Paper 1 - Federgon

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Paper 1 - Federgon
La réforme du marché public de
l’accompagnement des demandeurs
d’emploi en Grande-Bretagne: un exercice
d’équilibre
Auteurs: Liesbeth Van Parys et Ludo Struyven
Analyse réalisée dans le cadre d’une étude comparative internationale
commandée par Federgon et portant sur le recours par les pouvoirs publics à
des opérateurs externes
Date: septembre 2009
iii
La présente contribution a été réalisée dans le cadre d’une nouvelle étude comparative internationale portant sur le recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Les résultats de
cette étude sont présentés dans une série de cinq articles. Ce document consacré à
la Grande-Bretagne en constitue la première partie. Il est suivi de deux articles
portant respectivement sur le recours à des opérateurs externes aux Pays-Bas et en
Belgique. Un quatrième article présente une synthèse des analyses de ces pays et
de quelques autres; cette synthèse permet de tirer des enseignements pour le
recours à des opérateurs externes en Belgique, ainsi que dans d’autres pays qui
prennent des mesures pour développer un marché public. Une note de
recommandations a également été rédigée dans le cadre de cette étude. Cette note
a pour but, en s’inspirant de pratiques observées à l’étranger, de confronter les
premières expériences menées dans notre pays à des choix de principe, plutôt que
de décrire comment ces choix peuvent être mis en oeuvre techniquement.
Titre des articles:
1. Van Parys L. & Struyven L. (2009a), La réforme du marché public de
l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Grande-Bretagne: un exercice
d’équilibre.
2. Van Parys L. & Struyven L. (2009b), Le système hybride de recours par les pouvoirs
publics à des opérateurs externes aux Pays-Bas: évolutions récentes sur le marché de la
réinsertion.
3. Struyven L. & Van Parys L. (2009a), Au pays des ‘tenders’ et ‘appels à projets’: les
premières années du recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes pour
l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Belgique
4. Struyven L. & Van Parys L. (2009b), Expériences de recours par les pouvoirs publics
à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Leçons
pour la Belgique. Synthèse.
5. Struyven L. & Van Parys L. (2009c), Le recours à des opérateurs externes dans le
cadre de l’accompagnement des demandeurs d’emploi: comment aller plus loin après la
première phase de ‘tendering’ et d’’appels à projets’? Note de recommandations.
v
Tables des matières
Liste des abbreviations
vii
1. Introduction
1.1 Introduction théorique au recours par les pouvoirs publics à des
opérateurs externes
1.2 Objectifs de l’étude et méthodes de recherche
1.3 Structure de l’article
1
1
2
3
2. Cadre politique: ‘a major transformation’ dans la politique britannique
d’activation du marché du travail
5
3. Donneurs d’ordre, prestataires et demandeurs d’emploi: tâches,
responsabilités et rapports mutuels
3.1 Répartition des tâches et relations entre le DWP, JCP, les prestataires
privés et les demandeurs d’emploi
3.2 La ‘supply chain’: une fonction de donneur d’ordre à deux niveaux
3.3 L’ampleur des contrats: étendue géographique, volumes et budgets
3.4 Sélection des contractants principaux
3.5 Financement lié au résultat: ‘no cure less pay’
3.6 Liberté de choix du demandeur d’emploi
9
10
11
14
16
19
4. Le développement du marché des opérateurs: une recherche d’équilibre
entre flexibilité et stabilité
20
5. Définition, contrôle et évaluation des résultats à atteindre
5.1 Contrôle et évaluation des prestations
5.2 Résultats attendus sur la base de l’expérience des Employment
Zones et des interviews
6. Enseignements pour le recours à des opérateurs externes en Belgique: un
exercice d’équilibre en cinq points
6.1 Un équilibre entre stabilité et flexibilité
6.2 Un équilibre dans la répartition des tâches entres acteurs publics et
acteurs privés
6.3 Un équilibre entre petits et grands opérateurs, commerciaux et non
commerciaux
6.4 Un équilibre entre la gestion axée sur le résultat, la qualité et l’égalité
6.5 Un équilibre entre différents intérêts
Annexes
Annexe 1 /
Annexe 2/
9
24
24
26
28
28
28
29
29
30
31
Aperçu détaillé des quatre étapes du plan d’accompagnement
des bénéficiaires de l’allocation JSA
32
Carte des 14 zones sur lesquelles portent les contrats
33
vi
Annexe 3 /
Annexe 4 /
Bibliographie
Aperçu des contrats globaux, des budgets indicatifs
et des volumes de clients par zone
Shortlist des candidats contractants principaux sélectionnés
au cours de la phase du PQQ et contractants principaux
choisis dans la phase finale, par zone contractuelle
34
36
39
vii
Liste des abbreviations
ACEVO
CS
DWP
ESA
EZ
FND
GB
IB
IS
ItT
JCP
JSA
ND
PQQ
SPV
WD
Association of Chief Executives of Voluntary Organisations
Commissioning Strategy
Department for Work and Pensions
Employment and Support Allowance
Employment Zones
Flexible New Deal
Grande-Bretagne
Incapacity Benefit
Income Support
Invitation to Tender
Jobcentre Plus
Jobseekers Allowance
New Deal
Pre-Qualification Questionnaire
Special Purpose Vehicle
WorkDirections
1
1. Introduction
Le présent article expose les développements récents de l’élaboration de la politique d’activation du marché du travail en Grande-Bretagne. Il s’articule particulièrement autour de l’approche de cette politique sur le plan organisationnel: la création d’un marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Cette
étude s’inscrit dans une tradition de recherche de l’HIVA (Hoger Instituut voor de
Arbeid – Institut supérieur de l’emploi de la K.U.Leuven) sur ce thème. Les expériences britannique, néerlandaise, australienne et suédoise de recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes dans le cadre de la politique d’activation
du marché du travail ont déjà été étudiées à l’occasion de précédentes missions de
recherche (cf. Struyven et al., 2002; De Cuyper et al., 2005).
Dans cette introduction, nous allons expliquer la notion de recours à des opérateurs externes d’un point de vue théorique (§1.1), exposer les objectifs de l’étude et
commenter la méthodologie utilisée (§1.2). Nous donnerons enfin un aperçu de la
structure de l’article (§1.3).
1.1 Introduction théorique au recours par les pouvoirs publics à des opérateurs
externes
Le ‘marché public’, aussi appelé ‘quasi-marché’, est un concept développé par Le
Grand et Bartlett (1993). Ces auteurs désignent ainsi une nouvelle approche organisationnelle des pouvoirs publics pour l’exécution de la politique sociale. Cette
approche confère aux pouvoirs publics un rôle nouveau, celui de régisseur. À ce
titre, ils ne prennent plus en charge l’ensemble de l’offre de services, mais font
appel à des opérateurs publics et privés (commerciaux et non commerciaux). Ces
opérateurs se trouvent dans une relation de concurrence: ils concourent, par le
biais d’une procédure d’appel d’offres (tendering), pour l’obtention de contrats de
services.
Il convient de ne pas confondre marché public et ‘marché libre’ du placement.
Le Grand et Bartlett distinguent trois différences importantes:
– dans un marché public, la concurrence n’est pas nécessairement motivée par le
profit: des organisations sans but lucratif et des organisations publiques peuvent aussi concourir;
– il s’agit toujours de fonds publics qui sont mis à disposition par l’État (tout
comme dans un système de subsidiation). Dès lors, la demande totale ne varie
pas de la même façon que sur un marché libre; elle peut se déplacer uniquement entre les prestataires d’un appel d’offres à l’autre;
– le pouvoir d’achat n’est pas (nécessairement) détenu par les demandeurs
d’emploi individuels (clients), mais par une instance qui intervient en tant que
donneur d’ordre pour le compte du client final.
2
Selon Le Grand et Bartlett, les principaux motifs d’introduction d’un marché
public sont doubles:
– premièrement, on vise une augmentation de l’efficience et de l’efficacité des
prestations. La concurrence qui apparaît devrait stimuler l’amélioration des
prestations des opérateurs, tant privés que publics;
– deuxièmement, la réactivité des opérateurs par rapport aux souhaits et aux besoins des clients d’une part, et la liberté de choix du client d’autre part, doivent
augmenter. Dans le domaine de l’accompagnement des demandeurs d’emploi,
ceci implique concrètement de pouvoir fournir aux demandeurs d’emploi un
accompagnement sur mesure.
Nous retrouvons également ces arguments en faveur de l’introduction d’un marché public dans les notes d’orientation du gouvernement britannique (DWP,
2008a, p. 16; DWP Memorandum in House of Commons, 2009, Vol. II). On y
trouve toutefois encore un argument supplémentaire (House of Commons, 2009,
Vol. II-14): en coopérant avec les opérateurs privés, les pouvoirs publics ne doivent pas développer leurs capacités propres à court terme, et le potentiel existant
dans le secteur privé est pleinement exploité.
1.2 Objectifs de l’étude et méthodes de recherche
1.2.1 Objectifs de l’étude
Cette étude vise à proposer une analyse approfondie des développements récents
dans le domaine du recours par les pouvoirs publics à des opérateurs externes en
Grande-Bretagne. Elle concerne plus particulièrement l’introduction de la stratégie
appelée ‘Commissioning Strategy’ qui sera appliquée pour la première fois dans le
cadre de la nouvelle politique d’activation du ‘Flexible New Deal’ (cf. infra).
L’objectif est de faire une radiographie des différents aspects propres au recours
à des opérateurs externes et de les soumettre à une analyse critique. Les problématiques abordées sont les suivantes: répartition des tâches entre les prestataires
publics et privés, relation contractuelle entre le donneur d’ordre public et les opérateurs privés, sélection des opérateurs, proportion du financement lié au résultat,
liberté de choix pour le demandeur d’emploi, marché des opérateurs visé et définition, suivi et évaluation des résultats. Nous tirerons ensuite des enseignements
de cette analyse critique pour le recours à des opérateurs externes en Belgique et
dans d’autres pays qui font (ou feront) l’expérience de ce système dans le cadre de
l’accompagnement des demandeurs d’emploi: de quelle manière ce marché peut-il
être mis en place et quels sont les facteurs de réussite et d’échec?
3
1.2.2 Méthodes de recherche utilisées
Pour cette étude qualitative, trois méthodes ont été utilisées: recherche documentaire, consultation d’experts et interviews directes. Pour la recherche documentaire, les types de documents suivants ont été étudiés: notes d’orientation du
Department for Work and Pensions (DWP), rapports du Work and Pensions
Committee à la House of Commons, mémorandums d’opérateurs privés du marché de l’emploi, études scientifiques et articles de presse. Le Professeur Dan Finn
(School of Social, Historical and Literary Studies, University of Portsmouth,
Royaume-Uni) a été consulté en tant qu’expert en la matière. Pour les interviews
directes, nous avons effectué un voyage d’étude à Londres. Nous avons interviewé1 d’une part un opérateur privé international du secteur marchand qui
soumissionne pour devenir contractant principal (cf. infra §3.2),
Ingeus/WorkDirections, et d’autre part le représentant de l’association des dirigeants du secteur non marchand en Grande-Bretagne, l’Association of Chief Executives of Voluntary Organisation. Des membres de cette organisation soumissionnent pour devenir contractants principaux ou sous-contractants (cf. infra §3.2).
