Surréalisme

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Surréalisme
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Le Surréalisme
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UN MOUVEMENT, UNE PERIODE Dossiers pédagogiques sur les collections du Musée
national d'art moderne
Genèse de l'Art surréaliste
Les artistes et leurs œuvres: Giorgio De Chirico, Portrait prémonitoire de Guillaume
Apollinaire, 1914
Max Ernst, Ubu Imperator, 1923
Man Ray, Le Violon d’Ingres, 1924
Joan Miró, La Sieste, 1925
René Magritte, Querelle des universaux, 1928
Salvador Dali, Lion, Cheval, Dormeuse invisibles, 1930
Victor Brauner, Loup­Table, 1939­1947
Textes de référence
Texte extrait de "La glace sans tain", Les Champs
magnétiques, André Breton et Philippe Soupault, 1919
Définition du Surréalisme, in André Breton, Manifeste du
Surréalisme, 1924
Poème de Joan Miró, novembre 1936
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Glossaire du Surréalisme
Chronologie
Bibliographie sélective
Ce dossier s’inscrit dans une série “Un mouvement,
une période ”, qui sera régulièrement augmentée dans
cette partie du site.
• Ces dossiers sont réalisés autour d’une sélection d’œuvres
des principaux mouvements ou tendances représentés dans
les collections du Musée national d’art moderne,
• S’adressant en particulier aux enseignants ou aux
responsables de groupe, ils ont pour objectif de proposer des
points de repères et une base de travail pour faciliter
l’approche et la compréhension de la création au 20e siècle,
ou pour préparer une visite au Musée.*
Chacun de ces dossiers comporte :
­ une présentation générale permettant de définir et de situer
le mouvement dans un contexte historique, géographique et
esthétique,
­ une sélection des œuvres des collections du Musée les plus
représentatives, traitées par fiches comportant une notice
d’œuvre, une reproduction et une biographie de l’artiste,
­ un ou plusieurs textes de référence apportant en
complément une approche théorique,
­ une chronologie,
­ une bibliographie sélective. *A NOTER
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Les collections du Musée comportent plus de 59 000 œuvres.
Régulièrement, le Musée renouvelle les œuvres présentées
dans ses espaces situés aux 4e et 5e niveaux du Centre
Pompidou. Les dossiers pédagogiques sont réalisés en lien
avec ces accrochages.
Pour en savoir plus sur les collections du Musée :
www.centrepompidou.fr/musee.
Genèse de l'Art surréaliste Le groupe des Surréalistes s’est formé à partir de l’esprit de
révolte qui caractérise les avant­gardes européennes des
années 20. Tout comme le mouvement Dada, auquel certains
ont appartenu, ces poètes et ces artistes dénoncent l’arrogance
rationaliste de la fin du 19e siècle mise en échec par la guerre.
Constatant néanmoins l’incapacité du Dadaïsme à reconstruire
des valeurs positives, les Surréalistes s’en détachent pour
annoncer l’existence officielle de leur propre mouvement en
1924.
Dominé par la personnalité d’André Breton, le Surréalisme est
d’abord d’essence littéraire. Son terrain d’essai est une
expérimentation du langage exercé sans contrôle. Puis cet état
d’esprit s’étend rapidement aux arts plastiques, à la
photographie et au cinéma, non seulement grâce aux goûts de
Breton, lui­même collectionneur et amateur d’art, mais aussi
par l’adhésion d’artistes venus de toute l’Europe et des États­
Unis pour s’installer à Paris, alors capitale mondiale des arts.
Les artistes surréalistes mettent en œuvre la théorie de
libération du désir en inventant des techniques visant à
reproduire les mécanismes du rêve. S’inspirant de l’œuvre de
Giorgio De Chirico, unanimement reconnue comme fondatrice
de l’esthétique surréaliste, ils s’efforcent de réduire le rôle de la
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conscience et l’intervention de la volonté. Le frottage et le
collage utilisés par Max Ernst, les dessins automatiques
réalisés par André Masson, les rayographes de Man Ray, en
sont les premiers exemples. Peu après, Miró, Magritte et Dali
produisent des images oniriques en organisant la rencontre
d’éléments disparates.
Leur première exposition collective a lieu à Paris en 1925. Puis
le mouvement se diffuse à l’étranger pour atteindre une
renommée internationale avec les expositions de 1936 à
Londres et à New York, de 1937 à Tokyo, de 1938 à Paris,
notoriété renforcée par l’immigration aux États­Unis de la
majeure partie du groupe pendant la guerre. Le Surréalisme a
ainsi profondément inspiré l’art américain : la pratique de
l’automatisme est par exemple l’une des origines du travail de
Jackson Pollock et de l’Action Painting, tandis que l’intérêt
porté par les Surréalistes au thème de l’objet annonce le Pop
Art.
Le Surréalisme est un mouvement qui se développe pendant
plus de quarante ans, depuis les avant­gardes historiques du
début du siècle jusqu’à l’émergence de nouveaux courants dans
les années 60 : outre la peinture américaine et le Pop Art, l’art
surréaliste a motivé l’apparition d’une seconde vague avant­
gardiste en Europe dans les années 60, dont le Nouveau
Réalisme est l’éminent représentant.
Lien vers le dossier Pop Art
Lien vers le dossier Nouveau Réalisme
Giorgio De Chirico Volos, Thessalie, 1888 ­ Rome, 1978 Giorgio De Chirico, Portrait prémonitoire de
Guillaume Apollinaire, 1914 Huile sur toile
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81,5 x 65 cm
© Adagp, Paris 2007 Ce tableau, vraisemblablement intitulé Homme­cible
lors de sa création, n’a acquis son titre définitif
qu’après la blessure de Guillaume Apollinaire en
1916, que De Chirico avait, en quelque sorte,
annoncée.
En effet, le portrait en ombre chinoise, qui apparaît
dans une fenêtre au second plan du tableau,
comporte sur la tempe un cercle blanc qui figure une
cible, précisément à l’endroit où le poète sera atteint
par un éclat d’obus pendant la guerre. Cette
coïncidence a été interprétée comme un signe du
destin par Apollinaire lui­même, ainsi que par les
Surréalistes enclins à reconnaître chez De Chirico
quelques facultés visionnaires. Un dessin de ce
portrait a appartenu à Paul Éluard, grâce auquel
l’œuvre a été diffusée au sein du groupe, tandis que
le tableau, offert au poète par l’artiste, a longtemps
fait partie des collections privées de ses héritiers.
