La Bronchiolite du nourrisson : Quand faut

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La Bronchiolite du nourrisson : Quand faut
La Bronchiolite du nourrisson :
Quand faut-il s’inquiéter ?
Une maladie virale épidémique
La bronchiolite aigüe représente le tableau le plus fréquent de l’infection respiratoire basse
chez le nourrisson. C’est une maladie virale dont le pic hivernal est le plus souvent lié à un
virus nommé VRS (virus respiratoire syncytial). Son développement croissant est lié à
l’urbanisation et à la socialisation précoce du bébé (crèches). Si l’on considère la population
des nourrissons de 0 à 24 mois vivant en France, on estime le nombre de bronchiolites à
400 000 par an ! En fait la tranche ciblée dans l’épidémie va de 3 à 12 mois.
Toux et respiration difficile sont les signes principaux
Peu de temps après une banale rhinopharyngite accompagnée d’un rassurant 38° le
nourrisson tousse, beaucoup plus que d’habitude, et respire vite et mal. Une oreille attentive
ou le stéthoscope médical percevra des bruits surajoutés : plutôt grésillements et crépitants
avant l’âge de 12 mois, plus volontiers sifflements après. Les anglo-saxons utilisent le terme
de wheezing, véritable onomatopée. Ainsi, après l’âge d’un an, parle-t-on parfois de
bronchites sifflantes ; le terme de bronchite asthmatiforme, prêtant trop à confusion, est à
proscrire. Ces bruits respiratoires sont liés à l’inflammation des petites bronches dont le tissu
intérieur (la muqueuse), va être véritablement abrasé. Cellules mortes, œdème du tissu et
sécrétion accrue de mucus réduisent la lumière des bronchioles et entrainent cet
essoufflement audible. Il faut environ un mois pour que la muqueuse bronchique cicatrise
après cette agression. Parfois elle n’a même pas le temps de se réparer qu’un autre virus
(responsable d’une banale rhinite chez un adulte) se présente et les symptômes rechutent.
Se crée ainsi une fragilité respiratoire qui peut rester haute, ce sont les incontournables
rhinopharyngites, ou basse à type de bronchiolites ou bronchites sifflantes.
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Stratégie thérapeutique : déception !
Soyons précis : au cours des premières bronchiolites (la première et la deuxième du
nourrisson), aucune preuve suffisante ne permet d’appliquer une stratégie thérapeutique
spécifique. Les études scientifiques dites en double aveugle (produit testé contre placebo)
n’ont pas permis de valider un quelconque médicament utilisé par ailleurs dans d’autres
maladiesbronchiques :
_ Les médicaments de l’asthme aigu sont inefficaces dans la première bronchiolite d’allure
épidémique : en effet, il y a encombrement et non pas serrement de la bronche (spasme
bronchique). La méta-analyse 2006 « Cochrane » sur l’utilisation des bronchodilatateurs
(Ventoline® par exemple, spray de couleur bleue) ne met en évidence qu’une légère
amélioration des scores cliniques à court terme seulement. Selon les auteurs de cette revue,
l’utilisation des broncho-dilatateurs ne s’accompagne pas d’une amélioration significative de
l’oxygénation, ni d’une réduction du taux d’hospitalisation chez les patients traités. Ils ne
proposent donc pas de les utiliser.
- Et la cortisone par voie orale (Celestène® par exemple) ? Une revue systématique
Cochrane parue en 2004 et mise à jour en 2008, portant sur 13 études randomisées et
contrôlées, a conclu qu’il n’y avait pas de bénéfice à court terme à en administrer dans la
bronchiolite aiguë. Cela ne prévient ni l’hospitalisation, ni la durée de la maladie, ni les
rechutes. Même constats avec les corticoïdes inhalés (pour info : spray de couleur rouge
ou rougeâtre)
- Les antitussifs sont interdits, il faut respecter une toux productive. Les mucolytiques ou
ceux pompeusement appelés mucorégulateurs n’ont aucune indication. Actuellement ils sont
contrindiqués chez le nourrisson
- La maladie est virale, les antibiotiques sont inutiles. Le taux d’infection bactérienne
invasive est faible également, variant de 0,2 % à 3,7 % si l’on ne tient pas compte du
tout petit qui doit, de toute façon, être hospitalisé. La surinfection sera de plus en plus
rare grâce à l’utilisation répandue du vaccin anti-pneumococcique (Prevenar®)
Que nous reste t-il ? : Le BSP
Le BSP est le bon sens paysan ! La prise en charge sera symptomatique, comme le souligne
la conférence de consensus déjà ancienne (2000) sur la bronchiolite du nourrisson. Les
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mesures sont hygiéniques : ne pas trop couvrir, faire boire, fractionner les repas, laver le nez
au sérum physiologique, moucher l’enfant. Le bébé respire par le nez, un nez bouché c’est
un repos gâché, une insomnie assurée, une aggravation des troubles respiratoires.
La kinésithérapie respiratoire
Sera proposée en cas d’hypersécrétion, et ce en dehors de la phase aiguë. Elle privilégie
alors des techniques expiratoires passives et lentes associées à la toux provoquée. Le
kinésithérapeute spécialisé participe à l’éducation parentale et notamment à l’apprentissage
du mouchage. Une première bronchiolite peut durer une dizaine de jours. La toux est le
dernier
symptôme
à
disparaître.