Nom des organisations
Ingeus/Work Directions
Association of Chief Executives
of Voluntary Organisations
(ACEVO)
Nom des personnes de contact
Jenny Ross (Manager of the Ingeus Centre
for Policy and Research) et Andrew Wilson (Director of Business Development)
Ralph Michell (Head of Policy)
Date
14 avril 2009
15 avril 2009
Il est important de préciser que la nouvelle politique britannique ne sera
d’application qu’à partir du mois d’octobre 2009. Par conséquent, le fonctionnement du nouveau marché public ne peut pour le moment être évalué ni quantitativement, ni qualitativement.
1.3 Structure de l’article
L’article est structuré comme suit. Dans le deuxième chapitre, nous esquisserons le
cadre politique plus large dans lequel s’inscrit le développement du marché public
de l’accompagnement des demandeurs d’emploi en Grande-Bretagne. Dans le
troisième chapitre, nous examinerons de manière plus approfondie la répartition
des tâches et les relations entre les différents acteurs du marché public (donneurs
d’ordre, opérateurs et demandeurs d’emploi). L’étendue et les modalités des
contrats entre le régisseur public et les prestataires privés seront également abordées. Le quatrième chapitre sera consacré au marché des opérateurs visé par les
1
Dans la suite du présent article, les interviews seront désignées comme suit: (interview ‘nom
de l’organisation’).
4
pouvoirs publics britanniques. Dans le chapitre 5, nous décrirons les résultats que
doivent atteindre les prestataires privés et les modalités de suivi et d’évaluation de
ces résultats. Sur la base de l’analyse critique formulée dans ces quatre premiers
chapitres, nous tirerons ensuite des enseignements pour le recours à des opérateurs externes en Belgique. Ces enseignements seront exposés dans le sixième et
dernier chapitre.
5
2. Cadre politique: ‘a major transformation’ dans la politique
britannique d’activation du marché du travail
En janvier 1998, le gouvernement travailliste alors récemment entré en fonction
annonçait une modernisation de la politique du marché du travail. Le ‘New Deal’
a introduit le principe selon lequel les demandeurs d’emploi ont certes des droits,
mais aussi des devoirs (‘something for something’). Des programmes New Deal
adaptés à différents groupes cibles (tels que les jeunes, les parents isolés, les plus
de 50 ans et les personnes handicapées) ont été mis en place pour
l’accompagnement et la réinsertion des demandeurs d’emploi. Une sanction,
matérialisée par la suspension de l’indemnisation, devait empêcher que les
demandeurs d’emploi ne prennent pas leurs responsabilités (DWP, 2008b).
La réforme actuelle, considérée comme ‘a major transformation’, prolonge cet
élan et doit permettre à la Grande-Bretagne d’atteindre un taux de participation au
marché du travail de 80%, de réduire la part des allocataires, de lutter contre la
pauvreté des enfants (à l’horizon 2020) et de réaliser l’égalité des chances pour les
personnes handicapées (à l’horizon 2025). Le gouvernement situe donc la nouvelle
approche dans un programme plus large de cohésion sociale, de durabilité,
d’égalité des chances et de diversité. Les trois réformes suivantes sont plus particulièrement à l’ordre du jour:
– extension de l’activation auprès des inactifs;
– modernisation des programmes d’activation;
– elargissement du recours à des opérateurs externes.
Extension de l’activation auprès des inactifs. Pour pouvoir réaliser l’ambition d’aller
vers un taux de participation au marché du travail de 80%, de nouveaux groupes
cibles sont identifiés, à savoir les parents isolés (pour ce groupe, l’objectif est un
taux de participation au marché du travail de 70% en 2010) et les personnes handicapées. Par ailleurs, les indemnisations existantes sont revues. Les parents isolés
ne pourront désormais solliciter l’allocation Income Support que si le plus jeune
enfant n’a pas atteint l’âge de sept ans.
Partant du principe qu’il convient de se concentrer non pas sur les limitations
mais bien sur les capacités de la personne, l’allocation Incapacity Benefit a été
remplacée par une allocation Employment and Support Allowance. Désormais, on
détermine si les personnes atteintes d’une maladie/d’un handicap sont en mesure
de travailler (à temps partiel) ou d’entreprendre une activité professionnelle. Si
c’est le cas, la personne est accompagnée dans son parcours vers l’emploi par un
conseiller personnel et bénéficie de la formation et de la préparation nécessaires. Si
ce n’est pas le cas, la personne perçoit l’allocation Support Allowance.
Modernisation des programmes d’activation. Les services offerts aux demandeurs
d’emploi par Jobcentre Plus (JCP; cf. VDAB, Forem et Actiris) et les prestataires
6
privés (notamment dans le cadre des programmes ‘New Deal’ et des ‘Employment
Zones’ régionales) sont également revus. Désormais, un diagnostic sera établi
pour chaque demandeur d’emploi qui fait la demande d’une allocation Jobseeker
Allowance (JSA). L’aide sera ensuite dispensée comme suit (cf. figure 1 et figure en
annexe 1):
– dans la phase 1 (zéro à trois mois après la demande), le demandeur d’emploi
est censé agir de manière autonome. Une séance obligatoire de ‘Back to work’
est organisée à titre de soutien. Si le demandeur d’emploi ne réussit pas à trouver un emploi au cours de cette période, l’intensité du soutien augmente progressivement au cours des phases suivantes;
– dans la phase 2 (trois à six mois), les demandeurs d’emploi sont suivis de plus
près dans leur recherche d’emploi: ils sont régulièrement invités à des entretiens, doivent répondre à certaines offres d’emploi et prendre en considération
des emplois qui ne correspondent pas immédiatement à leur premier choix;
– la phase 3 (six à douze mois) est baptisée ‘the Gateway’ d’après la formule
réussie des programmes ND. Elle implique l’élaboration d’un plan d’action
individuel reprenant les activités auxquelles le demandeur d’emploi doit participer au cours des prochains mois pour accroître ses chances de (re-)mise au
travail. Les demandeurs d’emploi pour lesquels un besoin de soutien intensif
est identifié dès la phase 1 ne participent pas à la séance Back to Work, mais
sont directement orientés vers la phase Gateway. On parle alors de ‘fast track’
(voie rapide);
– la phase 4 prend cours si la recherche d’emploi n’a toujours pas abouti après
douze mois. Au cours de cette phase, Jobcentre Plus redirige le demandeur
d’emploi vers un prestataire privé spécialisé (commercial ou non commercial).
Il est prévu que cette phase dure environ douze mois, avec une prolongation
possible de six mois si toutes les parties sont d’accord. Les activités de cette
phase doivent être axées sur la mise au travail. L’instance publique (JCP) reste
chargée du suivi (elle prend contact régulièrement avec le demandeur
d’emploi), de l’indemnisation et des sanctions éventuelles. Cette phase est
appelée ‘Flexible New Deal’ (FND) et elle est au centre de la présente analyse.
Au cours de chacune des phases, le demandeur d’emploi peut être sanctionné s’il
ne participe pas aux activités obligatoires telles que la séance Back to Work ou les
activités définies dans le plan d’action individuel, sans avoir dûment motivé son
absence. JCP peut par exemple prévoir également via une ‘Jobseeker’s Direction’
que le demandeur d’emploi doit postuler sous peine de sanction. La sanction se
traduit par une perte de l’indemnité de chômage pendant une ou deux semaines
dans le cas d’un premier manquement. Si un deuxième cas se présente dans la
même année, une suspension de quatre semaines est appliquée. En cas de récidive(s) au cours de l’année suivant le dernier cas, une suspension immédiate de
26 semaines est d’application (DWP, 2009). Dans certaines circonstances, un
‘Hardship payment’ peut être prévu afin d’éviter de mettre la personne sanctionnée et sa famille dans une situation financière trop difficile.
7
Source: DWP, 2008c
Figure 1
Les quatre étapes du plan d’accompagnement des bénéficiaires de l’allocation JSA
Elargissement du recours à des opérateurs externes. Le recours à des opérateurs externes pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi n’est pas une nouveauté en
Grande-Bretagne. Un ‘marché public’ a déjà été créé pour l’accompagnement des
demandeurs d’emploi, notamment pour quelques programmes New Deal, pour le
programme Employment Zones et le programme Pathways to Work. Les résultats
positifs (des EZ en particulier) ont amené Tony Blair et son successeur, Gordon
Brown, à accorder leur soutien à une réforme plus poussée qu’ils ont qualifiée
comme suit: ‘first stage in the next decade of welfare reform’ (Financial Times, 6
mars 2007). La nouvelle approche est justifiée par le fait qu’elle représente une
approche plus stratégique de la politique de recours à des opérateurs externes
ainsi qu’une simplification et une rationalisation des contrats ‘welfare to work’
existants.
Les propositions relatives au recours à des opérateurs externes, issues notamment du ‘Freud Report’ et du ‘Leitch Review of Skills’,2 ont été reprises et
développées dans une ‘Commissioning Strategy’ globale (CS; DWP, 2008d) par le
Secrétaire d’Etat à l’Emploi et aux Pensions, James Purnell. L’objectif est de simplifier et de rationaliser les contrats existants afin de pouvoir établir une relation
2
Le document ‘Leitch Review of Skills’ évoque la possibilité d’une collaboration entre
prestataires du marché de l’emploi et organismes de formation (par ex. le Learning and Skills
Council en Angleterre et le Skills Development en Écosse) pour assumer le rôle de donneur
d’ordre. Le gouvernement entend ainsi combler le ‘fossé des qualifications’ (skills gap). Le
DWP souhaite réaliser cette intégration à terme dans le cadre du FND et a mis en place des
projets pilotes (expériences ‘Integrated Employment and Skills’ (IES)) à cette fin. Pour le
contexte belge, il est intéressant de pointer un problème qui se pose: le Pays de Galles et
l’Écosse disposent d’une compétence étendue en matière de formation et refusent pour le
moment de financer des formations qui sont imposées ‘d’en haut’ aux demandeurs d’emploi
(interview WorkDirections).
8
stratégique avec un groupe restreint d’opérateurs forts qui sont prêts à soutenir et
à développer la politique.
Dans la nouvelle approche définie dans la CS, le régisseur-ensemblier/donneur
d’ordre du marché public de l’accompagnement des demandeurs d’emploi ne sera
plus Jobcentre Plus mais bien le ‘Department for Work and Pensions’ (DWP). 80%
des activités seront exécutées par un noyau stable de ‘contractants principaux’ qui
géreront à leur tour de nombreux contrats plus restreints au sein d’une région
déterminée. Le rôle de sous-contractant sera principalement assumé par de plus
petits opérateurs. Les contractants principaux disposeront d’un contrat de longue
durée de 5 ans, avec extension possible à 7 ans. La majeure partie du financement
(80%) dépend du placement des chômeurs dans un emploi d’une durée minimum
de six mois. Nous nous pencherons en détail sur ces aspects dans la suite du présent article.