Le vif intérêt qu’a suscité cette œuvre auprès des
Surréalistes ne se limite cependant pas à la
prémonition. De même que les images des rêves
condensent des significations multiples, les éléments
de la composition autorisent des lectures qui se
superposent et s’enrichissent mutuellement. Le profil
d’Apollinaire s’inspire d’un portrait numismatique,
réalisé la même année par De Chirico, qui érige le
poète au rang d’un empereur antique, cette grandeur
étant nuancée par le choix d’une représentation en
ombre chinoise qui évoque les lanternes magiques,
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ou encore les cibles qui défilent dans les jeux de tir.
La statue au premier plan superpose elle aussi
plusieurs images. Peinte sur le modèle de la Vénus
de Milo, elle doit être identifiée au poète Orphée,
dont la figure est suggérée par ses attributs, le
poisson et la conque. Elle porte des lunettes noires
qui symbolisent la cécité, infirmité associée dans la
mythologie grecque à la sagesse.
Ainsi, la composition d’ensemble propose une
"énigme", selon le mot de De Chirico, à déchiffrer par
association d’idées, qui fait apparaître Apollinaire
comme l’incarnation même de la poésie hypostasiée
en sagesse.
Biographie
D’origine italienne, Giorgio De Chirico naît et grandit
dans une ville portuaire à l’Est de la Grèce, fréquente
l’Institut Polytechnique d’Athènes, en même temps
qu’une école de dessin et de peinture. Il poursuit ses
études d’art à Munich, où il est attiré par la peinture
de Böcklin, et par la philosophie de Nietzsche.
Son installation à Paris en 1911 lui fait découvrir les
paysages de la modernité, dont les symboles, comme
les gares, les cheminées, les enseignes, se mêlent à
ses souvenirs de Grèce et d’Italie. Ces superpositions
lui inspirent des peintures volontairement
énigmatiques qu’Apollinaire qualifie de
"métaphysiques". Régulièrement exposées à partir
de 1912 au Salon d’Automne et au Salon des
Indépendants, ces toiles représentent des objets
juxtaposés, dont certains sont récurrents, des
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éléments architecturaux qui projettent des ombres
accentuées, des sculptures antiques qui se
confondent bientôt avec les mannequins des ateliers
de couture, ou encore un gant ou un artichaut.
En 1915, l’entrée en guerre de l’Italie mobilise
l’artiste à Ferrare, ville dont l’architecture lui suggère
une série de peintures intitulée "Intérieurs
métaphysiques", où l’espace se fragmente en une
multiplicité de points de vue, allant du trompe­l’œil à
la perspective la plus vertigineuse. En 1918, il
s’installe à Rome, où il participe à la fondation de
Valori Plastici, revue qui s’oriente rapidement vers la
défense de l’art italien du Quattrocento.
De Chirico désavoue alors sa production passée au
moment où elle est reçue comme une révélation par
les Surréalistes : en 1922, une grande exposition
personnelle lui est consacrée à Paris, préfacée par
André Breton.
Max Ernst
Brühl, près de Cologne, 1891 ­ Paris, 1976 Max Ernst, Ubu Imperator, 1923 Huile sur toile
81 x 65 cm
© Adagp, Paris 2007 Acquise par Paul Éluard avec deux autres grandes
huiles sur toile, Ubu Imperator marque d’emblée
l’entrée de Max Ernst dans le champ du Surréalisme.
Cette œuvre illustre avec éclat la combinatoire
d’éléments hétérogènes, héritée du collage. Sa force
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est de produire une image unifiée, tout en conservant
la perturbation, introduite dans la vision, par chacun
des éléments : pointe de la toupie, carcasse rouge où
transparaît une armature de fer, mains humaines
exprimant l’étonnement.
Ainsi se compose, dans le jeu et la dérision, l’image
du Père Ubu, symbole grotesque de l’autorité
inventé par Alfred Jarry. Plus encore, sous ce
déguisement ressurgit l’enfance de Max Ernst, une
vision de "demi­sommeil" selon les termes mêmes de
sa description, dans laquelle les prestiges de
l’autorité paternelle ainsi que ceux de la création
artistique sont désacralisés. Derrière la bouffonnerie
du pouvoir désignée par la toupie Ubu, c’est aussi
toute l’esthétique traditionnelle – construction
rationnelle et perspective géométrique ­ qui est
tournée en ridicule.
Un an avant la parution du Manifeste du surréalisme,
Ernst élabore non seulement la définition des voies
formelles dans lesquelles il s’engage ­ processus
complexe d’alchimie visuelle où se superposent et se
combinent des symboles résurgents de l’enfance ­
mais surtout le sens de sa propre attitude devant
l’acte de peindre, à la fois distanciée et ironique, qui
commandera toute sa poétique.
Biographie
Max Ernst étudie la philosophie et l’histoire de l’art à
l’université de Bonn de 1909 à 1912. Après sa
mobilisation durant la Première Guerre mondiale, il
crée avec Arp et Baargeld une section Dada à
Cologne. Inspirés par la peinture de De Chirico
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diffusée par la revue Valori Plastici, ses premiers
collages composés en 1919 jouent sur la multiplicité
des sens, l’ambiguïté et la contradiction, pour
échapper à toute logique. Ces travaux sont présentés
à Paris en 1921 lors d’une exposition organisée par
André Breton, posant ainsi les bases esthétiques du
futur groupe surréaliste.
Dans le cadre des recherches de ce jeune
mouvement, Max Ernst invente de nouvelles
techniques picturales comme le frottage en 1925 :
grâce à ce procédé qui relève du hasard, il instaure
une distance face à l’œuvre qui le conduit à se situer
"au­delà de la peinture". De même, il invente en
1929 le roman­collage avec La Femme cent têtes,
puis réalise des sculptures, des décors pour les
Ballets russes.
Son œuvre occupe une part importante de
l’exposition "Fantastic art, Dada and Surrealism"
organisée en 1936 au MoMA de New York, où
quarante­huit de ses tableaux sont présentés. La
Seconde Guerre mondiale le conduit à s’exiler aux
États­Unis où il peint une série de toiles, notamment
Le Surréalisme et la peinture, de 1942, (titre faisant
écho au célèbre ouvrage d’André Breton) pour
laquelle il utilise la technique du "dripping". Un
véritable manifeste de l’automatisme est ainsi
proposé à la jeune génération de peintres américains
qui sera profondément marquée par ses innovations.
