Polycopi du Cours Echocardiographie Doppler

Transcription

Polycopi du Cours Echocardiographie Doppler
~ Échocardiographie - Doppler ~
1
Échocardiographie - Doppler
S. Lafitte, M. Lafitte, P. Réant, R. Roudaut
C.H.U. de Bordeaux ~ Hôpital Cardiologique du Haut Lévêque Pessac ~ France
Hypertension artérielle pulmonaire primitive ou secondaire
Cœur pulmonaire aigu post-embolique
Cœur pulmonaire chronique
Dans ce chapitre, il sera développé successivement la place de l’échocardiographie dans
l’hypertension artérielle primitive ou secondaire, le cœur pulmonaire aigu post-embolique et enfin le
cœur pulmonaire chronique.
Hypertension artérielle pulmonaire primitive ou secondaire
Généralités et Définition
L’évaluation du niveau des pressions pulmonaires fait partie de tout examen échocardiographique.
Il s’agit d’un temps capital de l’examen car la mise en évidence d’une hypertension artérielle
pulmonaire (HTAP) représente en règle un élément de gravité, que celle-ci soit secondaire ou
primitive.
L’HTAP (AP01) est définie par une élévation de la pression artérielle pulmonaire moyenne (PAPM) >
25 mmHg, elle est considérée comme :
légère (stade I) pour une PAPM entre 25-35 mmHg
modérée (stade II) pour une PAPM entre 35 et 45 mmHg
et sévère (stade III) pour une PAPM > 45 mmHg,
en sachant que la PAPM normale est égale à 15 mmHg.
En pratique, l’écho-Doppler permet avant tout d’évaluer la PAPS qui est habituellement considérée
comme élevée pour des valeurs supérieures à 30 mmHg avant 50 ans, 40 mmHg après 50 ans, en
sachant qu’il s’agit d’une variable et qu’à l’effort, de façon physiologique, la PAPS peut s’élever jusqu’à
60 mmHg. Une PAPS > 50 mmHg au repos est toujours pathologique. Une PAPS > 60 mmHg signe
une HTAP importante.
Physiopathologie
Sur un plan physiopathologique, l’HTAP peut être de plusieurs types selon son étiologie.
- L’HTAP post-capillaire est fréquente en cardiologie et peut compliquer toute cardiopathie gauche.
Plus exceptionnellement elle peut être liée à une compression ou unesténose des veines pulmonaires,
à une maladie veino-occlusive. L’HTAP post-capillaire est caractérisée par une pression capillaire
pulmonaire (PCP) > 15 mmHg et un gradient PAPd – PCP < 10 mmHg.
- L’HTAP pré-capillaire connaît des mécanismes et des étiologies multiples comme une origine
pulmonaire, l’embolie pulmonaire, les maladies de système, le HIV, l’HTAP primitive...
Elle se caractérise le plus souvent par une PCP normale, des résistances pulmonaires élevées, un
gradient PAPd – PCP > 10 mmHg. A noter qu’une HTAP pré-capillaire peut être secondaire à une
HTAP post-capillaire dans un contexte de cardiopathie du cœur gauche. Dans ce cas la PCP est
élevée. Quand au gradient PAPd – PCP, il peut être normal (< 10 mmHg) si l’HTAP pré-capillaire est
modérée et non fixée, ou élevée (> 10 mmHg) s’il existe une maladie artériolaire pulmonaire
surajoutée.
~ © 2010 DCAM ~ Université Victor Segalen Bordeaux 2 ~ France
1/5
~ Échocardiographie - Doppler ~
2
Diagnostic positif
Le diagnostic d’HTAP a largement bénéficié de l’apport de l’écho-Doppler, tout en sachant que le
diagnostic de certitude s’effectue par cathétérisme avec évaluation de la PCP, ce que ne peut faire
l’écho Doppler. Un test au NO sera utile en cas d’HTAP pré-capillaire isolée.
Diagnostic positif et quantitatif de l’HTAP
Mode bidimensionnel
En mode 2D, on observe des modifications morphologiques des cavités droites à type de :
- dilatation du VD et/ou hypertrophie de la paroi libre du VD,
- dilatation de la voie pulmonaire,
- modification de la courbure du septum inter-ventriculaire en cas d’HTAP sévère.
Mode TM
En mode TM, on enregistre un tracé anormal de la valve en diastole avec horizontalisation de la pente
diastolique, diminution, voire disparition de l’onde « A », fermeture mésosystolique des sigmoïdes.
Ces signes présentent tous de nombreuses limites et ne seront présents qu’en cas d’HTAP franche.
Mode Doppler
En Doppler, l’examen portera sur la valve tricuspide et/ou la valve pulmonaire.
Mesure de la PAPS à partir de l’IT
En présence d’une HTAP, la fréquence d’une IT augmente entre 80 à 100% selon les séries. L’IT sera
recherchée en Doppler couleur à partir des incidences habituelles : apicale 4 cavités et parasternale
petit axe.