Ces trois grandes réformes ne peuvent bien entendu pas être considérées séparément. L’engagement du gouvernement britannique en faveur de l’activation des
chômeurs de longue durée et de nouveaux groupes cibles exige une approche plus
souple, plus innovante et plus intensive. Pour ce faire, il fait de préférence appel à
des organisations privées du secteur marchand et du secteur non marchand qui
disposent déjà des connaissances et des compétences nécessaires. L’introduction
d’un large recours aux opérateurs externes est censé stimuler davantage la qualité
des prestations de ces opérateurs. La suite du présent chapitre est consacrée à une
étude approfondie de la Commissioning Strategy telle qu’elle sera appliquée (pour
la première fois) dans le cadre du Flexible New Deal.
9
3. Donneurs d’ordre, prestataires et demandeurs d’emploi: tâches,
responsabilités et rapports mutuels
Ce paragraphe est consacré à une étude plus détaillée de la répartition des tâches
et des relations entre les différents acteurs (Department for Work and Pensions,
Jobcentre Plus, opérateurs privés du secteur marchand et du secteur non marchand et demandeurs d’emploi) dans la Commissioning Strategy. Cette stratégie
vise à favoriser une évolution nouvelle et plus poussée du marché public de
l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Après un bref aperçu schématique
de tous les acteurs et de leurs relations, nous approfondirons les éléments cruciaux
de la CS: (a) le rapport entre les contractants principaux et les sous-contractants,
(b) l’ampleur des contrats, (c) la sélection des contractants principaux, (d) le financement lié au résultat et e) la liberté de choix du demandeur d’emploi.
3.1 Répartition des tâches et relations entre le DWP, JCP, les prestataires privés
et les demandeurs d’emploi
L’introduction de la Commissioning Strategy et du Flexible New Deal va de pair
avec une révision de la répartition des tâches entre les différents acteurs. La nouvelle approche se présente comme suit:
– les demandeurs d’emploi bénéficiaires d’une allocation JSA sont accompagnés
dans leur recherche d’emploi au cours de quatre phases successives (cf. supra
§2). Jobcentre Plus joue ici un rôle essentiel: au cours de chaque phase, il verse
la Job Seeker Allowance, il évalue toutes les deux semaines les efforts réalisés
par le chômeur pour trouver un emploi, et c’est à lui que revient dans toutes
les phases la décision en matière de sanctions à l’encontre du demandeur
d’emploi;
– l’accompagnement intensif du demandeur d’emploi dans la quatrième phase
est cependant délégué par JCP aux contractants principaux. Ceux-ci décident
eux-mêmes du contenu de l’accompagnement (choix de l’approche et des
autres opérateurs privés auxquels les prestations sont éventuellement soustraitées (idée de ‘black box’)). Au cours de cette phase, un nouveau plan
d’action individuel est établi en concertation avec le demandeur d’emploi. Le
contractant principal peut décider lui-même de prendre en charge
l’accompagnement de tous les clients ou de le déléguer à son tour à un ou plusieurs sous-contractants (cf. infra §3.2). Pendant cette phase, JCP reste toutefois
responsable de l’indemnisation, des entretiens bimensuels et des sanctions. Il
est attendu du prestataire privé qu’il prenne contact avec JCP si le demandeur
d’emploi ne se montre pas suffisamment coopérant et qu’il puisse produire les
éléments de preuve nécessaires en vue d’une éventuelle sanction;
10
–
–
enfin, le DWP est chargé de l’ensemble du processus de recours au marché.3
Ceci signifie qu’il organise et gère le processus d’appel d’offres et qu’il assure
ensuite le suivi des contrats avec les différents contractants principaux et
apporte des corrections si nécessaire. Le DWP dirige également JCP en tant
qu’agence publique;
ces relations peuvent être schématisées comme suit (figure 2). Dans la suite du
présent chapitre, nous étudions ces relations en détail et décrivons les instruments utilisés pour les faciliter.
Figure 2
Aperçu schématique des relations entre les différents acteurs dans la Commissioning
Strategy telle qu’elle est appliquée dans le cadre du Flexible New Deal
3.2 La ‘supply chain’: une fonction de donneur d’ordre à deux niveaux
Dans la nouvelle structure de marché, la fonction de donneur d’ordre se décline à
deux niveaux:
– les ‘prime contractors’ (ci-après ‘contractants principaux’) sont responsables du
bon fonctionnement de la ‘supply chain’ (c’est-à-dire l’ensemble de la chaîne
des prestations, allant du contractant principal aux différents sous-contractants
3
Il convient de noter que l’organisation et la gestion des appels d’offres étaient auparavant
prises en charge en partie par JCP et en partie par le DWP, dans la mesure où JCP se chargeait
des appels d’offres New Deal, et le DWP de ceux des Employment Zones (De Cuyper et al.,
2005).
11
–
et aux sous-traitants éventuels de ces sous-contractants) dans une zone
contractuelle définie;
les nombreux ‘subcontractors’ (ci-après ‘sous-contractants’) font fonction de
‘delivery provider’.
Les ‘contractants principaux’ obtiennent un contrat de longue durée (5 ans, avec
extension possible à 7 ans) portant sur un marché très vaste: il s’agit de prestataires de haut niveau avec lesquels le DWP entend nouer une relation stratégique,
plutôt que d’imposer le respect d’une mission contractuelle bien définie. Le DWP
recherche principalement des partenaires avec lesquels il peut partager une vision
et des idées pour développer la nouvelle politique. Des indications fournies par le
contractant principal à propos de modifications au sein des groupes cibles peuvent
par exemple jouer un rôle dans le développement de la politique. Le DWP
s’efforce donc d’imposer le moins possible d’exigences sur le fond et compte plutôt sur les connaissances et les compétences du secteur pour fournir dans chaque
zone les programmes les plus adaptés et les plus axés sur un travail sur mesure.
Cette approche est également appelée ‘black box approach’.
Le DWP ne s’immisce pas davantage dans la conception et dans la gestion de la
‘supply chain’. Il part du principe que les territoires sur lesquels portent les
contrats sont si vastes que chaque contractant principal devra travailler avec des
sous-contractants. Il laisse néanmoins les possibilités suivantes aux contractants
principaux:
– le contractant principal fournit lui-même une partie des services, le reste étant
délégué à des sous-contractants;
– le contractant principal sous-traite l’ensemble des services à des sous-contractants;
– le contractant principal fournit lui-même l’ensemble des services.
Le DWP exige toutefois que chaque contractant principal indique dans son offre
les sous-contractants avec lesquels il entend travailler. Le DWP peut mettre son
veto à une collaboration avec certains sous-contractants, aussi bien avant que pendant ou après l’attribution du marché. Le DWP n’impose aucune limite en ce qui
concerne le nombre de niveaux de la chaîne. Les sous-contractants peuvent donc à
leur tour faire appel à des sous-traitants. Le suivi et la gestion des prestations de
l’ensemble de la chaîne relèvent de la responsabilité finale du contractant principal. Dans le chapitre suivant, nous allons approfondir la relation entre le contractant principal et le sous-contractant.
3.3 L’ampleur des contrats: étendue géographique, volumes et budgets
Ces contrats stratégiques sont conclus pour l’ensemble d’une région, d’une superficie supérieure à celle des districts actuels de Jobcentre Plus mais inférieure à celle
de l’Angleterre, de l’Écosse ou du Pays de Galles (cf. carte en annexe 2). Lors de la
constitution des quatorze zones contractuelles, on a tenu compte de délimitations
12
existantes telles que celles des City Strategy Pathfinders. Dans certaines zones, un
seul contractant principal intervient, dans d’autres, ils sont deux (cf. tableau 1). La
deuxième phase du FND qui commencera en octobre 2010 inclura une série de
nouvelles zones.
Tableau 1
Aperçu du nombre d’opérateurs par zone contractuelle dans le Flexible New Deal
Zones contractuelles (districts JCP)
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
14.
Nombre de contractants
principaux
Birmingham and Solihull
Black Country
Cambridgeshire and Suffolk / Norfolk / Lincolnshire and
Rutland
Devon & Cornwall
Leicestershire and Northhamptonshire / Nottinghamshire
Central London /
Lambeth, Southwark & Wandsworth
Greater Manchester Central /
Greater Manchester East and West
North and Mid Wales / South East Wales
North and East Yorkshire and Humber / Tees Valley
Edinburgh, Lothian and Borders / Ayrshire, Dumfries,
Galloway and Inverclyde / Lanarkshire and East
Dunbartonshire
South Wales Valleys / South West Wales
South Yorkshire / Derbyshire
Surrey and Sussex / Kent
Coventry and Warwickshire / The Marches / Staffordshire
2
2
2
1
2
2
1
1
2
2
1
2
2
2
Total des 14 territoires
24
Source: DWP, 2008c
Le nombre estimé de ‘starters’ dans le Flexible New Deal par an et par zone
contractuelle est indiqué en détail dans le tableau de l’annexe 3. Le nombre total
estimé de ‘starters’ par an pour toutes les zones se présente comme suit:
Octobre 2009 – mars 2010
Avril 2010 – mars 2011
Avril 2011 – mars 2012
Avril 2012 – mars 2013
Avril 2013 – mars 2014
Avril 2014 – septembre 2014
99 600
146 500
152 800
150 700
149 100
74 600
Il s’agit d’estimations du DWP sur la base des éléments suivants:
– valeurs de départ basées sur le nombre d’allocataires JSA ayant été demandeurs d’emploi pendant douze mois en 2005-06; et
13
–
augmentations et baisses prévues du nombre d’allocataires JSA qui restent
demandeurs d’emploi pendant douze mois.
Des augmentations sont prévues suite à l’activation des personnes handicapées et
des parents isolés (cf. supra §2). Des baisses peuvent se produire si la nouvelle
approche de JCP (modèle en 4 phases, cf. supra §2) et d’autres programmes (par
ex. City Partnerships et Local Employment Partnerships) portent leurs fruits. Le
volume réel dépendra également de l’utilisation du parcours ‘fast track’ par JCP: si
davantage de demandeurs d’emploi sont intégrés précocement dans la phase 3, le
nombre de ‘starters’ dans le FND augmentera également (DWP, 2008f).
Pour donner aux contractants principaux la possibilité d’estimer eux-mêmes les
volumes futurs, le DWP a mis à la disposition des soumissionnaires deux ensembles de données contenant des informations relatives au marché de l’emploi. Le
DWP exige des contractants principaux qu’ils soient préparés à des fluctuations de
volume allant jusqu’à 139%.
Toutefois, suite à la crise actuelle, les volumes réels dans la première période du
FND pourraient être jusqu’à 300% supérieurs aux estimations, selon les calculs du
DWP. Le DWP a par conséquent prévu une pause pour permettre aux candidats
d’adapter leurs offres à la nouvelle donne (Smith & Cave, 2009). L’évolution de la
crise restant incertaine, on ignore dans quelle mesure les volumes réels des années
à venir s’écarteront des estimations. Ceci accroît naturellement le risque lié au
FND pour l’ensemble des parties.