Il épouse Peggy Guggenheim en 1942 puis, en
1946, Dorothea Tanning, avec laquelle il s’installe
en Arizona avant de revenir en France en 1953.
Man Ray
Philadelphie, 1890 ­ Paris, 1976 http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-surrealisme/ENS-surrealisme.htm
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Epreuve gélatino­argentique montée
sur papier
31 x 24,7 cm (hors marge : 28,2 x 22,5
cm)
© Man Ray Trust / Adagp, Paris 2007 Dans ses mémoires, Man Ray raconte qu’Alice Prin,
dite Kiki de Montparnasse, refusait de poser pour
lui, parce que, disait­elle, "un photographe
n’enregistrait que la réalité". Relatant sa réponse à
Kiki, il poursuit : "Pas moi… je photographiais comme
je peignais, transformant le sujet comme le ferait un
peintre. Comme lui, j’idéalisais ou déformais mon
sujet". Le Violon d’Ingres illustre particulièrement ces
propos évoquant une photographie à mi­chemin
entre la peinture et la reproduction mécanique.
Le corps de Kiki vu de dos ainsi que la position de sa
tête, coiffée d’un turban oriental, rappellent les
baigneuses d'Ingres, notamment le personnage
situé au premier plan du Bain turc, référence
suggérée à Man Ray par la perfection du corps de la
jeune femme qui, dit­il, "aurait inspiré n’importe quel
peintre académique".
Grâce aux deux ouïes dessinées à la mine de plomb
et à l’encre de Chine sur l’épreuve, le corps est ici
métamorphosé en violon. Si Man Ray joue avec
l’expression populaire "avoir un violon d’Ingres",
c’est­à­dire un hobbie, qui rappelle qu’Ingres était un
fervent violoniste, il entend aussi révéler l’érotisme
de la jeune femme et sa propre passion : elle est son
violon d’Ingres. Le photographe évoque ainsi le
thème de "l’amour fou", qu’André Breton explore à
son tour dans l’ouvrage éponyme de 1937.
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Enfin, le rapprochement d’un corps de femme et d’un
violon illustre le principe de la rencontre insolite cher
aux surréalistes. À cet égard, cette photographie est
publiée pour la première fois en juin 1924 sur la page
de garde du numéro 13 de la revue d’André Breton et
Philippe Soupault, Littérature, et a longtemps
appartenu à Breton. C’est ce tirage original que
possède le Mnam, ainsi qu’une variante où Kiki pose
de profil.
Man Ray ayant autorisé des retirages à plusieurs
reprises, il existe d’autres exemplaires de cette
photographie. À partir de l’une des rééditions, il
réalise en 1965 une autre version du Violon d’Ingres
en traçant quatre cordes, non pas en trompe­l’œil
comme les ouïes, mais au milieu de l’image sur toute
sa longueur.
Le Bain turc de Jean­Auguste Dominique Ingres au
Musée du Louvre
Biographie
Après ses études secondaires, Emmanuel Rudnitsky
occupe divers emplois dans la publicité et le
graphisme, tout en commençant à peindre: il adopte
alors son nom d’artiste, Man Ray ou "l’homme­
rayon".
En fréquentant régulièrement, à New York, la galerie
291 dirigée par le photographe Alfred Stieglitz, puis
la célèbre exposition de l’Armory Show en 1913, il
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découvre les avant­gardes européennes, et en
particulier les travaux de Marcel Duchamp, dont
Man Ray fait la connaissance deux ans plus tard,
pour nouer une amitié de toute une vie. Ensemble, ils
assistent Katherine S. Dreier, riche mécène
américaine, dans la création d’un musée d’art
contemporain en 1920: "La Société anonyme". La
même année, ils inaugurent aussi une section Dada
à New York en publiant une revue, dont il ne paraît
qu’un numéro: "L’époque n’en méritait pas
davantage. C’était une dadadate" dira Man Ray. C’est
durant cette période qu’il s’initie en autodidacte à la
photographie, d’abord pour reproduire ses peintures
ainsi que les travaux de Duchamp, puis pour réaliser
des portraits.
Après son installation à Paris en 1919, parallèlement
à un travail de studio, notamment pour le couturier
Paul Poiret, il fréquente les Surréalistes et poursuit
ses recherches personnelles en expérimentant de
nouveaux procédés comme le rayographe. Il en
publie le résultat dans un ouvrage intitulé les Champs
délicieux, en hommage aux Champs magnétiques de
Soupault et Breton. Il réalise aussi quelques films
comme Retour à la raison en 1922, ainsi que des
objets surréalistes. Celui que Duchamp définit
comme "nom masculin : syn. de joie, jouer, jouir"
participe à toutes les expositions surréalistes de 1925
à 1959.
Man Ray sur Internet:
http://www.manray­photo.com/
Joan Miró Barcelone, 1893 ­ Palma de Majorque, 1983 http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-surrealisme/ENS-surrealisme.htm
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Joan Miró, La Sieste, 1925
Huile sur toile
113 x 146 cm
Cette toile, qui appartient à la période des "peintures
de rêve" initiée en 1924, est significative de la
contribution de Joan Miró au Surréalisme. Tout en
prenant appui sur le réel, le peintre élabore son
propre univers onirique constitué d’un répertoire de
signes, inspirés de l’œuvre de Paul Klee, qu’il
disperse sur un espace pictural monochrome et sans
repère, à la limite du vide.
Le processus de simplification dont est issue la Sieste
peut être reconstitué à partir des dessins
préparatoires de Miró. Dans l’un d’eux, une femme
est allongée par terre devant une maison sur laquelle
figure un cadran solaire; au loin, sur une plage,
quatre personnages dansent la sardane. Au­delà se
dressent les pics des montagnes de Montroig, lieu
de villégiature de Miró en Catalogne, tandis que dans
le ciel s’élève un soleil flamboyant. Dans un autre
dessin qui préfigure le résultat final, Miró a rassemblé
ces différents éléments en les schématisant: la
femme et la maison sont confondues en une sorte de
cerf­volant blanc; les flèches du cadran solaire
agrandies indiquent le chiffre 12, l’heure de la sieste;
la ronde des danseurs se traduit par un cercle de
pointillés; la crête des montagnes devient une sorte
de parapluie renversé.
