BRÈVE SUR LE TRAITÉ DE LISBONNE N° 201

Transcription

BRÈVE SUR LE TRAITÉ DE LISBONNE N° 201
Paris, le 5 novembre 2008
BRÈVE SUR LE TRAITÉ DE LISBONNE N° 201
Le devoir de « coopération loyale » des États membres envers l'Union
européenne
L'Union européenne est, depuis l'origine, basée sur le principe dit de la « coopération
loyale » des États membres avec l'Union européenne et ses institutions.
Dans la formulation d'origine (Art. 10
notamment :
TCE),
les États membres s'engagent
¾ à prendre « toutes mesures [...] propres à assurer l'exécution des obligations
découlant du Traité [...]. »
¾ à s'abstenir de « toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation
des buts du Traité [...]. »
Ce principe a été repris à l'article 4 § 3 du Traité de Lisbonne.
Il se réfère principalement au respect et à la mise en œuvre du droit et des
décisions de l'Union européenne par les autorités nationales (respect qui fait par
ailleurs l'objet du contrôle juridictionnel des tribunaux nationaux et de la Cour de
Justice européenne).
Mais il a en réalité une portée politique plus générale et peut sans doute être
invoqué dans des circonstances telles que la ratification des traités
communautaires par les États membres qui les ont signés.
La « coopération loyale » des États membres dans le processus de ratification
implique certainement que ceux-ci - en l'occurrence leurs gouvernements - prennent
« toutes les mesures propres à assurer l'exécution » de leur devoir de ratification
et notamment :
9 en mettant en œuvre les procédures les plus appropriées (votes
parlementaires ou référendum) ;
9 en assurant la bonne préparation de la décision (campagnes d'information
adéquates, délais raisonnables...) ;
9 si nécessaire en vérifiant, au préalable et en temps utile, la conformité
juridique du traité avec leurs règles constitutionnelles respectives ;
9 en soutenant loyalement, auprès des parlements ou directement auprès des
électeurs, la proposition de ratification du traité qu'ils ont signé.
Û
[Ce principe de « coopération loyale » dans la ratification des traités une fois signés
est d'ailleurs confirmé, en droit international, par la Convention de Vienne sur le
droit des traités de 1969 qui prévoit notamment qu'un État « doit s'abstenir d'actes qui
priveraient un traité de son objet et de son but », notamment en mettant en péril sa
ratification. Cette règle s'applique aux traités européens qui demeurent, dans leur
forme, des traités internationaux régis par la Convention de Vienne.]
Û
On peut légitimement s'interroger sur le fait de savoir si, dans le cas de la ratification
du Traité de Lisbonne, tous les gouvernements des États membres de l'Union
européenne ont bien respecté ces règles, soit en prenant les mesures préparatoires
nécessaires, soit en s'abstenant de mesures dilatoires, voire obstructives.
Dans le cas particulier des traités communautaires (qui exigent pour leur entrée en
vigueur - contrairement à la plupart des accords internationaux et des constitutions des
États fédéraux - la ratification unanime des États), ce devoir de coopération loyale
revêt une importance primordiale. La négligence, la carence ou l'obstruction d'un
seul État est en effet susceptible de provoquer le retard, voire l'échec de l'ensemble de
l'entreprise.
En signant le Traité de Lisbonne, les 27 États membres et leurs gouvernements se sont
en même temps engagés à prendre « toutes les mesures propres à assurer l'exécution »
de leur décision commune, c'est-à-dire à honorer leur signature.
Le Parlement européen a, à plusieurs reprises, rappelé les États membres à leur
devoir de ratification et souligné que les retards excessifs de certains d'entre eux dans
l'accomplissement de ce devoir pourraient provoquer l'échec final du processus .Le
Parlement s'apprête à renouveler cette mise en garde à la veille du Conseil européen
des 15 et 16 décembre.
Souhaitons qu'il soit enfin entendu et que la « coopération loyale » des États membres
concernés permette l'entrée en vigueur du Traité avant les élections européennes de
juin 2009.
Jean-Guy GIRAUD
NB : Notes et Brèves précédentes archivées sous :
http://www.europarl.europa.eu/paris/4/par41eu5791.htm
Annexe
Irlande
¾ Le Gouvernement n'a pas encore pris de décision sur l'opportunité, les
modalités ou la date d'un nouveau vote.
¾ Les partis politiques souhaiteraient reporter ce vote après les élections
européennes et locales de juin 2009.
République tchèque
¾ Sur demande du Président (en visite en Arabie Saoudite et en Irlande), la Cour
constitutionnelle a reporté son verdict sur la constitutionnalité du Traité de
Lisbonne au 25 novembre.
¾ Le Gouvernement envisagerait de reporter à 2009 le vote de ratification du
parlement.
¾ Le parti gouvernemental (conservateur) conditionnerait son vote positif sur la
ratification à l'autorisation concomitante de l'installation d'un radar
antimissiles américain en République tchèque.
¾ Le Président Vaclav Klaus pourrait attendre l'issue du deuxième vote irlandais
avant de signer la loi de ratification une fois votée.
Suède
¾ Le Parlement devrait voter la loi de ratification le 20 novembre, après « avoir
pris son temps pour la ratifier car c'est un processus constitutionnel long »
(Cecilia Malmström, Ministre des Affaires étrangères).
¾ La Suède regretterait que le Traité de Lisbonne n'entre pas en vigueur pour les
élections européennes de juin 2009 « parce que nous perdrons deux sièges au
Parlement européen avec les dispositions du Traité de Nice. » (Cecilia
Malmström).
Pologne
¾ Le président Kaczynski a jusqu'ici refusé de signer la loi de ratification du
Traité de Lisbonne (votée en avril 2008 par le Parlement) au motif du vote
négatif irlandais.
Allemagne
¾ La Cour constitutionnelle ne rendrait son verdict sur la constitutionnalité du
Traité de Lisbonne qu'au début 2009 car elle aurait décidé d'effectuer un
examen approfondi des implications du Traité de Lisbonne sur la
« souveraineté de l'État allemand ». La Cour aurait refusé toute procédure
d'urgence arguant du fait que, suite au refus irlandais, le Traité de Lisbonne ne
pouvait pas entrer en application.
¾ Le Président Köhler aurait signé la loi de ratification (votée en mai 2008),
mais aurait décidé d'attendre le verdict de la Cour avant de transmettre
officiellement les instruments de ratification.