Le Doppler continu, aligné sur le flux couleur pour obtenir un bon alignement, permettra d’évaluer la
vitesse maximale mésosystolique de l’IT. En l’absence de sténose pulmonaire (valvulaire,
infundibulaire ou supraventriculaire) la PAPS est égale à la PSVD.
On pourra donc obtenir la PAPS à partir de l’équation :
PAPS = 4 V2 IT + POD
Plusieurs approches ont été proposées pour l’évaluation de la pression systolique de l’OD qui reste
sujette à caution.
En l’absence de signes droits, on estimera la POD entre 5 à 10 mmHg, à 15 mmHg si VCI dilatée
avec diminution des variations respiratoires et jugulaires turgescentes et enfin à 20 mmHg en cas d’IT
massive.
Mesure de la PAPS à partir de l’IP
Si l’IT est massive et laminaire, l’utilisation de l’IP pour évaluer la PAPS est préférable. Dans la
pratique, une valeur de POD 10 mmHg est souvent choisie en sachant que la valeur choisie influera
peu sur le niveau de la PAPS à la différence de la qualité du signal de l’IT.
Les vitesses proto et télé diastoliques (BP08c1) de l’IP sont corrélées respectivement à la PAPM et à
la PAPD.
2
PAPM = 4 V IPpd + 10 mmHg
2
PAPD = 4 V IPtd + 10 mmHg
PAPM = (PAPs + 2 PAPD)/3
PAPS = 3 PAPm – 2 PAPd
Comme pour l’IT, la pression estimée du VD en diastole est empiriquement choisie à 10 mmHg.
Mesure de la PAPS à partir de l’IP (suite)
Il peut être intéressant de confronter les 2 valeurs de PAPS obtenues à partir de l’IT d’une part, à partir
de l’IP d’autre part. Si les valeurs sont discordantes, cela incite à recueillir des flux par d’autres voies
pour obtenir un meilleur alignement.
Étude du flux antérograde de l’Artère Pulmonaire
L’étude du flux antérograde de l’AP permet également une approche de la PAPS.
~ © 2010 DCAM ~ Université Victor Segalen Bordeaux 2 ~ France
2/5
~ Échocardiographie - Doppler ~
3
En effet, en cas d’HTAP, on observe une modification de la morphologie de ce flux qui devient
triangulaire à pic précoce et non plus ogival.
Ce flux est parfois bifide avec encoche mésosystolique.
Le temps d’accélération mesuré du début du flux au pic du flux est le paramètre le mieux corrélé aux
pressions pulmonaires.
Un TA < 100 ms est très évocateur d’une HTAP avec une sensibilité et une spécificité proche de
100%, a fortiori si ce TA est < 70 ms.
Mesure de la PAPS en cas de CIV
En présence d’une CIV, la PAPS pourra être déduite à partir des gradients maxima trans CIV et de la
pression artérielle systolique au brassard (PAS) :
2
PAPS = PAS – 4 V trans CIV
Mesure de la PAPS en cas de canal artériel persistant (CAP)
De la même façon, en présence d’un CAP, la PAPS pourra être déduite à partir des gradients
maximum du flux transcanalaire et de la PAS au brassard.
PAPS = PAS – 4 V2 transcanal
Diagnostic différentiel
Le retentissement sur les cavités droites de l’HTAP peut être modeste, voire absent, en particulier
chez les patients franchement déplétés. On ne peut se baser sur la « normalité » du VD pour éliminer
une HTAP.
Le flux d’IT ne doit pas être confondu avec celui d’un RA, d’une IM, d’une communication VG-OD
exceptionnelle d’un hyper débit droit (anévrisme, fistule AV), d’un flux de CIA, de CAV...
Diagnostic étiologique
L’étiologie de l’HTAP est souvent évoquée par le contexte clinique (pathologie cardiaque, pulmonaire,
maladie de système, HIV..).
Le diagnostic d’HTAP primitive pré-capillaire ne sera retenu qu’après un bilan étiologique complet. Ce
diagnostic a d’autant plus d’importance que l’arsenal thérapeutique s’est amélioré ces dernières
années conduisant à un bénéfice certain en termes de confort de vie et de survie.
-----o0o-----
~ © 2010 DCAM ~ Université Victor Segalen Bordeaux 2 ~ France
3/5
~ Échocardiographie - Doppler ~
4
Cœur pulmonaire aigu post-embolique
L’échocardiographie-Doppler cardiaque s’est imposée dans la stratégie diagnostique de l’embolie
pulmonaire (EP) et principalement pour les patients hospitalisés en cardiologie.
L’EP étant de gravité variable, le retentissement cardiaque n’est présent que lorsqu’il existe une EP
tronculaire avec HTAP brutale.
Diagnostic positif et de gravité
Mode Bidimensionnel
En écho 2D, on observe une dilatation des cavités droites, avec déplacement vers la gauche et
perturbations de la cinétique du SIV d’où compression du VG par le VD dans une enveloppe
péricardique inextensible.