Le résultat de cette simplification progressive est une
restructuration du tableau qui donne toute son
importance au fond et à la couleur.
Biographie
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Très tôt passionné par le dessin, Joan Miró est
contraint de suivre une formation de comptable. À la
suite d’une maladie qui l’isole quelques mois, il se
réoriente vers la peinture en s’inscrivant, en 1912,
dans une école d’art de Barcelone. L’enseignement
anti­académique de l’établissement lui fait découvrir
les artistes pionniers de l’art moderne comme
Cézanne, les Fauves et les Cubistes, dont ses
premières toiles ressentent l’influence.
À partir de 1918, date de sa première exposition
personnelle à Barcelone, il entame une période
"détailliste", série de peintures où chaque détail est
précisément représenté dans un style naïf, comme
dans La Ferme de 1921­22, achetée par
Hemingway. Son travail se détache
progressivement de ce réalisme méticuleux sous
l’influence du milieu artistique parisien qu’il fréquente
au cours de nombreux séjours effectués à partir de
1920: introduit par son compatriote Pablo Picasso,
Miró rencontre André Masson, son voisin, par
l’intermédiaire duquel il rejoint le groupe surréaliste.
La montée de la violence en Europe dans les années
30 l’oriente vers une recherche plus dramatique qui
aboutit à une série de pastels à la fois effrayants et
grotesques, ses "peintures sauvages". La guerre
d’Espagne l’oblige à se fixer à Paris, puis en
Normandie, où en 1940 il commence la série des
Constellations reproduites dans un ouvrage préfacé
par Breton. En 1941, la première rétrospective de
son œuvre au MoMA de New York le consacre.
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Après la guerre, une grande diversité d’œuvres voit
le jour, aussi bien des céramiques que des fresques,
par exemple le panneau mural de l’UNESCO à Paris
en 1958, la série des 3 Bleus de 1961, vastes
surfaces monochromes vigoureusement ponctuées,
ou encore des sculptures monumentales telles que la
pièce réalisée pour le parvis La Défense en 1978. René Magritte
Lessines, 1898 ­ Bruxelles, 1967 René Magritte, Querelle des
universaux, début 1928
Huile sur toile
53,5 x 72,5 cm
© Adagp, Paris 2007 Cette peinture est l’une des premières de la série des
"peintures­alphabets" ou "peintures­mots" réalisée
par Magritte au cours de son séjour parisien de 1927
à 1930. Ces œuvres constituent une proposition pour
établir un nouveau rapport entre les mots et la
peinture, révélant ainsi l’ambiguïté des liens entre les
objets réels, leur image et leur nom. Ce problème est
aussi abordé par Magritte dans "Les mots et les
images", article publié en décembre 1927 dans La
Révolution surréaliste, qui présente un tableau
confrontant des énoncés linguistiques à des vignettes
illustratives. Par exemple, la première phrase nous
apprend qu’"un objet ne tient pas tellement à son
nom qu’on ne puisse lui en trouver un autre qui lui
convienne mieux".
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La Querelle des universaux pourrait illustrer cet autre
énoncé tiré de l’article: "parfois le nom d’un objet
tient lieu d’une image". En effet, les mots "feuillage",
"cheval", "miroir", "convoi", écrits sur la toile,
remplacent l’image qu’ils désignent. Placés à
l’extrémité des pointes d’une étoile énigmatique et
inscrits chacun sur une tache brune, "une forme
quelconque qui peut remplacer l’image d’un objet",
ces mots participent pleinement à la composition
spatiale d’une nouvelle image fantomatique. Grâce à
cette toile, la connexion que nous établissons
spontanément entre les objets, les images et les
mots, se trouve mise en déroute.
Biographie
Né dans le Hainaut, au sud de la Belgique, René
Magritte s’installe à Bruxelles en 1915, un an après le
suicide de sa mère, retrouvée noyée, une chemise lui
masquant le visage. Son souvenir est sans doute à
l’origine de nombreuses peintures où Magritte
présente des figures voilées. Après des études à
l’Académie des Beaux­arts de Bruxelles de 1916 à
1918, il est employé comme dessinateur dans une
usine de papier peint, et parallèlement à ce travail,
peint des toiles abstraites.
En 1925, la découverte de l’œuvre de De Chirico
l’incite à adopter une facture réaliste pour
représenter des objets quotidiens comme des
chaussures, des clés … organisés selon des rapports
formels déroutants et dans des situations
invraisemblables. En 1926, en compagnie des poètes
Marcel Lecomte, Camille Goemans et E.L.T.
Mesens, il fonde le groupe surréaliste belge, avant
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de rejoindre pour trois ans, à Paris, le groupe
d’André Breton.
De retour à Bruxelles en 1931, tout en étant devenu
le chef de file du Surréalisme en Belgique, Magritte
ouvre un atelier de création publicitaire, activité qui
n’est pas sans lien avec le style de sa peinture.
Pendant la guerre, il revient brièvement à
l’Impressionnisme, pour retrouver ensuite sa facture
classique et traiter de nouveaux thèmes surréalistes.
En 1973, Michel Foucault lui consacre son célèbre
essai Ceci n’est pas une pipe.
Salvador Dali
Figueras, 1904 ­ Figueras, 1989 Salvador Dali, Lion, Cheval,
Dormeuse invisibles, 1930
Huile sur toile
50,20 x 65,20 cm
© Salvador Dali, Fondation Gala ­
Salvador Dali / Adagp Composée au printemps 1930, cette toile développe
pour la première fois le processus d’apparition des
images doubles, triples, et même multiples, qui
relèvent de l’activité paranoïaque critique tout juste
instituée par Dali: "récemment, au travers d’un
processus nettement paranoïaque, j’ai obtenu l’image
d’une femme dont la position, les ombres et la
morphologie, sans altérer ni déformer en rien son
aspect réel, sont en même temps un cheval". Par
cette multiplication des images possibles, Dali entend
instaurer un doute sur ce que représente l’image,
pour étendre ensuite cette attitude critique à toute la
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réalité: "on pose le doute mental de savoir si les
images mêmes de la réalité sont uniquement un
produit de notre faculté paranoïaque".
Dans cette toile, la remise en cause de l’univocité de
la perception est provoquée par la métamorphose
d’une barque en un corps de femme, puis de cheval,
d’une chevelure qui devient une crinière, dans un
décor de plage qui, peuplé de motifs architecturaux,
évoque le Modern Style tant admiré par Dali.