La valeur financière des contrats est la suivante (DWP, 2008g):
– 5 - 10 millions £ (4,5 – 9 millions euros)4 par an pour les contrats dans les zones
rurales avec un seul contractant principal;5
– 16 - 20 millions £ (14,4 – 18 millions euros) par an pour les contrats dans les zones urbaines avec un seul contractant principal;
– 8 - 23 millions £ (7,2 – 20,7 millions euros) par an pour les zones dans lesquelles
les demandeurs d’emploi ont le choix entre deux contractants principaux.
Au total, le DWP prévoit de consacrer au cours de la première phase environ
190 millions - 230 millions £ (171 - 207 millions euros) pour les quatorze contrats.
Selon des informations récentes parues dans TimesOnline (22 avril 2009), ce budget pourrait être revu à la hausse en réaction à la crise. Dans le budget 2009, un
supplément global d’1,7 milliard £ (1,53 milliard euros) est en tout cas prévu pour
JCP et le FND.
4
5
Pour la conversion en euros, le taux utilisé est le taux de change moyen entre le 11 mai 2008 et
le 5 avril 2009, soit 0,90. Le taux a fluctué au cours de cette période entre 0,81 (06/11/2008) et
0,98 (29/12/2008) (http://www.exchange-rates.org/history/GBP/EUR/G).
La question du financement des contractants dans les zones rurales suscite encore des remous.
Les opérateurs font en effet valoir que le coût des services y est plus élevé que dans les zones
urbaines en raison de la faible densité, de frais de déplacement supérieurs et de possibilités
d’emploi moins nombreuses (House of Commons, 2009, Ev. 24).
14
3.4 Sélection des contractants principaux
Avec la Commissioning Strategy, le DWP entend désormais pouvoir s’appuyer
sur un ou deux contractants principaux6 dans chaque zone contractuelle. En raison des attentes importantes dont font l’objet les ‘contractants principaux’ et de
l’ampleur inédite des contrats qu’ils seront amenés à gérer, une procédure de
sélection intensive a été mise en place. La sélection se déroule en deux phases au
cours desquelles les candidats rentrent respectivement les documents suivants: un
‘pre-qualification questionnaire’ (PQQ) et un dossier ‘invitation to tender’ (ItT).
Chaque candidat doit en outre être accrédité (ou être disposé à l’être) par
Momenta.7 Cette accréditation comprend une première évaluation des points suivants:
– entité juridique;
– preuve de souscription à une assurance;
– respect d’exigences statutaires (santé et sécurité, respect de la législation en
matière d’égalité des chances et de racisme);
– respect d’exigences explicitement définies en matière d’égalité et de diversité.
A l’issue la phase du PQQ, le DWP souhaite obtenir une ‘shortlist’ (cf. annexe 4)
reprenant les candidats susceptibles de disposer de ressources financières suffisantes et de la stabilité et de l’expertise nécessaires pour la gestion des gros
contrats FND. Seuls ces candidats présélectionnés peuvent ensuite participer à
l’appel d’offres proprement dit. Les critères suivants sont évalués au cours de la
phase du PQQ (DWP, 2008g):
– capacité financière à assumer le rôle de fournisseur FND;
– expérience de la gestion de gros contrats et du ‘supply chain management’;
– prestations dans le cadre de contrats antérieurs;
– connaissance et expérience des clients et de leurs besoins;
– connaissance et expérience du travail avec les parties intéressées (stakeholders);
– garantie de qualité.
6
7
Le DWP attribue les contrats à une seule entité juridique. Lorsque plusieurs opérateurs du
marché Welfare to work souhaitent coopérer pour assumer conjointement le rôle de
contractant principal, ils peuvent créer à cet effet un ‘Special Purpose Vehicle (SPV)’. Ceci offre
principalement des possibilités aux petits opérateurs. Il ressort toutefois de l’interview de
l’ACEVO (qui représente des organisations du secteur non marchand) que des discussions ont
eu et ont lieu à ce sujet mais qu’elles n’ont encore débouché sur aucune action concrète. Il est
possible que des changements interviennent lorsqu’on aura davantage d’expérience avec la
nouvelle Commissioning Strategy. D’après nos informations, un seul SPV a été sélectionné
pour la shortlist: il s’agit de ‘Mentor Employment and Skills’, fruit de la collaboration entre
Mentor Network (États-Unis) et Fourstar Group (Pays-Bas).
Momenta est l’organisme chargé par le Department for Work and Pensions de l’accréditation
des opérateurs privés qui fournissent des services et des biens au DWP. Momenta est une
division de l’entreprise privée AEA Technology Environment.
15
La deuxième phase, Invitation to Tender, c’est-à-dire celle de l’appel d’offres proprement dit, comporte une évaluation beaucoup plus détaillée de la qualité, du
prix et du risque de l’offre. La qualité et le prix sont évalués séparément et comptent chacun pour la moitié du score final (cf. infra). De plus, le DWP évalue le taux
de risque au moyen d’un ‘capabilities and capacities assessment». Dans ce cadre, il
vérifie plus précisément si les candidats sont en mesure d’exécuter le contrat sur la
base des nouvelles données mentionnées dans l’offre. Enfin, le DWP décide quelle
est l’offre économiquement la plus avantageuse, c’est-à-dire d’après lui celle qui
présente le meilleur rapport entre qualité, prix et risque (DWP, 2008e).
L’évaluation de la qualité englobe tout un éventail de critères qui ont chacun
leur propre poids. Les éléments suivants sont ainsi évalués: méthode de fourniture
des services, suivi du client au sein de la chaîne, implication des parties intéressées, prestations prévues, expérience, capacités en matière de gestion et de qualité,
capital humain, prévention de la fraude, équipements dans les différents locaux,
plan de mise en œuvre et variations de volume. Le score attribué pour la qualité
va de un (‘poor’: nettement inférieur aux attentes) à cinq (‘excellent’: correspondant totalement aux attentes et offrant une valeur ajoutée).
Dans leur offre, les contractants principaux doivent présenter un prix total
incluant les prévisions d’inflation pour chaque année du contrat. Pour déterminer
ce prix, ils peuvent se baser sur les volumes de clients prévus par le DWP et sur le
budget disponible par zone. En ce sens, la Commissioning Strategy se distingue de
procédures précédentes (et encore en cours) où le DWP définissait des prix forfaitaires par type de prestation et par groupe cible et où la concurrence ne jouait donc
que sur le terrain de la qualité.8
Pour l’évaluation du prix, il est calculé un prix moyen par résultat. Ce prix
reprend les trois composantes du financement (service fee, rémunération pour un
emploi de courte durée et rémunération pour un emploi de longue durée; cf. infra
§3.5). Selon la Pricing Proposal Guidance (DWP, 2008h), les candidats peuvent
également proposer au DWP des réductions de prix qui s’appliqueront s’ils remportent un contrat dans plusieurs zones.
Outre la qualité, le prix et le risque, le DWP évalue enfin l’adéquation du
contrat par rapport aux besoins et aux objectifs locaux. L’expérience est une
condition, mais elle peut avoir été acquise dans un autre domaine ou avoir trait à
d’autres services que ceux du marché ‘welfare to work’. La condition principale
est d’être en mesure de travailler avec des partenariats locaux existants (dans lesquels les Jobcentre Plus managers et les Customer Service Directors jouent un rôle
essentiel), de contribuer au développement d’initiatives locales et d’apporter des
ressources complémentaires allouées par le FSE. L’expérience de la collaboration
8
Outre le prix, la part du financement qui dépend de la définition d’un résultat prévu est
également indiquée. Les prix sont adaptés pour Londres (où les prestations sont plus chères) et
ils peuvent être ajustés lorsqu’il est question d’une ‘faillite extrême du marché’ dans un
territoire déterminé. Les (candidats) contractants peuvent consulter ces prix dans les ‘Look Up
Tables’, cf.: http://www.dwp.gov.uk/supplyingdwp/what_we_buy/pg_chapter_4.pdf.
16
avec des partenariats est exigée. Dans le même contexte, le DWP fait appel, pour la
rédaction du cahier des charges destiné aux contractants principaux, à la contribution des Local Strategic Partnerships, de Jobcentre Plus, des Learning and Skills
Councils et d’autres instances publiques centrales et locales. Ces intervenants ne
sont pas seulement impliqués dans la formulation de l’appel d’offres, mais aussi
dans l’évaluation des offres.
3.5 Financement lié au résultat: ‘no cure less pay’
Avec une part de 80% de financement lié au résultat, les contrats conclus avec le
DWP sont fortement axés sur les performances. Le fait de lier le financement aux
résultats obtenus a pour but d’inciter les contractants à trouver un emploi convenable et durable pour un nombre maximum de clients. Ceci s’oppose par exemple
à un financement lié aux moyens mis en œuvre, dans lequel le simple fait de fournir les services demandés, sans considération du résultat final pour le client, serait
suffisant.
3.5.1 Le financement en détail
Les contractants principaux sont financés comme suit. 20% du prix total représente
le ‘service fee’. Il s’agit d’un acompte non lié au résultat pour les services à fournir.
Environ la moitié de cette rétribution est versée au cours de la première année du
contrat. Pour les sixième et septième années du contrat, les contractants sont censés pouvoir se passer de cette rémunération.
50% du prix total est consacré à la rémunération d’un placement sous contrat de
courte durée.9 Les 30% restants sont destinés à la rémunération d’un placement
des clients dans un emploi durable.10 Dans leur offre, les contractants principaux
doivent préciser la norme de résultat qu’ils poursuivront. Dans son appel d’offres,
le DWP indique les deux références nationales suivantes pour les résultats (‘performance baselines’) et ajoute que les candidats doivent proposer eux-mêmes dans
leur offre des normes de résultat argumentées et réalistes (tenant compte du marché local de l’emploi).11
– 55% de clients placés dans un emploi à court terme (13 semaines);
– 50% de clients placés dans un emploi durable (26 semaines sur 30).
9
Le DWP définit un ‘short job outcome’ comme suit: Short Job Outcome must be for a job that:
involves a minimum of 16 hours per week; involves continuous employment lasting 13 weeks
(no breaks in employment); and started prior to completing allotted time with the supplier or
within six weeks of completing the allotted time.
10 A Sustained Job Outcome must be for a job that involves a minimum of 16 hours per week,
where the customer is in employment for at least 26 weeks out of 30. Breaks in employment
must total no more than four weeks and the job must be started prior to completing the allotted
time with the supplier or within six weeks of completing the allotted time.
11 Le DWP n’indique pas expressément dans l’appel d’offres que les normes de résultat prévues
peuvent également être inférieures aux normes nationales (55 et 50%). Il semble pourtant le
suggérer (DWP, 2008g, p. 93).