La dilatation du VD est bien visible en incidence apicale 4 cavités qui montre une surface VD
augmentée.
La surface télédiastolique du VD qui est voisine de 8 cm²/m² chez le sujet normal, double en cas d’EP
massive, elle est proche de 15 cm²/m².
Il existe une corrélation linéaire entre l’augmentation des surfaces du VD et l’index d’obstruction
artérielle.
Mode TM
En mode TM, il est classique de mesurer les diamètres DTD VD et DTD VG et de calculer le rapport
entre ces 2 diamètres qui plaident en faveur d’une EP massive pour des valeurs de DTD VD > 25 mm,
DTD VG < 40 mm et un rapport DTD VD/DTD VG ≥ 0,5 et surtout 06 pour EP massive.
Autres éléments diagnostiques
Le TAP est dilaté, de calibre supérieur à celui de l’aorte (corrélé au degré d’HTAP).
La VCI et les veines sus-hépatiques sont classiquement dilatées avec réduction des variations
respiratoires, ce qui traduit l’élévation de la POD et de la pression veineuse centrale.
Dans 10% des EP, il est possible de mettre en évidence un thrombus mobile voir « serpentin » qui va
et vient entre l’OD et le VD. Il s’agit bien entendu d’une urgence médico-chirurgicale.
L’exploration des branches et des artères pulmonaires est difficile en ETT, mais plus facilement
accessible en ETO. Cet examen sera donc très utile en milieu de réanimation chez un patient intubé
ventilé pour confirmer une suspicion d’EP.
Mode Doppler
En Doppler, on évaluera les pressions pulmonaires qui sont classiquement modérément élevées dans
l’EP. Classiquement, une HTAP > 60 mmHg traduit l’existence d’EP récurrentes, d’un cœur
pulmonaire chronique, d’une cardiopathie préexistante ou d’une affection respiratoire préexistante.
Diagnostic différentiel
L’écho peut être utile au diagnostic d’une autre urgence cardiologique : tamponnade, infarctus,
dissection aortique....
Un CPA peut présenter d’autres origines : détresse respiratoire aiguë, poussée aiguë d’une HTAP
chronique, mais dans ce cas le contexte clinique est généralement évocateur.
Un infarctus inférieur avec extension au VD se traduira par une dilatation VD avec hypo ou akinésie
plus ou moins étendue (BC10), le contexte clinique est généralement évocateur.
Enfin, une échographie normale n’élimine pas le diagnostic d’EP (en cas d’obstruction < 50 % du lit
vasculaire)+++.
~ © 2010 DCAM ~ Université Victor Segalen Bordeaux 2 ~ France
4/5
~ Échocardiographie - Doppler ~
5
Surveillance évolutive
Classiquement, les signes de surcharge des cavités droites diminuent sous traitement plus ou moins
rapidement
selon
la
stratégie
thérapeutique
retenue :
héparino-thérapie,
fibrinolyse,
exceptionnellement chirurgie (en particulier en cas de caillot flottant).
Soulignons que de tels caillots peuvent disparaître en quelques heures sous fibrinolytiques.
-----o0o-----
Cœur pulmonaire chronique
Le CPC correspond par définition au retentissement sur le cœur droit d’une HTAP chronique précapillaire avec augmentation des résistances artérielles pulmonaires.
Les étiologies sont multiples :
- insuffisance respiratoire chronique
- cœur pulmonaire chronique post-embolique
- HTAP primitive ou secondaire à une vascularite pulmonaire.
Sur le plan physiopathologique, l’HTAP est progressive, ce qui conduit à une dilatation du VD associée
à une hypertrophie de la paroi libre du VD et plus tardivement à une dysfonction VD.
Diagnostic positif
Mode Bidimensionnel
En écho 2D on observe une dilatation des cavités droites avec aspect arrondi de la pointe où on met
en évidence des trabéculations hypertrophiques,
L’hypertrophie VD est retrouvée par la mesure de l’épaisseur de la paroi libre au-delà de 4 mm.
On retrouve également, une modification de la courbure septale qui est aplatie ou inversée, voir un
aspect de refoulement et de compression du VG, une dilatation de la VCI et des veines sushépatiques.
Mode Doppler
En mode Doppler, on identifie une HTAP qui est souvent importante et il existe des troubles du
remplissage VG à type d’anomalie de relaxation.
Diagnostic différentiel
Les principaux diagnostics différentiels sont :
- la dysplasie arythmogène VD,
- les shunts G-D comme une CIA,
- le rétrécissement valvulaire pulmonaire,
- et l’atteinte VD sur myocardiopathie dilatée.
Conclusion
Qu’il s’agisse d’HTAP primitive, secondaire, de cœur pulmonaire aigu ou chronique,
l’échocardiographie possède une place indiscutable dans la prise en charge de ces patients, générant
des critères positifs et de gravité qui permettent un tri initial dans le cadre de l’urgence.
-----o0o-----
~ © 2010 DCAM ~ Université Victor Segalen Bordeaux 2 ~ France
5/5

Documents pareils