Exposée au cinéma d’art et d’essai de Montmartre, le
Studio 28, à l’occasion de la première projection de
l’Âge d’or co­réalisé par Dali et Buñuel, l’œuvre a été
lacérée par un public hostile, ce qui témoigne du
scandale suscité par l’artiste au début des années 30.
Biographie
Originaire de Catalogne, Salvador Dali entre en 1921
à l’École des Beaux­arts de Madrid, d’où il est
renvoyé en 1926 pour indiscipline. De cette
formation, il conserve malgré tout l’amour de la
grande peinture, qu’il complète par la découverte des
avant­gardes artistiques telles que le Futurisme
italien, le Cubisme et l’œuvre de De Chirico. À cette
époque, il fréquente les milieux anarchistes et se lie
d’une profonde amitié avec le poète Federico Garcia
Lorca, qui écrit l’Ode à Salvador Dali, et avec Luis
Buñuel alors étudiant.
Il commence à produire une œuvre personnelle
autour de 1927, par exemple la toile intitulée Le sang
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Le Surréalisme
est plus doux que le miel, qui dépeint un paysage
désertique où sont dispersées des figures insolites,
dont ses premières formes molles. Mais ce n’est
qu’avec le film Un Chien andalou, réalisé en 1929
avec Luis Buñuel, qu’il s’impose dans le milieu
artistique et attire l’attention des Surréalistes.
Au cours de l’été 1929, ses nouveaux amis lui
rendent visite en Catalogne avec, parmi eux, Helena
Diakonova, surnommée Gala, future compagne de
Dali. La même année a lieu sa première exposition
personnelle à Paris. À partir de 1930, le scandale
causé par la projection de L’Age d’or accroît sa
notoriété. Il réalise de multiples objets surréalistes et
applique à sa peinture la méthode paranoïaque
critique.
Pendant la guerre, il séjourne aux États­Unis où il
produit des illustrations, des publicités et rédige sa
biographie, La Vie secrète de Salvador Dali. Il conçoit
aussi des décors de théâtre et de cinéma,
notamment pour Spellbound en 1945 (La Maison du
Dr Edwardes) d’Alfred Hitchcock. Par la suite, il
partage son temps entre New York, Paris et Port­
Lligat, où se trouve sa propriété de Cadaqués, ne
cessant d’apparaître au cours d’interventions
provocatrices.
Le site de la Fondation Gala – Salvador Dali :
http://www.salvador­dali.org/
Victor Brauner
(Pietra­Naemtz ­ Roumanie ­ 1903, Paris ­1966)
Victor Brauner, Loup­table, 1939­1947
Bois et éléments de renard naturalisé
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Le Surréalisme
54 x 57 x 28,5 cm
© Adagp, Paris 2007 Le Loup­table est un être hybride imaginé par Victor
Brauner en 1939, d’abord sous forme de peinture. Il
apparaît en effet dans deux tableaux, Fascination et
Espace psychologique, tandis que l’objet en trois
dimensions est réalisé pour l’Exposition internationale
du Surréalisme de Paris, 1947, sans doute à la
demande d’André Breton.
Il constitue un objet surréaliste, proche du ready­
made avec sa table fabriquée en série, mais
introduisant avec le renard naturalisé un "objet
trouvé", notion propre au Surréalisme : il s’agit d’un
objet qui s’impose de lui­même à la sensibilité du
spectateur grâce à une forte connotation symbolique.
La fourrure du Loup­table, terme qui évoque lui­
même le mot "redoutable", symbolise à la fois la
chaleur et la mort, ce qui a conduit André Breton à
interpréter cette œuvre comme un signe
prémonitoire de la Seconde Guerre mondiale : "Victor
Brauner seul alors a tablé sur la peur, et il l’a fait au
moyen de la table que l’on sait… Cette période de son
œuvre nous apporte le témoignage
incontestablement le plus lucide de cette époque, elle
seule est toute appréhension du temps qui va venir"
(Le Surréalisme et la peinture, 1946).
Biographie
Originaire d’une petite ville des Carpates, Victor
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Le Surréalisme
Brauner étudie la peinture à l’École des Beaux­arts de
Bucarest, d’où il est renvoyé, ses œuvres étant
jugées scandaleuses. À partir de 1924 jusqu’à la fin
des années 20, il participe activement aux
mouvements d’avant­garde de la capitale roumaine,
proches de l’esprit dadaïste, en collaborant à de
nombreuses revues. Parallèlement à ces activités,
après avoir découvert l’œuvre de De Chirico lors
d’un premier voyage à Paris, il pratique une peinture
figurative, mettant en scène des figures d’animaux
fantastiques.
En 1930, il s’installe définitivement en France, où il
rejoint son compatriote Constantin Brancusi, grâce
auquel il rencontre les Surréalistes. André Breton
préface le catalogue de sa première exposition
parisienne en 1934 qui présente des toiles suggérant
un univers ubuesque. À cette époque, Victor Brauner
développe aussi le thème de l’œil énucléé, ce qui sera
interprété comme une prémonition, lorsqu’en 1938
Oscar Dominguez lui crève accidentellement un œil
au cours d’une bagarre.
Après la guerre, il rompt avec le groupe surréaliste
pour se rapprocher de Matta, lui­même exclu par
Breton, avec lequel il collabore, notamment à la
réalisation de quelques toiles.
En 1966, la France lui rend hommage en le désignant
comme son représentant à la Biennale de Venise.
Textes de référence http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-surrealisme/ENS-surrealisme.htm
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Le Surréalisme
Texte extrait de "La glace sans tain", Les Champs
magnétiques, André Breton et Philippe Soupault,
1919
"Prisonniers des gouttes d’eau, nous ne sommes que des
animaux perpétuels. Nous courons dans les villes sans bruits et
les affiches enchantées ne nous touchent plus. À quoi bon ces
grands enthousiasmes fragiles, ces sauts de joie desséchés ?
Nous ne savons plus rien que les astres morts ; nous regardons
les visages ; et nous soupirons de plaisirs. Notre bouche est
plus sèche que les pages perdues ; nos yeux tournent sans but,
sans espoir. Il n’y a plus que ces cafés où nous nous réunissons
pour boire ces boissons fraîches, ces alcools délayés et les
tables sont plus poisseuses que ces trottoirs où sont tombées
nos ombres mortes de la veille.