17
Une fois le contrat conclu, les contractants principaux seront responsables des
normes qu’ils se sont eux-mêmes imposées, normes qui serviront de base pour le
financement hebdomadaire qu’ils percevront. Un prix moyen sera ainsi calculé
pour chaque placement à court terme et chaque placement durable. Ce prix sera
obtenu en divisant la part prévue du prix total du contrat (respectivement 50% et
30%) par le nombre de placements prévu par le contractant. Il sera ensuite ajusté
chaque année en fonction des prévisions d’inflation (DWP, 2008f).
Dans l’établissement de son offre, le contractant principal doit par conséquent
réfléchir attentivement pour voir quel est le rapport le plus stratégique entre le
prix contractuel proposé et les normes de résultat. À prix constant, la rémunération par placement diminue à mesure que la norme augmente. Les contractants
principaux sont donc incités à demander un prix élevé au DWP. D’autre part, le
DWP exerce une pression sur les prix en proposant un prix indicatif (certes sous la
forme d’un budget total pour l’ensemble des contractants) par zone contractuelle.
3.5.2 Modifications possibles à l’avenir
Le développement du modèle de financement reste à ce jour inachevé. Les éléments suivants sont ainsi encore en discussion:
– le DWP souhaite revoir à la hausse la définition d’un ‘emploi durable’ et relever la barre de 26 semaines à 18 mois. Les représentants de WorkDirections et
de l’ACEVO que nous avons rencontrés se sont montrés favorables à cette
orientation ;
– certains détracteurs reprochent au modèle actuel de ne pas offrir de garanties
suffisantes contre le ‘parquage’12 des clients. Selon eux, les normes de résultat
actuelles permettent aux contractants de privilégier les clients présentant le
meilleur potentiel de réussite et d’offrir aux autres des services médiocres. Une
proposition visant à inciter les contractants à accompagner le plus possible de
clients vers un emploi durable consiste à travailler avec un système de paiement différencié (‘differential payments’):
– ceci peut par exemple être réalisé au moyen d’un modèle de triage (‘triage
model’). Ce modèle implique de catégoriser les clients en fonction de leur
éloignement par rapport au marché de l’emploi/des obstacles à l’emploi
qu’ils doivent surmonter. Une rémunération supérieure est prévue pour
l’accompagnement des clients confrontés à davantage d’obstacles. De cette
12 ‘Parquage’ et ‘écrémage’ sont deux variantes d’un même phénomène. L’écrémage signifie que
le prestataire de services se concentre sur les clients faciles à placer et néglige complètement les
clients présentant davantage de difficultés. Dans le deuxième cas, des services sont certes
offerts aux clients présentant des difficultés, mais ces services restent médiocres. Le risque
d’écrémage des clients est moindre car les prestataires ne peuvent ni choisir leurs clients, ni les
renvoyer. Il est toutefois possible que les contractants principaux redirigent les clients
présentant davantage de difficultés vers les sous-contractants. Selon le candidat
WorkDirections (interview), cet effet secondaire serait limité par le fait que les contractants
principaux assument la responsabilité finale du résultat de l’ensemble de la chaîne.
18
manière, les contractants peuvent être rétribués pour les investissements
qu’ils consacrent aux clients nécessitant davantage de soutien et
d’accompagnement (House of Commons, Work and Pensions Committee,
2009, p. 33-34). Un essai de catégorisation des clients aux Pays-Bas (Kansmeter) a toutefois montré qu’une répartition artificielle était souvent trop
éloignée de la réalité qui est beaucoup plus complexe, ce qui peut donner
lieu à des erreurs d’orientation et à des cas de ‘parquage’ (ibid., 33);
– un modèle alternatif accueilli avec plus d’enthousiasme par les contractants
principaux est celui de l’accélérateur (‘accelerator model’). Il prévoit une
augmentation de la rétribution des contractants par le DWP, à mesure que
ceux-ci parviennent à accompagner vers un emploi durable un nombre de
clients supérieur à ce qui est prévu dans les normes de résultat. On pourrait
se baser dans ce cadre sur des normes préalablement convenues, par
exemple par cohorte ou par mois;
– une troisième alternative, que l’on retrouve aux Pays-Bas et qui peut être
considérée comme une variante du ‘triage model’, est celle d’une différenciation du rapport moyens-résultats selon le groupe cible. Pour les clients
plus difficiles à accompagner, le rapport pourrait par exemple être de 50-50
au lieu de 20-80. Ceci impliquerait de définir une série de critères pour
déterminer qui est ‘plus difficile’ à accompagner;
– une combinaison de ces différents systèmes pourrait également apporter
une solution.
– enfin, à la lumière de la crise actuelle, des voix s’élèvent parmi les contractants
principaux pour plaider en faveur d’une suppression du financement lié au
résultat ou d’une augmentation du budget. Le volume de clients prévu a en
effet triplé, tandis que le nombre de postes vacants est en baisse (Smith & Cave,
2009). On craint des compromis inévitables entre qualité, performances et taux
de couverture (interview WorkDirections). Sur les 31 prestataires sélectionnés
au cours de la phase du PQQ, sept ont jeté l’éponge. Il s’agit principalement
d’opérateurs du secteur non marchand (Financial Times, 18 novembre 2008).
Deux acteurs de plus grande taille (parmi lesquels WorkDirections) ont décidé
de retirer leur offre pour certaines zones (ibid.). Dans un premier temps, le
DWP ne s’est pas montré favorable à une modification. Son argument est que
les pertes éventuellement encourues pendant la période de récession économique seront compensées au cours de la prochaine période de haute conjoncture,
la durée des contrats permettant d’envisager les choses sur le long terme
(interview WorkDirections). Une pause a toutefois été introduite dans la procédure de tendering afin de donner aux candidats-contractants principaux la
possibilité d’adapter leur offre en fonction de la nouvelle donne. Selon un article récent de TimesOnline (22 avril 2009), le DWP envisagerait tout de même
maintenant de rétribuer également les contractants dès lors que les clients sont
‘job ready’. On ne sait toutefois pas clairement quels critères d’appréciation
seraient appliqués dans ce cadre.
19
3.6 Liberté de choix du demandeur d’emploi
Dans le cadre du rôle du donneur d’ordre, un dernier thème important à examiner
concerne la liberté de choix du demandeur d’emploi. Dans le projet actuel, le DWP
garantit que dans les zones où deux contractants principaux seront actifs, chacun
d’entre eux gérera 50% du marché, les clients étant adressés ‘ad random’. Ceci
changera à terme de manière à ce que les clients puissent choisir eux-mêmes le
contractant principal qui a leur préférence. Leur liberté de choix sera cependant
limitée dans la mesure où le DWP garantit qu’un contractant principal ne pourra
pas couvrir plus de 70% (et donc pas moins de 30%) du marché.13
Il faut toutefois attendre de voir si ceci sera mis en place dans les faits. Même si
des expériences en cours dans les Pathways to Work et les Employment Zones
(parents isolés) indiquent que ceci donne lieu à une responsabilisation (‘empowerment’) des clients, d’autres (e.a. l’interview WorkDirections; House of Commons,
2009, 46-47) épinglent les constats suivants: le client n’est pas en mesure de choisir
lui-même, le conseiller dispose souvent de plus de connaissances et d’expertise en
la matière, et le choix n’entraîne pas nécessairement de meilleurs résultats (Griffiths & Durkin, 2007).
Une deuxième forme de liberté de choix fait l’objet d’un consensus beaucoup
plus large: les clients doivent être activement impliqués dans l’élaboration de leur
plan d’action. Le choix qui leur est ainsi conféré leur permet d’avoir davantage de
prise sur leur propre évolution et aiguise leur sens des responsabilités. Le principe
consistant à renforcer les devoirs du demandeur d’emploi (participation sous
peine de sanctions) est donc d’une certaine manière compensé par la possibilité
qui lui est donnée de s’impliquer de manière importante dans l’élaboration de son
parcours (‘something for something’).
13 Le transfert des parts aura lieu après deux évaluations consécutives sur la base du système Star
Rating (cf. §4). D’autres informations sont disponibles dans Mcluckie Townsend & Tucker,
2008. Les modalités de répartition des clients entre les contractants principaux lorsque l’un
d’eux aura atteint la part de marché maximale (70%) ne sont pas claires.
20
4. Le développement du marché des opérateurs: une recherche
d’équilibre entre flexibilité et stabilité
En 2007, le nombre de prestataires disposant d’un contrat avec Jobcentre Plus est
passé d’environ 2 000 à 900, l’ensemble représentant un montant total d’environ
950 millions £. Ceci reflétait déjà une tendance à opter pour de plus gros contrats
conclus avec un nombre plus limité d’opérateurs.
Pour le FND, le DWP souhaite faire appel pour 80% du marché à un noyau restreint et stable de prestataires de confiance. Le reste du marché est ouvert à de
nouveaux entrants. Le nom des 21 contractants principaux désignés pour les quatorze régions a été communiqué à la fin du mois de mai 2009 (cf. annexe 4). Le
nouveau système remplacera tous les programmes New Deal et Employment
Zones existants à partir du mois d’octobre 2009.
Le DWP (2009a) affirme être neutre à l’égard des candidats, qu’ils soient issus
du secteur marchand ou du secteur non marchand. Il faut toutefois s’attendre à ce
que la majeure partie des contrats soit attribuée à des opérateurs bien implantés
du secteur marchand, tandis que les opérateurs de plus petite taille du secteur
marchand et les opérateurs du secteur non marchand assumeront le rôle de souscontractant.
C’est ce qui ressort déjà de la shortlist établie à l’issue du PQQ et de l’attribution
finale des contrats pour la première phase du FND que le DWP a publiées respectivement en août 2008 et en mai 2009 (cf. annexe 4): le secteur non marchand constitue une minorité et soumissionne pour un nombre plus restreint de zones.14 En
outre, Shaw Trust, un opérateur national non marchand qui emploie plus de
1 400 collaborateurs, n’a remporté aucun contrat, alors qu’il avait soumissionné
pour treize régions sur quatorze. Néanmoins, le secteur non marchand gère à ce
jour environ la moitié du marché Welfare to work (interview ACEVO). Lors de
notre contact avec WorkDirections, l’interviewé a souligné que même dans le
segment du secteur marchand, moins de trente candidats sont réellement en
mesure d’assumer le rôle de contractant principal pour le FND au vu de l’ampleur
des contrats.
L’objectif du DWP est que le contractant principal établisse à son tour une relation durable avec les sous-contractants qui fournissent les meilleures prestations.
C’est la raison pour laquelle le DWP n’impose pour la ‘supply chain’ aucune
consigne financière ou opérationnelle et délègue également le suivi et le contrôle
de la qualité au contractant principal. Le DWP attend en revanche des contractants
principaux qu’ils agissent conformément à certaines valeurs et principes fonda-
14 Les opérateurs non marchands qui figurent sur cette liste sont notamment Wise Group,
Peabody Strust, Shaw Trust et le Royal British Legion Industries. Ces opérateurs n’ont rentré
une offre que pour un nombre limité de zones, à l’exception de Shaw Trust
(http://www.shaw-trust.org.uk) qui soumissionne pour toutes les zones, sauf une.