« La kiné » n’est pas (ou peu) pratiquée dans les pays anglo-saxons et une fronde semble
monter contre cette pratique. Disons simplement que ces techniques n’ont pas la prétention
de guérir la maladie mais d’aider un nourrisson encombré. Les études contradictoires ont
toutes été réalisées chez la très faible minorité des nourrissons hospitalisés. Il n’y a pas
(pour le moment) d’études contrôlées dans la bronchiolite commune, habituelle, en
ambulatoire.
La bronchiolite, est-ce grave ?
La réponse est non. La guérison spontanée est l’éventualité la plus fréquente, mais 3 à 4
semaines sont nécessaires au décours de la phase aiguë pour que la muqueuse à l’intérieur
des bronches cicatrise et retrouve une fonction efficace.
L’hospitalisation va cependant concerner 1 à 3% des bébés atteints. Il y a donc des patients
à risque et d’autres qui s’aggravent.
Les patients à risque doivent être identifiés sur les facteurs suivants :
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-
âge < 6 semaines
-
antécédents de prématurité < 34 semaines d’aménorrhée
-
maladie cardiaque sous-jacente
-
troubles digestifs associés compromettant l’alimentation et la réhydratation
- difficultés psychosociales et familiales pour la surveillance
Les patients qui s’aggravent devront avoir un recours hospitalier en présence d’un des
critères suivants :
-
altération de l’état général, aspect dit « toxique »
-
survenue de pauses respiratoires
-
présence d’une coloration bleutée de la peau, surtout à l’effort (cris, prise difficile de la
tétée). C’est la cyanose.
-
refus de l’alimentation et bien sur déshydratation avec une perte de poids > 5% (par
exemple perte supérieure à 400g pour un enfant de 8kg)
-
élévation thermique > 39° (indicatif seulement)
On peut mesurer le taux d’oxygène dans le sang de l’enfant
Certains médecins ou kinésithérapeutes spécialisés ou services de porte hospitaliers sont
équipés pour mesurer la saturation artérielle transcutanée en oxygène (SpO2 tc) : c’est
l’oxymétrie de pouls. Elle est réalisée avec un petit capteur au bout du doigt, sans effraction,
au repos ou lors de la prise d’un biberon. Un taux de SpO2 < 94% (<92% dans les articles
canadiens) est un indicateur de gravité.
Qu’appelle t’on « Asthme du nourrisson » ?
C’est la Haute Autorité de Santé (HAS) qui a demandé en 2009 à un groupe d’experts
français de bien vouloir définir ce qu’était l’asthme de l’enfant de moins de 36 mois et d’en
fixer la prise en charge. L’argumentaire scientifique de ces recommandations est
téléchargeable sur : www.has-sante.fr . La définition de l’asthme du petit est clinique : tout
épisode d’essoufflement avec sifflement, qui s’est produit au moins 3 fois depuis la
naissance et cela quelles que soient les causes déclenchantes, l’existence ou non d’un
terrain allergique. L’asthme du nourrisson n’est pas à traiter comme un asthme allergique.
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On doit dire première bronchiolite, deuxième et à partir de la troisième avant 36 mois :
asthme du nourrisson. Les épisodes ultérieurs avec toux et sifflements seront nommés
exacerbations de la maladie.
Le fait de poser ce diagnostic implique surveillance et traitement de fond. La première
bronchiolite a été initiatrice, mais l’asthme du nourrisson n’est pas un asthme de la vie...
La plupart des bébés siffleurs ne deviendront pas asthmatiques, les enfants à risque sont
ceux nés de parents allergiques, ceux porteurs d’un eczéma surtout si on laisse la dermatite
évoluer, ceux qui ont présenté une bronchiolite sévère avant l’âge de 6 mois.
Que retenir en pratique?
- Le premier épisode de bronchiolite est aigu et viral : ce n’est pas de l’asthme, même si
l’enfant siffle
- Il n’y a pas de traitement spécifique, mais des mesures d’hygiène avec notamment le
mouchage au sérum physiologique
- le kinésithérapeute doit vous apprendre à moucher le bébé et en phase de sécrétion
bronchique aider à l’expectoration
- Le diagnostic d’asthme du nourrisson est clinique : à partir du troisième épisode de
sifflement, quelle qu’en soit la cause déclenchante
- Si lors d’une première bronchiolite (sans fièvre élevée) la radiographie pulmonaire est
inutile, le nourrisson asthmatique doit bénéficier d’une radio et celle-ci doit être normale en
dehors des crises
- Le marqueur principal qui permet de dire que ce bébé siffleur gardera un asthme de l’enfant
est son terrain allergique. Il faut traiter régulièrement la peau d’un nourrisson porteur d’une
dermatite atopique, aussi en prévention de l’asthme.
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En savoir plus ?
Quelques sites
- « Bronchiolite, lignes directrices, CHU Sainte Justine », excellent article (pdf) en
Français d’un grand hôpital canadien
- Haute Autorité de Santé (HAS), Société Pédiatrique de Pneumologie et Allergologique
[SP2A]. Recommandations Professionnelles. Asthme de l’enfant de moins de 36 mois :
diagnostic, prise en charge et traitement en dehors des épisodes aigus. Mars 2009.
-
http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_796722/asthme-de-l-enfant-de-moins-de36-mois-diagnostic-prise-en-charge-et-traitement-en-dehors-des-episodes-aigus
-Courlygones.net : « Votre enfant est gêné pour respirer » Téléchargement libre sur le site
-
Un livre
-
J. Robert. De la bronchiolite à l’Asthme. Pages : 87-98 in : « Vivre mieux avec
les allergies de l’enfant » 2012 ; 1 vol, Ed. Odile Jacob
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