Scott Soo, The routes to exile. France and the Spanish Civil War

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Scott Soo, The routes to exile. France and the Spanish Civil War
Francia­Recensio 2015/1
19./20. Jahrhundert – Histoire contemporaine
Scott Soo, The routes to exile. France and the Spanish Civil War refugees, 1939–2009, Manchester (Manchester University Press) 2013, XIII–290 p., 2 maps (Studies in Modern French History), ISBN 978­978­0­7190­8691­5, GBP 65,00.
rezensiert von/compte rendu rédigé par
Geneviève Dreyfus­Armand, Cahors
L’ouvrage de Scott Soo vient combler une lacune importante dans l’historiographie en langue anglaise: l’étude de l’exil des républicains espagnols en France à l’issue de la guerre d’Espagne était délaissée depuis l’étude pionnière due à Louis Stein en 1979. Or, cet exil a été le premier grand exode que l’Europe occidentale a connu dans la première moitié du XXe siècle ainsi que le plus important en direction de la France. Et, depuis une vingtaine d’années, les publications sur ce thème se sont intensifiées, aussi bien en Espagne qu’en France.
Basé sur une très bonne connaissance des travaux existants, des archives disponibles et sur de nombreux témoignages suscités par l’auteur, cet ouvrage étudie l’exil républicain espagnol en France dans la longue durée. Bien qu’évoquant des exemples sur tout le territoire français, l’auteur se penche plus particulièrement sur la région aquitaine dont il met au jour des archives peu explorées et recueille des entretiens avec quelques derniers survivants de cette histoire. Soo étudie aussi bien l’histoire que la mémoire des exilés, dont les associations mémorielles animées par les descendants sont très actives en France au début du XXIe siècle.
L’auteur met en évidence le caractère exceptionnel et unique de cet exil dans la longue histoire de l’asile français. Le moment lui­même de la plus grande vague migratoire est particulièrement singulier : le plus important des exodes générés vers la France par la guerre d’Espagne, celui de 1939, se produit dans une période de montée des tensions internationales et de restrictions apportées à l’entrée des étrangers sur le sol français. Ce qui explique le caractère à la fois méfiant et restrictif de l’accueil réservé aux réfugiés par des autorités françaises débordées par l’ampleur des événements et tributaires d’une opinion publique extrêmement divisée.
La France de la IIIe République a inauguré avec les républicains espagnols la tragique histoire des camps d’internement, qui ont perduré pendant l’occupation du pays et connu une évolution encore plus répressive sous le gouvernement de Vichy et une inféodation à la politique nazie d’élimination des Juifs. L’auteur ne peut qu’évoquer la terminologie employée à l’époque par les pouvoirs publics français pour désigner ces camps – camps de concentration –, appellation que les descendants d’exilés continuent d’employer dans le présent, alors que les historiens, soucieux d’éviter la confusion avec les camps nazis, préfèrent généralement le terme générique de »camp d’internement«. Tout en admettant que la mémoire blessée des républicains espagnols puisse revendiquer le terme d’origine Lizenzhinweis: Dieser Beitrag unterliegt der Creative­Commons­Lizenz Namensnennung­Keine kommerzielle Nutzung­Keine Bearbeitung (CC­BY­NC­ND), darf also unter diesen Bedingungen elektronisch benutzt, übermittelt, ausgedruckt und zum Download bereitgestellt werden. Den Text der Lizenz erreichen Sie hier: http://creativecommons.org/licenses/by­nc­nd/3.0/de
que les tragédies ultérieures de l’histoire ont rendu difficile à utiliser de façon indistincte par des historiens professionnels.
Scott Soo s’interroge particulièrement sur la manière dont les républicains espagnols ont relevé le défi de leur défaite en Espagne et des dures conditions des débuts de de l’exil. Ou comment leur forte identité leur a permis de mettre en œuvre des stratégies de survie et de reconstruction personnelle. Et comment s’est mise en place dans l’exil une culture commémorative, particulièrement développée depuis le début du XXIe siècle.
L’ouvrage est divisé en trois parties. D’abord, sont analysés les débuts de l’exil jusqu’à l’occupation de la France, avec les choix décisifs des premiers mois afin de sortir de l’univers des camps : repartir en Espagne avec les risques que cela comportait, s’engager dans la Légion étrangère ou les Régiments de marche de volontaires étrangers – seule incorporation militaire possible – ou travailler, soit individuellement soit collectivement dans les Compagnie de travailleurs étrangers (CTE). La partie centrale est consacrée à l’enrôlement des réfugiés espagnols dans l’économie de guerre française dans les CTE puis dans les Groupements de travailleurs étrangers (GTE) qui leur succèdent sous Vichy, avec les refus de nombreux républicains espagnols de travailler pour l’occupant en France ou en Allemagne. Ce qui amènera à la constitution des premiers maquis espagnols dans des zones géographiquement propices de montagnes (Pyrénées, Massif central, Cévennes) et à l’engagement dans des mouvements français de Résistance. Enfin, la dernière partie est consacrée aux aspirations au retour en Espagne et au rôle important des commémorations depuis le début de l’exil, avec son développement récent dans les générations suivantes. L’auteur se penche particulièrement sur deux associations, l’Amicale de Gurs – fondée autour du camp de Gurs – et FFREEE – Fils et filles de républicains espagnols et enfants de l’exode –, créée à Argelès­sur­Mer, lieu du premier grand camp d’internement, montrant comment ces associations articulent une liaison avec d’autres mémoires.
Bien que certains aspects de cette histoire n’aient pas ou peu été évoqués, comme les cultures de l’exil ou l’activité politique de celui­ci, ce livre a pour caractéristique originale et novatrice de se situer dans la longue durée, confrontant sans cesse les faits et la mémoire, dans la perspective plus globale d’une étude de l’asile en France et des relations de ce pays avec ses réfugiés. Le devenir des républicains espagnols dans la société française montre à l’évidence que, sans qu’ils l’aient souhaité, leur intégration dans le pays d’exil s’est effectuée progressivement et que leurs descendants sont totalement partie prenante de la vie sociale et politique française ; de nombreux élus ou responsables politiques à divers niveaux mais aussi des écrivains et des artistes reconnus en témoignent aujourd’hui.
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