21
mentaux définis dans le code de déontologie (Code of Conduct) (DWP, 2008e,
annexe I).
Les principes importants de ce code sont notamment les suivants:
– le budget et les risques sont répartis de manière équitable entre les contractants
principaux et les sous-contractants;
– les contractants principaux doivent s’abstenir de toute tentative de débauchage
du personnel des (candidats) sous-contractants;
– dans la phase de négociation, les contractants principaux ne peuvent pas
empêcher les sous-contractants de négocier également avec d’autres contractants principaux;
– le contrôle et la gestion des informations au sein de la chaîne doivent se dérouler de manière cohérente, proportionnelle et transparente, sans bureaucratie
excessive;
– les contractants principaux doivent aider et encourager les petits sous- contractants et prévoir le soutien supplémentaire nécessaire pour les nouveaux opérateurs;
– il faut favoriser une communication ouverte de manière à pouvoir traiter les
problèmes le plus rapidement possible.
Le DWP déploie également d’autres efforts afin de faciliter la relation entre le
contractant principal et le sous-contractant et de promouvoir un vaste marché de
petits opérateurs spécialisés. Il existe ainsi une procédure de réclamation officielle
pour les sous-contractants, et le DWP cherche à obtenir un retour d’information
direct de leur part. Le DWP a également organisé des activités visant à mettre en
contact des contractants principaux et des sous-contractants, notamment par
exemple des activités de ‘speed dating’.
Il ressort toutefois de l’interview de l’ACEVO que le secteur non marchand
attend d’autres efforts de la part du DWP. L’interviewé a ainsi épinglé les deux
points suivants:
– full cost recovery: les organisations du secteur non marchand exigent que les
frais généraux auxquels elles sont confrontées soient totalement remboursés
dans le cadre de la Commissioning Strategy. Sans cela, elles se trouvent, selon
elles, dans une position concurrentielle défavorable par rapport aux opérateurs
du secteur marchand qui disposent d’autres revenus pour financer ces frais. En
outre, ces organisations n’ont pas la capacité et l’expertise nécessaires pour
répercuter ces coûts dans leurs offres. Le DWP craint que l’octroi d’une telle
garantie ne place les opérateurs du secteur marchand dans une position défavorable mais il finance des organismes tels que l’ACEVO pour prévoir des
formations sur le thème de la répercussion des frais;
– Social Investment Bank: les organisations du secteur non marchand ont beaucoup plus de difficultés que d’autres organisations pour obtenir des prêts. Elles
sont néanmoins également désireuses d’investir dans le développement de
leurs capacités et dans l’innovation. Pour remédier à ce problème, le secteur
22
propose l’instauration d’une banque d’investissement social. Cette mesure dispose d’un soutien politique au sein des deux grands partis (le Labour et les
Conservateurs) mais elle ne constitue pas une priorité pour le gouvernement
actuel (interview ACEVO).
Penchons-nous enfin sur les préjugés réciproques et les attentes qui (d’après les
interviews et les mémorandums)15 existent dans le chef des candidats contractants
principaux et des candidats sous-contractants:
– les candidats contractants principaux ont le sentiment d’être considérés comme
le ‘big bad provider’. Ils affirment néanmoins être disposés à contribuer au
développement des capacités des sous-contractants et à appliquer une répartition équitable des moyens et des risques. D’autre part, ils pointent également
du doigt certaines difficultés: les organisations du secteur non marchand ne
veulent pas toutes croître, et le placement n’est souvent pas l’objectif premier
de ces organisations (leur priorité est plutôt d’augmenter l’autonomie du
client, de rapprocher celui-ci du marché du travail, par exemple);
– de leur côté, les candidats sous-contractants craignent des abus de la part des
contractants principaux: le tri des meilleurs clients (‘cherry picking’), le débauchage de leur personnel et une répartition défavorable des moyens et des risques. D’un autre côté, ils manifestent une certaine confiance quant à l’existence
de ‘bons’ contractants principaux. Ils espèrent également que les contractants
principaux comprendront mieux les conditions de base de leur gestion économique et seront disposés à faire preuve de plus de flexibilité que le DWP.
Cette défiance mutuelle et la crainte d’abus et de fraudes soulèvent la question de
la nécessité de mettre en place un organisme de médiation ou de régulation. La
recherche documentaire (House of Commons, 2009) et les interviews que nous
avons réalisées montrent que cette idée reçoit un écho favorable. L’utilité d’un
médiateur est reconnue, en premier lieu pour le demandeur d’emploi. En effet,
dans la conception actuelle de la CS, celui-ci ne dispose pas d’un moyen formel
pour introduire une plainte. Un médiateur et une charte des clients placeraient le
client dans une position nécessairement plus forte.
L’idée d’un médiateur pour garantir une bonne relation entre sous-contractants
et contractants principaux est en revanche rejetée. Tout d’abord, il existe déjà une
procédure de réclamation pour les sous-contractants via le DWP. Ensuite, les
opposants à cette idée redoutent que ceci n’affaiblisse la relation stratégique entre
contractant principal et sous-contractant, ou à l’inverse, que les sous-contractants
n’hésitent à déposer une plainte par crainte de détériorer la relation avec le
contractant principal.
15 Les mémorandums de nombreuses organisations des secteurs marchand et non marchand
peuvent être consultés dans le Volume II du rapport du Work and Pensions Committee (House
of Commons, 2009).
23
Une autre piste possible proposée est la mise en place d’un régulateur du marché. Un régulateur devrait tout d’abord pouvoir distinguer le bon grain de l’ivraie
parmi les opérateurs et lutter contre l’écrémage et le parquage (interview WorkDirections). Cet objectif peut être atteint en augmentant la transparence du marché
(par ex. en matière de résultats) et en vérifiant explicitement que tous les acteurs
jouent le jeu honnêtement. En ce qui concerne le régulateur, une question reste
ouverte: le DWP doit-il prendre en charge cette fonction? Les partisans de cette
solution affirment que le DWP peut être considéré comme une organisation disposant de l’expertise et des capacités nécessaires. Ils pensent également que la création d’un nouvel organisme entraînerait des frais et une charge administrative
trop élevés (interview WorkDirections).16
De leur côté, les détracteurs soulignent le risque d’une confusion d’intérêts et
d’une influence du politique. Contrairement aux partisans, ils mettent précisément
en question les capacités et la fiabilité du DWP. Ils font ainsi remarquer que les
‘contract managers’ sont principalement des cadres juniors disposant d’une expérience limitée. Ils doutent également, sur la base d’expériences passées, que le
DWP tienne ses promesses. Il ressort également de l’interview que nous avons
réalisée que le DWP ne trouve pas problématique de rediscuter les contrats en
coulisses avec les contractants sélectionnés après l’attribution du marché (au bénéfice des deux parties) (interview WorkDirections). Ceci amène à fortement mettre
en doute la capacité du DWP à assumer un rôle de régulateur neutre.
16 Il convient de remarquer que WorkDirections n’a pas pris officiellement position ici. Au sein
de cette organisation, la discussion sur l’opportunité de confier le rôle de régulateur au DWP
n’est pas close. Dans l’interview, les arguments pour et contre ont été abordés.
24
5. Définition, contrôle et évaluation des résultats à atteindre
Comme indiqué plus haut, le placement durable est véritablement l’objectif principal du Flexible New Deal. On entend par là un placement pour une durée d’au
moins 26 semaines. Le but à terme est de relever la barre à dix-huit mois. D’autre
part, il est également attendu des contractants principaux qu’ils accompagnent
leurs clients (dans un premier temps) vers un emploi de courte durée. Ces deux
objectifs en matière de placement font l’objet d’un incitant financier (cf. §3.5). Le
DWP impose encore deux autres normes de résultat pour lesquelles il n’est pas
prévu d’incitant financier direct, mais qui sont prises en compte dans le cadre du
classement Star Rating (cf. infra). Il s’agit des objectifs suivants (DWP, 2008f,
p. 92):
– au moins 95% des clients doivent avoir travaillé ou exercé une activité professionnelle au minimum pendant quatre semaines consécutives à temps plein
avant de quitter la phase du FND, et ce dans les 52 semaines à compter du
début de cette phase;
– pour au moins 85% des clients, le prestataire privé doit avoir commencé ses
prestations dans les quinze jours qui suivent le moment où les clients lui ont
été adressés (ces données sont déclarées via un enregistrement officiel).
5.1 Contrôle et évaluation des prestations
5.1.1 Suivi à l’aide d’un système informatique commun
Pour atteindre les résultats fixés en termes de placement, le DWP dépend des
contractants principaux et des sous-contractants. Ces acteurs ont cependant également leurs objectifs propres (les opérateurs du secteur marchand poursuivent
par exemple en premier lieu un objectif de bénéfice). Le DWP doit donc tenter
d’orienter ces acteurs pour qu’ils atteignent ces objectifs de placement. Le financement lié au résultat (cf. §3.5 supra) peut être considéré comme le principal
instrument à cet effet. Ceci n’est bien sûr possible que si le DWP dispose de données précises. Le DWP a donc fait mettre au point un système informatique destiné à remplacer les systèmes papier en usage pour enregistrer l’envoi des
clients vers les prestataires: le système ‘Provider Referrals and Payment’. Par ailleurs, le système Provider Level Management Information utilisé au niveau du
DWP/de JCP est également adapté de manière à ce que toutes les données soient
rassemblées sur la base de définitions communes. En outre, des données relatives
à la gestion des contrats seront recueillies une fois par mois auprès des contractants principaux. Ceci doit permettre aux contract managers du DWP de déterminer avec les contractants comment leurs prestations peuvent être améliorées
(House of Commons, 2009, Ev. 65).
25
5.1.2 Auto-évaluation
Il est par ailleurs attendu des contractants principaux qu’ils évaluent en permanence leurs propres prestations et celles des autres prestataires de la supply chain
et qu’ils en rendent compte annuellement par le biais d’une évaluation appelée
‘Self-Assessment Review’ (SAR). Un contrôle externe de ces évaluations est réalisé
au moyen des ‘Common Inspection Frameworks’ d’Ofsted (Angleterre) et Estyn
(Pays de Galles).17
5.1.3 Le système Star Rating
La pièce maîtresse du modèle d’évaluation de la Commissioning Strategy est le
système ‘Star Rating’. Cet instrument a pour but de permettre au DWP de comparer les prestations des différents contractants principaux. Les indicateurs clés (Key
Performance Indicators) portent sur les trois domaines suivants:
– résultats des prestations: placement à court terme et placement durable (70%);
– qualité des prestations (20%);
– respect du contrat (10%).
Pour déterminer les scores, les chiffres bruts ne sont pas les seules données
importantes; les retours d’informations des clients, de JCP et de l’organisme de
formation DIUS sont également pris en compte.
