
Le plus gros marché
“collectivités” de France
Les contrats attribués ont permis d’écono­
miser 45 % par rapport aux tarifs réglemen­
tés, des rabais très nettement supérieurs à
ceux de 7 % à près de 12 % obtenus en 2008
sur le précédent appel d’offres. “C’est le plus
gros marché collectivités de France et il intéresse
les grands acteurs, commente Jean-Jacques
Guillet, président du Sigeif. Nous achetons
groupés ; c’est un avantage à partir du moment
où le marché commence à être concurrentiel.”
La bulle gazière.
La chute spectaculaire des cours du gaz sur
le marché à court terme, si elle se prolonge,
laisse entrevoir d’autres conditions favo­
rables pour le prochain appel d’offres. Au
final, le volume d’énergie concerné par la
consultation de cette année s’est trouvé va­
lorisé à 43 millions d’euros, la valeur au tarif
réglementé étant de 80 millions d’euros.
Deux importants contrats
pour EDF
Parmi les quatre contrats en concurrence,
deux ont été attribué à EDF. L’un, pour les
sites des HLM chauffés collectivement, ain­
si qu’au grand stade nautique intercommu­
nal de Châtillon-Malakoff, soit 155 sites
représentant 260 GWh par an. L’autre lot a
porté sur les plus importants sites des autres
membres du groupement pouvant relever
jusqu’à ce jour des tarifs réglementés : 690
sites et 500 GWh par an.
Un troisième contrat, remporté par Poweo,
rassemble les sites ayant d’ores et déjà perdu
le bénéfice des tarifs réglementés (sites mis
en service depuis juillet 2007) : 440 sites et
135 GWh par an.
Enfin, un contrat relatif à la fourniture en
gaz de l’unité centrale thermique du Centre
d’accueil et de soins hospitaliers de Nan­
terre, consommant 40 GWh par an, revient
à Tegaz.
Des nouveaux outils
pour le futur
De plus, deux contrats portant sur l’effica­
cité énergétique du patrimoine communal
existant (assistance à la passation de marchés
d’exploitation, diagnostics thermiques, étu­
des solaires thermiques, programmation
pluriannuelle des investissements...), ainsi
que sur les projets neufs (aide à la program­
mation et optimisation de l’esquisse, test
d’étanchéité à l’air, simulations thermiques
dynamiques, thermographie, instrumenta­
tion post-réception), ont été attribués res­
pectivement à la société H3C et à la société
Deltawatt, en groupement avec ICE.
Par ces nouveaux outils, le Sigeif apporte sa
pierre au renforcement des nouvelles poli­
tiques énergétiques locales, répondant ainsi
aux objectifs nationaux et européens de
maîtrise de l’énergie.
Comment la “bulle” a fait
des heureux
Comment le groupement de commandes
de gaz du Sigeif a-t-il obtenu des prix
inférieurs de 45 % aux tarifs réglemen­tés, qui venaient presque simultanément
d’être relevés, en moyenne, de 9,7 % ?
­Explication.
La règle d’évolution de ces tarifs a été
fixée par les pouvoirs publics afin de re­
fléter les coûts d’approvisionnement de
GDF Suez dont les contrats d’importa­
tion conclus avec la Russie, l’Algérie, la
Norvège, etc., sont indexés sur des pro­
duits pétroliers. Ce mode d’indexation,
général en Europe, permet que le gaz
(substituable dans tous ses usages) soit
toujours compétitif par rapport à l’éner­
gie concurrente.
Excédent mondial de gaz
Les tensions sur le prix du pétrole se ré­
percutent ainsi sur les factures aux tarifs
réglementés. En 2010, alors que les
cours du pétrole grimpaient, un excé­
dent mondial de gaz (baisse de la de­
mande, du fait de la crise économique,
et développement de l’offre dû, notam­
ment, au gaz non conventionnel) a fait
chuter les prix sur les marchés de gros,
qui ont alors constitué une source d’ap­
provisionnement soudainement attrac­
tive pour les fournisseurs.
La procédure d’achat public très réac­
tive mise en place par le Sigeif lui a
­permis de tirer pleinement profit de
ce contexte favorable aux acheteurs
­gaziers.
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s a v i e z - v o us
Sigeif
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R É S E A U X É NER G IE • H O R S S É RIE • n o v e m b r e 2 0 1 0
Énergie : les Français dépensent
2300 euros par an
Suivez le “coach
carbone”
riches, entre ville et campagne,
entre types d’habitat et entre
ménages âgés et ménages
jeunes.
Les progrès énergétiques (iso­lation, chauffage plus performant...)
ont, par exemple, davantage
profité aux ménages aisés, pour
lesquels le poids de la facture
d’énergie dans la consommation a baissé d’un tiers depuis
1985, contre un quart pour les
ménages les plus pauvres. Les
ménages ruraux sont également
pénalisés : ils sont plus souvent
âgés, chauffés au fioul et vivent
en logement individuel plus grand
(lire aussi page 4).
2300 euros par an : c’est ce que
dépensent les Français en
énergie, pour se chauffer et faire
rouler leur voiture. Cette somme
équivaut à 8,4 % (4,8 % pour
leur résidence et 3,6 % pour leur
moyen de transport individuel) de
leur dépense totale de consommation, “soit autant que les loisirs
ou les vêtements”, indique la
cinquième étude de l’Insee, parue
en octobre 2010.