Quelquefois, le vent nous entoure de ses grandes mains froides
et nous attache aux arbres découpés par le soleil. Tous, nous
rions, nous chantons, mais personne ne sent plus son cœur
battre. La fièvre nous abandonne.
Les gares merveilleuses ne nous abritent plus jamais : les longs
couloirs nous effraient. Il faut donc étouffer encore pour vivre
ces minutes plates, ces siècles en lambeaux. Nous aimions
autrefois les soleils de fin d’année, les plaines étroites où nos
regards coulaient comme ces fleuves impétueux de notre
enfance. Il n’y a plus que des reflets dans ces bois repeuplés
d’animaux absurdes, de plantes connues.
Les villes que nous ne voulons plus aimer sont mortes.
Regardez autour de vous : il n’y a plus que le ciel et ces grands
terrains vagues que nous finirons bien par détester. Nous
touchons du doigt ces étoiles tendres qui peuplaient nos rêves.
Là­bas, on nous a dit qu’il y avait des vallées prodigieuses :
chevauchées perdues pour toujours dans ce Far West aussi
ennuyeux qu’un musée".
Définition du Surréalisme, in André Breton, Manifeste du
Surréalisme, 1924 http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-surrealisme/ENS-surrealisme.htm
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Le Surréalisme
"SURRÉALISME, n. m. Automatisme psychique pur par lequel on
se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de
toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée.
Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la
raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale.
ENCYCL. Philos. Le surréalisme repose sur la croyance à la
réalité supérieure de certaines formes d’associations négligées
jusqu’à lui, à la toute­puissance du rêve, au jeu désintéressé de
la pensée. Il tend à ruiner définitivement tous les autres
mécanismes psychiques et à se substituer à eux dans la
résolution des principaux problèmes de la vie. Ont fait acte de
SURRÉALISME ABSOLU MM. Aragon, Baron, Boiffard, Breton,
Carrive, Crevel, Delteil, Desnos, Éluard, Gérard, Limbour,
Malkine, Morise, Naville, Noll, Péret, Picon, Soupault, Vitrac.
Ce semblent bien être, jusqu’à présent, les seuls, et il n’y aurait
pas à s’y tromper, n’était le cas passionnant d’Isidore Ducasse,
sur lequel je manque de données. Et certes, à ne considérer
que superficiellement leurs résultats, bon nombre de poètes
pourraient passer pour surréalistes, à commencer par Dante et,
dans ses meilleurs jours, Shakespeare. Au cours des différentes
tentatives de réduction auxquelles je me suis livré de ce qu’on
appelle, par abus de confiance, le génie, je n’ai rien trouvé qui
se puisse attribuer finalement à un autre processus que celui­
là".
Poème de Joan Miró, novembre 1936, cité in Joan Miró,
Fondation Pierre Gianadda, Martigny, 1997, p.14
"La belle comtesse
montre sa vieille cuisse
ses entrailles cuisent
les nuées
son rond ventre éventail
défie le soleil rond
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Le Surréalisme
Les poils de ses aisselles
se collent aux cils
des chérubins
L’orteil de son homme
transperce l’arbre fleuri
vérole du potager
un oiseau se pose sur le nez de son homme
et fait descendre la lune
la lune se pose sur le cul de son homme
et tombe amoureuse de l’arc­en­ciel
l’arc­en­ciel s’enferme dans le cercueil
et le cercueil dit à l’écureuil merdre! Veux tu
finir"
Glossaire du Surréalisme Cadavre exquis :
Le Cadavre exquis est le plus célèbre des jeux surréalistes.
Pratiqué à partir de 1925, Ernst consiste à composer des
poèmes ou des dessins à plusieurs, chacun inscrivant un mot ou
un motif sur un papier plié, à l’insu des autres participants. Les
œuvres ainsi obtenues présentent des rapprochements
inattendus, comme la phrase "le cadavre exquis boira le vin
nouveau", à laquelle le jeu doit son nom.
Collage :
Au sein du Surréalisme, le procédé du collage est surtout
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Le Surréalisme
employé par Max Ernst. Dès 1919, il assemble des images
issues de multiples domaines, dans le but de provoquer des
rencontres insolites. À partir de 1929, il crée des romans­
collages, séries d’images confectionnées à partir de gravures de
la fin du 19e siècle ou de catalogues illustrés, et reliées entre
elles par la simple répétition de motifs visuels.
À la différence du collage cubiste voué à la seule recherche
plastique, et des photomontages éminemment politiques du
dadaïsme allemand, le collage surréaliste suggère de nouvelles
associations visuelles, poétiques et oniriques.
Décalcomanie :
Cette technique a été utilisée pour la première fois dans un
cadre artistique par Oscar Dominguez en 1936. L’artiste presse
une feuille blanche sur une autre feuille enduite de gouache
noire, et répète l’opération, de manière à reporter plusieurs fois
les taches de peinture. L’image qui en résulte permet à l’artiste
de libérer son imagination en interprétant à sa guise les formes
obtenues. À la suite d’Oscar Dominguez, Max Ernst applique le
principe de la décalcomanie à la peinture à l’huile.
Écriture automatique :
Inspirée de la psychanalyse, et surtout de la poésie d’Arthur
Rimbaud et de Lautréamont, l’écriture automatique consiste à
écrire si rapidement que la raison et les idées préconçues n’ont
pas le temps d’exercer leur contrôle. Le premier texte issu de
cette méthode, Les Champs magnétiques de 1919, a été rédigé
tour à tour par André Breton et Philippe Soupault.
Frottage :
Équivalent pictural de l’écriture automatique, le procédé du
frottage a été découvert par Max Ernst à l’occasion d’un épisode
précis de sa vie, en 1925. En fixant le plancher usé d’une
auberge où il séjournait en Bretagne, il décide de relever
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Le Surréalisme
l’empreinte de cette matière en frottant à la mine de plomb un
papier posé sur les lattes de bois. Il étend ensuite ce procédé à
d’autres textures et publie son premier recueil de frottages,
Histoire naturelle, en 1926. Il poursuit cette recherche en
utilisant la peinture à l’huile.
Fumage :
En 1937, le peintre autrichien Wolfgang Paalen invente le
procédé du fumage : il réalise des dessins tracés en promenant
la flamme d’une bougie sur une feuille de papier. Plus tard, il
applique cette technique à la peinture à l’huile. Il annonce ainsi
les peintures de feu d’Yves Klein.