Selon la valeur de la somme pondérée, le contractant principal obtient un, deux,
trois ou quatre étoiles. Les étoiles sont octroyées deux fois par an. Le nombre
d’étoiles qu’obtient le contractant principal a différentes répercussions. Tout
d’abord, il peut donner lieu à un gain/une perte de marché dans les régions où
plusieurs contractants principaux sont actifs (cf. §3.6). Ensuite, le DWP tiendra
compte des scores dans la décision de prolonger un contrat ou d’attribuer un nouveau contrat. La publication des scores devrait constituer pour les contractants un
incitant supplémentaire à fournir de bonnes prestations.
Nous avons toutefois entendu trois éléments de critique à l’égard du système
Star Rating:
– le premier porte sur la méthode utilisée pour mesurer les résultats des prestations. Pour ce calcul, les prestations réalisées sont comparées aux normes fixées
pour chaque contrat. Toutefois, la méthode de mesure fait que le volume des
clients sortants est comparé au volume des clients entrants. Ces groupes peuvent cependant présenter de grandes différences de volume et de composition,
ce qui invalide le résultat de la mesure (interview WorkDirections);
– ensuite, la mesure de la qualité est également jugée insuffisante. Lors de
l’interview de WorkDirections, la personne interrogée a fait remarquer que l’on
mettait trop l’accent sur les incitants financiers. Le financement basé sur le
17 En Écosse, les dispositions en matière de garantie de la qualité sont toujours à l’étude
actuellement.
26
–
résultat n’est certes pas remis en cause, mais selon WorkDirections, il doit être
davantage complété par des contrôles de la qualité. Ce n’est que de cette
manière, estime WorkDirections, que les contract managers pourront évaluer la
façon dont les contractants principaux et les sous-contractants jouent le jeu et
que l’écrémage et le parquage pourront être évités;
enfin, dans l’interview de l’ACEVO, la personne interrogée a fait remarquer
que le système Star Rating pouvait avoir un effet pervers pour les souscontractants. Leur score n’est en effet pas déterminé individuellement, mais
dépend des prestations de l’ensemble de la chaîne. Il est donc possible qu’un
sous-contractant qui fournit de bonnes prestations obtienne injustement un
score médiocre. C’est pourquoi l’ACEVO suggère de réaliser aussi des évaluations individuelles. Cette mesure bénéficierait également aux contractants
principaux, puisqu’il est dans leur intérêt de savoir avec quels sous-contractants la collaboration est la plus efficace.
5.2 Résultats attendus sur la base de l’expérience des Employment Zones et des
interviews
Il faudra encore attendre pour savoir si la Commissioning Strategy constitue
l’approche appropriée pour atteindre les objectifs visés sur le marché du travail.
Ce nouveau système de recours au marché dispose en tout cas d’une base de comparaison scientifique sous la forme des Employment Zones.18 Là aussi, le DWP
faisait appel à des opérateurs privés pour la réalisation de son programme ‘Welfare to work’. Les restrictions imposées aux opérateurs étaient réduites au minimum, et l’on appliquait aussi le principe d’un financement basé sur le résultat.
Une différence importante avec le FND réside dans le fait que les opérateurs privés des EZ géraient également l’indemnisation, de sorte qu’ils pouvaient donner
des incitants aux demandeurs d’emploi.
Deux études d’évaluation des EZ (Hales et al., 2003 et Hasluck et al., 2003) font
une comparaison avec les régions du New Deal classique (généralement prises en
charge par Jobcentre Plus) et épinglent les points suivants:
– dans les Employment Zones, un nombre significativement plus élevé de
participants est au travail dix mois après le début du parcours, mais après
vingt mois, cet écart n’est plus significatif, sauf pour les emplois à temps plein;
– dans les Employment Zones, on observe un petit effet net positif en matière de
sortie du chômage par rapport à d’autres régions;
18 Le programme Employment Zones, introduit en avril 2000 dans les quinze régions les moins
développées du Royaume-Uni, constituait une nouvelle approche du chômage de longue
durée des plus de 25 ans (et plus tard, des jeunes également). Un ou plusieurs prestataires
privés sont chargés de ces zones. L’approche est axée sur un accès rapide à l’emploi, et les
actions sont brèves, intensives et orientées vers le client. Le financement des opérateurs privés
dépendait partiellement des résultats. Les opérateurs disposaient également de la gestion
partielle de l’indemnisation. Pour une analyse détaillée du programme Employment Zones,
consulter Griffiths & Durkin, 2007.
27
–
la satisfaction des clients est plus grande parce que les prestations sont davantage orientées vers le client et que ce dernier peut bénéficier de plus de temps
et d’attention.
Toujours selon l’étude de Griffiths & Durkin (2007), les résultats des EZ sont
modérément positifs. Leur analyse des évaluations existantes indique en effet que
les EZ enregistrent de meilleurs résultats que les programmes ND pour le placement des demandeurs d’emploi (pour qui la participation au programme est obligatoire). Rien n’indique une existence accrue des phénomènes d’écrémage et de
parquage par rapport à JCP. Il ressort toutefois de l’analyse coût-bénéfice mise à la
disposition des auteurs par le DWP que le coût du programme EZ est supérieur à
celui des programmes ND alors que (1) les placements réalisés sont souvent d’une
durée relativement courte et que (2) la part des placements à long terme ne diffère
plus beaucoup de celle que l’on observe dans les programmes ND. Selon les
auteurs, le problème des EZ réside dans le fait que des emplois de courte durée
trouvés de manière hâtive ne constituent pas souvent un bon point de départ pour
une carrière durable. Il peut s’agir d’emplois de faible qualité qui offrent aux
demandeurs d’emploi - en particulier les personnes plus difficiles à placer, dont la
marge de choix en matière d’emploi est limitée - peu d’opportunités de développer de nouvelles compétences et qui ne les incitent pas à continuer à travailler.
Avec la Commissioning Strategy pour le FND, le DWP semble en tout cas
s’engager dans une tentative de résolution de ces problèmes. Tout d’abord,
l’importance de l’emploi durable est fortement soulignée par l’extension de la
définition de la ‘durabilité’ (pour les EZ, la barre était fixée à 13 semaines), et ce
paramètre compte pour une part importante dans le financement. En outre, le
DWP exerce une pression sur le prix en exigeant de meilleures prestations des
contractants sans revoir le budget à la hausse.19 Certains facteurs de réussite des
EZ sont également conservés dans la CS. En particulier, les contractants continueront à bénéficier de la flexibilité financière et opérationnelle nécessaire qui leur
permet de mettre en place une offre de services orientée vers le client, de fournir
des prestations sur mesure et d’innover.
19 Notons que ceci suscite des contestations de la part des contractants principaux. Johnson van
Serco décrit les attentes du DWP comme suit: ‘it is looking for around double the level of
performance at half the amount of money per unit per outcome.’ (House of Commons, 2009,
Ev. 22).
28
6. Enseignements pour le recours à des opérateurs externes en
Belgique: un exercice d’équilibre en cinq points
A l’issue de cette analyse des expériences menées en Grande-Bretagne, nous retenons que pour développer un marché public qui fonctionne bien, il est indispensable de trouver un équilibre dans différents champs de tension. Les pays qui souhaitent développer un marché public de l’accompagnement des demandeurs
d’emploi (ou en poursuivre le développement) devront plus précisément se soumettre aux cinq exercices d’équilibre suivants.
6.1 Un équilibre entre stabilité et flexibilité
Nous retenons tout d’abord que la Grande-Bretagne, après différents exercices
d’appel au marché, a finalement adopté un modèle qui est destiné à garantir un
équilibre entre stabilité des partenaires d’une part, et flexibilité d’autre part. La
conclusion de contrats importants avec un nombre limité d’opérateurs et pour une
longue durée doit permettre aux pouvoirs publics d’établir une relation stratégique et stable avec des opérateurs privés. Le besoin de flexibilité découle de
l’importance qui est accordée au travail sur mesure, à la nécessité de répondre aux
besoins locaux et de pouvoir diminuer/augmenter de manière flexible les capacités en fonction des fluctuations de volume. Le gouvernement britannique espère,
grâce à ce modèle, pouvoir tirer le meilleur parti de l’expérience et des capacités
du secteur privé pour un meilleur résultat.
6.2 Un équilibre dans la répartition des tâches entres acteurs publics et acteurs
privés
Deuxième élément important dans la nouvelle approche britannique: la répartition
des tâches entre le service public de placement et le secteur privé. Cette répartition
est claire: JCP prend en charge l’accompagnement des demandeurs d’emploi au
cours des trois premières phases du plan d’insertion et les domaines suivants au
cours des quatre phases: indemnisation, entretiens de suivi bimensuels avec le
client, décision en matière de sanctions et application des sanctions. Les opérateurs
privés sont sollicités pour la quatrième phase, le Flexible New Deal. Au cours de
cette phase, ils prennent en charge l’accompagnement intensif des chômeurs
indemnisés qui sont au chômage depuis douze mois (ou moins s’ils sont arrivés en
phase 3 de manière anticipée par le parcours ‘fast track’). Ils disposent d’une
grande liberté pour l’élaboration de l’approche concrète et pour l’organisation des
prestations. En cas de problèmes avec des clients qui ne collaborent pas suffisamment au processus, l’opérateur privé doit le signaler à JCP, qui intervient ensuite.
Enfin, l’organisation et la gestion de l’appel d’offres sont prises en charge par le
DWP. JCP n’a par conséquent aucune influence directe sur le processus de recours
29
au marché, tandis que le DWP ne gère pas l’orientation des clients. Cette méthode
permet d’éviter que des acteurs soient à la fois juges et parties.
6.3 Un équilibre entre petits et grands opérateurs, commerciaux et non
commerciaux
Nous souhaitons en troisième lieu mettre expressément en lumière les changements que la nouvelle approche entraînera sur le marché des opérateurs privés. Le
choix de nouer une relation stratégique durable avec une poignée de grands opérateurs a en effet pour conséquence d’obliger les opérateurs plus petits (du secteur
marchand et non marchand) à assumer le rôle de sous-contractant. Ils ne sont donc
plus financés ou engagés par le DWP, mais bien par de plus grands opérateurs
issus de leur propre secteur. Il ressort de notre étude que la position de ces petits
opérateurs face à cette évolution est mitigée. D’une part, ils craignent certains
excès dans le chef des contractants principaux. Ceux-ci pourraient être tentés de
trier les meilleurs clients et de rediriger les clients plus difficiles vers les souscontractants (‘cherry picking’) et/ou d’essayer de débaucher leur personnel et/ou
de transférer des risques trop importants sans proposer une contrepartie financière équitable.
D’un autre côté, les petits opérateurs manifestent une certaine confiance quant à
l’existence de ‘bons’ contractants principaux. Ils espèrent aussi pouvoir établir une
meilleure relation avec le contractant principal qu’avec le DWP, parce que le premier comprend mieux les conditions de base de leur gestion et est susceptible de
faire preuve de plus de flexibilité. Il est en tout cas essentiel que ces petits opérateurs acquièrent/conservent une place à part entière dans ce nouveau modèle. Ce
sont eux, en effet, qui ont acquis l’expertise et l’expérience spécifiques pour traiter
certains groupes cibles et qui bénéficient souvent d’une plus grande confiance de
la part des personnes éloignées du marché du travail.