Compte tenu des facteurs qui
influencent les consommations
d’énergie, “les inégalités d’effort
énergétique se sont accrues
depuis vingt-cinq ans” entre
ménages modestes et ménages
Dépenses des ménages métropolitains
par poste budgétaire
4 000
3 000
2300 €
2 000
1 000
L’aviation civile
veut voler vert
Les cent quatre-vingt-dix pays
membres de l’Organisation de
l’aviation civile internationale se
sont engagés à ne pas dépasser
le niveau d’émissions de CO2 qui
sera atteint en 2020, grâce à un
gain de rendement des moteurs
de 2 % par an, et ce jusqu’en
2050. Au regard de ce qu’exige
l’Union européenne (–10 % des
émissions en 2020 par rapport
à 2005), l’engagement est certes
minime. D’autant plus que ce
secteur devrait, du fait de son
développement, enregistrer une
hausse de ses émissions de 70 %
entre 2005 et 2020.
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Source : Insee.
*Hors énergie
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Masdar, ville du futur sans
carbone, uniquement électrifiée
à l’énergie solaire, est sortie
du sable dans les environs d’Abou
Dhabi et accueille ses premiers
résidents. Située à 20 km de la
capitale des Émirats arabes unis,
elle devrait accueillir quarante
mille habitants.
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La ville décarbonée
sort des sables
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Éteignons pour
sauver les oiseaux
À New York, le groupe de
protection des oiseaux NYC
Audubon sensibilise la ville
sur les dangers que représentent
les gratte-ciels pour les volatiles.
“Environ 90 000 oiseaux meurent
annuellement de collisions avec
les bâtiments à New York”, estime
la direction du groupe.
Cette année, les propriétaires
et locataires de l’Empire State
building, du Chrysler ou encore
du Rockefeller Center ont accepté
d’éteindre les lumières des
étages inoccupés entre minuit
et l’aube.
Les difficultés
de la concurrence
Selon un sondage réalisé par
l’institut Opinion Way, près
de 40 % des Français ne savent
toujours pas qu’ils peuvent
changer de fournisseur d’électricité. Pour le gaz, ils sont 58 %
à l’ignorer. Autre inconvénient
de la concurrence : changer de
fournisseur d’énergie serait jugé
difficile par 46 % des sondés.
Le “coach carbone” mis
au point par l’Ademe et la
fon­da­tion Nicolas Hulot doit
permettre aux ménages d’éva­
luer leur propre consommation
d’énergie.
Conçu comme “un outil dispo­
nible 24 h sur 24 sur Internet,
gratuit et personnalisable, qui
proposera des économies en
tonnes de CO2, en kilowattheures, en litres de carburant
ou même en euros”, le coach
carbone est un questionnaire
de cent soixante questions,
auquel les internautes peuvent
répondre en plusieurs fois.
Il permet de décrypter les
habitudes du foyer en matière
de logement, de transport,
d’équipement et d’alimentation,
et de déterminer les préconisa­
tions les mieux adaptées pour
faire évoluer les comportements
face aux dépenses en énergie.
www.coachcarbone.org
L’Europe atteindra
l’objectif de Kyoto
L’Union européenne sera bien le
bon élève de la classe climatique
internationale. C’est ce qui
ressort du “Rapport annuel de
la Commission sur les progrès
accomplis” selon lequel les États
membres auxquels des objectifs
de réduction ont été assignés au
titre du protocole de Kyoto respec­teront leurs engagements. En
1997, les quinze États membres au
moment de l’adoption du pro­tocole se sont engagés à réduire
collectivement de 8 % leurs émissions de gaz à effet de serre (GES)
entre 1990 et 2012. Pour l’UE 27
dans son ensemble, les émissions
ont baissé de 14,3 % entre l’année
de référence et 2008.
Les pros du solaire
tapent fort
L’appel d’offres lancé en 2009
par la Commission de régulation
de l’énergie (CRE) pour la
construction de fermes solaires
Courrier au médiarisque d’être déclaré infructueux.
teur de l’énergie
Selon Jean-François Carenco,
directeur de cabinet de Jean-Louis
Le nombre de plaintes au
Borloo, ministre en charge de
médiateur national de l’énergie, l’Énergie et de l’Environnement,
Denis Merville, ne cesse d’aug­ le motif en est que “les candidats
menter : depuis le 1er janvier
ont exagéré : alors que l’objectif
2010 jusqu’au 15 octobre,
d’un appel d’offres est normalecinq mille cinq cent cinquante ment d’obtenir un prix inférieur au
saisines écrites, presque autant
tarif existant, tous proposaient des
que sur l’ensemble de l’année
prix supérieurs de 20 % !”.
précédente.
Bonne nouvelle : les réclama­
tions pour pratiques commer­
ciales déloyales sont en déclin.
En revanche, celles relatives
à des problèmes de facturation
sont en nette augmentation.
Étiquettes pour
les téléviseurs
Les téléviseurs européens vont
bientôt être pourvus d’étiquettes
énergétiques pour aider les
consommateurs à choisir les
produits les plus économes,
propose la Commission de
Bruxelles. Ces appareils
représentent un tiers de la facture
d’électricité annuelle d’un
ménage. Pour la première fois,
les fabricants devront étiqueter
leur classe de consommation
énergétique, selon une échelle
allant de la plus efficace (A)
à la moins efficace (G).
L’étiquette devra être clairement
visible si le prix du téléviseur est
mentionné.
est édité par le
Syndicat Intercommunal pour le Gaz
et l’Électricité en Île-de-France
66, rue de Monceau, 75008 Paris
Tél. 01 44 13 92 44 - Fax 01 44 13 92 49
Directeur de la publication
Serge Carbonnelle
Réalisation Sigeif. Imprimé en France
Crédits photos :
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p. 14 : J.C. Pattacini / Urba Images Server
p. 15 : Tim Brakemeier / DPA AFP
Illustrations : Nando
www.sigeif.fr
Imprimé en France sur papier provenant de forêts gérées selon des principes conformes aux normes environnementales.
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