Grattage :
Inventé par Max Ernst en 1927 comme extension du frottage, le
grattage est surtout pratiqué par Esteban Francès, peintre
d’origine espagnol et rallié au Surréalisme en 1937. Cette
technique consiste à gratter à la lame de rasoir des couches
superposées de peinture de différentes couleurs, afin de faire
surgir des formes plus ou moins transparentes et diaprées.
Objet surréaliste :
Après les Ready­made de Marcel Duchamp, André Breton
suggère au milieu des années 20 de fabriquer "certains de ces
objets qu’on n’aperçoit qu’en rêve", et "dont le sort paraît
infiniment problématique et troublant". Comme chez Duchamp,
il s’agit d’assembler des objets déjà existants et de peu de
valeur. Mais contrairement à lui, les surréalistes attendent du
nouvel objet qu’il provoque une réaction affective, voire "une
émotion sexuelle particulière" selon Salvador Dali.
Les plus célèbres des objets surréalistes sont dûs à Alberto
Giacometti, Salvador Dali, Joan Miró, André Breton, Oscar
Dominguez ou encore Man Ray.
Paranoïa­critique :
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Le Surréalisme
Développée par Salvador Dali à partir de 1929, la théorie de la
paranoïa­critique consiste en un délire d’interprétation, appliqué
non seulement à l’art, mais aussi à la réalité. Son but est de
dépasser la perception habituelle jugée trop pauvre, au profit
d’une appréhension du réel démultipliée.
Rayographe :
Le procédé du rayographe a été inventé par Man Ray en 1922.
Il s’agit de réaliser des photographies sans appareils, en plaçant
des objets sur une plaque sensible que l’on expose à la lumière.
Chronologie 1922
André Breton rompt avec le mouvement Dada en publiant des
textes critiques dans sa revue Littérature, et regroupe autour
de lui quelques poètes comme Robert Desnos, René Crevel ou
Benjamin Peret. Ils poursuivent les recherches entreprises par
Breton et Philippe Soupault dans les Champs magnétiques,
texte écrit selon la méthode de l’écriture automatique et publié
en 1919. Le groupe s’auto­désigne comme le "mouvement flou"
jusqu’à l’officialisation du Surréalisme en 1924.
1924
Le mouvement est officialisé à Paris par la publication du
Manifeste du Surréalisme, texte qu’André Breton avait
initialement conçu pour préfacer la parution d’un recueil de
poèmes automatiques, Poisson soluble. Il définit le Surréalisme
comme "automatisme psychique pur par lequel on se propose
d’exprimer, soit verbalement, soit par écrit, soit de toute autre
manière, le fonctionnement réel de la pensée". Breton tire ainsi
les conséquences artistiques de la théorie psychanalytique, en
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Le Surréalisme
particulier de l’interprétation des rêves par Freud.
La Révolution surréaliste remplace Littérature et un "bureau de
recherches surréalistes" est ouvert : "son but initial est de
recueillir toutes les communications possibles touchant les
formes qu’est susceptible de prendre l’activité inconsciente de
l’esprit".
Les peintres André Masson et Joan Miró rejoignent le
mouvement.
1925
À la galerie Pierre, à Paris, le 13 novembre à minuit, est
inaugurée la première exposition de peinture surréaliste,
regroupant des œuvres de Giorgio De Chirico, Hans Arp, Max
Ernst, Paul Klee, Man Ray, André Masson, Joan Miró, Picasso et
Pierre Roy.
Max Ernst se consacre à ses premiers frottages.
Les premières expériences de "cadavre exquis", expression
d’une pensée à plusieurs voix, sont réalisées.
Louis Aragon publie Le Paysan de Paris.
À Bruxelles, un groupe réuni par les écrivains Paul Nougé et
E.L.T. Mesens autour de la revue Correspondance se lie avec les
surréalistes français. Le peintre belge René Magritte réalise ses
premières œuvres surréalistes et devient le chef de file de ce
Surréalisme belge.
1926
André Masson réalise ses premiers tableaux "presque
uniquement faits de sable collé" qui mettent l’accent sur la
matière et le hasard.
En mars, à Paris, Jacques Trual et André Breton ouvrent la
Galerie Surréaliste avec l’exposition Tableaux de Man Ray et
objets des Îles (Océanie) qui établit pour la première fois un
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Le Surréalisme
rapport entre la création surréaliste et des œuvres primitives.
La presse est scandalisée par une statue océanienne, jugée
indécente, choisie par Man Ray pour figurer en vitrine de
l’exposition et en couverture du catalogue.
1927
En janvier, André Breton adhère au parti communiste.
En juin, la première exposition personnelle du peintre Yves
Tanguy est organisée à la Galerie Surréaliste. Ses peintures,
héritant de l’univers de Giorgio De Chirico, présentent un
monde qui semble flotter entre le milieu sous­marin et le milieu
terrestre.
André Breton écrit Nadja, portrait d’une jeune femme dont il a
été amoureux et qui a sombré dans la folie. L’ouvrage s’achève
sur l’affirmation désormais célèbre : "La beauté sera
CONVULSIVE ou ne sera pas". 1928
En février, paraît Le Surréalisme et la peinture, recueil d’articles
d’André Breton sur Picasso, Giorgio De Chirico, Max Ernst, Man
Ray, André Masson…
Salvador Dali et Luis Buñuel réalisent le film Un chien andalou
grâce au mécénat de Marie­Laure et Charles de Noailles, qui
financent aussi au même moment un autre film surréaliste resté
célèbre, Le Sang d’un poète de Jean Cocteau.
1929
En février, André Breton adresse un courrier aux collaborateurs
du Surréalisme pour mesurer "le degré de qualification morale
de chacun", ce qui le brouille avec Bataille, Leiris et Masson.
Cette démarche aboutit à la mise au point théorique que
constitue le Second manifeste du Surréalisme publié en
décembre.
Max Ernst réalise son premier roman­collage : Perturbation, ma
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Le Surréalisme
sœur, la femme 100 têtes. En utilisant des gravures anciennes
issues de l’imagerie populaire, Max Ernst présente un univers
de rêve soumis aux caprices de l’inconscient.
Du 20 novembre au 5 décembre, à la galerie Gœmans, se tient
la première exposition parisienne de Salvador Dali. Son œuvre
invite à la pratique de la paranoïa­critique, méthode pour
appréhender le réel en doutant de l’univocité de ses
significations.