6.4 Un équilibre entre la gestion axée sur le résultat, la qualité et l’égalité
6.4.1 Gestion axée sur le résultat et qualité
Le quatrième point que nous aimerions épingler dans cette analyse du modèle
britannique est la gestion fortement axée sur le résultat. 80% du financement étant
lié à la réalisation d’objectifs prédéfinis, les contractants principaux sont confrontés à un risque élevé. Ce risque s’accroît encore davantage suite à la crise financière actuelle. Tant du côté du DWP que du côté des opérateurs privés, on semble
envisager l’avenir avec crainte. On craint notamment des compromis entre taux de
couverture (‘coverage’), qualité et performances. D’un autre côté, on prévoit que
les contractants pourront compenser les pertes encourues dans une région/une
période donnée par les bénéfices réalisés dans d’autres régions/périodes grâce à la
grande ampleur des contrats (aussi bien en termes d’échelle que de temps).
30
6.4.2 Gestion axée sur le résultat et égalité
Un équilibre qui fait encore défaut aujourd’hui au modèle britannique est celui qui
doit exister entre la gestion axée sur le résultat et la gestion axée sur l’égalité. Le
modèle de financement actuel n’incite en effet pas suffisamment les prestataires
privés à investir dans les demandeurs d’emploi qui sont davantage éloignés du
marché du travail. Ceci peut avoir pour conséquence que ces demandeurs
d’emploi ne bénéficient d’aucun service (écrémage) ou ne bénéficient que de services médiocres (parquage). Il convient donc d’envisager les modifications qui pourraient être apportées à ce modèle de financement lié au résultat. L’introduction
d’une forme de ‘differential payment’ (paiement différencié) pourrait considérablement endiguer le phénomène d’écrémage et de parquage des clients. Ce système implique que les contractants bénéficient d’une prime lorsqu’ils accompagnent vers un emploi des demandeurs d’emploi plus difficiles à placer (modèle de
triage) ou davantage de clients que ce qui était prévu dans les objectifs (modèle de
l’accélérateur). La proportion du financement lié au résultat peut également être
adaptée au degré de difficulté que présente le demandeur d’emploi (par ex. 50-50
au lieu de 80-20).
6.5 Un équilibre entre différents intérêts
Enfin, il manque encore aujourd’hui au modèle britannique un élément important:
une instance indépendante, un ‘régulateur du marché’ chargé de superviser le
fonctionnement du marché public. Une instance de ce type peut notamment veiller
à l’adéquation des formes de recours au marché, superviser le respect de la législation et réaliser la transparence du marché en assurant un suivi et une évaluation
de la qualité et des résultats. Ces tâches sont actuellement prises en charge dans
une certaine mesure par le DWP (cf. par ex. le système de suivi et le système Star
Rating). On peut toutefois se demander dans quelle mesure le DWP est capable
d’adopter une attitude suffisamment neutre.
Le régulateur du marché ou un médiateur spécial pourrait en outre se charger
de recueillir les plaintes des différents acteurs concernés: DWP, contractants principaux, sous-contractants et clients. Pour ces derniers en particulier, une véritable
procédure officielle de plainte fait actuellement défaut en Grande-Bretagne.
31
Annexes
Aperçu détaillé des quatre étapes du plan d’accompagnement des bénéficiaires de l’allocation JSA
Source: DWP, 2008f, p. 75
32
Annexe 1 /
33
Annexe 2/ Carte des 14 zones sur lesquelles portent les contrats Source: DWP, 2008f, p. 89
34
Annexe 3 / Aperçu des contrats globaux, des budgets indicatifs et des volumes de clients par zone Prévisions du nombre de starters Flexible New Deal*
Numéro
de référence
(cf. carte)
Zones contractuelles / districts Jobcentre
Plus
Nombre
de contractants principaux par
zone
Prix
contractuel
indicatif
total par an*
(millions £)
1
Octobre
2009 à
mars 2010
Avril 2010
à mars
2011
Avril 2011
à mars 2012
Avril
2012 à
mars 2013
Avril
2013 à
mars 2014
Avril 2014
à septembre 2014
Ayrshire, Dumfries, Galloway & Inverclyde
/ Edinburgh, Lothian & Borders /
Lanarkshire & East Dunbartonshire
2
17,11
7 100
10 600
11 000
10 900
10 800
5 400
2
North East Yorkshire & the Humber / Tees
Valley
2
20,99
8 900
12 900
13 500
13 400
13 200
6 600
3
Greater Manchester Central / Greater
Manchester East & West
1
18,52
8 200
12 600
13 100
12 900
12 600
6 300
4
Derbyshire / South Yorkshire
2
17,86
7 500
11 000
11 500
11 300
11 200
5 600
5
South East Wales / North & Mid Wales
1
8,59
3 800
5 900
6 100
6 000
5 900
3 000
6
Coventry & Warwickshire / The Marches /
Staffordshire
2
17,18
7 100
10 600
11 100
10 900
10 800
5 400
7
Leicestershire & Northamptonshire /
Nottinghamshire
2
18,32
7 700
11 300
11 800
11 600
11 500
5 800
Numéro de
référence
(cf. carte)
Zones contractuelles / districts Jobcentre
Plus
Nombre de
contractants
principaux
par zone
Prix
contractuel
indicatif
total par an*
(millions £)
8
Avril
2012 à
mars 2013
Avril
2013 à
mars 2014
Cambridgeshire & Suffolk /
Lincolnshire & Rutland / Norfolk
2
15,91
6 700
9 800
10 300
10 100
10 000
5 000
9
Birmingham & Solihull
2
22,82
10 100
14 100
14 700
14 600
14 500
7 200
10
Black Country
2
16,56
7 200
10 200
10 600
10 500
10 400
5 200
11
South West Wales / South Wales Valleys
1
9,39
4 200
6 400
6 700
6 500
6 400
3 200
12
London Central / Lambeth, Southwark
& Wandsworth
2
26,78
10 000
14 300
14 900
14 800
14 700
7 400
13
Kent / Surrey & Sussex
2
20,37
8 400
12 600
13 100
12 900
12 800
6 400
14
Devon & Cornwall
1
6,19
2 700
4 200
4 400
4 300
4 300
2 100
24
236,59
99 600
146 500
152 800
150 700
149 100
74 600
Total pour la phase n° 1
*
Octobre
2009 à
mars 2010
Avril 2010
à mars
2011
Avril 2011
à mars 2012
Avril 2014
à septembre 2014
Remarque: ces valeurs sont des estimations et sont exprimées sous la forme d’une valeur annuelle pour chaque contrat global en millions. Les
valeurs indiquées sont exprimées en Livres Sterling £ (GBP) au prix actuels (juillet 2008).
Source: DWP, 2008f, p. 90
35
Black Country
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
Central London, Lambeth, Southwark &
Wandsworth
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
Total offers sélectionnees
x
x
x
Total offers rentrées
Coventry & Warwickshire, The Marches,
Staffordshire
Surrey & Sussex, Kent
South Yorkshire, Derbyshire
x
South Wales Valleys & South West Wales
Edinburgh, Lothian & Borders, Lanarkshire & East Dunbartonshire, Ayrshire
Dumfries, Galloway and Inverclyde
North & East Yorkshire & Humber, Tees
Valley
North & Mid Wales & South East Wales
Greater Manchester Central, Greater
Manchester East and West
Leicestershire, Northhamptonshire and
Nottinghamshire
x
Devon & Cornwall
Cambridgeshire & Suffolk, Norfolk, Lincolnshire & Rutland
Birmingham & Solihull
Pertemps People Development Group Ltd
Mentor Employment and Skills
Serco
A4E
Dudley Metropolitan Council
Remploy Ltd
Manpower
Royal British Legion Industries
Calder Holdings BV
TWL Training
GSL UK Ltd
Reed in Partnership Ltd
Birmingham Faith in Action
ESG Holdings
WorkDirections
36
Annexe 4 / Shortlist des candidats contractants principaux sélectionnés au cours de la phase du PQQ et contractants principaux choisis dans la phase finale, par zone contractuelle 8
5
8
12
1
8
1
1
2
6
6
9
1
3
10
1
1
3
5
1
1
0
0
1
0
0
0
0
0
2
TNG
Pinnacle PSG
Reliance Secure Taks Management
Careers Development Group
Wise Group
Dash Training South Wales LLP
Peabody Trust
Prospects Services Ltd
Shaw Trust
Working Links
Re-Gen
Silex
Connexions Staffordshire Ltd
Max Employment
Skills Training UK Ltd
Seetec
Totaal ingediend
Totaal geselecteerd
x
x
x
x
x
11
2
x
x
x
x
13
2
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
11
2
x
5
1
x
x
12
2
x
x
x
14
2
x
x
x
7
1
x
x
x
x
6
1
x
x
x
x
x
x
x
x
x
12
2
x
10
2
x
x
x
x
x
7
1
12
2
x
x
x
x
14
2
x
x
x
x
x
x
x
13
2
Coventry & Warwickshire, The Marches,
Staffordshire
Surrey & Sussex, Kent
South Yorkshire, Derbyshire
South Wales Valleys & South West Wales
Edinburgh, Lothian & Borders, Lanarkshire & East Dunbartonshire, Ayrshire
Dumfries, Galloway and Inverclyde
North & East Yorkshire & Humber, Tees
Valley
North & Mid Wales & South East Wales
Greater Manchester Central, Greater
Manchester East and West
Central London, Lambeth, Southwark &
Wandsworth
Leicestershire, Northhamptonshire and
Nottinghamshire
Devon & Cornwall
Cambridgeshire & Suffolk, Norfolk, Lincolnshire & Rutland
Black Country
Birmingham & Solihull
Total offers sélectionnees
x
Total offers rentrées
x
8
7
2
2
2
1
1
2
13
12
1
1
1
7
1
5
147
1
0
0
0
1
0
0
0
0
4
0
0
0
1
1
1
24
37
*
Les champs en grisé indiquent quels sont les opérateurs figurant sur la shortlist PQQ qui ont été choisis dans la phase finale.
Source: DWP, 2008i & DWP, 2009b
x
x
x
x
39
Bibliographie
‘Brown promises to help Britain into work’, The Independent, 26 novembre 2007,
http://www.independent.co.uk/news/uk/politics/brown-promises-to-helpbritain-into-work-760571.html.
‘Budget: Job fund to get young employed into work’, TimesOnline, 22 avril 2009,
http://business.timesonline.co.uk/tol/business/economics/budget/article614
9496.ece.
‘Crisis fails to put off bids for contracts’, Financial Times, 18 novembre 2008,
http://www.ft.com/cms/s/0/7e60dda8-b4fc-11dd-b7800000779fd18c.html?ftcamp=rss.
De Cuyper P., Struyven L. en Vanhoren I. (2005), Private bedrijven in het
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http://www.dwp.gov.uk/welfarereform/in-work-better-off/in-work-betteroff.pdf (12 avril 2009).
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