1930
En riposte au Second Manifeste, Georges Bataille fait paraître
en janvier un tract intitulé Un cadavre dans lequel il dénonce les
principes qu’il juge moralisateurs d’André Breton. Le tract est
co­signé notamment par Michel Leiris, Robert Desnos, Raymond
Queneau et Jacques Prévert.
Le premier numéro du Surréalisme au Service de la Révolution,
dont le titre est suggéré par Louis Aragon, paraît en juillet et
remplace La Révolution surréaliste.
En décembre, le second film de Dali et Buñuel L’Âge d’or est
projeté au "Studio 28", salle de cinéma montmartroise. Des
membres de la Ligue des patriotes et de la Ligue antijuive
saccagent les locaux.
1931
Les artistes surréalistes sont exposés pour la première fois aux
États­Unis, à Hartford (Connecticut). Cette manifestation réunit
des œuvres de Salvador Dali, Giorgio De Chirico, Max Ernst,
André Masson, Joan Miró, Picasso et Pierre Roy.
Alberto Giacometti réalise ses premières sculptures­objets, des
"objets mobiles et muets" composés de formes organiques qui
peuvent être mises en mouvement.
1932
En novembre, André Breton publie les Vases communicants,
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Le Surréalisme
ouvrage qui tente d’établir l’existence de liens étroits entre les
rêves et l’état de veille, dont il envoie un exemplaire à Freud. Il
y critique les objets "à fonctionnement symbolique" de Salvador
Dali qu’il juge trop réducteur du désir.
1933 Albert Skira publie la revue surréaliste Minotaure (1933­1938)
dont le premier numéro est consacré à Picasso.
1934 Au Musée Royal de Bruxelles, les Surréalistes belges organisent
la première grande exposition d'œuvres surréalistes venant de
toute l’Europe qu’ils intitulent, elle aussi, Minotaure.
L’artiste allemand Hans Bellmer adhère au Surréalisme avec la
publication dans le numéro 6 de la revue Minotaure (décembre
1934) de photographies présentant un de ses objets
surréalistes, La Poupée.
1935 Alberto Giacometti est exclu du groupe. Il récuse son œuvre
surréaliste et annonce son désir de travailler à nouveau
"d'après modèle".
En novembre, la première exposition parisienne de l'artiste
Victor Brauner est organisée à la galerie Pierre.
1936
En mai, à Paris, une exposition d’objets surréalistes à la galerie
Charles Ratton réunit pour la première fois des objets naturels,
des objets trouvés et des objets composés par les artistes
surréalistes.
L’International Surrealist Exhibition est organisée à Londres par
l’historien d’art Herbert Read, et préfacée par André Breton.
En décembre, le MoMA de New York présente l’exposition
Fantastic Art, Dada and Surrealism.
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Le Surréalisme
1937
André Breton devient rédacteur en chef de la revue Minotaure.
Il fait paraître l’Amour fou.
1938 À la galerie des Beaux­arts, à Paris, se tient une nouvelle
Exposition internationale du surréalisme, avec la collaboration
scénographique de Marcel Duchamp. Cette exposition réunit
plus de 60 artistes de différents pays, présentant près de 300
peintures, objets, collages, photographies et installations.
1939
Salvador Dali est exclu du groupe.
La guerre disperse les Surréalistes, dont une grande partie
s’exile aux États­Unis : le modèle qu’ils représentent sera
déterminant pour les mouvements artistiques naissants ou à
venir, comme l’Expressionnisme abstrait, le Néo­dadaïsme, et le
Pop Art.
Bibliographie sélective Essais sur le Surréalisme
­ Pierre Chavot, L’ABCdaire du Surréalisme, Paris, Flammarion,
2001
­ Gérard Durozoi, Histoire du mouvement surréaliste, Paris,
Hazan, 1997 ­ Jean­Paul Clébert, Dictionnaire du Surréalisme, Paris, Seuil,
1996 ­ Gaëtan Picon, Journal du Surréalisme : 1919­1939, Genève,
Skira, 1976
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Le Surréalisme
Catalogues d’exposition
­ La révolution surréaliste, Centre Georges Pompidou, Paris,
2002 ­ Miró, la Collection du Centre Georges Pompidou, Musée d’art
contemporain de Bordeaux, 1999 ­ Man Ray, la photographie à l’envers, Centre Georges
Pompidou, Paris, 1998 ­ Dessins surréalistes : visions et techniques, Centre Georges
Pompidou, Paris, 1995 ­ Max Ernst, rétrospective, Centre Georges Pompidou, Paris,
1992
­ André Breton, la beauté convulsive, Centre Georges
Pompidou, Paris, 1991 ­ De Chirico, Centre Georges Pompidou, Paris, 1983
Écrits d’artiste
­ René Magritte, Les Mots et les images : choix d’écrits,
Bruxelles, Labor, 2000 ­ Man Ray, Autoportrait, Arles, Acte Sud, 1998 ­ Joan Miró, Ecrits et entretiens, Paris, Daniel Lelong, 1995 ­ Salvador Dali, Journal d’un génie, Paris, Gallimard, 1994
Filmographie
Man Ray, Retour à la raison, 1922 Man Ray, Emak Bakia, 1926
Man Ray, L’Étoile de mer, 1928
Man Ray, Les Mystères du château de Dé, 1929
Jean Cocteau, Le Sang d’un poète, 1929
Salvador Dali et Luis Buñuel, Un Chien andalou, 1929 Salvador Dali et Luis Buñuel, L’Âge d’or, 1930
Liens internet
La Révolution surréaliste. Exposition, cinéma, publications... Parcours de l’exposition La Révolution surréaliste (6 mars – 24
juin 2002, Centre Pompidou)
Parcours Cinéma Luis Buñuel : Un chien andalou – L’Age d’or
http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-surrealisme/ENS-surrealisme.htm
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Le Surréalisme
(sur la collaboration entre Salvador Dali et Luis Buñuel)
Collections du Musée : L’objet dans l’art du 20e siècle
Collections du Musée : pour voir toutes les œuvres de ces
artistes appartenant aux collections du Musée.
Pour consulter les autres dossiers sur les collections
du Musée national d'art moderne
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Mise à jour : août 2007 Conception : Florence Morat
Documentation, rédaction : Vanessa Morisset
Montage : Anna Aleksandrowicz­Huertas
Coordination : Marie­José Rodriguez
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